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Critique de Woland


Woland
14 septembre 2015
ISBN : ?

C'est le roman de Boileau-Narcejac que, plus jeune, j'avais le moins aimé . Et la chose n'avait aucun rapport avec le "Vertigo" d'Hitchcock - bien que ce ne soit pas, là non plus, le film du "Maître" que je préfère - les "Sueurs Froides" de l'Anglais n'ayant pas grand chose à voir avec celles imaginées par Pierre Boileau et Thomas Narcejac sous le titre d'ailleurs originel de "D'Entre les Morts."

Construit en deux parties, le roman débute à l'aube de l'effondrement des troupes françaises sous la poussée allemande, à Paris ("la ligne Maginot est infranchissable = plus de frontières et nous vivrons tous heureux !" (je me demande pourquoi j'écris ça, tiens, j'ai dû faire trop de posts politiques ce matin ... ;o) ), puis, passé le grand écart de l'Occupation, reprend son fil conducteur à la Libération, quand les médecins sont contraints de prescrire des "rations" supplémentaires à ceux de leurs patients qui, comme M° Flavières, lequel a passé ces quatre ans à Dakar, en est revenu complètement déboussolé, notamment sur le plan hépatique.

Ayant quitté la police parce que, souffrant de vertige, il n'avait pu venir en aide à un collègue avec lequel il poursuivait un malfrat sur un toit parisien et ayant ainsi provoqué, malgré lui, la chute et la mort dudit collègue, Flavières s'est reconverti dans le droit. Un jour, un ami avec qui, justement, quinze ans plus tôt, il avait fait son Droit,, Gévigne, gros homme rond, sympathique, qui a fait une belle fortune dans les affaires et qui, pourtant, fait parfois montre d'une timidité qui ne convient guère à ses activités, vient lui demander d'enquêter sur sa femme, Madeleine. Non qu'il la soupçonne de le tromper, ce serait trop simple. En fait, pour résumer une histoire que Flavières a bien du mal à arracher à son visiteur, celui-ci se demande si Madeleine n'est pas en train de devenir folle : elle change d'humeur, évoque tout le temps l'une de ses aïeules, Pauline Lagerlac, à qui elle semble de plus en plus s'identifier et qui, malheureusement, n'a trouvé rien de mieux que de terminer sa vie encore jeune, dans le suicide.

D'abord tenté de refuser ce dossier pour le moins étrange, Flavières se laisse tenter en définitive. Il faut dire que, pratiquement à peine a-t-il posé les yeux sur Madeleine qu'il en tombe amoureux. Il commence sa filature, ce qui lui permet de constater d'ailleurs que Gévigne n'a pas menti. Sous ses yeux mêmes, la jeune femme se jette d'un pont et ne doit la vie qu'à l'intervention de l'avocat qui plonge immédiatement pour la ramener. D'humeur changeante mais pas capricieuse, comme on pourrait le penser, Madeleine reste une énigme et elle le restera jusqu'à sa mort, qui s'accomplit là encore sous les yeux de Flavières : ils étaient partis se promener à la campagne, elle avait voulu visiter une église puis grimper au clocher et hop ! sans que, cette fois-ci, son compagnon puisse intervenir, elle se jette dans le vide.

Fin de la première partie. On comprend que Flavières ait préféré s'exiler aux colonies.

Quand il revient, il n'a malheureusement pas oublié son amour passé. Oh ! il a tout essayé pour ça mais rien n'a marché . Toujours obsédé, il apprend que Gévigne est mort dans une fusillade - avec les affaires qu'il faisait, c'était un risque qu'il courait - bref, on pourrait dire que tout le passé est mort. Jusqu'au jour où il croise, dans l'hôtel où il est descendu, une femme qui, si l'on excepte la couleur de ses cheveux et un léger empâtement peut-être du visage, est l'exact sosie de Madeleine. Elle vit avec un Libanais particulièrement riche qui l'entretient, bien entendu et elle affirme mordicus s'appeler Renée Sourange.

Toute la seconde partie repose à la fois sur l'affrontement entre deux volontés et aussi, un fois de plus, sur le thème du double, du qui-est-qui - ou qui-était-qui - un thème cher au tandem policier français. Ca se termine évidemment très, très mal, tant pour Flavières que pour Renée/Madeleine. Mais, pour moi en tous cas, l'ambiance fait défaut. Surtout si on compare "D'Entre les Morts" aux "Louves" par exemple ou même à "Maléfices".

En effet, jusqu'ici, on avait toujours eu affaire, chez Boileau-Narcejac, à des hommes "faibles". Mais Flavières, lui, a un caractère de meneur. Aussi comprend-on mal, voire pas du tout, son obsession primitive pour Madeleine. Elle est belle, soit, elle a tout d'une héroïne romantique, elle est probablement un peu détraquée puisqu'elle est capable de passer deux heures toute seule dans une chambre d'hôtel qu'elle loue sous le nom de son aïeule Pauline mais ...

... c'est un ectoplasme, j'ai beau cherché, je ne trouve pas d'autre mot pour la définir. Quant à Renée Sourange, son apparence un tant soit peu plus "ronde" lui conférant sans doute aux yeux du lecteur un peu plus d'existence, l'assurance dont elle fait preuve aussi, elle passe un peu mieux mais son repli inexplicable, sa soumission soudaine à Flavières - elle quitte son amant pour lui - manquent de crédibilité. A nouveau, à la suite de son personnage, le lecteur fait un faux pas, dérape. En outre, il comprend tout de suite que Renée et Madeleine ne font qu'une - et que Gévigne cherchait simplement un témoin imparable pour justifier de la démence de son épouse, dont il héritait tous les biens. Or, qui, mieux qu'un avocat, démissionnaire de la police, certes mais enfin non pour lâcheté ou corruption, simplement parce qu'il souffrait d'un mal qu'il ne pouvait contrôler, le vertige, pouvait fournir témoignage d'un tel poids ?

Bon, comme je conseille toujours, essayez voir. le début du livre est assez vif, je ne saurais vous dire vraiment quand j'ai commencé à m'ennuyer - peut-être finalement trouvais-je Flavières et Madeleine un peu trop gnangnan ... Ou alors, les dialogues manquaient de punch, la construction me posait problème ... C'était "téléphoné" d'avance et, surtout, sans jeu de mots stupide, il n'y avait pas de "chute" tout à la fin.

Maintenant, il se peut que vous, vous adoriez. En ce qui concerne le film, vous devriez aussi aimer mais sachez bien que Hitchcock a arrangé tout ça à sa propre sauce. Une mention toute particulière cependant à la somptueuse Kim Novak , actrice-comète à la fois flamboyante et glacée, qui campe une merveilleuse Madeleine / Judy (Lucy dans la version française, si mes souvenirs sont bons.)

Bonne lecture ! Et bon DVD ! ;o)
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