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Chloé Billon (Traducteur)
EAN : 9782368125311
208 pages
Charleston (09/12/2020)
3.22/5   16 notes
Résumé :
« J’avais découvert posé sur le lit un petit dessin représentant une femme et un homme à tête de taureau. (...) Le dessin est brutal. Je le déteste. Je l’adore. Je ne m’en déferai jamais. (...) Sur ce dessin, c’était moi. Ni Olga, ni Marie-Thérèse, ni aucune autre de ses amantes de passage dont il ne se rappelait pas les noms. J’étais l’élue, j’étais la gagnante, j’étais marquée. J’étais à lui. »

Photographe renommée, figure prometteuse de l’avant-gar... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Excellent roman se présentant comme une autobiographie extraite d'un journal fictif de Dora Maar.

Sous la plume de Slavenka Drakulic, auteure croate, le personnage Dora Maar y décrit la relation sous emprise qu'elle entretint pendant 7 ans avec Picasso.

Elle y perdit son art, la photographie, sa santé mentale et finit ses jours volontairement isolée, dans la piété et une relative pauvreté, peignant des toiles qui la sauvèrent de la folie.

L'emprise de Picasso ne s'exerçait pas uniquement à l'égard de ses maîtresses, mais à l'égard de tous ceux qui faisaient partie de son cercle : son épouse de laquelle il ne divorça jamais, ses enfants, surtout son fils, Paul, qui resta toute sa vie son homme à tout faire, autant dire un esclave. Il envoûtait son large cercle d'amis, dont étaient Roland Penrose, son épouse, la photographe américaine Lee Miller, l'écrivain-ethnologue Michel Leiris, Man Ray, Max Ernst et surtout Paul Eluard qui lui était inféodé jusqu'à lui prêter son épouse-poupée Nusch.

Comment y échapper ? Eh bien on n'y échappait pas, tant l'homme était magnétique, d'un magnétisme animal tel qu'il était presqu'impossible de ne pas tomber sous son orbite quand on le côtoyait.

L'unique personne qu'il ait respecté fut Gertrude Stein, à qui il devait sa renommée et qui lui assura à ses débuts de quoi peindre et ses premières ventes.

Les autres souffrirent, devinrent fous, se suicidèrent. Beaucoup d'entre eux. Picasso le vampire, Picasso-Chronos, Picasso-le Minotaure.

La responsabilité en est-elle au seul Picasso, homme incapable de sentiment mais artiste jusqu'au bout des doigts, de l'âme ? Certainement pas : Picasso était un monde, une mouvance, une galaxie, il ne s'arrêtait pas à sa personne. Il était la proie aussi bien que le chasseur car tout était magique en lui : sa parole était celle du Dieu vivant ; il transformait tout en art : il chinait des matières informes aux puces et les transformait en sculptures ; ses mains ne restaient jamais inoccupées : avec une capsule de vin, un bouchon, un quelconque objet il fabriquait sans relâche au restaurant et partout où il se rendait des petits objets qu'il distribuait ; dessinait des croquis qui, lorsqu'il daignait les signer, enrichissaient instantanément ceux à qui il les offrait.

Ce roman est passionnant car il restitue l'ambiance du surréalisme, sa créativité, sa liberté de moeurs ; un accent particulier est mis sur les étapes de la réalisation enfiévrée du célèbre tableau "Guernica", (dont Dora Maar assura le reportage photographique).

Ce roman très bien documenté. La traduction a été assurée par Chloé Billon.

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1935. Dora Maar est photographe pour le film de Jean Renoir « le crime de Monsieur Lange ». La jeune femme aux origines diverses se sent bien à Paris et semble s'épanouir avec les surréalistes qu'elle fréquente dont Paul Eluard qui lui présentera Pablo Picasso dans l'un des plus célèbres cafés germanopratins.

Un an plus tard, le couple est déjà sur les ailes de l'errance et Picasso peint « Dora et le Minotaure », tableau d'un érotisme cruel mais qui illustre à la perfection la relation entre le « Maître » et sa nouvelle muse, une relation perdue dans un labyrinthe de domination, de supériorité, de sexe. Un sexe proche du cannibalisme avec l'ogre Picasso.

Pour ce journal intime fictif, l'écrivaine Croate Slavenk Drakulic ne pouvait choisir meilleur titre que cette toile si représentative de l'histoire de ce couple et de la charge destructrice qui s'ensuivra. le récit commence lorsqu' Henriette Theodora Markovitch, son vrai nom, sort de l'hôpital Sainte-Anne après avoir subi de terribles électrochocs. Nul ne sait qui l'a fait interner mais c'est Jacques Lacan qui signera un bon de sortie et suivra sa patiente pour encore quelques années. Sa séparation avec Picasso ne passe pas, l'humiliation face à la nouvelle maîtresse est le coup de pinceau qui a fait dériver la désormais ex-muse.

Mais remontons au commencement, de cette enfance en Argentine, du rideau blanc qui séparait sa chambre à celle de ses parents et qui deviendra une obsession – une sorte d'Oeil – de sa mère pieuse et autoritaire, de son père séducteur et volage. La jeune Dora ne sait qui elle est, elle vit à Buenos Aires, ses gènes sont français et croate. Quand elle se met au tango, la mère décide de retourner à Paris et emmène sa fille par crainte qu'elle devienne une « francesa ». Mais Dora semble indomptable, prête à tout pour imposer sa liberté et assouvir sa passion de la photographie, elle se met en couple avec Georges Bataille, sa réputation ne sera alors plus à faire quant à sa sexualité. Puis, la rencontre avec Picasso. Malgré que l'artiste continue à fréquenter ces précédentes maîtresses, Dora accepte tout. Par amour. Un amour qui ira de Charybde en Scylla.

Un récit qui se lit comme un roman, captivant dès les premières pages et ce jusqu'aux dernières lignes. Un regard objectif sur cette femme affranchie mais qui finira par se replier sur elle-même pour terminer humblement, presque en ascète et terriblement aigrie. A partir des cahiers réels de la photographe, on réalise très bien les tourments de la jeune femme, elle qui a immortalisé par des clichés Pablo peignant Guernica, un Pablo d'ailleurs beaucoup moins engagé comme on a pu le faire croire et qui a traversé l'Occupation sans aucun souci. Intéressant également cette comparaison entre le Minotaure et l'Origine du Monde de Courbet. Deux tableaux provocateurs mais ô combien différents dans l'approche et la signification.

Un beau portait d'une femme victime de son propre destin. Un livre qui fait écho à celui de Marina Picasso « Grand-père ».
Lien : https://squirelito.blogspot...
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Lorsqu'elle a rencontré Pablo Picasso en 1936, Dora Maar était déjà réputée pour son travail de photographe, occupant une place importante au sein de la famille artistique parisienne de l'entre-deux guerres aux côtés d'Éluard, Man Ray, Lee Miller ou André Breton. Fascinée malgré elle, elle finira par succomber au génie et aura dès lors le plus grand mal à exister en dehors de l'ombre du génie. Car Picasso et les femmes, ce sont autant d'histoires de tourments et de drames et pourtant lorsque l'on évoque Olga, Jacqueline, Marie-Thérèse ou Dora, c'est souvent le terme de "muse" qui vient en premier.
Dans ce texte présenté comme un journal intime imaginaire, la parole est donc à Dora, Dora la croate, Dora l'argentine, Dora qui avant même que Picasso ne la représente en "Femme qui pleure" s'empêchait de sourire, sur les injonctions de sa mère. Dora aux identités plurielles qui n'a attendu personne pour exister, mais sortira exsangue de leurs sept années de vie commune. Car elle est fière, et refuse de se soumettre ; alors il se vengera en la peignant des pires façons.
De plus en de récits concernant les femmes de son entourage témoignent d'un monstre égoïste et exclusif et celui-là n'est pas en reste, décrivant un comportement de gamin gâté. Son chef d'oeuvre "Guernica", témoignant de sa compassion pour le peuple espagnol ? Ce sont en réalité Dora et Paul Eluard qui l'ont poussé à enfin s'exprimer sur le sujet. le mot "humiliation" revient très souvent sous la plume de Slavenka Drakulic, incarnant une Dora très sévère avec les autres femmes de Picasso, décrites tantôt comme folles, tantôt comme arrivistes. Reste le portrait d'une artiste qui a osé tenir tête à un monstre sacré dans un récit qui ouvre grand la porte sur son oeuvre.
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Aujourd'hui, je viens vous parler du livre Dora Maar et le minotaure de Slavenka Drakulic qui fait partie de la collection des indomptées aux éditions Charleston.



J'aime beaucoup lire des biographies pour m'imprégner des vies de personnes qui ont marqué leur temps, comprendre certains de leurs choix, vivre certains épisodes de leurs vies grâce à ces écrits... Pour le coup, je ne connaissais pas Dora Maar et très peu la vie de Picasso. Je ne suis pas une grande adepte de peinture ce pourquoi je suis peut être passée à côté de certains passages.

Ce livre est plus ou moins coupé en trois parties. La jeunesse de Dora, sa rencontre et sa vie avec Picasso puis sa descente aux enfers.

La jeune femme de 25 ans la cadette de Picasso va petit à petit se rendre compte que la relation qu'elle entretient avec n'est pas celle qu'elle aurait voulu. Elle va devoir vivre dans l'ombre du peintre, auprès d'un homme sombre qui est plus intéressé par l'art et sa propre liberté. Cette relation toxique va petit à petit la transporter aux portes de la folie où elle va se retrouver seule.
C'est un texte assez sombre et j'avoue avoir ressenti de la compassion et parfois une certaine pitié pour Dora et d'autres femmes.

J'ai été intéressée par l'expliquation de la réalisation de Guernica. On en apprend un peu plus sur l'une des plus grandes oeuvres de Picasso et on s'imagine un peu plus les circonstances de sa réalisation.

Il s'agit du portrait d'une femme victime d'un homme égocentrique et misogyne qui me laisse triste et interrogative. Aurait-elle percé dans l'art et aurait-elle été plus heureuse si elle ne l'avait pas connu ?

Il vous tente ?


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Grosse déception que ce roman.
L'autrice donne la parole à Dora Maar à travers un carnet qu'elle aurait tenu.
J'ai apprécié le début qui retrace l'enfance de Dora.
Par contre une fois que Picasso fait son apparition, j'ai perdu tout engouement pour cette femme libre. L'histoire tourne en boucle.
Et puis comment retracer une biographie, même si elle est romancée, je dirais même, surtout si elle est romancée en si peu de pages.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Les hommes sont dangereux, me répète maman. Tous les hommes ? je demande. Oui, affirme-t-elle, oui, oui, tous. Comment cela, dangereux ? je répète sans oser ajouter si cela concerne aussi mon père.
Ils sont dangereux comme la fièvre du tango. Comme le tango, répond-elle
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"J'avais découvert posé sur le lit un petit dessin représentant une femme et un homme à tête de taureau. (...) Le dessin est brutal. Je le déteste. Je l'adore. Je ne m'en déferai jamais. (...) Sur ce dessin, c'était moi. Ni Olga, ni Marie-Thérèse, ni aucune autre de ses amantes de passage dont il ne se rappelait pas les noms. J'étais l'élue, j'étais la gagnante, j'étais marquée. J'étais à lui."
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Je l’aime autant que je le méprise. L’homme est pitoyable, immoral, avare, méchant. L’artiste est un génie que j’admire.
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J'ai su tout de suite que ma rencontre avec Picasso serait fatale.
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Vidéo de Slavenka Drakulic
hromadske
Slavenka Drakulić, née en Croatie (ex-Yougoslavie) en 1949, est une auteure dont les livres et les essais ont été traduits dans de nombreuses langues. Drakulić est un rédacteur en chef de The Nation (États-Unis) et un auteur indépendant dont les essais ont été publiés dans The New Republic, The New York Times Magazine et The New York Review Of Books. Elle contribue à Süddeutsche Zeitung (Allemagne), Internazionale (Italie), Dagens Nyheter (Suède), The Guardian (Royaume-Uni), Eurozine et d'autres journaux et magazines
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