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EAN : 9782812200236
Ramsay (22/09/2010)
4.67/5   6 notes
Résumé :
Les continents ne sont pas fixes, ils dérivent. Les continentaux sont des migrants qui s’ignorent, des passagers soumis à ce mouvement infime comme à l’écoulement insensible du temps. Des passagers en rupture de barre, en rupture d’avenir, incapables d’empoigner le gouvernail pour métamorphoser en destin leur errance misérable.

Les îles aussi dérivent avec leur équipage. Plus vite, plus loin, dans l’urgence et le péril, aspirées par le sillage néfast... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
6 Perles à découvrir, admirer, dans la transparence de l'océan, la beauté des ïles, et la douceur de vivre, surgissentt les travers d'une civilisation frappée de plein fouet par l'ambigüité de la modernité. le long de ces nouvelles, nous sommes subjugués par la plume délicate de Anne-Catherine Blanc et à la fois chagrinés par la douleur et la souffrance avilissantes d'une population.

Six nouvelles pour six tableaux différents mais pourtant un fil conducteur commun, hormis le pacifique, le regard d'une civilisation sur un monde devenu carte postale pour les uns, devenus l'envers du décor pour les autres.

"billet entrecoupé par des citations voir sur le blog pour son intégrailité"
Je ne peux vous livrer la suite, vous laissant découvrir la fin de cette superbe nouvelle, malgré la tragédie et l'absurdité de l'homme qui se laisse piéger et avaliser par l'alcool, devenant plus qu'une bête sans coeur ni âme ; Poevara a subi, en silence, puis Poevara a mis un terme à cette souffrance, se laissant couler dans l'abyme d'un autre ailleurs sans doute meilleur que la réalité.
Lignes de vie, deuxième destination, à la découverte de deux personnages peints avec beaucoup de sagesse et de justesse, l'art et la manière une fois encore dont fait preuve l'auteur pour cette description, me laisse en admiration. le vieux tinito qui calligraphie à longueur de journée sur de vieux annuaires, et le tatoueur, deux arts qui requièrent de la patience et l'harmonie du geste.
Raerae, troisième nouvelle, troublante, prenante, émouvante, j'ai appris par ce récit que l'homosexualité ou les travestis, dans les temps lointains dans cette partie du monde n'était pas le tabou d'aujourd'hui, mais faisait partie de la nature, personne s'en offusqué, sans doute parce qu'à cette époque, les choses nées d'elles-même devaient vivre à la lumière comme toute chose sur cette terre et non cachées et salies par une éducation absurde au nom de la morale et de la bêtise humaine.
Une fois encore, l'auteur aborde un sujet délicat avec poésie et tendresse, par un personnage attachant qui fait encore ici les frais de ces hommes qui se croient plus homme qu'un Raerae, mais au final ne sont que des épaves de notre civilisation blindée de préjugée, aveugle de l'essentiel, refusant la différence, mais profitant de la faiblesse et la naïveté d'un être autre, pourtant humain :

Passons à la suivante : Sa place au soleil , quelque peu différente des autres, puisque Colette européenne en est la protagoniste. Cette histoire pourrait être la nôtre, une envie de briser le quotidien, de voyager, mais voyager est-il suffisant pour tout changer ? Colette aime le soleil, participe à des jeux, et la chance lui sourit : elle gagne un voyage de rêve ! Ce rêve sera-t-il à la hauteur de ses espérances ? Que se cache derrière cette envie d'évasion, qui est réellement Colette ? Peinture d'aujourd'hui sur fond de destin commun, devons-nous attendre l'heure fatidique où tout peut basculer pour profiter de la vie ? La fin nous surprend, comme un coup de poing dans notre réflexion, sans doute le voyage est à notre porte et notre destinée dans le bonheur de tous les jours à déguster sans modération, sans soleil ni îles juste savoir apprécier la douceur de vivre.

Les deux dernières nouvelles, m'ont moins impressionnée, moins transportée : le sauvetage de tonton Philibert et la fourgonnette. Malgré tout, j'ai apprécié les pointes d'humour, et découvrir à travers ces histoires le quotidien de ces îliens.

Pour résumé, je me suis délectée à la lecture de ce recueil, j'avais adoré Moana blue et je viens d'acquérir “l'astronome aveugle” qui rejoint ma PAL. Une auteure qui sait nous offrir le dépaysement toute en poésie et couleur sans pourtant nous cacher la triste réalité de ces îles contaminées par notre civilisation.







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Recueil de nouvelles d'Anne-Catherine Blanc.

Poerava - "Poerava était née au temps de la mémoire perdue. Comme tous ceux de sa génération, elle n'était plus que l'héritière d'une amnésie." (p. 8) Poerava s'invente des rituels magiques pour se protéger et se venger. Face à la brutalité de l'existence, elle investit les perles d'un pouvoir sacré : création de l'homme dans les fermes perlières, ces agglomérats de nacre noire et dure sont comme Poerava, inaliénables. Poerava n'appartient qu'à elle-même et à l'océan."Elle savait désormais que l'atoll, son anneau de corail, son anneau de noces, la vouait sans faille au bleu mortel dont elle était née. Elle ne pouvait plus compter, pour se sauver, que sur ses rituels magiques." (p. 17)

Lignes de vie - Entre un vieil homme qui trace inlassablement des lignes de calligraphie sur de vieux annuaires et un tatoueur qui orne les peaux de bijoux indélébiles, il y a le même amour du dessin. "Seul compte le geste en cours d'accomplissement, le tracé en devenir." (p. 31 & 32) Quelle que soit l'encre ou le support, "la calligraphie, c'est comme la vie : on ne peut pas remonter le courant." (p. 32) La calligraphie et le tatouage sont deux arts tahitiens, issus de traditions métisses et symboliques. Qu'il marque la peau ou qu'il couvre la feuille, celui qui les pratique est "à la fois artiste graphique et écrivain public. Écrivain à fleur de peau." (p. 41)

Raerae - "Herenui était gaucher, métis et raerae." (p. 49) Beaucoup de défauts pour un seul homme. Est raerae l'homme qui choisit d'être une femme, d'exprimer et de vivre sa féminité. Dans l'ancienne Tahiti, c'était une pratique fréquente. Encore aujourd'hui, "sa culture lui offrait un biais pour l'exprimer sans déshonneur." (p. 57) Mais les temps changent. Herenui, si heureuse et innocente, s'attire les moqueries et les désapprobations d'une société qui oublie ses traditions. "Qu'elle existe, soit, mais au moins, qu'elle souffre d'exister sous cette forme au lieu de s'épanouir en toute sérénité !" (p. 62) Pauvre raerae qui fera l'expérience d'une brutalité gratuite et mesquine.

Sa place au soleil - Colette vit dans un pays gris, éloigné de l'océan et du soleil. Mais justement, le soleil, Colette en rêve et elle projette des séjours fabuleux dans des terres gorgées de lumière chaude et brûlante. "Pour tout le bourg, elle est la brave papetière un peu timbrée, l'aventurière en pantoufles dont on peut sourire sans méchanceté." (p. 92) Mais Colette n'ose prendre l'avion et découvrir enfin les mondes dont elle rêve. "Enclos dans ces routines gigognes, le temps de Colette tourne en rond comme un hamster dans sa roue." (p. 93) Mais voilà qu'un jour, Colette gagne un voyage à Tahiti. Enfin, elle peut passer derrière la carte postale et goûter au soleil. Mais ce qu'elle découvre là-bas est plus précieux que cette chaleur céleste : elle goûte à la vraie chaleur, celle dont elle a tant manqué.

Le sauvetage de Tonton Philibert - Tonton Philibert aime, le week-end, boire plus que de raison et vider les canettes en pêchant. Il se réveille alors les lundis matins et flotte entre amnésie et migraine. Connu sur l'ïle pour conduire une antique 404 plateau rafistolée, il mène ces jours-là sa guimbarde avec l'assurance optimiste des gens ivres morts. Un lundi matin, l'ivresse est plus tenace qu'à l'accoutumée et Tonton Philibert ne peut pas dire comment il a rejoint son lit.

La fourgonnette - Georges-Temoe est un fils de riche pourri gâté dont la maman est toujours disposée à couvrir les incartades. Mais quand Georges-Temoe envoie dans le fossé le pauvre Rodrigue Titi et son vieux scooter et qu'il tente d'échapper aux policiers présents, il commet une boulette d'une telle envergure que même sa mère, au plus fort de sa mauvaise foi légendaire, ne peut pas ignorer. Boire ou conduire, il faut choisir. Mais il faut également choisir que conduire.

L'auteure nous emmène en Polynésie française. Mais de la multitude d'îles, elle ne retient que Tahiti,"le caillou des mille fantasmes" (p. 104) et s'emploie à gommer les toiles de Gauguin pour faire apparaître une autre réalité, pas moins colorée mais certainement moins idyllique. Si l'île fantasmatique est protégée par sa barrière de corail, elle en est aussi prisonnière. "Le récif de corail avait déployé autour de l'île haute son anneau vermiculé, foisonnant, d'une persévérance de pierre vive, isolant et protégeant peu à peu le microcosme d'un lagon." (p. 7)

Anne-Catherine Blanc trace avec talent, finesse, émotion et nostalgie les nouvelles lignes d'un univers dont on a trop rêvé. Tahiti, la douce terre des fantasmes, n'est plus. Touchée voire tachée par la modernité, elle sent toujours peser le lourd tribut de l'exotisme imposé par des continentaux en mal de frissons d'ailleurs."Depuis longtemps, elle avait disparu, la bienheureuse autarcie du passé, offerte à des habitants sans convoitise par un pays luxuriant et généreux. La modernité avait créé des besoins et, même, elle avait fait naître chez certains une soif de consommation insatiable."(p. 54) Devant le constat mélancolique d'une innocence perdue, l'auteure déploie des personnages qui sont les héros de destinées minuscules aux accents d'épopée.

J'avais déjà particulièrement apprécié L'astronome aveugle de la même auteure. Deuxième lecture réussie avec un voyage dans le Pacifique émouvant, à la rencontre des nouvelles légendes de l'archipel.
Lien : http://lililectrice.canalblo..
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De prime abord, on dirait 6 nouvelles apportant chacune un regard
différent et complémentaire sur la Polynésie Française. Et puis, on s'aperçoit
que, au delà de personnages et de situations qui émeuvent ou font sourire,
ces facettes participent d'une même structure générale. On pense aux jours
d'une broderie. J'ai particulièrement aimé la nouvelle où l'écrivain juxtapose
un tatoueur polynésien et un calligraphe chinois. Elle est toute en transparence
et légèreté ; pourtant elle ouvre sur l'écriture et les signes des perspectives
inattendues.

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Offert par le www.blog-o-book.com il y a plus de 10 ans. Merci.

Mon plaisir est allé croissant en lisant ces nouvelles. J'ai aimé Colette et sa découverte de Tahiti mais surtout de l'amitié.

Dommage qu'elle n'ait pas su dire bye bye à la routine de son pays saturnien.

Enfin la chute de la dernière nouvelle m'a beaucoup plu. Elle m'a fait rire. Ces gendarmes faisant face à cette mama antipathique mais qui pense avoir le dessus et qui va se faire avoir par sa propre prétention. Qui l'eut cru...

Un très bon livre, avec des personnages très différents mais qui sont émouvants ou énervants suivant les cas. En tout cas attachants. Une belle écriture, stylée mais sans trop de fioritures. Classe mais pas ampoulée... Bref du bonheur. Une découverte.

Merci encore à www.blog-o-book.com et à Mme Blanc et aux éditions Ramsay.
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Passagers de l'archipel  le troisième livre d'Anne-Catherine Blanc a pour cadre Tahiti, une île que l'auteure connaît bien pour y avoir vécu plusieurs années. Et on retrouve avec plaisir non seulement un univers particulier et des thèmes récurrents mais aussi un style. Une écriture légère et sensible alternant un registre comique et familier et une dimension poétique et philosophique .
Ce recueil de nouvelles offre une vision de cette île mythique très différente de l'image exotique galvaudée encombrant les esprits. S'éloignant des clichés, l'auteure nous fait partager avec humour et empathie la vie quotidienne des Tahitiens , de ces hommes et de ces femmes simples qui «ne sont pas des anges». Elle nous fait découvrir un peuple «stigmatisé» par les dérives de la modernité qui a conservé des valeurs de tolérance et de solidarité car il reste malgré tout adapté à son monde maritime originel.
Anne-Catherine Blanc nous embarque sur un navire voguant sur l'infini de la mer dont nous sommes les éphémères passagers, et de cette errance qui est avant tout intérieure, il émane une sorte de philosophie de l'ancrage et du détachement, comme si chacun devait trouver «sa place» en harmonie avec le monde, pour pouvoir ensuite être prêt à s'en libérer.
 
Lien : http://l-or-des-livres-blog-..
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Ces tatouages-là sont faits pour être exhibés, visibles de tous, ils grimpent à l’assaut des membres, enlacent les torses, soulignent l’arc des reins, ciblent les épaules ou les crânes.

D’autres, au contraire, s’enveloppent de mystère, posés délicatement sur la rondeur d’une fesse, effleurant le creux d’une aisselle ou le renflement d’un pubis, encerclant l’aréole d’un sein. Ces tatouages-là sont d’abord des offrandes amoureuses, de tendres surprises à l’amant qui, pour la premières fois, les dévoile sur le corps désiré. Ils deviennent ensuite des secrets d’alcôve, des sujets de plaisanteries privées, de discrets petits sceaux garant d’intimité.

Et le tatoueur à longueur de journée écoute, conseille, caresse, palpe, gratte, pince, et puis transperce et brûle et imbibe d’encre indélébile les épidermes de ses frères humains.

Dépositaire de tous les secrets du monde.

A la fois artiste graphique et écrivain public. Ecrivain à fleur de peau.”

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Mais, avant le soir de sa chute, elle ne prit jamais conscience de la haine qu’une créature comme elle pouvait générer dans l’un ou l’autre clan.

La limpidité presque angélique de ses intentions la sauvait toujours de désastre. La sincérité de son regard, la spontanéité de ses élans la protégeaient du mal. Parvenus au bord du gouffre, ses agresseurs potentiels renonçaient à l’y pousser, parce qu’elle était vraie, parce qu’elle était pure, et sans doute aussi parce qu’ils n’étaient pas totalement pervertis, parce qu’ils étaient encore capables de pressentir en elle cette vérité, cette pureté, capables encore d rougir d’eux-mêmes.”

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Mais il arrive parfois, quand il trace un kanji, de ne plus se sentir exister que comme souffle vital, comme pur élan du corps devenu simple conducteur de l’énergie universelle. Dans ces instants de grâce, il s’oublie et se fond dans le creuset du monde. Sa vie alors n’est plus sa vie, elle participe de cette énergie démesurée et il expérimente à l’avance, ébloui comme un enfant qui mâchouille un bout de pâte crue avant que sa mère n’enfourne le gâteau, la saveur inachevée mais grisante, de son éternité
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Des montagnes sublimées par cette lumière mouvante, qui joue à se faufiler entre le bleu du ciel et de gros nuages gris perle, roulant très haut; Des montagnes qui se jettent dans le lagon, comme toutes celles de l’île, n’offrant aux habitants qu’une mince bande de terre habitable de part et d’autre de la route de ceinture
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“ Les ancêtres de Poerava étaient arrivés là guidés par les étoiles, sur d’immenses pirogues doubles, pontées, capables d’affronter les rages d’un océan que seule l’inexpérience d’autres hommes, un jour, permettrait de baptiser Pacifique.”
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