« Juillet 1992--
J'entends bien ce qu'on veut dire par "écrivain autodidacte": celui qui s'est fait loin de toute école. Il n'empêche qu'il y a là de quoi pouffer; un vrai écrivain est par définition un autodidacte, car ce qui le distingue, c'est précisément ce qui ne s'apprend pas. « (p. 207)
Un titre des plus réussis, car il joue sur plusieurs "significations" : religieux, image ironique pour exprimer des choses en catimini, toujours jubilatoire car l'auteur est fidèle à lui-même, cultivant la mauvaise foi, comme deux de ses auteurs de prédilection:
Paul Léautaud et
Jules Renard....
Tout est presque dit… Notre écrivain, il s'en tape des études, des plans de carrière, des mondanités et ronds-de-jambe du Monde des lettres parisiennes !!! Il s'en tape et c'est peu de le dire… Il n'aime qu'ECRIRE… il persiste, il souffre, il dure et il s'obstine … car c'est toute sa vie… et presque tout le reste, il s'en tape… hormis sa compagne K., enseignante et sa première lectrice convaincue…son chat… ses livres… et puis pour tout le reste…BASTA… Il aime et ne peut pas vivre sans la LITTERATURE…mais les humains, et surtout la société l'enquiquinent…au plus haut point !
Ouvrage épuisé… j'ai profité de constater avec plaisir que la Réserve Centrale des Bibliothèques de la ville de Paris possédât ces carnets couvrant les années 1990-1991, alors que notre « ours mal léché » fêtait ses 40 ans, malgré de gros soucis de santé… il traversait une période de doutes plus violents, entre les refus successifs des éditeurs de publier ses « Carnets », et son obstination à « être écrivain et un écrivain de préférence publié » !!! , même si il ne veut pas se plier aux simagrées ultérieures, commerciales !!
Ce diariste et « misanthrope aimable », ainsi que l'a défini son éditeur,Dominique Gaultier [Le Dilettante ], André Blanchard est un écrivain loin des cercles parisiens, atypique, ronchon, dévoré par sa passion de l'Ecriture et de la Littérature, il n'épargne personne dans le monde des Lettres, quand il n'aime pas, il l'exprime sans ambages ; de même, quand il s'enthousiasme… Je l'ai souvent exprimé dans mes chroniques, j'ai une sympathie profonde pour les livres qui mènent à d'autres livres-trésors !!. Ce n'est pas pour rien qu'André Blanchard a eu droit à une filiation assez juste : « Petit-neveu de
Léautaud »…
Comme je l'ai déjà formulé précédemment, ces années 1990-1992 sont empreintes aussi de nombreuses phases de découragement, tant par les soucis de santé ,à répétition, que par les refus des éditeurs…et la recherche de petits boulots alimentaires !
Toutefois « notre trublion » persiste, poursuit la rédaction de ces « Carnets », qui le maintiennent debout, en butte avec ce travail d'écriture, dont il ne peut se passer, qui lui offre un « destin », ce « destin » qu'il ne rêve que dans le travail avec les MOTS…, une respiration vitale !
Choix très réussi du titre, entre la consonance religieuse,et le double sens : exprimer des choses en catimini…Titre correspondant parfaitement au ton de ces « Carnets »…
Un ton jubilatoire, caustique, mordant… désabusé…polémique sur la Vie et ses congénères !! Une mauvaise foi…des antipathies aussi vives que ses enthousiasmes… Mauvaise foi parfois incroyable comme celle entretenue par certains de ses auteurs préférés :
Léautaud,
Jules Renard…
L'ensemble reste tonique et drôle… proclamant surtout une liberté de pensée et de parole…indéfectibles ! …
Il parle merveilleusement des textes qui le surprennent comme un écrit de Dagerman… envers lequel il exprime en très peu de lignes, un coup de coeur, le surprenant lui-même…Ses enthousiasmes deviennent « nôtres », tant ils sont communicatifs…
« -Les
Ennuis de noce de
Stig Dagerman. Je me suis trouvé nez à nez avec un genre d'écriture que je ne connaissais ni d'Eve ni d'Adam, et qui, sans crier gare, vous fait circuler pleins gaz dans la tête des personnages, de but en blanc. Sont-ce des façons, être ainsi embarqué sans savoir qui est qui ! Seulement, le temps que je fulmine et songe à prendre la tangente, c'était trop tard. Et ce fut une fameuse traversée. “(p. 109)