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Critique de deidamie


« Bonjour les Babélionautes ! Aujourd'hui, on va faire un peu d'histoire…

-Un peu ? Et si je t'envoie le bouquin dans la tête, tu continues à penser que c'est « un peu » ? Il pèse au moins trois kilos, ce Poche.

-Mouais, t'as raison. D'accord. On va faire beaucoup d'histoire avec Marie-Antoinette l'insoumise, de Simone Bertière.

Or donc je suis désolée pour ceux que je vais choquer, mais Marie-Antoinette n'est pas seulement l'un des persos qui met de belles robes dans Lady Oscar (ou La Rose de Versailles pour ceux qui préfèrent le manga à l'animé). Hé oui, incroyable ! Elle a réellement existé, figurez-vous. Et Simone Bertière en a fait une biographie, que je viens de finir.

-Ridicule. Des biographies, il y en a déjà des tas, à commencer par celle de Zweig et à terminer par celle de Fraser.

-Certes ! Hélas, le texte de Zweig comporte une bonne part de roman et celle de Fraser, quoique fort utile et admirable, ne m'a laissé aucun souvenir, je le crains.

-Quel intérêt alors ? Tu vas lire cette pavasse et dans deux jours, tu auras tout oublié.

-L'intérêt ? Mais celui de découvrir le travail d'une autrice dont je suis devenue fan !

Simone Bertière est une historienne en qui brûle la flamme ardente de la passion pour une discipline qu'elle souhaite partager avec pas n'importe qui : avec vous !

L'autrice sait que vous n'êtes pas spécialiste et s'applique donc à rendre son texte plaisant et accessible pour que vous aussi, vous la rejoigniez sur son terrain de jeu. Elle s'applique à reconstituer les contextes et les usages pour remettre les choses en perspective, pour nous immerger dans une société que nous ne connaissons plus et pour nous expliquer des usages que nous ne comprenons plus.

-Ouais, parce que bon, l'étiquette, la cérémonie du lever, moi, hein… tout ce bazar juste pour sortir du pieu, ça me dépasse.

-Certes, on ne le comprend plus, toutefois, ce rituel avait une signification à l'époque ! ‘Fin, « je viens de dire « on ne le comprend plus », mais Marie-Antoinette ne saisissait pas très bien non plus. Tous ces rites insupportables avaient pourtant un but : séparer le roi et la reine de l'humanité basique, les rendre brillants et lointains afin d'entretenir une aura de grandeur. En supprimant l'aura, le couple devient des gens comme tout le monde. Donc, si le roi et la reine deviennent des gens ordinaires… ben tu peux leur couper la tête comme au premier quidam venu.

-Ben j'vois pas l'intérêt de s'encombrer d'un truc pareil… C'est bon, on sait que Louis XVI était un impuissant et un faible, et qu'elle était une vampire qui suçait les finances de la France pendant que le peuple crevait de faim…

-Ah ! Merci beaucoup. Vois-tu, ce que tu viens de dire représente la raison principale pour laquelle j'ai acheté et lu ce livre. Je ne sais pas ce qu'il en est pour vous, Babélionautes, mais j'ai été élevée dans la haine de Marie-Antoinette, que l'on me présentait comme une monstresse assoiffée de plaisirs payés par le sang du peuple innocent. J'exagère à peine. Et non, Louis XVI n'était pas impuissant.

J'ai commencé à douter quand j'appris que le fameux « S'ils n'ont pas de pain, qu'ils mangent de la brioche » n'était qu'un mensonge.

-Ouais, mais quand même, elle a tué la France avec ses caprices !

-Beeen… non. C'était un peu plus compliqué que ça. Et le travail de cette biographie démontre que la Révolution est l'aboutissement de décennies de délitement : impossibilité de remplir les caisses, injustice d'un système figé…

Les causes sont multiples, complexes et ne tiennent pas seulement au comportement de la reine, il n'a pas arrangé les affaires de qui que ce soit, certes, mais elle n'est pas la succube infâme que l'on me dépeignait enfant. Je vais répéter, mais : c'est un peu plus compliqué, quoi.

-Nan, mais sérieux, Déidamie ! T'as pas plutôt envie de conseiller des trucs chouettes aux autres débiles, au lieu de bouquins d'histoire froids, factuels et casse-rotules ? Vacances, détente, tout ça, tu te souviens ou pas ?

-Mais là encore, tu restes dans le bas préjugé ! le texte de Simone Bertière n'est en rien froid ni casse-petons. Son style est vif, fluide comme une plaisante conversation. Et elle se permet même parfois ce que je vais appeler le clin d'oeil ou le sourire en coin adressé au lecteur.

-C'est quoi encore cette invention ?

-Dans tout le fatras d'informations, l'enseignante, de temps en temps, glisse dans le texte un brin d'humour, une pointe d'ironie ou de gentil sarcasme, qui laisse entrevoir, aussi brièvement qu'un battement de paupière cependant, la personne derrière le texte. Je ne veux pas dire que maintenant Mme Bertière et moi sommes potes, que je la connais pour de vrai, non, pas du tout.

Ce que je veux dire, c'est que ce procédé instaure une proximité entre elle et le lecteur, une forme de complicité. L'historienne, tout en exposant causes, conséquences et contextes, ne se prive pas pour glisser ici ou là un trait d'humour ou d'ironie, et rend ainsi son texte chaleureux.

Si vous explorez l'histoire en amateur, ne vous laissez pas rebuter par le nombre de pages : Marie-Antoinette l'insoumise présente une réflexion à la fois précise, plaisante et enrichissante sur la personnalité et la vie de la reine, tout à fait accessible pour les ignares dans mon genre. »
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