LE JOUR OÙ KARIM BERROUKA A NIQUÉ MES ZYGOMATIQUES
Commençons par la partie sérieuse de cette nouvelle petite et humble chronique : remercions d'abord les précieuses éditions ActuSF ainsi que notre site de lecture en ligne préféré, Babelio.com, pour l'envoi de l'échevelé dernier roman de
Karim Berrouka :
le jour où l'humanité a niqué la fantasy dans le cadre de la Masse Critique "mauvais genre"... qui n'a jamais aussi bien porté son nom qu'en l'occurrence !
Les Blobs sont sur la plage
Ils s'enfoncent dans le sable
Ils font trembler la terre
Font déborder la mer
C'est ainsi que débute une des chansons - "Les Blobs attaquent la plage", tiré du second excellent album "Houlala 2"- du célèbre groupe punk français Ludwig von 88, au sein duquel
Karim Berrouka officia avec coeur, mais c'était au siècle passé (même si le groupe se soit reformé en 2016).
Depuis, ce ne sont plus les blobs - quoique - qui attaquent, sous la plume démente de notre impétrant, bibliothèques, rivières, salons du livres et autres déserts hiératiques, mais nos sacrés et immémoriaux personnages imaginaires, ceux-là même qui constituent bien souvent les fondements, pour ne pas écrire les fondamentaux de notre imaginaire légendaire ainsi que les meilleurs romans de ce genre littéraire très largement inauguré par William Morris mais qui acquit ses
lettres de noblesse sous la plume talentueuse et parfois très savante de J.R.R
Tolkien.
Oui, mais...
Mais voilà-t-il pas que nous autres, humains du monde du dessus, nous avons tout faux, depuis le début ! Les lutins ne sont en rien de petits êtres malicieux généralement habillés de vert, les fées sont mochissimes (et tiennent plus du blob susmentionné, mais avec des myriades d'ailes, que de la célèbre Clochette), les Ondines sont encore plus garces que dans les légendes et les Djinns sont intransportables ailleurs que dans les endroits chauds et secs. Quant aux autres - banshees, elfes, gnomes et autres dryades -, le roman ne permet pas d'en savoir tellement plus sur nos errements mais on est en droit d'imaginer le pire !
La galerie de portrait à laquelle nous convie
Karim Berrouka est parfaitement folle : un groupe punk constitué de deux gars et d'une fille bien frappés, deux amies aussi différentes que complémentaires, un couple de médium très "scientifiques", des bidasses (forcément) débiles, des flics dépassés, des êtres du "petit peuple" - dire : de l'Affre-Monde - tous plus déjantés les uns que les autres, des écrivains de SFFF plutôt coriaces, un projet faramineux, des aventures rocambolesques, de la déchronologie, un monde d'en-dessous, des bagarres épiques, des personnages schizophrènes, de la philosophie fantaisiste, des rebondissements imprévus, du rire, du rire et encore du rire !
Surréaliste, oulipien, 'pataphysicien même, parfaitement frappadingue, déjanté, rock'n roll, si le "punk is not dead", c'est bien sous la plume de
Karim Berrouka qu'il poursuit sa glorieuse existence et, franchement, ça déménage ! À déconseiller à tous les rabat-joie, les pisse-froid et autres radins des zygomatiques. Quant aux autres, préparez-vous à une avalanche de loufoquerie savamment, minutieusement, intelligemment construite. Et même si la touche finale frise l'excès de "grand nawack", on ne s'ennuie pas un instant à la lecture de ce roman trépidant. Un coup à attendre le suivant avec impatience et à découvrir les précédents sans vergogne !