Vendredi soir

Une femme qui s'apprête à s'installer chez son nouveau compagnon est prise dans des embouteillages un soir et vit une aventure d'une nuit avec un inconnu. En cent pages à peine, avec simplicité mais sans simplisme, Emmanuèle Bernheim décrit une passion aussi intense que fugace.

L'intrigue du livre est simple, presque improbable, un peu comme dans le Cran d'arrêt, son premier livre, d'ailleurs, dont elle reproduit le motif : celui de la passion qui ravage tout sur son passage, laisse hagard, mais qui paraît en même temps inéluctable, presque nécessaire pour l'héroïne du livre.

Les deux personnages principaux se rencontrent dans un embouteillage. Elle conduit, elle accepte de le transporter, et invinciblement, leur rencontre va aboutir à une nuit d'amour, dans un élan presque primitif. Mais la façon dont Bernheim fait état de cet événement est exactement le contraire : toute son écriture est resserrée, rendant palpable le moindre émoi vécu au cours de cette nuit. Jamais d'impudeur, juste les mots nécessaires et utiles pour rendre sensible cette passion qui les submerge et dont chacun sait d'avance qu'elle ne survivra pas au lever du jour.

Un écrivain doit-il écrire mille pages pour évoquer la passion et le faire si bien ? Pas d'étalage, pas de longueur, et pourtant, Emmanuèle Bernheim ausculte avec une acuité et une intelligence suprenantes l'attraction immémoriale entre un homme et une femme. On peut appeler ça un chef d'oeuvre. La forme courte sied à son auteur et elle ne nous laisse qu'un seul regret : ne pas écrire plus souvent, car elle n'a publié qu'une poignée de livres… Peu importe finalement si c'est pour atteindre cette qualité.

Phrases très courtes qui donnent une impression de rapidité mais l'action ne l'est pas. La centaine de pages se lit facilement mais l'histoire m'a laissé sur ma fin. Peut-être m'attendais-je à quelque chose de plus surprenant, donc j'ai été déçue.