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Marthe Metzger (Traducteur)
EAN : 9782070393091
158 pages
Gallimard (23/06/1995)
3.81/5   44 notes
Résumé :
Personne ne pourra ouvrir ce merveilleux livre sans céder du début à la fin au charme impétueux, tendre et plein d'humour, de l'auteur. Il ne semble guère possible, au cours des quatre récits brefs et limpides composant l'ouvrage, de manifester autant de féminité authentique jointe à une indomptable vaillance virile. Et c'est pourtant l'évidence : Karen Blixen tue un lion comme une femme ordinaire se rend au marché.

Dans une ferme située sur les hauts... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Karen Blixen veut raviver, réanimer, en quelque sorte revisiter, trente ans après son retour au Danemark, ses souvenirs du Kenya, écrits dans « la ferme africaine ».
Le premier souvenir prégnant est celui de Farah, noble Somali, son bras droit, conscient de son devoir de veiller sur elle, lui interdisant aussi de se mettre en danger ou d'entrer dans des dépenses inutiles. Farah l'attendait à Aden, pendant 18 ans il a connu, dit-elle « tous mes projets et toutes mes pensées. Je lui parlais de mes espérances et de mes déceptions. »

Avec une tendresse infinie, avec intelligence, dans son deuxième livre sur l'Afrique, Karen Blixen rend hommage, en premier, à ce gentleman musulman aux idées aristocratiques, majordome hautement respectable, plus soucieux de son bon renom et de son honneur à elle que de son bien-être.

Lorsque Karen fut obligée de quitter le Kenya, il l'accompagna jusqu'à Mombassa ; voyant sa silhouette s'éloigner de plus en plus, « j'eus l'impression, dit elle, de perdre une partie de moi même, comme si, par exemple, on me coupait lentement la main droite de sorte qu'il me serait impossible dorénavant de monter un cheval, de manier un fusil ou d'écrire autrement que de la main gauche. »
Peut-on écrire de façon plus délicate de l'estime que l'on a et que Karen gardera toute sa vie pour Farah, ainsi que la douleur de l'éloignement définitif ?

Elle a tout perdu bien sûr, quand elle a dû retourner d'où elle venait, parmi les siens qui ne voulaient pas d'elle. Elle a perdu, alors, elle écrit, et elle se souvient : les personnes, en premier ; les chasses, lorsqu'elle se trouve face à face avec un fauve, en compagnie de Denys Finch Hatton , en particulier la chasse aux lions.
Elle soigne , aussi, comme elle peut, et raconte ses erreurs, tout en se demandant si ses « clients « ne préféraient pas au fond de leur coeur un médecin qui n'était pas infaillible ». et qui lui pardonnent donc ses faux pas. Elle comprend par là même le rejet de « ses gens » comme elle dit, qui pensent que la médecine occidentale et les hôpitaux surtout, sont destinés à faire mourir, en remplaçant, sans qu'ils l'aient demandé, et sans leur en expliquer le pourquoi, les remèdes traditionnels à base de plantes et de prières, en famille, naturellement.
Elle reçoit, un jour, un « grand geste », de la part de beaucoup de Kikuyus , femmes, enfants, vieillards : une sorte d'acceptation collective pour ce qu'elle essayait de faire, les soigner : ils viennent en foule avec des maux bénins, se faire soigner par elle.
Ils la félicitent aussi de s'être bien habillée le jour de la réception du Prince de Galles, futur roi d'Angleterre : elle leur a fait honneur, ils avaient peur qu'elle garde sa vieille culotte de cheval remplie de boue et ses bottes éculées.
Elle rappelle le souvenir d'Ali Abdullahi, dont elle n'avait pas parlé dans sa « Ferme africaine »et la généalogie qui fait qu'une veuve épouse le frère puiné.
Et puis Kamante, l'intelligent petit, ayant adhéré au parti Mau Mau, qui, pour expliquer ce changement à un autre danois venu prendre de ses nouvelles :
-« Voyez donc ce que m'écrit Mensahib : « Mon bon et fidèle serviteur Kamante » puis il replia la lettre, la remit en poche et dit : « C'est bien ce que je suis ».

Douce tendresse, de cette grande dame qui a essayé de comprendre la civilisation où elle vivait, ses traditions, ses coutumes, et toujours les comparant à son érudition nordique. Lorsqu'elle apprend la mort de Farah, elle refuse d'y croire, « pourquoi s'en était-il allé ? Lui qui avait toujours été le premier à répondre à mon appel » puis repense qu'il l'a toujours devancée, pour dresser sa tente au lieu du rendez-vous.
LC Thématique octobre 2021 : Cap au Nord
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Karen Blixen, dans Ombres sur la prairie évoque les personnes et les moments qu'elle a connus quand elle était à la tête de sa ferme africaine, avec un premier témoignage en forme d'hommage à Farah son homme de confiance, somali musulman, celui qui l'accueille quand elle arrive pour la première fois en Afrique et celui qui la verra partir définitivement en Europe. Elle évoque également des moments comme la chasse et les safaris qu'elle pratique et auxquels elle renonce (sauf la chasse au lion) ainsi que sa fonction de "médecin", consultée régulièrement par la population environnante. le dernier évoque son retour et les nouvelles qu'elle obtient de temps en temps de ses amis africains qui maintiennent son souvenir vivant.

A la lecture d'Ombres sur la prairie, c'est une femme à la fois forte et sensible qui nous est révélée, une femme qui à force d'humilité et de patience, s'adapte aux populations somali, kikuyu, masaïs, des groupes dont il faut souvent ménager les rites et traditions pour obtenir leur respect. On sent à chaque page l'amour et le bonheur qu'elle décrit et même l'honneur qu'elle ressent d'avoir connu des personnes d'exception, quelque soit leur statut social, leur religion, coutumes ou nationalité. On peut ressentir un peu de colonialisme mais il faut replacer ces récits dans leur contexte et l'attitude respectueuse dont Karen Blixen fait preuve pendant sa vie au Kenya montre qu'elle a toujours placé sur un pied d'égalité le personnel avec lequel elle travaillait et ses amis européens.
Une belle leçon de respect et d'humanité.
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Denys Finch Hatton, le Concerto pour clarinette, le survol de l'Afrique...
Tous les fans d'Out of Africa connaissent ces images ainsi que celle de Karen Blixen, incarnée par Meryl Streep dans son plus beau rôle (enfin, d'après moi^^), le destin exceptionnel de Karen Blixen, née au Danemark en 1885. Rejetant un mode de vie bourgeois et linéaire, elle part s'installer en Afrique avec le baron Bror Blixen où elle reste de 1914 à 1931. Elle est obligée de quitter sa ferme africaine après avoir fait faillite et retourne au Danemark, mais elle reste fidèle à cette nation où elle aurait « désiré laisser ses os ».
Si la biographie de Jean-Noël Liaut, Karen Blixen m'a montrée que sa relation avec Denys était largement moins idyllique que dans le film, elle m'a donné envie de me plonger dans son oeuvre. Je lirai donc d'ici peu Les Contes d'hiver et pourquoi pas Les Contes gothiques, dont le titre m'attire beaucoup...
La plus grande partie de la vie de Karen Blixen en Afrique est racontée dans La Ferme africaine et dans les Lettres qu'elle a échangées avec ses amis et sa famille ; Ombres sur la prairie constitue un prolongement de ces oeuvres et régalera ceux qui rêvent de retrouver cet univers. Composé de quatre récits, ce recueil est un tissu de souvenirs, d'émotions, de réflexions anthropologiques, et d'érudition, liés par un fil parfois ténu mais toujours présent. Karen Blixen raconte les liens de confiance tissés avec ses domestiques et les tribus vivant sur « ses » terres, les échanges, les difficultés mais aussi les moments émouvants qu'ils ont pu partager et réussit à retrouver leurs traces vingt ans après son départ d'Afrique.


Si certaines remarques peuvent surprendre le lecteur contemporain, par exemple sur les comparaisons qu'elle établit entre les différents peuples qu'elle rencontre et sa propre culture, il faut situer l'oeuvre dans un contexte colonial, à une époque où les européens s'installaient en Afrique en conquérants, pour y faire fortune, parfois aux dépens de la population. Ce qui n'est finalement pas le cas de Karen Blixen qui s'est sincèrement intéressée au sort des peuples vivant sur ses terres, à leur santé, leurs coutumes, leur manière d'envisager le monde. En témoigne la première nouvelle, Ombres sur la prairie, où elle rend hommage à son domestique Farah et où on la voit soigner avec dévouement ses « gens ».


Ma préférence va Barua a soldani, dans lequel elle raconte comment une lettre écrite de la main du roi du Danemark devient une sorte de talisman pour les gens qui vivent sur ses terres et permet d'apaiser les souffrances les plus terribles par le simple contact. Un mélange de réalisme, de réflexion et de poésie dans lequel elle révèle une grande humanité et beaucoup de sang-froid.
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Si vous n'avez pas lu La Ferme africaine vous avez certainement vu le film ! Rarement l'adaptation d'un livre fut aussi réussie au point de ne pouvoir à nouveau lire Karen Blixen sans avoir le visage de Meryl Streep en filigrane.
Je vous parlerai un jour ou l'autre de sa correspondance mais aujourd'hui j'avais envie de retrouvailles avec un livre court moins connu que la Ferme Africaine.

Quatre petits récits placé dès les premières lignes sous la protection de Farah « le gardien de mon univers africain » dit Karen Blixen.
Ces Ombres sur la prairie complètent très heureusement la magnifique Ferme Africaine et éclairent certains aspects de la vie de Karen Blixen qu'elle a passé sous silence dans son roman.
Elles revient sur les tribus qui peuplaient alors le Kenya, leurs pratiques ancestrales, sur ses lectures pour comprendre la loi musulmane et la confiance que lui font les africains qui l'entourent.
Elle revient longuement sur Farah à qui elle est attachée de façon très forte et dont elle dit qu'il est « le plus authentique gentleman que j'aie connu. » qui dirigeait la maison et conduisait la vieille Ford « comme si elle eût été la Rolls Royce des Rothschild » elle donne des nouvelles de Juma ou de Kamante « le grand solitaire » et sa fameuse « sauce Cumberland » et prouve ainsi que son attachement ne s'est pas interrompu avec son retour au Danemark.
Elle revient sur certains épisodes évoqués dans la Ferme Africaine, chasse aux lions, chasse aux éléphants. Et vous verrez le rôle que peut jouer une « lettre du roi ».
Karen Blixen revient sur les soins qu'elle dispensât tout au long de son séjour « je finis par savoir réduire la fracture d'un bras ou d'une cheville » ou ses tentatives vaines pour soigner les morsures de serpent.
Les récits ne sont pas exempts de parfum colonialiste mais rien qui n'entache la sincérité de Karen Blixen dans l'attachement qu'elle avait pour tous les africains qui ont gravité autour d'elle, qui ont travaillé sur la ferme et l'on sent un grand dévouement de part et d'autre.
Elle revient sur les derniers temps passés en Afrique, le retour au Danemark, les lettres échangées pendant des années avec les uns et les autres mais inexorablement l'Afrique s'éloigne « La Croix du sud était restée suspendue au ciel pendant quelque temps, telle une trace lumineuse de ce monde englouti » et finit par disparaître.

Un petit livre que j'ai eu beaucoup de plaisir à relire.
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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karen Blixen revient, de nombreuses années après son retour au Danemark, sur la longue période de sa vie passée au Kenya. En quelque sorte, ce livre est un complément au très beau récit de "La ferme africaine". le lecteur y retrouve l'attachement que cette femme d'origine danoise éprouvait pour "ses gens", un terme qui n'avait rien de péjoratif dans son esprit, et notamment pour son fidèle serviteur et ami Farah; il y retrouve l'évocation des paysages et de la faune africaine peuplée de grands fauves; il y perçoit tout l'amour pour un pays que l'auteure n'avait jamais vraiment quitté par la pensée.
Ce récit est empreint d'une poignante nostalgie.
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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
-" Le prince (de Galles) vient à la ferme vendredi pour le dîner et voir danser les gens. Et tu sais que l'on ne danse pas à cette époque de l'année".
Les Ngoma étaient des danses rituelles rattachées à la fête de la moisson et tous les colons savaient qu'en cette matière les indigènes préfèrent mourir que d'enfreindre une loi sacrée en vigueur depuis mille ans.
La nouvelle bouleversa Farah autant qu'elle m'avait bouleversée moi-même. Pendant quelques instants il resta muet et comme pétrifié. Enfin il dit :
- Tu as raison, Memsahib, et à mon avis il n'y a qu'une chose à faire. Je vais prendre l'auto et ferai la tournée des grands chefs. Je leur parlerai et leur dirai qu'il faut qu'ils viennent à ton secours, et je leur rappellerai que c'est toi qui est venue à leur secours il y a trois mois.
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Nous autres, Blancs, lorsque nous entrons en contact avec la population de l’ancien continent, nous oublions qu’elle a un passé que nous ignorons ; nous refusons de reconnaître qu’elle a existé avant notre rencontre.
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Sans m'en rendre bien compte, je savais déjà sur cette pente herbeuse que j'avais atteint le plus haut sommet auquel il me serait jamais donné de parvenir sur cette terre. Créature minuscule dans cet alambic formidable de l'air, de la terre et des herbes mais cependant ne faisant qu'un avec eux. Me doutais-je alors que j'avais atteint aussi le sommet de ma propre vie ? L'espace autour de moi était empreint d'une sorte de solennité douloureuse.
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Nous autres, Blancs, lorsque nous entrons en contact avec la population de l'ancien continent, nous oublions qu'elle a un passé que nous ignorons ; nous refusons de reconnaître qu'elle a existé avant notre rencontre.
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Les Masais étaient mes voisins. Lorsque je traversais le fleuve qui formait la limite de mes terres je me trouvais dans leur réserve.Mais les Masais n'y étaient pas toujours. Ils erraient avec leurs grands troupeaux d'un bout à l'autre de la savane, vaste à peu près comme l'Irlande, se guidant d'après les chutes de pluies et la poussée de l'herbe.
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Videos de Karen Blixen (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Karen Blixen
À travers les différents ouvrages que l'auteur a écrit pendant et après ses voyages à travers le monde, la poésie a pris une place importante. Mais pas que ! Sylvain Tesson est venu sur le plateau de la grande librairie avec les livres ont fait de lui l'écrivain qu'il est aujourd'hui, au-delàs de ses voyages. "Ce sont les livres que je consulte tout le temps. Je les lis, je les relis et je les annote" raconte-il à François Busnel. Parmi eux, "Entretiens" de Julien Gracq, un professeur de géographie, "Sur les falaises de marbres" d'Ernst Jünger ou encore, "La Ferme africaine" de Karen Blixen. 
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
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