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EAN : 9782246820499
512 pages
Grasset (18/08/2021)
  Existe en édition audio
4.39/5   4606 notes
Résumé :
« La carte postale est arrivée dans notre boîte aux lettres au milieu des traditionnelles cartes de voeux. Elle n’était pas signée, l’auteur avait voulu rester anonyme. Il y avait l’opéra Garnier d’un côté, et de l’autre, les prénoms des grands-parents de ma mère, de sa tante et son oncle, morts à Auschwitz en 1942. Vingt ans plus tard, j’ai décidé de savoir qui nous avait envoyé cette carte postale, en explorant toutes les hypothèses qui s’ouvraient à moi.
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Critiques, Analyses et Avis (701) Voir plus Ajouter une critique
4,39

sur 4606 notes
En 2003, Lélia, la mère de l'auteur, reçoit avec perplexité une étrange carte postale. Anonyme, elle ne comporte que les prénoms de quatre membres de la famille, morts à Auschwitz en 1942. Près de vingt ans plus tard, Anne Berest se met en tête de découvrir qui a bien pu envoyer ce message énigmatique. Son enquête va lui faire exhumer un siècle d'histoire familiale, depuis la fuite de Russie des Rabinovitch, en passant par la Lettonie et par la Palestine, jusqu'à leur installation à Paris et l'horreur qui les y attendait pendant la seconde guerre mondiale. La grand-mère de l'auteur, Myriam, fut la seule à échapper au funeste destin de la famille entière. Elle a laissé à sa fille et à ses deux petites-filles le terrible poids d'un silence étourdissant…


Bien avant Anne, Lélia avait commencé à recoller les morceaux de ce passé barricadé dans le mutisme maternel, rassemblant et recoupant au cours de longues et minutieuses investigations les traces qui, dans leurs boîtes d'archive, attendaient de trouver leur place dans la mémoire des vivants. L'histoire des Rabinovitch met en pleine lumière le vieux serpent de mer de l'antisémitisme, les exils répétés et les renaissants espoirs d'intégration, la confiance demeurée malgré les alarmes, et finalement la prise au piège d'un impensable savamment orchestré. Avec justesse et intelligence, la narration restitue contexte et processus, décortiquant comment, insensiblement, a pu s'imposer une idéologie massivement meurtrière, au point de susciter le zèle d'un Etat français devançant les exigences nazies.


Piqué par l'énigme de la carte postale, le lecteur se retrouve happé par l'enquête menée par l'auteur, et c'est à pieds joints qu'il plonge dans ce récit sensible et vivant courant sur cinq générations. Dépourvue du moindre pathos, la narration bouleverse d'autant plus qu'elle se déroule avec la plus grande sobriété. Son réalisme saisissant vous emmène coeur et dents serrés au bout de l'insoutenable, et c'est le moins que l'on puisse faire que de savoir et de se souvenir. Ecrire et lire cette histoire, c'est sortir les victimes du néant où on l'on a voulu les plonger, puis les laisser bien après la défaite allemande. Car il aura fallu des années, puis encore un demi-siècle, pour que l'administration française finisse par reconnaître d'abord le simple décès, puis la mort en déportation des victimes des camps…


Tout en creusant le sillon de la mémoire, l'enquête d'Anne Berest nous confronte également à la réalité contemporaine. Comment ne pas se sentir troublé lorsque l'on découvre avec elle ce que sont devenus la maison et les biens personnels de ses arrière-grands-parents, la gêne et l'hostilité patentes des descendants des anciens voisins ? Au fur et à mesure que s'emboîtent les bribes du passé, ce sont toutes leurs répercussions sur le présent qui nous sautent peu à peu à la figure et nous interrogent. Pour l'auteur, elles sont le déclencheur d'une réflexion intime sur son identité, sur l'influence de ce passé sur sa personnalité profonde et sur sa manière de vivre sa judaïcité.


Initialement choisi sur un quiproquo entre les écrivains Anne et Claire, que j'ignorais soeurs, ce livre sur lequel je me suis précipitée, sans même me préoccuper à l'avance de son contenu, m'a subjuguée. Grave, parfois éprouvant, tendu comme un thriller, il est écrit avec une sincérité, une sensibilité et une clairvoyance qui vous vont aussi droit au coeur qu'il marque votre esprit. Un très grand coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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La « Carte postale » dont il est question dans le titre est celle reçue le 6 janvier 2003 par la mère de l'autrice. Totalement anonyme et représentant l'Opéra Garnier, celle-ci mentionne uniquement l'adresse de la destinataire, ainsi que quatre prénoms écrits les uns en dessous des autres: Ephraïm, Emma, Noémie, Jacques. Ceux de ses grands-parents maternels, de sa tante et de son oncle, tous morts en déportation pendant la Seconde Guerre mondiale.

En cherchant à découvrir la provenance de cette carte, Anne Berest reconstruit progressivement une histoire familiale passée sous silence, reconstituant d'une part l'histoire de ses aïeux, tout en s'interrogeant sur sa propre identité juive. Une quête de vérité qui invite tout d'abord à faire la connaissance des membres de la famille Rabinovitch, depuis leur fuite de la Russie jusqu'à leur installation à Paris, en passant par la Lettonie et la Palestine. Puis vient l'horreur de la Shoah, de l'organisation nauséabonde de la déportation par la France aux retours surréalistes des camps, en passant inévitablement par l'horreur sur place…

Si le mystère de l'origine de la carte, permettant à l'autrice d'insuffler un aspect polar à sa quête, ne m'a pas vraiment tenu en haleine, cette enquête bouleversante permet surtout de faire revivre quatre personnages effacés par les nazis, de leur donner une voix et d'inscrire à jamais leurs noms sur la couverture d'un livre…à défaut d'avoir eu droit à une sépulture…
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Tout démarre avec cette fameuse carte postale reçue le lundi 6 janvier 2003, par Lélia, la mère de l'autrice. Sur cette carte sont inscrits quatre prénoms : Ephraïm et Emma, les grands-parents maternels de Lélia, ainsi que Noémie et Jacques, sa tante et son oncle. Tous les quatre avaient été déportés à Auschwitz en 1942 et n'en sont jamais revenus.
Comment expliquer que, soixante-et-un ans plus tard, cette carte postale parvienne à Lélia et Pierre Bouveris, une carte postée du bureau du Louvre et représentant l'Opéra Garnier ?
Le mystère étant resté entier, ce n'est que dix ans plus tard qu'Anne Berest, sur le point d'accoucher, décide de tenter de tout savoir sur ses ancêtres.
La carte postale, extraordinaire quête mêlant intimement l'histoire d'une famille aux drames bouleversants causés par le nazisme, m'a emporté et passionné jusqu'à la dernière ligne. Pendant les Correspondances de Manosque 2021, j'avais écouté Anne Berest parler de son livre, cela m'avait touché, intrigué, intéressé, mais je ne pensais pas que la lecture du livre m'emmène au plus profond de l'âme humaine, soulignant une fois de plus des problèmes toujours actuels, hélas.
C'est tout d'abord Lélia, sa mère, qui raconte, dans le Livre I, intitulé Terres promises. Elle détaille l'histoire de ses grands-parents : Ephraïm et Emma Rabinovitch. Lui, à 25 ans, ne se sent pas juif mais socialiste, en 1919, dans cette Russie où les brimades, la violence, la mort menacent. Il faut envisager de partir mais Emma, enceinte, met d'abord au monde Mirstchka (Myriam) à Moscou, le 7 août 1919. Pour échapper aux fouilles de la police, ils partent vivre à Riga, en Lettonie où la vie est prospère car Ephraïm réussit dans le commerce du caviar. Puis, Noémie naît dans cette même ville où recommencent les menaces qui poussent à partir pour Lodz, en Pologne. L'antisémitisme gagne là aussi. Train pour Budapest, bateau sur la Mer Noire et Haïfa, en Palestine où Myriam et Noémie, après le russe, le yiddish, l'allemand et le polonais, apprennent l'hébreu et l'arabe…
Un petit frère, Itzhaak, voit le jour là-bas, à Migdal, mais Ephraïm veut développer une invention qui accélère la levée de la pâte à pain, dont il est l'auteur. Quel est le pays idéal pour réussir avec un tel procédé ? La France, bien sûr ! le petit Itzhaak s'appellera Jacques et c'est ainsi, je passe certains détails, que toute la famille se retrouve à Boulogne-Billancourt, en septembre 1929.
Les parents réussissent. Les enfants entament de brillantes études au Lycée Fénelon mais la jalousie, la haine ressortent peu à peu. Tout au long de ma lecture, je croise des noms prestigieux comme Jean Renoir, Francis Picabia et Vicente, son fils, Gabriële Buffet, puis René Char à la tête d'un réseau de résistance.
Bien avant que la France soit envahie, les Juifs sont stigmatisés. Lorsque Pétain fait adopter le statut des Juifs en 1940, c'est une cascade d'interdictions qui entraînent notre pays et l'Europe entière dans l'horreur d'un génocide programmé, organisé et facilité par une opinion publique saturée de slogans antisémites qui peuvent surgir à nouveau aujourd'hui.
Anne Berest conte tout cela de manière très vivante. Alternent confidences et événements tragiques comme la rafle du Vél' d'Hiv', les camps et les convois. Il faut raconter encore et toujours ramener à la mémoire des anciens comme des plus jeunes cette extermination massive d'êtres humains, avec des souffrances inimaginables, dans des pays que l'on disait civilisés.
Le Livre II de la carte postale se consacre aux souvenirs d'un enfant juif sans synagogue avec toujours le même objectif : qui a écrit et expédié cette fameuse carte ? Comment se sentir juive alors qu'on est élevée dans le socialisme laïc et républicain ? Eh bien, la bêtise et l'intolérance sont toujours prêtes à ressurgir et à causer les mêmes ravages si la mémoire s'efface.
Un Livre III traite des prénoms, ces fameux prénoms qu'il faut changer pour éviter les réflexions des imbéciles. C'est dans ce Livre III que l'autrice publie deux lettres. La première, elle l'écrit à sa soeur, Claire Berest, qui lui adresse une réponse belle, forte, émouvante ! Un grand moment de lecture !
Enfin, le Livre IV parle de Myriam qui a vécu avec Vicente Picabia et Yves Bouveris, entre Apt et Avignon, dans le Luberon, près du village de Céreste. C'est ainsi que, délicatement, par subtiles touches successives, l'énigme de l'origine de la carte postale sera enfin résolu mais je n'en dis pas plus pour laisser à chacune et à chacun le plaisir de la découverte tout en gardant en mémoire les années tragiques qui ont marqué à jamais ce XXe siècle alors qu'aujourd'hui, la folie humaine frappe encore, oblige un peuple à fuir les bombes et la guerre, causant de nouveaux déracinements et, c'est le plus intolérable, abrégeant des vies dans des souffrances inadmissibles.

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« Je me reconnais enfin : je suis fille et petite fille de survivants » conclut Anne Berest en achevant l'histoire de sa famille au XX siècle.

Lélia Picabia, mère de la romancière, fut conçue durant l'occupation par ses parents, opérateurs radios opérant pour un réseau de résistance … on devine son sort si ceux ci avaient été capturés par l'occupant. Son père Vicente se suicida après la guerre, Myriam, sa mère, se remaria et, durant des décennies, garda le silence sur son enfance et son mariage.

Myriam Rabinovitch, la grand mère, née à Moscou en 1919, grandit dans une fratrie de trois enfants, fuit la Russie avec ses parents vers la Lettonie. Puis ils s'installent en Palestine, cultivent des oranges, et arrivent enfin en France. Ils apprennent rapidement le français, Myriam et sa soeur Noémie collectionnent les premiers prix pendant que leur père innove, dépose des brevets et crée une société. Cette intégration exemplaire ne suffit pas pour obtenir leur naturalisation et quand la guerre éclate la famille est contrainte de se réfugier dans l'Eure. Myriam se marie le 14 novembre 1941, devient ainsi française, et s'installe à Paris avec Vicente Picabia.

Le 13 juillet 1942, la gendarmerie se présente au refuge des Rabinovitch, interpelle les enfants Noémie et Jacques qui sont emprisonnés à Evreux, internés au camp de Pithiviers, déportés le 2 aout vers Auschwitz… Jacques est gazé, Noémie succombe du typhus.

Le 8 octobre, Ephraim et Emma, les parents sont à leur tour arrêtés, dirigés vers Drancy et achevés dès leur arrivée le 6 novembre à Auschwitz

Myriam, sans aucune nouvelle de ses parents, part en Provence, rejoint le réseau animé par le Capitaine Alexandre alias René Char qui plastique la maison de Jean Giono, retrouve Vicente incarcéré à Dijon, puis le couple remonte à Paris où il est recruté par les services britanniques.

A la libération, elle guette devant l'hotel Lutetia le retour des déportés et prisonniers. En vain … polyglotte elle s'engage comme traductrice dans l'armée pour oublier ce passé sinistre.

Remariée Myriam Bouveris refait sa vie, tait sa judéité, élève ses enfants puis accueille ses petits enfants l'été en Provence

En 2003, une carte postale est adressée à M Bouveris ; quatre prénoms Ephraim, Emma, Noémie et Jacques en constituent le texte énigmatique qui va inciter Lélia Picabia à s'intéresser à l'histoire des Rabinovitch.

En 2020, la fille d'Anne Berest est traitée de juive par un écolier … avec sa mère Lélia, elle reprend le fil du drame, rencontre les derniers survivants ayant connu leurs ancêtres et publie cet extraordinaire témoignage qui est à la fois un livre d'histoire et un manuel d'éducation civique traitant les sujets graves que sont les migrations, le racisme et l'antisémitisme. Et un bel hommage rendu à celles et ceux qui ont abrité, aidé, nourri les proscrits, au péril de leur vie.

Cette carte postale mérite d'être lue, notamment par les lycéens, qui seront sensibles au destin de Noémie et Jacques, adolescents apatrides, entonnant la Marseillaise le 13 juillet 1942 dans le fourgon cellulaire qui les mène au calvaire.
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Une carte postale glissée au milieu des traditionnelles cartes de voeux arrive dans la boîte aux lettres de Lélia, mère d'Anne Berest, le lundi 6 janvier 2003. Représentant l'opéra Garnier dans les années 90, la carte anonyme comporte seulement l'adresse de la destinataire et quatre prénoms inscrits d'une écriture maladroite les uns en dessous des autres : Ephraïm, Emma, Noémie et Jacques. Ce sont les prénoms des grands-parents de Lélia, de sa tante et de son oncle. Tous étaient morts à Auschwitz en 1942 et ressurgissaient ainsi soixante et un an plus tard.
Après s'être interrogés sur l'origine de la carte, les parents d'Anne la rangent dans un tiroir.
Si ces gens étaient ses aïeux, l'auteure, 24 ans à cette date-là, ne connaissait rien d'eux. Occupée par une vie à vivre et d'autres histoires à écrire, elle efface de sa mémoire le souvenir de cette carte postale, tout en se promettant d'interroger plus tard sa mère sur l'histoire de leur famille.
Une quinzaine d'années plus tard, mère à son tour, une phrase de sa fille Clara « Parce qu'on n'aime pas trop les Juifs à l'école » va perturber Anne Berest et sera l'élément déclencheur de l'enquête minutieuse qu'elle va livrer pour retrouver l'auteur de cette carte postale.
C'est avec sa mère qui connaît parfaitement l'histoire de la famille, qui a fait des recherches pendant vingt-cinq ans, qui a donc déjà accumulé une immense documentation et avec l'aide des brouillons de lettres de sa grand-mère ainsi que le début de roman de la soeur de sa grand-mère, Noémie, que l'auteure va, d'une part retracer le destin de cette famille juive mi-russe, mi-polonaise, les Rabinovitch sur quasiment un siècle, depuis 1919 jusqu'à nos jours et d'autre part, en parallèle, écrire le récit de l'enquête.
C'est donc en 1919, pour échapper à la police bolchevique que les Rabinovitch, Ephraïm et Emma quittent en pleine nuit Moscou pour atteindre clandestinement la frontière avec leur nourrisson dans une carriole branlante et s'installer en Lettonie. le nourrisson n'est autre que la grand-mère d'Anne : Myriam qui, en 1923, aura une petite soeur Noémie.
Ils ne pourront rester à Riga, devenant par leur réussite persona non grata. Ils partent alors pour la Palestine où sont déjà établis les parents d'Ephraïm. Ce dernier est engagé à Haïfa dans une entreprise d'électricité mais comprend qu'il ne pourra jamais réaliser ses projets. Naîtra en 1925 Itzhaak surnommé Jacques.
Ils y resteront cependant cinq ans avant d'embarquer pour la France, « ce pays qui a toujours été bon avec eux » et d'emménager à Paris, convaincus que la France est leur salut. Les années passent et les filles font un parcours scolaire remarquable. Mais la guerre est là et des cinq membres de la famille, seule Myriam l'aînée survivra, échappant à la déportation. Elle s'était mariée au début de la guerre avec Vicente, fils du peintre Francis Picabia et Gabriële Buffet.
À noter qu'Anne Berest et sa soeur cadette Claire, ont écrit un livre biographique, Gabriële, sur leur arrière-grand-mère paternelle.
Anne Berest, avec des chapitres courts et un style simple presque journalistique parfois, réussit de façon très émouvante à nous replonger dans ce passé antisémite que l'on voudrait voir définitivement révolu. Que d'errances pour cette famille qui, pourtant n'a qu'un seul souci, s'intégrer là où elle arrive. Ephraïm demandera d'ailleurs sa naturalisation qui, après de longs mois finira par lui être refusée. Une phrase résume bien cette quête de simple bonheur « Mais Ephraïm, l'ingénieur, le progressiste, le cosmopolite, a oublié que celui qui vient d'ailleurs restera pour toujours celui qui vient d'ailleurs. La terrible erreur que commet Ephraïm, c'est de croire qu'il peut installer son bonheur quelque part ». Ce déplacement, cet exil et cette sensation de chercher sa place quelque part tout en se demandant si on va finir par la trouver revêt quasiment un caractère universel tant elle peut s'adresser à chacun de nous.
Mais ce qui à mon sens fait l'originalité de ce livre, somme toute pas vraiment un chef-d'oeuvre de littérature, est de l'avoir écrit sous forme de thriller tragique. Jusqu'à la dernière ligne, il est impossible de savoir qui a rédigé cette carte postale et on ne peut que louer son expéditeur pour l'avoir envoyée puisqu'il a permis à l'auteure de retracer avec maints détails le destin romanesque de ses ancêtres, ses recherches ayant été aussi l'occasion d'une quête initiatique sur la signification du mot « Juif » dans une vie laïque : Qu'est-ce qu'être juif ?
Ce récit familial sidérant, marqué par la Shoah et qui a obtenu le prix Renaudot des lycéens 2021, pose en outre la question de savoir si certains traumatismes graves subis ne seraient pas véhiculés ensuite dans les gènes des descendants et transmis chez les générations suivantes ?
Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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critiques presse (7)
Culturebox
19 janvier 2022
Un livre palpitant, aussi éclairant que poignant, à lire absolument pour ne jamais oublier la destinée du peuple juif.
Lire la critique sur le site : Culturebox
LeSoir
15 octobre 2021
Dans « La carte postale », un modeste document entraîne Anne Berest sur les chemins d’une longue enquête douloureuse.
Lire la critique sur le site : LeSoir
LaCroix
09 septembre 2021
Cherchant à élucider le mystère d’une carte postale anonyme, Anne Berest reconquiert son histoire familiale marquée par la Shoah.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Elle
06 septembre 2021
Une quête de vérité poignante.
Lire la critique sur le site : Elle
LePoint
31 août 2021
Avec « La Carte postale », Anne Berest se lance dans une quête alliant les ressorts du thriller aux accents d’un requiem.
Lire la critique sur le site : LePoint
LeFigaro
26 août 2021
Un siècle de l’histoire d’une famille juive. Un grand roman vrai qui pose des questions.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Elle
26 août 2021
À partir d’une énigmatique carte postale, l’écrivaine Anne Berest a reconstitué l’histoire de ses aïeux morts en déportation. Fruit d’une enquête menée main dans la main avec sa mère Lélia, ce récit intime et profond est l’événement de la rentrée.
Lire la critique sur le site : Elle
Citations et extraits (503) Voir plus Ajouter une citation
Les voisins du dessus jouaient du piano, la musique qui provenait du plafond m'enveloppait. Un soir j'ai eu la sensation que les notes tombaient dans ma chambre comme une pluie fine.
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- Maman... il y a bien un moment où on ne pourra plus dire « on ne savait pas »..
- L'indifférence concerne tout le monde. Envers qui, aujourd'hui, es-tu indifférente ? Pose-toi la question. Quelles victimes, qui vivent sous des tentes, sous des ponts d'autoroute, ou parquées loin des villes sont tes invisibles ? Le régime de Vichy cherche à extraire les Juifs de la société française, et y parvient.
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Jje ne l'avais jamais rencontrée mais je savais très bien qui était Déborah. Georges m'avait déjà à plusieurs reprises parlé d'elle.
Son regard me fit comprendre plusieurs choses. Que Déborah était une femme autoritaire et sûre d'elle. Et qu'elle n'était pas du tout contente de ma présence à ce dîner.
Déborah et Georges se connaissaient depuis l'internat. A l'époque Georges était très amoureux de Déborah mais ce n'était pas réciproque. Elle avait repoussé ses avances. Comment avait-il pu s'imaginer un instant qu'une fille comme elle pouvait s'intéresser à un garçon comme lui ?
- Je préfère qu'on reste amis, lui avait-elle dit.
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Les réponses arrivaient seulement avec quelques semaines de retard. Déborah, je ne sais pas ce que veut dire "être vraiment juif" ou "ne l'être pas vraiment". Je peux simplement t'apprendre que je suis une enfant de survivant. C'est-à-dire quelqu'un qui fait les mêmes cauchemars que sa mère et cherche sa place parmi les vivants. Quelqu'un dont le corps est la tombe de ceux qui n'ont pu trouver leur sépulture. Déborah, tu affirmes que je suis juive quand ça m'arrange. Lorsque ma fille est née, que je l'ai prise dans mes bras à la maternité, tu sais à quoi j'ai pensé ? La première image qui m'a traversée ? L'image des mères qui allaitaient quand on les a envoyées dans les chambres à gaz. Alors voilà, cela m'arrangerait que les choses soient autrement. Cela m'arrangerait de ne pas avoir peur de l'administration, peur du gaz, peur de perdre mes papiers, peur des endroits clos, peur de la morsure des chiens, peur de passer des frontières, peur de prendre des avions, peur des foules et de l'exaltation de la virilité, peur des hommes quand ils sont en bande, peur qu'on me prenne mes enfants, peur des gens qui obéissent, peur de l'uniforme, peur d'arriver en retard, peur de me faire attraper par la police, peur quand je dois refaire mes papiers ....peur de dire que je suis juive. Et cela, tout le temps. "Pas quand ça m'arrange". J'ai, inscrit dans mes cellules, le souvenir d'une expérience de danger si violente, qu'il me semble parfois l'avoir vraiment vécue ou devoir la revivre. La mort me semble toujours imminente. J'ai le sentiment d'être une proie. Je me sens souvent soumise à une forme d'anéantissement. Je cherche dans les livres d'Histoire celle qu'on ne m'a pas racontée. Je veux lire, encore et toujours. Ma soif de connaissance n'est jamais étanchée. Je me sens parfois une étrangère. Je vois des obstacles là où d'autres n'en voient pas. Je n'arrive pas à faire coïncider l'idée de ma famille avec cette référence mythologique qu'est le génocide. Et cette difficulté me constitue toute entière. Cette chose me définit. Pendant presque quarante ans, j'ai cherché à tracer un dessin qui puisse me ressembler sans y parvenir. Mais aujourd'hui je peux relier tous les points entre eux, pour voir apparaître, parmi la constellation des fragments éparpillés sur la page une silhouette dans laquelle, je me reconnais enfin : je suis fille et petite fille de survivants.

Page 481
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Mon père décide donc du jour au lendemain que toute la famille passera de Rosenberg à Rambert. Tu ne peux pas imaginer comme j'étais furieux !

— Pourquoi ?

— Mais je ne voulais pas changer de nom, moi ! Et mes parents avaient aussi décidé de me changer d'école ! Changer de nom, changer d'école, ça fait beaucoup tu sais, pour un petit garçon de 10 ans ! J'étais pas content, mais alors pas content du tout. Je leur fais une scène, je promets à mes parents de reprendre mon vrai nom le jour de mes 18 ans.

(…)

Mais petit à petit, je me rends compte qu'à l'école, s'appeler Gérard « Rambert » n'a vraiment rien à voir avec le fait de s'appeler Gérard « Rosenberg ». Et tu veux savoir quelle est la différence ? C'est que je n'entendais plus de «sale Juif» quotidien dans la cour de l'école. La différence c'est que je n'entendais plus des phrases du genre « C'est dommage qu'Hitler ait raté tes parents ». Et dans ma nouvelle école, avec mon nouveau nom, je découvre que c'est très agréable qu'on me foute la paix.

— Mais dis-moi Gérard, qu'est-ce que tu as fait finalement, à tes 18 ans ?
— Comment ça, qu'est-ce que j'ai fait ?
— Tout à l'heure tu m'as dit : «Je promets à mes parents de reprendre mon vrai nom le jour de mes 18 ans. »
— Ce jour-là, si quelqu'un m'avait demandé : « Gérard, tu as envie de redevenir Gérard Rosenberg ? », j'aurais répondu : « Pour rien au monde. »
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Vidéo de Anne Berest
Membre du jury du festival du Cinéma Américain de Deauville, l'autrice Anne Berest répond à nos questions yankees. On apprend ainsi que l'écrivaine n'a jamais vu "Les dents de la mer", préfère James Gray à Quentin Tarantino et a mis du temps à apprécier les westerns de Sergio Leone...
#AnneBerest #Deauville
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