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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Le rire est le propre de l'homme, dit-on, au grand soulagement des autres animaux, toujours inquiets de voir un honnête citoyen se mettre tout à coup à pousser de grands cris stridents en étant agité de convulsions nerveuses. Mais pourquoi rit-on exactement, et quelle est la fonction du rire dans la société ?

Pour Bergson, le rire est provoqué par « du mécanique plaqué sur du vivant ». L'être humain est censé être caractérisé par une certaine souplesse, tant physique qu'intellectuel. Qu'il puisse trébucher et tomber est donc contraire à sa nature, et tient plutôt de l'automate, incapable d'appréhender un obstacle inattendu et de s'écarter des ordres donnés. le comique de répétition, les quiproquos, plaquer les codes d'une corporation sur une situation étrangère, sont au final des variations de cette règle.

Enfin, le rire sert également d'arme sociale, ce qui le rend tout à coup nettement moins sympathique. Vous voulez éviter l'expérience humiliante d'être la cible des rires et des moqueries ? Vous avez plutôt intérêt à vous débarrasser de certaines habitudes que le reste du groupe ne tient pas à voir se propager.

L'essai de Bergson se limite à un seul type de rire, celui de la comédie. Son travail est simple à lire et à comprendre, et illustré par de nombreux exemples tirés de la littérature classique, dont par exemple Molière ou Don Quichotte. Son propos est aussi interpellant, puisque selon lui le rire va de pair avec une certaine forme de cruauté envers celui qui en est la cible. Et même si cette dernière est imaginaire, il a de quoi se poser quelques questions…
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« du mécanique plaqué sur du vivant ». La comédie ne serait pas un art si ce principe primitif énoncé par Bergson n'était qu'une recette.
Pourtant, quand je vois la tête de Louis de Funes dans l'Avare (ou dans ses autres comédies), je vois immédiatement la raideur du personnage et ça suffit presque à faire rire.
Lorsque mes enfants de 9 et 11 ans ont ri à gorge déployée en regardant cette comédie (la version filmée), c'était presque étonnant. En tous les cas la belle langue de Molière faisait bien partie du cocktail.
J'ai lu le « Rire » en pensant à cette expérience. de quoi rit-on ? Pourquoi rit-on ?
En analysant les différentes formes du comique, Bergson teste aussi sa philosophie du vivant. Et comme tout ce qui est vivant, Bergson sait que le rire ne s'enferme pas dans une définition. C'est tout l'intérêt de sa philosophie. La pensée est mouvante, inductive, déductive, vivante entre l'incertitude et les triomphes éphémères. La langue est fluide, claire et concise tout en avoisinant la poésie.
L'art vise à faire lâcher prise et Molière réussi son coup lorsque le public se met à rire. Mais là on ne rit plus seulement de la raideur du personnage mais de son vice, l'avarice, et peut-être même de la vanité, mère de tous les vices.
C'est que le personnage de la pièce a lui aussi perdu une certaine attention à la vie en se comportant de la sorte. Et le rire ici, donc l'art, a une fonction de correction sociale. « On pourrait dire que le remède spécifique de la vanité est le rire, et que le défaut essentiellement risible est la vanité ».
Le « Rire » ouvre donc une réflexion sociologique qui ne demande qu'à être développée. Il ne faudrait donc sans doute pas trop prêter attention au pessimisme qui envahit Bergson à la fin de son essai : « le rire n'aurait rien de très bienveillant. Il rendrait plutôt le mal pour le mal ».
Il ne lui suffirait pourtant que prolonger sa propre citation de la poésie de Sully-Prudhomme (à propos de Spinoza) en dévoilant un vers de plus sur le bien et le mal :
"Ce sage démontrait avec simplicité
Que le bien et le mal sont d'antiques sornettes
Et les libres mortels d'humbles marionnettes
Dont le fil est aux mains de la nécessité".
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Le rire, c'est, écrit à de nombreuses reprises Bergson, "du mécanique plaqué sur du vivant". Ce qui ruine l'humanité de l'individu, sa liberté, son autonomie, son indépendance, sa prétention à exister par soi-même, tout cela fait rire. Par exemple voir quelqu'un trébucher dans la rue, percevoir un tic de langage ou un geste récurrent, un trait de caractère, entendre révéler le mécanisme de la langue par des jeux de mots, etc. Le rire est aussi, ainsi, humiliation.
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Ce n'est pas parce que cet essai traite du comique qu'il ne faut pas le prendre au sérieux ! Pour Bergson le comique s'introduit quand quelque chose de mécanique s'introduit dans la vie : tels sont le comique de répétition, le comique d'inversion, le comique d'interférence, les jeux de mots, etc. C'est dire que ce travail ne se détache pas de sa philosophie générale et qu'il est à prendre au sérieux : les présupposés vitalistes, ceux de L'Evolution créatrice, sont là. Mais une question se pose, peut-être en reproche : si le rire intervient à ces moments mécaniques en quoi est-il profondément vivant si il l'est seulement ? Par une reprise vivante du mécanique, ce qui détruirait le mécanisme ... ? le comique n'est-il pas plus créatif ? Ne devient il pas dès lors automatique ? Les arguments sont bons et la discussion est ouverte.
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C'est un livre difficile d'approche, sauf pour les bons en philo, ce qui n'est malheureusement pas mon cas. Et pourtant le sujet est passionnant : la signification du comique - Pourquoi rit-on devant telle ou telle situation ?

L'auteur aborde la question en tant que philosophe, je n'ai pas donc pas tout compris dans son raisonnement mais j'ai lu avec plaisir tous les exemples tirés de pièces ou de citations dont il émaille son ouvrage. Mon ignorance est telle, que j'aurais presque pris ce livre au deuxième degré et ri du livre lui-même. La base du sens comique dit-il (pour résumer la première partie) est l'introduction du "mécanique" dans la légèreté, la souplesse, la fluidité, de la "vie réelle".

Sa façon de nous faire entrer dans son raisonnement est un peu directif : à la question "pourquoi rit-on ?", il va donner une réponse, qu'il présente non comme une hypothèse mais comme une vérité, puis, de cette première vérité, il va en déduire une autre, et ainsi de suite. Petit à petit, il nous fait entrer (en nous forçant un peu la main je trouve) dans son raisonnement. Pour résumer sa réponse, il va ensuite énoncer des "lois", des "lois" qui régissent à ses yeux le comique et son pourquoi.

Par exemple, une de ces lois, qui m'a laissée assez dubitative, explique pourquoi nous rions lors de répétition de mots au théâtre : "Dans une répétition comique de mots il y a généralement deux termes en présence, un sentiment comprimé qui se détend comme un ressort, et une idée qui s'amuse à comprimer de nouveau le sentiment. »

Plus loin, il va donner une définition alambiquée du quiproquo, qui serait une forme d'effet comique relevant de l'interférence des séries : "une situation est toujours comique quand elle appartient en même temps à deux séries d'évènements absolument indépendantes, et qu'elle peut s'interpréter à la fois dans deux sens tout différents".

Les derniers chapitres (sur les mots) m'ont un peu perdu, puis il termine en imaginant le trait de caractère qui aurait la meilleure disposition à générer le rire, et pour lui, ce serait la vanité.
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