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José Ignacio Fernández (Illustrateur)
EAN : 9782359200003
64 pages
Alzabane (09/09/2009)
4.12/5   26 notes
Résumé :
Avec "Ils ne sont pas comme nous", c’est un livre choc et prenant que proposent ici Jean-Sébastien BLANCK (textes) et José Ignacio FERNANDEZ (illustrations). Conçue et réalisée comme un véritable « livre-film », cette nouvelle illustrée nous transporte au cœur de l’Allemagne, en 1936, dans un asile de fous, où les patients coulent une vie paisible…Ils ne se doutent pas qu’ils seront bientôt les victimes d’une des premières expériences de gazages au zyklon B par les ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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En mettant en exergue ces vers de "L'Homme qui rit" de Victor Hugo, le ton de ce petit conte cruel est donné. Si le rire est une thérapie pour désamorcer une situation préoccupante, il peut aussi être ironique, méprisant, méchant, sardonique, sarcastique. le rire se transforme, dès lors, en un rictus effroyable.

Juin 1938. Clinique Münstall. Il y a là Wolf qui compte toute la journée. Il compte, recompte et décompte. Cent fois, mille fois, il remet les compteurs à zéro dès qu'il a atteint son objectif chiffré. Il compte les pas, les arbres, les cachets, les mots. Tout ce qui passe à sa portée est inventorié, comptabilisé. C'est une obsession dont il ne peut se défaire. Wolf s'est noyé dans les nombres, son esprit est encombré d'unités, de quantités infinies, de séries, d'abstractions, de pairs et d'impairs, de divisibles et d'indivisibles. Son âme est définitivement engloutie, submergée. Seuls, importent les chiffres. Il y a aussi Reinhardt, celui qui passe son temps à chaparder la blouse du médecin. Il joue au docteur avec les autres patients. Il a besoin d'être quelqu'un d'autre que lui. Dès qu'il aperçoit un uniforme, il n'a qu'un désir, s'en emparer pour le porter. Et puis, il y a le journaliste, venu à la clinique pour réaliser un reportage. Il est venu avec sa petite valise et se demande bien pourquoi, vu qu'il n'est là que pour son travail. Il n'est pas malade, lui. Il est différent des autres. Les anormaux, ce sont eux. D'ailleurs, il refuse de prendre les médicaments que lui donnent Emma ou Anna, les infirmières. Lui veut juste rentrer chez lui.

Janvier 1939. Otto Kepffer, chargé de mission du nouveau gouvernement est chargé de faire appliquer la circulaire de son ministère et de regrouper les patients de la clinique Münstall dans un centre spécial plus adapté, dans le cadre d'un programme expérimental. Leur transfert doit se faire dans les meilleurs délais, avec méthode et organisation. Wolf, Reinhardt, le journaliste et tous les autres comprennent que quelque chose trame. Heureusement, le docteur Schmidt et Emma sont présents pour calmer les angoisses, pour endormir les peurs, pour tranquilliser, malgré leur tristesse apparente. Les soldats eux aussi comptent, impassibles et concentrés, occupés qu'ils sont par leur macabre besogne. de toute façon, ces individus sont la lie de la nouvelle société. Ils souillent la pureté de la race aryenne. Ce sont des êtres sans valeur.

Écrit sous la forme d'une fable cynique, "Ils ne sont pas comme nous" de Jean-Sébastien Blanck revient sur un épisode monstrueux de la 2e Guerre mondiale - qui n'a pas été avare d'événements abominables -, les expériences de gazage des malades mentaux. Cette expérimentation sur des êtres pudiquement qualifiés de différents allait ouvrir la voie, quelques années plus tard, au génocide d'autres sous-hommes - les Juifs, les Tziganes -, considérés comme tels par des individus se considérant très au-dessus de la moyenne. Saisissante allégorie sur la folie humaine, on perçoit que celle-ci ne se situe pas où on croit la trouver. La folie se trouve dans l'autre camp, celui de l'État qui a décrété l'éradication de personnes psychologiquement fragiles et qu'il aurait dû protéger, celui de la société dans sa quasi-totalité pour son silence obstiné valant un soutien tacite de cette politique infâme, celui des médecins et personnels soignants qui ont contribué à favoriser ce meurtre de masse par passivité. En 59 pages, le texte - servi par une écriture intelligente, nerveuse, au phrasé court et simple -, synthétise toute l'abomination de ce programme secret d'euthanasie des internés psychiatriques. Alternant courriers, dialogues, points de vue divers, l'auteur réussi à rendre l'atmosphère d'angoisse des patients, les non-dits du corps médical, les sentiments de gêne, de honte, de lâcheté de chacun. Conçu comme un scenario, le graphisme des photos renforce encore un peu plus cette sensation de malaise. Usant de méthodes de photomontage à la manière des anciens romans-photos de l'époque, on est impressionné par l'humanité et la normalité des fous, alors que les êtres soi-disant supérieurs apparaissent pervertis, défigurés par une idéologie qui les assimilent à la vraie folie. "Ils ne sont pas comme nous" de Jean-Sébastien Blanck ou comment raconter l'indicible de façon à la fois accessible et captivant. A mettre entre toutes les mains, sans hésitation.
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Cette nouvelle montre comment les malades internés dans un HP ont été les premiers cobayes du tristement célèbre gaz zyklon qui permis, au nom de l'"hygiène raciale" d'exterminer de manière systématique des handicapés, des juifs ou des tsiganes.

A travers es 20 séquences illustrées qui composen la nouvelle, on se pose différentes questions :
- les pathlogies des patients nécessitaient-elle déjà un enfermement ? Rien n'est mois sûr, tant ils ne semblaient pas dangereux mais plutôt bourrés de médocs.
- on voit bien que la mère du pricipal narrateur et le personnel soignant étaient loin d'être favorables à ce qui se profilait (mais n'a été nommé que dans les dernières pages) : comment ce système a pu être efficace au point que personne n'ose se révolter contre cette inhumanité ? Parce que là, ils ne pouvaient pas dire qu'ils ne savaient pas !

Comme dans un film, à partir de l'entrée en scène des militaires, on sent qu'il se trame quelquechose de pas net et on avance progressivement vers le drame final.

L'histoire et le scénario sont assez simples et on connait malheureusement tous la fin. Ce qui est intéressant, c'est cette manière naïve d'amener le sujet de l'intérieur. Les illustrations vont parfaiteent dans le sens de cette naïveté : on y voit des personnages hilares et sympas qui ne se doutent de rien. Les montages donnent une impression d'hypercéphalie grotesque. Tous les personnages sont illustrés de cette manière :
- les malades : imbéciles heureux qui ne se doutent de rien
- le peronnel soignant qui finalement a laissé faire de peur de subir le même sort que les malades
- les SS, sûrs de la légitimité de leurs actes : ils sont persuadés de rendre service aux malades et à leurs familles en les amenant vers la solution finale
- Himmler et ses sbires administratifs ils ont la satisfaction du devoir accompli.

L'histoire se passe entre juin 1938 et janvier 1940. Cest un contexe extraordinaire d'inhumanité et d'eugénisme. Mais qu'en est-il aujourd'hui ? Evidement, dans les pays occidentaux, on ne gaze plus les handicapés. Mais le manque d'attention et d'aide qui leur est apporté, à eux et à leurs familles, n'est-il pas le signe d'un eugénisme rampant ?

La société a peur, et a toujours eu peur, des gens "pas comme nous" (handicapés, étrangers, pauvres, subversifs, marginaux, vieux ...). L'enfermement, la relégation et l'éloignement loin des yeux nous semblent de bonnes solutions. Mais finalement, ce sont les mêmes germes inhumains qui ont conduit au pire il n'y a pas si longtemps.

Outre ses qualités littéraires et graphiques, cette nouvelle est une super piqure de rappel pour nous faire réfléchir au sens réel du "plus jamais ça" de 1945. Je suis très contente d'y avoir eu accès via Babélio, et j'en recommande chaudement la lecture à tous !


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J'ai été très surprise en découvrant ce petit livre, pas plus grand qu'un fasicule à la couverture pour le moins étonnante. L'illustration donne un aspect vieilli et les personnages représentés donnent le ton... En effet, j'ai d'abord feuilleté le livre et regardé les pages illustrées. Je dois reconnaître qu'elles m'ont vraiment mise mal à l'aise : il s'agit de montages avec en arrière plan de vraies photos anciennes sur lesquelles viennent se greffer d'étranges personnages. Leurs têtes donnent l'impression d'être démesurées par rapport à un corps qui ne semble pas assorti. Une drôle de sensation vraiment, à la vue de ces graphismes, je vous en laisse juges...

Et puis, en abordant le texte, on comprend car celui-ci met lui aussi mal à l'aise... La folie est reflétée dans le texte même, qui joue avec les points de vue des personnages, sous forme de dialogues qui donnent parfois la sensation que les personnages s'adressent directement au lecteur, témoin impuissant. D'ailleurs, tout est fait pour que nous perdions nos repères, plongés nous-mêmes au coeur de la folie. D'abord, il y a ce journaliste qui ne semble finalement pas si fou et qui lance ses supplications "Tu sais, j'attends que tu viennes me chercher et que tu me ramènes à la maison. Tu ne devrais plus tarder maintenant n'est-ce pas? Tu me l'as promis." Et là, on se prend à douter : et si finalement, cet homme était comme nous? Victime d'une machination? Et puis, il y a ces fous qui se prennent pour des médecins, et ces médecins qui sont sans doute les plus fous dans l'histoire : ils obéissent les yeux fermés aux ordres donnés par les SS. Des ordres qui montrent là encore la folie, la barbarie de l'état nazi. Ce livre s'appuie en effet sur des faits historiques : les nazis, pour préparer la solution finale, ont testé leurs premières chambres à gaz sur ces hommes. Des hommes qui selon eux, n'étaient pas dignes de leur race supérieure car "tarés"... Et même si on connait les ignominies qui ont été commises à cette époque sombre de l'histoire, c'est chaque fois, la même terreur et la même incompréhension. Un livre qui dérange donc, qui bouscule, mais qui ne peut laisser indifférent, ne serait-ce que par sa construction si particulière.

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1938-1939, près de Cologne, en Allemagne. Interné dans une clinique psychiatrique, un malade écrit à sa mère, et lui parle de ses nouveaux amis : il y a Wolf, qui compte toute la journée, et Rheinhardt, qui est fasciné par les tissus et qui sanglote comme un enfant quand on lui refuse le plaisir de porter la belle blouse blanche du directeur ; il y a aussi l'élégant Karl, joueur de poker… Un jour, des hommes en uniformes nazis font irruption dans la clinique : il est question de transférer les patients ailleurs. Wolf, Reinhardt, Karl et les autres ont-ils conscience du sort qui va leur être réservé, sur ordre d'Hitler ? Non, sans doute, car ils, ces « fous », ces « dégénérés », ne sont pas des humains, mais des bêtes, déclare un SS en éclatant de rire.

L'avis de Marion, 16 ans : Un bon livre bouleversant, qui fait frémir à l'idée des “fous” tués pendant la Seconde Guerre Mondiale, comme ceux dans l'histoire. Marquant.

L'avis de la rédaction : Un court récit, tout en délicatesse, qui vient nous rappeler que les malades mentaux ont été les premières victimes du nazisme et des chambres à gaz, lorsqu'en 1939 Hitler a décidé de les exterminer massivement, “par mesure d'hygiène”… le texte est illustré par des photomontages qui renforcent l'atmosphère surréaliste de l'histoire, puisqu'en définitive se pose la question : où est la folie véritable ?
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C'est un livre très curieux déjà par ses illustrations très décalées, faites de montages photo en noir et blanc, qui m'a fait penser à "Matin Brun" pour le traitement absurde d'un sujet de discrimination nazie.
Ici le public concerné est celui des malades mentaux, hospitalisés dans des "asiles" mais dont les responsables nazis veulent se débarrasser définitivement.
Le lecteur est un peu dérouté au départ en ne sachant pas toujours discerner qui est malade ("fou") et qui fait partie du personnel encadrant. Que signifie "comme nous" ? Quel est ce dénominateur commun qui nous distinguerait des soi-disant "dégénérés" ?
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
" - Vous croyez qu'ils ont peur ou qu'ils se doutent de quelque chose? demanda Schoënber.

L'autre SS qui avait fini de compter, éclata de rire en fermant bruyamment son registre.

- Ah ! Ah ! Pensez-vous mon colonel ! Ce sont des fous, ils sont comme des animaux. Ils ne comprennent rien, ils ne sentent rien... Ce sont des dégénérés.

- Oui, certainement ... fit Schoënber, pensif.

- Nous rendons service à leur famille... Vous savez, conclut l'officier comptable, ce ne sont pas des humains!

Le colonel SS observait, impassible, ces fantômes apeurés défiler devant lui comme du bétail. On commençait à entendre de plus en plus de pleurs et de grognements. Wolf était déjà loin devant. Il sanglotait : "Mon lapin! Mon lapin!"

- Oui, ce sont des fous, c'est vrai... dit Schoëner toujours songeur. Ils ne sont pas comme nous ! "
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Quatre et quatre font huit. Huit et huit qui font quinze ... Ah non ! Seize ! Ou dix-huit. Je ne sais plus. Ah ! Bonjour, monsieur ! Je m'appelle Wolf. Vous savez, on m'a emmené ici il y a très longtemps. Mais je me plais bien. On me laisse compter tranquillement. C'est important de compter, vous savez ... Alors ... Trois et trois font six, et six et six font ...
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- Vous croyez qu'ils ont peur, ou qu'ils se doutent de quelque chose ? Demanda Shoënber. L'autre SS, qui avait fini de compter, éclata de rire en fermant bruyamment son registre. - Ah ! Ah ! Pensez-vous, mon colonel ! Ce sont des fous. Ils sont comme des animaux. Ils ne comprennent rien, ils ne sentent rien ... Ce sont des dégénérés. - Oui, certainement ... fit Shoënber, pensif. - Nous rendons service à leur famille ... Vous savez, conclut l'officier comptable, ce ne sont pas des humains !
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- Bonjour ! Je suis Heinrich Himmler, chef suprême des SS. je suis chargé d'organiser l'élimination totale de toutes ces tares qui souillent notre magnifique race? Bientôt viendra l'heure des juifs, des communistes et des homosexuels. Mais pour l'instant, nous nous occupons de ces dégénérés.
- Pourquoi les éliminer ? On ne peut pas les soigner ?
- Non, ce sont des fous incurables. Vous savez, nous leur rendons service, à eux comme à leur famille et, bien sûr, à notre peuple, ils ne pourront jamais être comme nous. (p.57)
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Cette bande-annonce présente quelques images de "L'île de l'Homme volant", premier volume de la série de romans illustrés "Les Voyages des illustres Arlequin et Polichinelle" (à paraitre début 2022). Ceux-ci raconteront les incroyables aventures autour du monde, à la fin du XVIIIe siècles, de deux comédiens italiens à l'identité douteuse, "Arlequin" et "Polichinelle". Ces voyages - supposés authentiques - les auraient amenés à découvrir l'hémisphère australe, les Barbaresques, ou encore, les côtes de Zanzibar. Entre naufrages et voyages aériens ou sous-marins, ces deux héros n'en finiront plus de nous faire rêver à des mondes lointains et fantastiques. Ces romans s'inspirent directement des récits de voyages du siècle des Lumières, mais aussi des romans d'utopie (Le Voyage de Gulliver) mais aussi des romans d'anticipation du XIXème. Ils raviront les lecteurs à partir de 9 à 99 ans ! Au moins 5 volumes paraitront d'ici 2025, tous de Jean-Sébastien Blanck (textes et scénario) et Jonathan Bousmar (illustrations). le prochain volume, qui poursuit et achève l'aventure de "L'Île de L'Homme volant", sera intitulé "Le Trésor de Golkonda".
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