Le Fantôme du Père-Lachaise

Le fantôme du Père Lachaise, une littérature de feuilleton comme on les aime. Un roman en Noir et Blanc, sans nuances de gris (Ha ha) dans lequel les méchants sont vraiment méchants et les gentils vraiment gentils, protégés qu'il sont par un improbable détective au nom flamboyant de Chantecoq (par ces temps de Brexit, c'est bon à prendre ami Frenchie) et son non moins flamboyant assistant répondant lui au sunom de Météor «un petit bonhomme mince, sec étriqué, au faciès de clown, au regard fureteur sans cesse en éveil.»

Jack Sorett a tout de l'escroc mais il le cache bien. Il a éloigné le Comte de Préfailles, pour mieux séduire sa femme, «une beauté qui méritait de faire d'elle une véritable reine de Paris», en jouant le faux ami attentionné décidé à sortir le Comte de la panade dans laquelle lui-même, Sorett, l'a plongé avec délice. Un pervers narcissique psychopathe de surcroit.

Donc, il ruine la réputation du Comte auprès de sa femme sous de faux prétextes, laisse entendre que ce dernier a honteusement profité de la confiance que lui portait la banque Delorme dont il défend les intérêts au Maroc, et laisse mariner la jeune épousée avant de lui proposer de devenir sa maîtresse.

Un scénario immonde dont nous découvrons à la fois avec délice et horreur la sombre machination.

On imagine le lecteur parisien attendant chaque jour la suite de ce feuilleton avec une avidité non simulée.

Arthur Bernède joue avec la patience du lecteur. Il le submerge de subterfuges, n'hésitant à multiplier les chausses-trappes sous les pas fragiles de Mme de Préfailles. Son père, le marquis de Mongobert a eu une fille hors mariage, Juliette Lespagnac, qui ressemble comme deux gouttes d'eau à sa fille légitime.
Grâce à une intrigante, la baronne de Merloup qui pour des raisons obscures veut se venger des Montgobert, Sorett va entrer en contact avec cette pauvre fille, orpheline de surcroit et tombée dans la déchéance la plus abjecte qui soit.

Le piège est prêt à se refermer sur cette pauvre Michèle de Préfailles.

Pour faire plus vrai, l'auteur fait appel à un Russe blanc, le Prince Dimitri, pour jouer le rôle de l'amant de la fausse Mme de Préfailles.

Bernède ne s'encombre pas de figures de style, il multiplie les «transportons-nous maintenant dans le salon de Mme de Merloup dans lequel...», les «Où nous voyons le milliardaire Jack Sorett jouer un rôle important dans le complot qu'il a imaginé...», les «instantanément, un soupçon jaillit dans l'esprit du comte...», les «de son côté, la baronne de Merloup n'était pas restée inactive.», les «jamais le temps ne lui parut si long ; jamais l'expression du grand poète allemand Henrich Heine ne lui parut plus vraie «Que les heures sont paresseuses !», les «Où l'on voit que Météor aurait pu faire un standardiste extrêmement remarquable.»


Plus la mécanique et les rouages du complot grincent, plus l'auteur jubile et fait jubiler le lecteur.

A la fin de la première partie ce pauvre lecteur se dit, s'en est fait de Michèle de Préfailles.

C'est à ce moment que surgissent Chantecoq et Météor les as de l'enquête qui vont mettre en place un piège redoutable au moins aussi sophistiqué et tordu que celui imaginé par Jack Sorett.
«...c'est beaucoup plus amusant de se battre avec des géants que de courir après des nabots.» approuve Météor.

Un roman typique de l'époque, l'action se passe au début du XXème siècle, cinéma TSF et téléphone jouent déjà un grand rôle dans la société et Chantecoq n' hésite pas à y avoir recours, écoutes téléphoniques, déguisements, fausses nouvelles sont ses armes favorites. Un détective mondain bien dans son époque au volant de sa Talbot V6.

Pour réhabiliter les de Préfailles, et confondre Sorett et ses acolytes, Chantecoq va imaginer le subterfuge du Fantôme du Père Lachaise, et ça marche, je ne vous en dit pas plus !

Le crime ne paie pas !

Une lecture agréable et une découvert inattendue.

Merci Mr Bernède !