Sur vingt-deux chapitres, Sybille de Bollardière livre dans ce roman des images d’ « Une femme d’argile » passionnée et vibrante sur laquelle les événements semblent glisser.
La question délicate de la politique n’est pas occultée par l'auteur mais œuvre en arrière-fond dans l’existence de ses personnages. Son écriture est à la fois peinture et poésie. Sous sa plume, des paysages envoûtants prennent une forme réelle dans l’imaginaire de son lecteur.
Je n’ai cependant pas compris la nécessité du premier chapitre traitant de l’agonie d’une scolopendre sans lien apparent avec l’histoire. Peut-être sa morsure ? Car ce roman est un doux poison ! Le Mu-Ghindo (qui envoûta l'héroïne du roman) a entamé en moi son processus de fascination et celui-ci ne semble pas s’éteindre malgré d’autres lectures ultérieures. A mon humble sens, c'est lorsque l'empreinte demeure longtemps après avoir fermé un livre qu'il est légitime de dire qu'un auteur a réussi à vous subjuguer.
Je m'efforçais de vivre au jour le jour, en évitant de penser à ce qui m'avait conduit ici. Mais, ce soir-là, la chaleur et les mouvements de la scolopendre dans sa cage de verre avaient raréfié l'air, c'est moi qui m'asphyxiais, moi qui luttais le long des murs dégoulinant d'humidité contre des escadrons de moustiques. Je regagnai la chambre, laissant la lampe allumée dans le couloir non loin de la «bête» que je voulais pouvoir surveiller
Seule Européenne à des kilomètres à la ronde et recluse volontaire dans cet endroit sauvage, je supposais qu'on m'avait oubliée. L'absence de route filtrait inexorablement les nouvelles. Les combats avaient dû cesser, on n'entendait plus les tirs au petit matin, et les longues colonnes de fumée noire que l'on pouvait observer depuis les plateaux avaient diminué.
Sous la paillote au bord de la rivière, je rêvais de pouvoir à nouveau profiter du chant des oiseaux et de celui de l'eau quand elle dévale les collines après les averses.