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Critique de TerrainsVagues



C'est beau une ville la nuit, quand l'idée du bonheur se retranche derrière les portes closes, les volets tirés, les murs dressés.
Le crépuscule, lentement, se peuple des ombres expulsées des forteresses de l'amour.
Et tombent les masques de la bienséance, les âmes peuvent se mettre à nu.
C'est beau une ville la nuit, quand l'instant paisible allume ses étoiles, quand vu du ciel Paris se fait grande ourse.
C'est le moment où les spectres d'hier renaissent de leurs cendres. La douleur se répand à travers les bars encore ouverts comme pour prendre un énième dernier vers dans un instant de poésie inattendu.
C'est beau une ville la nuit, quand la vie sommeille, quand l'agitation se met en pause, que les minutes peuvent enfin prendre leur rythme sans être pressées par des quotidiens d'horaires de gare.
Les passagers clandestins de l'amour, de l'en vie, se transforment en junkies. Des frères de sans, des petites soeurs des pauvres. Sister mort fine pour seule héroïne. Comme une fleur de pavot à l'eau de rose, un bouquet d'amour en intra veineuse.
C'est beau une ville la nuit, quand la jungle de la civilisation n'est plus qu'un mauvais rêve, que l'égocentrisme n'est plus qu'une photo jaunie, le futile, un souvenir enfoui.
L'obscurité fait les blessures anonymes, elles parlent un même langage, elles se pansent les unes les autres en attendant l'aube à coups d'alcool, à couts de coeur. Amis d'ivresses. Frères d'armes, celles qu'ils ont déposé aux pieds de l'abandon. Des cris d'alarme à larme à l'oeil, l'an nuit se charge d'émotions.
C'est beau une ville la nuit, quand les appâts rances n'ont plus d'importance, que les jugements croupissent aux oubliettes, que l'homme peut être.
L'heure est aux gens de rien, aux déchus de l'amour, de la reconnaissance, de la considération. Des trois à la foi.
Reste des espoirs s'évanouissant dans des volutes de fumée allumant l'aube.
C'est beau une ville la nuit, quand Richard Bohringer du plus profond de sa poésie nous conte ses dérives, ses plaies, ses balafres, ses lâchetés, son courage, son amour.
C'est beau quand les jours et les nuits de Bohringer se confondent dans un clair obscur qui fait perdre pied.
C'est beau quand il rend hommage à son pote, son ami, Roland Blanche, cet acteur qui n'a jamais été reconnu comme il aurait dû l'être. Une véritable déclaration.
C'est beau Bohringer qui parle, qui écrit, à poil, sans filtre.
En fait, c'est beau la vie.
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