J'ai dix-huit jours, et I remember les grosses mouches noires et l'air tiède de l'été qui s'engouffre par les trous béants de l'hôpital. À dix-huit jours, je peux reconnaître le souffle de l'air du souffle des bombes, et un tir de mortier d'un tir de T.34. À dix-huit jours, je sais que je suis orphelin et qu'on m'appelle Nike (prononcer Naïk). À ma gauche, dans le même lit, Amir, un jour de moins, dort, et à ma droite, Leyla, la cadette, dix jours à peine, braille. Eux aussi sont orphelins, mais ils ne le savent pas. Je suis l'aîné, et je jure sur les étoiles qui brillent au-dessus du plafond envolé de les protéger toujours. Je le jure.
" - Vous tombez mal... Je suis en train de perdre mon père..
- Désolé... gravement malade ?
- Non, gravement heureux."
Restons ce que nous avons toujours été: des gens libres. c'est devenu suffisamment rare pour qu'on s'accroche ne serait-ce qu'à l'idée.
" On dit que vous avez été trouvé quelques heures après votre naissance, au côté d'un combattant mort portant des chaussures de sport d'une marque du siècle dernier : "nike"... votre prénom viendrait de là..."
"_On dit que vous avez été trouvé quelques heures après votre naissance, aux côtés d'un combattant mort portant des chaussures d'une marque du siècle dernier ! "Nike", votre prénom viendrait de là...
_On dit ça, oui...
_On dit aussi que Hatzfels, votre nom, vient d'un journaliste français qui vous a découvert et déposé à l'hôpital "Kosevo" de Sarajevo...Vous porteriez le nom d'une marque de chaussures et d'un inconnu ?
_Ça me va très bien."
Le matin, j'émerge de mes rêves, le plus heureux des anges. Je me couche le soir, un vrai salaud. Qu'ai-je donc fait entre-temps ? J'ai fréquenté les hommes et fouillé dans leur merdre. Abdulah Sidran (Sarajevo - 1993)
Restons, ce que nous avons toujours été... des gens libres... c'est devenu suffisamment rare pour qu'on s'accroche... ne serait-ce qu'à l'idée... et je veux être libre jusqu'au choix de ma propre mort.
Le fanatisme est un monstre mille fois plus dangereux que l'athéisme philosophique.
L'intrusion brutale de Cobbéa dans mon cerveau semble y avoir provoqué diverses courbatures et tuméfactions.
Le cerveau serait donc un muscle ?
Une mouche écrasée, c'est comme un tableau abstrait. Celle qui orne la main excitée d'Amir, fier de son trophée au point de rire aux éclats dans le grondement des armes, pourrait ressembler, au hasard : à une fleur malade, un crabe mutant, un objet céleste, un auto-portrait déformant, un sourire de purificateur ethnique (...), un décret de sécurité de l'ONU, une vue aérienne de ville blessée... Je saisis la main d'Amir, et j'en regarde la paume souillée. J'y vois Sarajevo, mourante.