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EAN : 9782490276004
120 pages
Inukshuk éditions (02/03/2018)
4.88/5   4 notes
Résumé :
26 auteurs francophones et serbes croisent leurs visions artistiques et leurs regards personnels au travers de 14 récits, chroniques de soldats ou de civils, et nous racontent la Grande Guerre.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
14 récits, oui 14 comme dans 14-18 car c'est bien de la Grande Guerre dont traite ce roman graphique où se côtoient une multitude de talents avec des scénarios écrits, tant par des auteurs francophones, que serbes, et où les dessinateurs sont tous issus de l'ex-Yougoslavie. Vous vous doutez bien qu'avec pareil sujet, il n'est pas un récit qui soit de nature joyeuse. Chaque dessinateur utilise la technique qui lui semble la meilleure pour traiter de cette infâme boucherie qui aurait dû être « La der des Ders » si les hommes avaient eu un peu plus de jugeotte et si l'esprit de revanche n'avait pas poussé un petit caporal affublé d'une moustachette ridicule à remettre le couvert vingt-et-un ans plus tard.

Les sujets traités sont très variés ce qui m conduit à écrire ma plus longue chronique à ce jour.

« Entre ciel et terre ».
Commençons par la retraite de l'armée serbe, accompagnée de milliers de civils, à travers les montagnes d'Albanie, où les montagnards albanais entraînés et équipés par les Allemands lui tendent des embuscades. J'ai été particulièrement sensible aux dessins de Drazen Kovacevic et à la mise ne couleur dans les tons sépias de Toni Anastasovski. le scénario de Dragana Stojilkovic est magnifiquement bien ficelé.

« L'odyssée du sous-marin Curie »
Suit l'incroyable histoire du sous-marin français « Curie » qui s'est empêtré dans les filets à l'entrée du port de Pola où il devait se glisser pour détruire les navires austro-hongrois qui s'y trouveraient. le scénario de Philippe Zytka se réfère à l'histoire authentique de cet équipage. le dessin de Darko Perovic a quelque chose de « Corto Maltese ». La mise en couleur de Sofjia Perovic est bien adaptée à l'atmosphère nocturne et à la faible lumière à l'intérieur du sous-marin.

« L'ange gardien ».
Le troisième récit, nous narre l'histoire de Milan, blessé à la tête par un shrapnel. Heureusement pour lui, son casque Adrian a amorti le coup. A l'hôpital, on lui rapporte son couvre-chef pour qu'il puisse voir l'effet du shrapnel et ce casque qui lui a sauvé la vie. C'est alors qu'un mot glisse de ce couvre-chef. Un mot en français que Milan se fait traduire. C'est le début d'une nouvelle histoire… Un très beau scénario de Bruno Falba, superbement illustré et mis en couleur sépia par Aleksa Gajic.

« le retour de Milou », sur un scénario de Rodolphe, nous entraîne à Belgrade en décembre 1918. Zoran Janjetov au dessin et à la couleur offre l'un des styles les plus particuliers de ce court récit.
La mère de Milan est impatiente de le revoir et s'affaire à mettre sa chambre en ordre. Elle contemple sa photo avec son ami français, Louis. Il y a aussi la photo de Vesna, sa petite fiancée. La maman établit déjà des projets d'avenir. Quand Milou va-t-il rentrer ? Voilà le facteur sur son vélo. Il dépose une lettre dans la boîte, enfin !

« Fusillé pour l'exemple », un scénario de Frédéric Bertocchini avec, au dessin, Igor Krstic. Septembre 1914, du côté de Verdun… LOISEAU Marcel est ramené grièvement blessé à la jambe et à la tête par un camarade. Sur sa route, l'infortuné croise un capitaine, genre abruti de première classe avec palmes et grande distinction. Ce capitaine, malgré les graves blessures dont il est affligé, lui ordonne de repartir au front. Marcel désobéit, tourne le dos à ce fou-furieux de capitaine et se rend au poste de secours tandis que le bon samaritain qui l'a secouru s'en retourne dans l'enfer des combats pour éviter des ennuis avec ce farouche capitaine qui se garde bien de foncer risquer sa très précieuse peau… Les ennuis de Loiseau ne font que commencer à cause de cet oiseau de malheur.
Si vous effectuez des recherches sur Internet, vous vous apercevrez bien vite que Marcel Loiseau a bien été « fusillé pour abandon de poste » le 12 octobre 1914. Il était soldat au 106 R.I. Les faits se sont déroulés à Mouilly - Rupt-en-Woëvre, près des Éparges, dans le département de la Meuse. Il a été réhabilité le 17 mars 1922. Son cas était un exemple flagrant d'un abus de pouvoir de l'autorité absurde d'un supérieur. Il fit partie des premiers soldats « fusillés pour l'exemple » réhabilité.
Le dessin de Igor Krstic, tout en nuances de lavis de gris et de noirs correspond idéalement à l'ambiance très sombre de cette histoire marquée par une profonde injustice. Petite observation : dans ce récit, les uniformes ne correspondent pas à ce qu'ils étaient au début de la guerre…
Anatole France avait écrit en 1909 : « L'armée étant une administration comme l'agriculture, les finances ou l'instruction publique, on ne conçoit pas qu'il existe une justice militaire quand il n'existe ni justice agricole, ni justice financière, ni justice universitaire. Toute justice particulière est en opposition avec les principes du droit moderne. Les prévôtés militaires paraîtront à nos descendants aussi gothiques et barbares que nous paraissent à nous les justices seigneuriales et les officialités. »

« Yanko le berger » de Tibery (Tiberiu Beka), seul aux commandes.
1914. Les Austro-Hongrois sont entrés en Serbie. Dans le territoire occupé ne restent que des femmes, des vieillards et des enfants. Yanko, petit berger, se morfond. L'armée ne veut pas de lui. Il garde ses moutons lorsqu'il entend des coups de feu en provenance de son village. Lorsqu'il arrive à portée de vue, des flammes dévorent déjà plusieurs maisons…
Une mise en couleur aux tons chauds et sombres pour accompagner une descente aux enfers qui montre comment certains soldats austro-hongrois se sont comportés dans les malheureux villages se trouvant sur leur passage. Après cela, on peut mieux comprendre pourquoi tant de civils ont pris la fuite avec les restes de l'armée.

« le conscrit » sur un scénario de Nenad Mikalacki Django, Igor Krstic au dessin.
Les gaz, ces horreurs, sont évoqués dans ce récit qui est une sorte d'allégorie fantastique de la mort. Je ne commenterai pas cette BD en noir et blanc pour garder l'entière surprise qui attend le lecteur.

« Frères d'armes » est un scénario du Français Dobbs (Olivier Dobremel) mis en lumière par Dragan Panovic.
Récit d'un équipage d'avion. Un Français comme pilote, un Serbe comme mitrailleur. Ils sont pris en chasse par un hydravion autrichien…
Les couleurs sont vives comme le sont celles des paysages autour de la rivière Drina. Un paysage magnifique qui ferait presque oublier que des hommes s'entretuent, comme s'ils n'avaient appris à voler que pour pouvoir s'envoyer en l'air afin de mieux s'étriper !

« L'éclaireur et son binôme », on le doit à un scénario de Vasa Pavkovic et aux dessins, puissants, en noir et blanc de Stevan Subic.
Darko Petrovic est éclaireur dans l'armée serbe. Voilà que seulement quatre mois se sont écoulés depuis le début de la guerre, mais déjà le monde de Darko s'est écroulé. le voilà reparti, seul, une fois de plus, pour une mission de reconnaissance. Mais cette fois, Darko ne reviendra pas seul…

« le chemin du désespoir » Milenko Misic, accompagné de Darko Stojanovic au dessin.
Un récit où l'on découvre la grave décision que prend l'état-major serbe de fuir le pays vers l'Albanie et le Monténégro, avec les principaux trésors du peuple serbe et des milliers de civils qui ont déjà « goûté » au comportement des troupes bulgares qui sont entrées en guerre avec des promesses effectuées par l'empereur austro-hongrois et le kaiser.
Les dessins sont de très grande qualité, mais pourquoi avoir opté pour un fond aussi foncé qui empêche de profiter pleinement des dessins ?

« Piqûre d'abeille » est une histoire de Pavle Zelic, Maza au dessin et Desko à la couleur.
Cette narration nous transporte à Salonique en Grèce où les populations et les militaires subissent les attaques incessantes, et leurs terribles conséquences, de l'aviation bulgare. La décision est prise de porter la guerre au coeur-même de la Bulgarie, à Sofia, leur capitale ! Et pour mener à bien cette mission, ils peuvent compter sur… un bombardier Farman ! Un caporal français, Royable, et un sous-lieutenant serbe Naumovic se voient confier cette mission…
De très beaux dessins où le noir se détache sur un fond sépia.

« le sang des damnés » de Michel Dufranne mis en dessin et en couleurs par Milan Drca.
Sergeï Feodorov qu'as-tu fait pour te retrouver à Mers-El-Khébir dans un bataillon disciplinaire en compagnie de tes camarades russes ? Comment, parti de Russie, t'es-tu retrouvé en France à te battre sous les ordres d'officiers incompétents qui te traitaient, toi et tes semblables, comme des esclaves dénués de droits autres que ceux consistant à obéir, à souffrir et à mourir ?
Un récit poignant sur ces soldats traités comme des moins que rien par leurs officiers inaptes au commandement, soldats qui, en France aussi, vont se révolter contre eux et faire leur petite révolution d'Octobre…

« le billet » de Philippe Zytka dessiné et mis en couleur par Milan Jovanovic.
Hugh Gibson est Australien… Et engagé volontaire. Il quitte son pays en 1915. Sa fiancée lui remet un billet de chemin de fer « aller-retour ». Comme cela, lorsqu'il rentrera en Australie, il n'aura pas à en acheter. Pour Hugh, ce billet va devenir son porte-bonheur. Son sauf-conduit qui doit lui permettre de revenir vivant au pays…
Basé sur le premier combat des Australiens sur le continent européen, à la Bataille de Fromelles, ils perdirent 5533 hommes. Cet épisode constitue les 24 heures les plus sanglantes de l'histoire militaire australienne ! Pour rappel, il n'y eut pas de conscription en Australie durant la Grande Guerre ! Tous les soldats étaient des engagés volontaires.

« le journal de Corfou », d'après un scénario de Filip Bankovic, mis en images par Ivan Stojkovic.
Milutin Dimitrijevic a 42 ans et il a découvert, à Belgrade, dans l'appartement de ses parents, au milieu d'un tas d'ouvrages poussiéreux, le journal de son arrière-grand-père qui s'appelait exactement comme lui. le 3 décembre 1914, lors de la contre-offensive serbe, son aïeul n'eut la vie sauve que grâce à un autre soldat qui le jeta à terre au moment d'une explosion. Il retrouvera par hasard cet inconnu sur l'île de Corfou où les survivants de l'armée serbe ont trouvé refuge, évacués par la marine française. Son sauveur s'appelle Lazare. Ils ne se quitteront plus jusqu'à ce que…
Un récit qui montre qu'il s'en faut de peu pour que s'arrête ou survive une lignée. Traité dans les tons sépia, c'est une BD très touchante.

Voilà résumés les courts récits présentés dans ce roman graphique d'excellent facture, tant artistique qu'historique. Il nous ouvre les yeux sur l'implication des Serbes dans la Grande Guerre (mais pas que puisqu'on y relate aussi des histoires de soldats australiens, russes, français, …).

La lecture de cet ouvrage m'a pris des jours ! Heureusement que j'étais en congé pour en profiter pleinement : il m'a mis en appétit pour en savoir davantage sur la participation des Serbes à ce conflit qui a démarré à cause d'un étudiant serbe à Sarajevo. J'ai passé des heures et des heures sur Internet à effectuer des recherches pour m'assurer de la base historique de chacun des récits, mais surtout pour en savoir plus (et pas que sur les Serbes).

A la fin de l'ouvrage, un dossier retrace l'histoire de la Serbie durant la Grande Guerre.

Je ne puis qu'en recommander l'achat à tous les passionnés d'histoire, en particulier ceux intéressés par la Première Guerre mondiale, mais aussi par l'histoire de l'aviation. Au niveau du graphisme, il y en a pour tous les goûts. Pour cette raison aussi, si vous voulez sortir des sentiers battus au niveau du « dessin », osez vous aventurer dans « L'ombre d'antan ».

Merci aux éditions INUKSHUK et à cette Masse critique « spéciale » qui m'ont permis de déguster une oeuvre très originale.
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La première guerre mondiale a beau, comme son nom l'indique, être mondiale, les récits que l'on trouve en France sur cette guerre tournent toujours autour des mêmes événements, lieux et acteurs. J'ai vraiment apprécié changer de point de vue et apprendre des choses sur un front délaissé par mes cours d'histoire et lectures personnelles. Les relations franco-serbes à cette période m'étaient inconnues et c'est avec plaisir que j'ai complété mes connaissances ou plutôt commencé à les compléter grâce à cet ouvrage.
L'ombre d'antan est un recueil de BD avec très instructif. Il est composé d'une préface, d'un dossier historique, de photos d'archives et de 14 histoires sous forme graphique créés par 14 duos le plus souvent associant un scénariste et un dessinateur dont l'un est français et l'autre serbe.
L'information qui m'a le plus marquée est le biais donné par les chiffres habituellement présentés. Pour ce conflit, on présente des chiffres et pourcentages correspondants au nombre de morts par rapport à la population militaires engagées et non par rapport à la population globale. Et bien que les pertes soient dans tous les cas impressionnantes, la mise en perspective diffère. 18% des soldats français correspond à 4% de la population globale alors imaginez pour la Serbie on monte à 28% de la population.
Niveau BD, les styles et choix de sujets sont très variés ce qui permet à chacun de trouver un style et/ou un sujet qui peut lui convenir. Pour ma part, j'ai été particulièrement sensible aux style de Drazen Kovacevic, de Dobbs, de Darko Stojanovic et d'Aleksa Gajic. J'irai regardé le reste de leur production. du point de vue des thématiques, il y a un bel équilibre entre ceux commun à tous les fronts et toutes les nations engagées, ceux plus spécifiques à la Serbie et même des points moins connus toujours d'autres nations. Pour ce qui est assez « universel », on trouvera les débuts de l'utilisation des sous-marins et des avions, les « fusilier pour l'exemple », la superstition, la création de binôme improbable (chat/homme) ou la réception de l'avis de décès post-armistice. Pour ce qui est lié à l'histoire serbe, on trouve les questionnements sur le fait d'organiser ou non une retraite générale, la fuite de la population à travers l'Albanie et les attaques subies, les mises à sac, assassinats et viols des villages de civils et l'hymne de guerre serbe.
Pour les points moins connus, il est question de la rébellion des russes du front de l'ouest et des engagés australiens.
Chaque histoire m'a intéressée. Chacune arrive à jouer avec nos émotions avec un équilibre juste. Un des points que j'ai préféré est la nuance mise sur le camp adverse. Les Allemands et leurs alliés ne sont pas décrits comme un monobloc de gens immondes. Dans les deux camps, combattaient des personnes qui n'ont pas choisis d'être là et font ce qu'ils peuvent pour survivre sans perdre trop d'humanité. Je vais conclure avec l'histoire qui m'a probablement le plus plu. On a un récit plus bisounours qui parle d'un message trouvé dans un casque qui a sauvé la vie du soldat qui le portait. Avoir un récit plus léger et positif m'a fait plaisir car dans toute cette horreur il est facile d'oublier que certains s'en sont sortis.
Je vous recommande cet ouvrage qui a marqué ma fin d'année de lectrice.
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1 préface. 14 récits. 1 dossier historique. 26 auteurs (scénaristes et dessinateurs) français et serbes. Tout cela pour rappeler les liens qui ont uni les deux territoires durant la Première Guerre Mondiale. Afin de tout comprendre, je vous renvoie au livre, très bien fait. Je ne saurais pas aussi bien vous expliquer. Chaque très courte BD est très différente autant dans le dessin que dans le récit. Évidemment, j'aurais aimé, parfois, que cela dure plus longtemps. Je pense surtout à "Entre ciel et Terre"


A découvrir !

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