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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Immense claque. Il faut absolument lire ce roman malgré la noirceur du sujet: la pédophilie et l'inceste.
J'en sors exsangue, complètement sonnée et en même temps subjuguée par cette puissance et cette beauté de l'écriture, cette voix singulière.

Un texte fort, qui prend aux tripes, vous sort de votre zone de confort aux forceps tout en étant porté par une langue magnifique, soutenue, évocatrice.
La narratrice est journaliste. Elle est de ces femmes courageuses qui n'hésitent pas à « rôder dans les coins partout où l'humanité s'est mise en boule et personne d'autre ne voudrait mettre un pied dans l'abject ou en abattre les devantures ».
Elle accepte de partir dans une ville de Calabre afin d'enquêter sur une affaire de pédophilie et de consigner la parole d'une jeune adolescente abusée par un sexagénaire qui vient d'être relaxé sous prétexte qu'elle en était amoureuse…
Au cours de cette enquête elle exhume des souvenirs concernant d'autres victimes parfois très proches, certaines disparues, et témoignera à leur place.

L'auteure décortique le vice, le tord jusqu'à en extraire la boue visqueuse et le décrit avec réalisme. La littérature devient un lieu de déposition dont la narratrice symbolise la parole libérée.


Ses mots, minutieusement choisis, tranchants, n'épargnent pas le lecteur, ébaubi par cette réalité qu'il peine à affronter, ce monde à la dérive dont la folie affecte toutes les strates sociales.


Elle dénonce avec rage, brise le silence et « porte plainte » pour eux à coup de phrases chocs mettant à vif la chair et l'âme et malgré la rudesse de certains passages on ne lâche pas le texte.
Elle explore le désastre causé par l'indolence judiciaire, le silence, le consentement tacite de l'entourage souvent complice et la cristallisation du mal qui revient comme un boomerang lacérer l'affect de la victime, en modifier la personnalité et en fracturer durablement la structure.
Sophie Blandinières est la voix de tous ces enfants du traumatisme, stigmatisés à vie par un parent incestueux ou tout autre prédateur, et : « pour les raconter tous, elle livre un roman aussi brûlant qu'une déposition collective ».
Superbe.
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Dans son premier roman, Sophie Blandinières nous raconte l'incroyable annulation par une cour de cassation italienne, en 2014, de la condamnation, en 2011, d'un homme pour pédophilie à 5 ans de prison pour actes sexuels avec une mineure de moins de 14 ans, jugement pourtant confirmé en appel, parce que "le rapport amoureux" entre l'accusé de 60 ans et la fillette de 11 ans, avait été "sous-évalué" par la cour d'appel !

C'est en lisant dans la presse que la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) avait remis son rapport final, ce jour 17 novembre 2023, au secrétaire d'État chargée de l'enfance, que le passage dans le livre précité m'est revenu en mémoire et que je viens de relire avec horreur.

Ce qui m'a frappé, c'est que de nombreux aspects soulevés par Sophie Blandinières dans son roman en matière de protection dans ce domaine spécifique de nos petits et nos adolescents trouvent leur écho dans les conclusions et surtout les 82 recommandations du rapport, notamment en ce qui concerne la dimension judiciaire.

Je cite ci-après un extrait de l'article de Solène Cordier paru dans le Monde d'aujourd'hui, qui illustre cette lugubre réalité :

"Dans son état des lieux, la commission se penche longuement sur le traitement judiciaire des violences sexuelles sur mineurs, manifestement défaillant, si l'on compare l'aspect massif de ces violences et les condamnations qu'elles entraînent. Les classements sans suite sont légion ; seule une plainte sur six pour viol ou agression sexuelle sur mineur aboutit à la condamnation de l'agresseur et une sur dix en cas d'inceste ; 3 % des viols et des agressions sexuelles commis chaque année sur des enfants font l'objet d'une condamnation des agresseurs ; 1 % seulement des viols et des agressions sexuelles incestueuses commis chaque année sur des enfants font l'objet d'une condamnation."

J'hésite à recommander la lecture de ce roman relativement court (122 pages en version originale de 2019 chez Flammarion), parce qu'il est à cause du sujet un des plus durs qu'il m'est arrivé à lire.
En raison de l'appel admirable et courageux de l'auteure en vue de la protection de nos enfants contre viols, violences et abus, ainsi que la qualité littéraire exceptionnelle de son écriture, ce livre mérite cependant largement 5 étoiles.

Sophie Blandinières, que je connaissais comme "ghostwriter" (prête-plume) de la biographie de Patricia Kaas "L'Ombre de ma voix", que j'ai commentée ici le 28 octobre dernier, m'a en effet favorablement impressionné par la richesse stylistique de son propre roman. Rien d'étonnant qu'il ait reçu le Prix Françoise Sagan en 2019.
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Livre dur, qui dérange et révolte et cela d'autant plus qu'il est très bien "e(t) cri (t)"
La narratrice est une journaliste qui se rend en Calabre pour couvrir un événement peu glorieux. La sortie de prison de P, condamné pour pédophilie. Mais la jeune victime de onze ans à l'époque des faits, témoigne en sa faveur pour le faire liberer, elle était "consentante", amoureuse.
La journaliste se remémore et nous fait pas également d'autres cas de sa propre famille, de son entourage et des dégâts que cela entraînent inévitablement sur la victime ou sur l'entourage.
"Le grand n'avait rien pu faire pour sa petite soeur, alors après il n'avait rien pu faire pour lui non plus."
Ce livre est un condensé de drames mais aussi peut-être un appel à la vigilance, à la responsabilité. Aucun milieu n'est préservé, et il n'est pas concevable de fermer ne serait-ce qu'un oeil une seconde.
Livre essentiel.


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Bouleversant! Je ne suis pas la seule à le dire et je ne vois pas comment le dire autrement.
Je suis toujours admirative des auteurs qui traite de sujets difficiles sans tomber dans le pathos où le reportage documentaire.
Avec un titre qui montre d'emblée une certaine impuissance à agir dans le secret des familles, "Le sort tomba sur le plus jeune" est le premier roman de Sophie Blandinières.
La narratrice comme l'auteure est journaliste. Elle va devoir se rendre en Italie, à Catanzano, en Calabre. Elle doit rédiger un article suite à l'annulation de la condamnation d'un homme de 60 ans jugé pour pédophilie. La petite fille qu'il a abusée avait 11 ans au moment des faits. Aujourd'hui, à 16 ans, elle a témoigné pour le faire libérer affirmant qu'elle était amoureuse de l'accusé. Pourtant ni elle, ni sa mère qui a dénoncé à la justice ce que cet homme faisait à sa fille, ne parlerons. La journaliste se trouvera seule face aux silences et aux non-dits.
Elle va donc écrire pour témoigner de l'horreur des corps d'enfants meurtris que lui raconte des femmes proches d'elle ou rencontrées par hasard.
Il y a surtout sa cousine Hannah, violée par son grand-père, son père et son frère. Elle restera proche d'elle, bouleversée par ce qui a pu se passer au sein de sa propre famille. Il y a aussi son amie Jeanne et bien d'autres encore.
Sophie Blandinières montre très bien comment les situations s'installent, dans tous les milieux sociaux, puisque le secret domine. Personne ne voit ou ne veut voir et comme on apprend l'obéissance aux enfants, leur rébellion semble impossible. Ces êtres violentés vont devoir vivre avec le poids des atrocités subies ou mourir.
Alors ce livre même court est important car il dit les choses.
Comme dans les romans de Christine Angot les propos dérangent, mais l'autofiction est un bon support pour parler de la pédophilie et de l'inceste.
Je regrette juste l'impuissance que l'on ressent face aux prédateurs qui détruisent des vies. Mais les mots sont difficiles à trouver face à de telles situations.

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Témoignage sur la pédophilie, le viol, l'inceste.
Un ouvrage à mettre dans les mains des juges, qui parfois, même souvent, sont laxistes face à cette ignominie.
L'affaire principale, c'est cet homme la cinquantaine qui a été avec une fille de 11 ans et dont la justice à déclaré la jeune consentante, il y a eu récemment en France la même décision de justice cette fois un homme de 28 ans et une fille de 11 ans.
Je suis tombé sur ce passage, un journaliste explique à Sophie Blandinières :
"Les cas de pédophilie sont presque à l'ordre du jour [...] quand la Cour de cassation a pris cette décision controversée [...] les gens étaient en colère contre le protagoniste masculin de l'affaire et contre le système judiciaire. Je crois qu'il faut chercher les raisons de ce phénomène dans le climat libertaire des années 70, ce n'en est que l'héritage, cette permissivité, cette évolution des mœurs.."
Le langage qu'utilise l'auteur est par moments assez cru, mais nécessaire, peut-être pour faire bouger les foules faces à tous les non-dits par peur, par honte...Les témoignages sont douloureux à lire.
L'on remarque aussi qu'il y a beaucoup d'affaires de ce genre.
L'histoire se déroule en Calabre, Italie.
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Bien triste sujet pour ce roman. L'auteure fait un passage à Catanzaro au sud de l'Italie, pour faire son enquête sur la pédophilie.
Très vite elle se rendra compte que les gens se taisent, ne raconterons rien, et que la vie continuera comme si de rien était. Un livre dont on en sort effaré, troublé par les faits racontés.
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Le poids du silence

« Le sort tomba sur le plus jeune », le premier roman de Sophie Blandinières aborde le thème de l'enfance violentée, sous la forme d'un docu-fiction au réalisme glaçant. La résignation et tout ce que le destin a d'inéluctable affleurent un texte à la noirceur implacable où le lecteur est précipité dans les tréfonds les plus sombres de l'âme humaine. C'est d'ailleurs sans ambiguïté qu'est annoncé en quatrième de couverture : « Je suis là pour nager, pour couler, pour sortir de l'eau casquée et en colère… Je suis venue porter plainte. » Et pendant 120 pages qui se lisent d'un souffle, l'écriture claque en effet comme un uppercut.

L'histoire :

La Cour de cassation italienne a annulé la condamnation d'un homme jugé pour pédophilie, estimant que la cour d'appel avait sous-évalué le « rapport amoureux » entre l'accusé âgé de soixante ans et sa victime, onze ans à l'époque des faits. La narratrice, qui est aussi journaliste, accepte d'aller enquêter à Cantazaro, en Calabre, d'où sont originaires les protagonistes de l'affaire.
Dire que couvrir un événement pareil ne déchaîne pas l'enthousiasme relève de l'euphémisme et elle seule a la témérité d'affronter cette mission.

Le récit démarre avec une conférence de rédaction où éclate le cynisme du directeur Sergio, qui entend consacrer sa une à ce fait divers. Un fait de société plutôt ; pour lui, en effet, l'aubaine est trop belle : à l'heure où n'importe qui papouille à tout va : « il était urgent de cesser de tout confondre et d'entreprendre de censurer l'intime, militait-il, bientôt on ne pourrait plus mettre ses mains ni sa langue nulle part... » Et somme toute, peut-être que seules certaines âmes sont aptes à discerner les couleurs des jours fastes, la forte lumière des matins les plus bleus. Alors oui, il est urgent que la jeune « victime » livre sa version des faits. Et de renvoyer chacun à ses failles.

Mon avis :

Il est bien trop facile de parler de voyages, de changements, de courage, de s'installer ailleurs et peut-être d'y vivre heureux. Comment échapper à la promiscuité, la misère, la saleté, la charge d'une fratrie trop nombreuse. Pour émerger du cloaque, il est alors tentant de jouer de ses charmes de lolita ; terme si galvaudé que, dans ce contexte, on traduirait volontiers par « petite salope ». Au point aussi de voir, en un homme de quarante ans son aîné, alors qu'on a soi-même tout juste onze ans, un bienfaiteur dont on pourrait tomber amoureuse. D'autant que l'homme en question, qu'on désigne ici par la seule lettre « P. » n'est autre qu'un brave fonctionnaire des services sociaux, employé modèle, qui se fond si bien dans la grisaille des jours qu'il « tient davantage du bon bougre que de la brute sanguinaire ». Ce serait donc le parti romanesque choisi par la « justice » pour absoudre l'impensable. Et ce sont aussi les idées qu'on cherche à mettre dans la tête de cette fillette qui, environnée par l'azur d'un jour particulier, s'abandonnera corps et âme à cet « ami ». Ce ne sont bien évidemment là que des suppositions, car le pourquoi du comment de ce « rapport amoureux » on n'en saura jamais rien.

La narratrice nous transporte en Italie, dans ce Sud aride, sur une terre cuite et recuite par le soleil, où, quand on n'est pas doué pour raconter quoi que ce soit, la tradition séculaire, aidée en cela par la criminalité organisée et la pauvreté endémique, oblige à se taire. Et en effet, il n'y a aucune raison pour que l'omerta ne sévisse pas ici une fois de plus.
C'est pourquoi, à défaut de réponses, puisque personne ne parlera, on verra défiler l'histoire d'autres enfants. Le livre est ainsi dédié à Hannah, Adèle, Cristina, Carlo, Marthe, Claudia, Geoffroy, Lucie et Tinou dont on apprend que l'enfance a été volée, sacrifiée, mise en pièces. En déroulant leur vécu, ainsi que son propre passé, la narratrice libère la parole des sans-voix et, à sa façon, crie tous ces prénoms à la face du monde.
Des mots durs, parfois crus mais éloquents, viennent dénoncer une maltraitance banalisée, qui s'infiltre insidieusement dans une société hypocrite, où on regarde ailleurs et où les pervers ne sont pas les seuls en cause. Les proches qui savent tout et font mine de rien des années durant pour préserver un confortable statu quo partagent la même responsabilité-culpabilité.
Quel que soit le milieu, on trouve partout des gens qui vivent là où jamais rien ne change et qui n'ont pas l'air de comprendre qu'ils meurent à petit feu sans s'en apercevoir, des individus « qui sont morts mais qui ne s'en souviennent plus ». Au fil d'une galerie d'une horreur – parfois insoutenable – on exhibe des petits corps souillés par l'abject, comme autant de cerveaux fêlés en devenir. Certains, une fois adultes, y laisseront la vie. On sort de sa lecture désarmé, assommé, mal à l'aise, et on comprend parfaitement la portée de ce message : « Je suis venue empêcher que des enfants soient inhumés avec les faits sans clairons. On leur doit bien une oraison funèbre. »
Lien : http://scambiculturali.over-..
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Une journaliste part en Calabre couvrir la relaxe d'un pédophile de 60 ans, au motif du prétendu consentement de sa victime de 11 ans, prétendument amoureuse de lui. Elle se désigne volontaire pour la mission, elle est journaliste de guerre et n'a pas d'enfant. "Je n'aurais pas pris cette responsabilité, de jeter des petits dans la gueule du monde, en conscience, je n'aurais pas eu la vanité de me reproduire, je n'aurais pas su en faire des adultes civilisés, quoi leur dire qui ne soit pas terrifiant, leur chanter des berceuses sans que ma voix tremble, leur raconter des histoires qui ne soient pas décevantes, je n'aurais pas pu me revoir petite, être renvoyée aux affres de mon enfance, au jardin des supplices, là où les grands découvrent, à la fin, les cachettes, là où l'abandon commence et le pire s'est produit, je n'aurais pas voulu me rappeler. " Elle part pour entendre mais personne ne parle, elle n'a que le silence à écouter, alors elle convoque des souvenirs. Les siens, ceux d'Hannah, sa cousine, ceux d'Adèle, son amie, ceux de Claudia, ceux d'enfants terrorisés par des adultes bourreaux et abandonnés par ceux qui détournent le regard.
Ce court roman est dur, mais pas plus dur qu'une vie où il est possible de broyer l'innocence.
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