La conjecture de Syracuse

Le Sud algérien, en 1961. le lieutenant Thèseus interroge sans ménagement un cadre du FLN, connu avant la guerre pour avoir été un prodige des mathématiques."D'une manière générale, il ne croit pas que la pratique des mathématiques soit compatible avec la guérilla, la réflexion sur la théorie des nombres avec la révolution". L'objet de l'interrogatoire demeure mystérieux.


Puis c'est la fin de la guerre. "En quittant El Hamel au moment du cessez-le-feu consécutif à la signature du traité d'Evian Thèseus devine que la parenthèse barbare est définitivement refermée ; il a le sentiment qu'en restituant ses effets militaires, c'est son enfance, sa jeunesse qu'il confie aux autorités comme si son innocence n'était pas perdue mais seulement épargnée (à la fois thésaurisée et préservée) dans un coffre imaginaires où il pourra un jour la recouvrer - intacte." Remise à zéro des compteurs, donc. "Pourtant il sait aussi qu'il est désormais un salaud ; il a eu accès aux égouts de lui-même et ce qu'il a vu ne l'a guère effarouché".

Paris, 2001. Thèseus est un professeur d'université établi, arrivé, au terme d'une carrière brillante, à une position dominante dans sa discipline, fondé sur le caractère indémontrable de la conjecture de Syracuse. Il se trouve confronté à un jeune chercheur prometteur, le petit-fils de l'homme qu'il a torturé pendant la guerre.

Plutôt emballée par la première partie, je me lance avec enthousiasme dans la lecture de la conjecture de Syracuse. Avec une écriture fluide, Antoine Billot enchaîne les chapitre courts, qui alternent avec des pages de réflexion sur les mathématiques (d'ailleurs bien mieux écrites que le reste, avec quelques pages particulièrement réussies sur l'explication de ladite conjecture).

Je n'ai pourtant pas accroché, un peu déconcertée par une structure arythmique, des personnages qui quoique se voulant complexes restent à mon sens trop simplistes, quelques réflexions douteuses. La conjecture de Syracuse, malgré un beau matériau (une histoire de vengeance à distance), ne convainc pas tout à fait.
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Au travers d'une curiosité arithmétique accessible aux écoliers (i.e. la conjecture de Syracuse) c'est la biographie d'un mandarin criminel de guerre mathématiquement déchu par le génial petit fils du martyr qu'il a exécuté.
Le roman alterne froidement des ambiances surprenantes qui vont de la barbarie coloniale dans la ruralité algérienne, de parallèle entre la rigueur mathématique et l'intégrisme religieux,
avec du sexe et de la pilosité débouchant sur de la capilliculture artistique, jusqu'à la vie cosmopolite, citadine et universitaire agrémentée d'urbanisme du tragique dénouement.
Plusieurs petits passages déroutants d'érudition en italique adoucissent un peu l'âpreté dérangeante du récit.
Ce livre a été acheté en vue de la rencontre science&littérature organisée par la SFP (Société Française de Physique) à l'IUT 2 de Grenoble le jeudi 15 décembre 2022 avec Antoine Billot et José Bico qui présente, lui, "La physique de l'élégance" avec une expérience de formation de mèches de poils mouillés
(cf. https://www.babelio.com/livres/Guyon-Du-merveilleux-cache-dans-le-quotidien/1044963 ).

Les articles à propos de ce livre faisaient état d'un "roman mathématique haletant". Autant la suite de Syracuse est passionnante, autant ce livre ne l'est pas. Il est certes bien écrit, mais je n'y ai rien trouvé de haletant, ni même de mystérieux. Mais je confirme que la suite de Syracuse elle-même est la grande gagnante de cette histoire, d'autant qu'elle n'a toujours pas été, à ma connaissance, démontrée.

Ouvrage décevant si comme moi, le coté mathématiques du titre vous a accroché. Pour ceux qui ont été frustré par l'absence de fondement scientifique, préférez de loin La conjecture des hirondelles aux éditions SoRaTu. Vous en aurez pour votre compte tout au long des trois saisons de la trilogie.