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3,68

sur 674 notes
COUP DE COeUR!!!
Un vrai, un véritable coup de coeur pour le second roman de Miguel Bonnefoy. Un très grand merci aux éditions Rivages et à Babelio pour cette découverte.
Il était une fois au XVIIIème siècle un capitaine de navire qui s'appelait Henry Morgan. Richissime, pirate hors pair il fait naufrage dans la mangrove des Caraïbes. Trois cents ans plus tard son trésor perdu dans les forêts vénézuéliennes fait encore rêver. A l'endroit supposé du naufrage plusieurs familles se sont installées. Elles vivent surtout de la récolte de la canne à sucre et de la fabrication de rhum. Parmi elles , la famille Otero , le père, la mère et leur fille unique Serena.
Un beau jour débarque un jeune homme Severo Bracamonde, sans un sou mais persuadé de devenir riche quand il aura mis la main sur le trésor de Morgan....
Roman, conte philosophique ? qu'importe chacun y trouvera son compte. Quant à moi je me suis laissée porter par l'écriture luxuriante de Miguel Bonnefoy. C'est à un festival de couleurs, de saveurs, de senteurs auquel j'ai été conviée. J'ai profité , savouré, freiné même pour ne pas lire trop vite . Bref vous l'aurez compris j'ai aimé , que dis-je j'ai adoré Sucre noir merci Monsieur Bonnefoy
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Ce roman laisse sur mes papilles de lecteur un goût de miel...
J'ai dégusté ce Sucre noir de Miguel Bonnefoy avec un plaisir incroyable.
Je ne lis (ou qu'exceptionnellement ) jamais les 4ème de couv, alors, je ne savais pas à quoi m'attendre avec ce roman, ce fut une belle surprise.
Toute proportion gardée et sans faire aucune comparaison, ni entre les livres, ni entre les auteurs, Sucre noir a ramené à ma mémoire Cent ans de solitude, lu il y a quelques années.
Ça  commence comme ces livres que je dévorais enfant.
Un bateau pirate.
Oh, il ne sillonne pas les mers ni les océans celui-là.
Non.
Il est perché dans les arbres. C'est une tempête qui l'a déposé là. En pleine forêt Caribéenne.
À son bord ?
Le capitaine Henry Morgan et son équipage.
Et surtout, surtout.... un fabuleux trésor...
Trois siècles plus tard, la légende attire les explorateurs. À commencer par Severo Bracamonte dont le regard croise celui de Serena Otero, héritière d'une plantation de canne à sucre...
De la chasse au trésor jusqu'à la fabrication d'un rhum d'exception, Bonnefoy nous entraine dans une saga familiale au coeur des Caraïbes.
Alors, ce trésor, mythe ou réalité ?
En tout cas, le destin d'une région, d'un village, d'hommes et de femmes va se trouver bouleversé.
Si vous aimez le bon vieux rhum, le pur, le fabriqué maisons, si vous rêvez de trouver le trésor du Capitaine Morgan, faites votre paquetage, n'oubliez pas votre détecteur de métaux  et embarquez sur le premier navire pour la mer des Caraïbes avec ce roman de Miguel Bonnefoy, émotion garantie.



 
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Mille sabords, quelle délicieuse lecture !
Ne serait-ce que pour son premier chapitre ébouriffant où l'on assiste au naufrage ahurissant d'un galion de pirates sur quelque canopée lointaine, bruissant de feuilles et d'oiseaux, ce roman vaut le détour. Mais il serait dommage de se priver de la suite qui se déguste comme une mangue sucrée relevée d'une goutte de nectar de vanille et brûlante comme le plus noir des poivres.
Ils sont nombreux, quelque trois cent ans plus tard, ceux qui chercheront le trésor sur plusieurs générations ; de ceux-là, la malédiction choisira pour ourdir ses armes ceux qui s'aveugleront sur le trésor disparu du légendaire pirate Henry Morgan plutôt que de gouter aux trésors du coeur et de la Nature. Ainsi en est-il de la quasi démoniaque Eva Fuego, née du feu et de la terre et consumée par sa rage et son ambition jusqu'au point d'orgue à couper le souffle de sa…
Non je ne vous dis pas, il faut lire la scène finale autant que celle d'ouverture, et tout ce qu'il y a entre les deux aussi, et se laisser pénétrer de cette histoire doucereuse et terrible qui met tous les sens en éveil et rend un magnifique hommage à la beauté des îles.
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Décidément, nos lectures nous réservent parfois de bien étranges surprises...
J'avais hâte de goûter au sucre noir de Miguel Bonnefoy, de m'envelopper de ses parfums tropicaux et de m'ennivrer de son rhum ambré.
J'arrive pourtant assez mitigée au terme de ma lecture.
La raison à cela ? Une grosse frustration.
Attendez que je m'explique...

Sucre noir est une très belle histoire aux allures de conte qui suscite la réflexion et qui a bien sûr sa morale tout à fait honorable.
Le trésor que le fameux pirate Henry Morgan a abandonné sur l'île trois siècles plus tôt suite à son naufrage attire comme il se doit les convoitises et les chercheurs d'or...en vain.
Personne ne le trouve..
Que ce soit Severo ou l'Andalou, après avoir sillonner et creuser en tous sens sous les yeux las de la belle Serena Otero, ils finissent par abandonner.
C'est que l'on cherche parfois bien loin ce qui se trouve sous nos yeux et le bonheur ne se vêt pas toujours d'ors et de pierres précieuses.

La plume de Miguel Bonnefoy est chatoyante et évoque les contrées luxuriantes des Caraïbes avec une poésie riche et colorée.
Tous les sens sont à la fête grâce à cette explosion de parfums et de tableaux enchanteurs.

Que de positif, me direz-vous...

J'en reviens à cette frustration que j'évoquais précédemment.
Les personnages de ce récit sont des personnages puissants, au caractère bien trempé tels les habitants au sang chaud de ces îles paradisiaques.
Or, Miguel Bonnefoy, nous dépeint trois générations de cette dynastie en moins de 200 pages et avec des repères temporels et géographiques un peu flous qui contribuent à une impression de survol.
Ces très beaux personnages, dont Eva Fuego est sans doute la figure la plus emblématique, auraient gagné beaucoup à voir leur destin un peu plus creusé.
Pour faire court (c'est le cas de le dire..), tout s'est passé trop vite, avec des passages trop rapides d'une époque à l'autre.

Je peux toutefois admettre que ce fut la volonté de l'auteur si son désir était de nous conter une fable plus qu'un roman, la morale n'ayant nul besoin de s'embarrasser de détails qui brouilleraient les pistes.

Ma déception est à la mesure de mon enchantement pour l'écriture et le propos.
Si je devais décrire mon impression, je dirais que c'est comme si on m'avait fait survoler une contrée magnifique sans m'avoir laissé le temps de l'admirer..
D'où les trois ⭐⭐⭐

Je serai tout de même curieuse de lire d'autres oeuvres de cet auteur qui sait si bien évoquer les parfums et les couleurs de la vie.
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Miguel Bonnefoy signe avec « Sucre noir » un roman aux allures de conte philosophique, en nous invitant à la recherche du trésor du capitaine Henry Morgan enterré depuis trois siècle sur un coin paradisiaque des Caraïbes.
Il nous livre l'histoire de la famille Otero dont la fille Serena, à peine sortie de l'enfance rêve d'un destin romanesque.
Au fil de ses pensées, elle attend son prince charmant n'hésitant pas à passer une petite annonce à la radio.
Malheureusement pour elle, l'homme qui surgit dans sa vie, semble bien plus intéressé par la perspective de devenir riche, en déterrant le butin du pirate que de ravir le coeur de la jeune fille.
De plus, Severo Bracamonte est loin des canons de beauté et de sensualité tant de fois espéré par la jeune femme.
Cependant, au fil du temps des liens se tissent entre les deux jeunes gens, de leur proximité une complicité et une intimité naissent.
Dans cette première partie, l'auteur excelle à décrire les prémices du sentiment amoureux et les fantasmes de l'enfance laissant place à une réalité plus réaliste.

« Severo Bracamonte, chargé à présent d'une mission familiale, ne pensait plus au trésor. La volonté de trouver la vie dans le ventre de sa femme lui fit bientôt oublier l'or dans celui de la terre. »
Les personnages de Miguel Bonnefoy, sont « haut en couleur », magnifiquement décrits.
J'ai particulièrement aimé Serena, volontaire, courageuse, allant au bout de ses rêves et de ses convictions.
Une jeune femme étrange, sortie des flammes, Eva Fuego traverse ces pages en laissant une trace indélébile sur la mémoire de ceux qui croisent son chemin.

J'ai eu beaucoup de plaisir à retrouver Miguel Bonnefoy dont le précédent roman m'avait laissé une impression mitigée. Cette fois-ci j'ai totalement adhéré à cette histoire.

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Toute sa vie, Severo Bracamonte a cherché le trésor d'Henry Morgan. le fameux pirate aurait enterré son trésor sur les côtes du Venezuela, cela laisse espérer que ses rêves les plus fous pourraient devenir réalité. Alors il cherche, et cherche encore, mais le trésor qu'il trouve n'est pas celui qu'il attendait. Pas le genre de trésor qui permet de réaliser des rêves mégalos, mais bon, il se réinvente et n'est pas malheureux pour autant. Tant pis pour ses rêves.

Entre conte philosophique, fable et parabole biblique, Miguel Bonnefoy a su renouveler son style tout en restant lui-même. le résultat est tout simplement époustouflant. Avec la simplicité qui le caractérise l'auteur parvient aussi bien à nous faire voyager, réfléchir ou nous toucher avec la poésie de sa prose.
Les personnages qu'il dépeint et la construction narrative sont bien plus aboutis que dans son roman précédent. Avec Sucre noir, pas une seule fausse note.

Je préfère ne pas trop dévoiler l'intrigue, ni les personnages qui peuplent ce récit si bien pensé et mis en scène.
Tout ce que je peux dire c'est que derrière cette superbe simplicité , c'est un roman très riche dont on déguste chaque mot.. avec un petit verre de Diplomatico, claro !

On pourrait encore en parler pendant longtemps, que ce soit sur la portée du message, les personnages secondaires, les petits indices subtils que Miguel Bonnefoy sème tout au long de son récit, .... Mais le mieux est encore de ne pas gâcher ce livre en faisant un inventaire exhaustif de ce petit trésor : mieux vaut le découvrir soi-même pour se laisser surprendre et éblouir.

Je remercie chaleureusement Babelio et les éditions Payot et Rivages pour ce partenariat Masse Critique.
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Fin XIXème siècle, quelque part dans les Caraïbes, la jungle qui bordait la rivière et qui avait vu s'échouer, trois siècles plus tôt, le navire de Henry Morgan, est maintenant occupée par une petite colonie paisible mais la légende du trésor du pirate anglais ravive toutes les envies et attire les aventuriers. Avec le développement du village, se succèdent les générations et plus spécialement la famille Otero, qui fait prospérer le village et s'enrichit grâce à la canne à sucre. Puis la distillerie de rhum, la rationalisation des cultures, l'aménagement du fleuve, la recherche d'investissement transforme le paysage et la mentalité des habitants.

Sous forme de conte, Miguel Bonnefoy avec Sucre noir, décrit l'évolution d'un petit bout de terre, qui devient un eldorado attractif pour les aventuriers à la recherche d'un trésor légendaire, vite relayés par les familles qui préfèrent mettre en valeur la terre, le vrai trésor. Mais les appétits pour cette richesse naturelle sont tout autant voraces...
Sucre noir est une fable allégorique de l'évolution du monde qui débute par la colonisation, puis l'ère industrielle, le commerce, la mondialisation. Sous forme de conte tantôt poétique, tantôt naïf, c'est une critique de la croissance et de la recherche de profit à tout prix, au détriment de la nature, un conte cruel terriblement actuel quand on considère la nationalité vénézuélienne de Miguel Bonnefoy.
Entre fable et drame...

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Autant j'avais adoré le Voyage d'Octavio, autant ici, je suis complètement passée à côté de ce titre.

Le roman est une nouvelle fois très bien écrit mais j'ai trouvé le ton pompeux, et je n'ai pas réussi à rentrer dans l'histoire à proprement parlé. Je pense que je m'attendais à autre chose d'où ma déception. La voix du lecteur (ma version était le livre audio) y est sans doute pour quelque chose.

Coté personnages, c'est la même chose, je n'ai pas réussi à m'attacher à l'un d'eux en particulier.

Bref, j'abandonne et je jette l'éponge préférant ne garder en mémoire que mon gros coup de coeur pour le précédent roman de l'auteur qui lui m'avait fait voyager.
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J'avais aimé découvrir l'auteur-conteur avec "Le voyage d'Octavio", j'ai aimé le retrouver ici avec "Sucre noir".

Un voyage délicieux, une fable comme j'en lis peu et qui m'a littéralement transportée dans ces contrées ensoleillées, douces et enivrantes des Caraïbes, où les trésors de la nature y sont multiples, embaumant les lieux, réjouissant nos yeux, et où bien sûr le rhum coule à flot grâce à l'or noir local : le jus de la canne à sucre ;-)
De même que l'amour est une richesse inestimable, la naissance d'un enfant apporte aussi son lot de merveilles...La vie regorge de trésors, à saisir, à bâtir, à ne pas bouder.
Les légendes, aussi, riment souvent avec trésor ! Et quand elles sont chargées de promesses d'un véritable trésor, celui bien palpable du coffre-fort renfermant les piécettes dorées, les bijoux incrustés de pierres précieuses et autres biens luxueux, elles sont capables d'enlever chez un homme toute pensée rationnelle et la quête peut s'avérer sans merci. C'est à peu près ce qui arrive à Severo Bracamonte; l'espoir de dénicher un trésor vieux de trois siècles lui a, parfois, fait quitter le chemin de la raison.
« ... il parla de son destin, de sa passion, rappelant qu'il était un chercheur d'or et que, comme tout chercheur d'or, il ne serait un homme que lorsqu'il aurait sorti un trésor du fond de la terre.
Serena le fixa longtemps, sans ciller et lui répondit avec une sagesse orgueilleuse qui n'était pas de son âge :
– Imbécile. Tu seras un homme quand tu sortiras un trésor du fond de mes yeux. »
J'ai particulièrement aimé le personnage de Serena, qui « lit dans les grimoires de la nature », et pour qui la terre est une ressource, un trésor à préserver, à écouter, à aimer. D'ailleurs, pour être tout à fait honnête, même si j'ai été complètement embarquée dans cette histoire, j'ai déploré la quasi absence de Serena dans le dernier tiers du roman. J'aurais aimé l'accompagner encore un peu plus...

"Sucre noir" est une histoire de famille, sur trois générations, et vous l'aurez compris, une histoire de quêtes, celles de tout un chacun, celles qui donnent un sens à notre vie.
« Depuis ce jour où ils s'offrirent la joie douloureuse du passage, pendant dix ans, Severo Bracamonte n'imagina pas qu'il y eût au monde un homme plus enviable que lui et comprit peut-être, dans ses plus téméraires réflexions, que son trésor avait toujours été où son imagination n'avait jamais cherché. »
La langue est belle, fluide, savoureuse ; je m'en suis délectée et je conseille, à ceux qui aiment les romans d'aventures, épiques et poétiques à la fois, les fables contemporaines aux personnages bien campés porteuses d'une belle morale, de ne pas hésiter à venir la déguster.

Beaucoup aimé le clin d'oeil à Flaubert et à La Fontaine...

Lien : https://seriallectrice.blogs..
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J'ai lu Sucre noir comme une fable, un conte philosophique écrit dans une langue belle et savoureuse comme une mangue bien mûre, je l'ai dégusté avec un très grand plaisir, me laissant aller aux évocations sensuelles, voluptueuses, quasi liquoreuses qui nous sont offertes.
Le livre s'ouvre sur une image surréaliste : un trois-mâts de dix-huit canons se trouve planté sur la cime des arbres. J'adore ce type d'image folle, de tableau irréel. de la mer, il n'y en a plus, les algues ont cédé leur place aux broussailles et au lierre, la boue a remplacé l'eau. Hum, ce mélange des éléments, terre, mer, ciel me comble de joie ! J'exulte !
L'équipage ne fait rien ou pas grand-chose et les réserves de nourriture baissent à vue d'oeil. Alors, on essaie d'attraper des oiseaux avec des filets de pêche (délicieuse inversion...) et l'on mange des crapauds en guise de crabes (avec un peu de mayo, on ne verra pas la différence...) Mais un soir, une tempête se lève, le bateau tangue dangereusement au-dessus du vide et risque à tout moment de s'écraser au sol. Il faut donc le délester : on jette alors les caisses, les armoires, les tonneaux, l'ancre, les tableaux volés (ah, ces belles accumulations d'objets hétéroclites, je jubile, voyez donc : «  Les oiseaux serraient entre leur bec des bracelets de cuivre et d'argent. Des robes de marquise flottaient au vent, sur la canopée, et les singes jouaient avec des dentelles, sautant d'arbre en arbre, déchirant le drapeau noir de la flibuste. » ) mais le capitaine Henry Morgan (célèbre flibustier, 1635-1688) refuse de jeter par dessus bord son trésor (nous y voilà, vous l'avez compris!).
Alors, écoutez bien, c'est sublime : « ...le poids du bateau déracina les arbres et l'entraîna vers l'abîme. Un nuage de poussière se leva et couvrit le ciel. le cadavre de la chute affola les animaux. Ainsi, les marécages, les passions, les profondeurs de la nature, avalèrent si bien la frégate de Henry Morgan que l'on ne récupéra aucun vestige, et son trésor resta enfoui là, entre des morceaux de voile et le cadavre d'un pirate, conservé dans le ventre des Caraïbes. » Magnifique, extraordinaire, fascinant chapitre UN - un trésor en lui-même, pas besoin d'aller plus loin - qui nous laisse sur toutes ces richesses cachées… Il est tellement beau ce chapitre UN qu'il me suffirait...
Trois siècles plus tard, c'est un village « qui s'est installé là où le bateau avait disparu. » La famille Otero, que l'on suivra sur trois générations, a racheté sur ces terres une propriété qui ne lui a pas coûté bien cher : les sols n'ont pas été entretenus, quant à la maison en elle-même, elle n'est pas bien belle et surtout, une clause morale stipule que personne ne doit entrer dans une des trois chambres de l'étage. (Humm, j'adore les lieux où il est interdit d'entrer… la fameuse petite pièce du château de Barbe-Bleue, la chambre n°237 de Shining...) L'ancienne propriétaire y vient une fois l'an y pleurer son mari disparu, elle emplit « son seau de larmes » et repart. Ezequiel Otero, sa femme Candelaria de Otero et leur fille unique Serena (des noms comme des voyages…) y vivent simplement, à l'écart du monde et les journées se répètent inlassablement. Ils cultivent la canne à sucre. Mais un jour, arrive un jeune homme de la ville, un certain Severo Bracamonte. Passionné par les histoires de pirates et de trésors cachés, il transporte avec lui des tas d'objets : cordes, compas, vieilles cartes, plans, documents divers, dessins, tous en rapport avec le trésor de Henry Morgan. Il en est bien persuadé : le trésor est ici sous ses pieds, il en a la preuve. On doit le laisser fouiller…
Et ils seront nombreux à vouloir retourner la terre en tout sens, cherchant un trésor qui est peut-être ailleurs… et pas si caché que ça !
Je vous imagine les yeux brillants, ça y est, vous avez retrouvé votre âme d'enfant, ça marche à tous les coups, les histoires de pirates et les trésors enfouis, on a beau dire que ça ne nous intéresse plus, qu'on a passé l'âge, pas du tout, croyez-moi !
Comme je le disais au début, j'ai lu Sucre noir comme on déguste un bonbon ou un bon vin, en le laissant doucement emplir mon palais de toute la magie de ses saveurs… un délice ! Les mots évoquant la nature luxuriante, le parfum des goyaviers, des amandiers, des orchidées, les arômes du rhum, les senteurs des épices et la chaleur de la terre sont délectables, exquis, succulents et certaines phrases s'apparentent à des fulgurances génialissimes d'une poésie extrême et d'une beauté absolue qui m'ont transportée. Allez, en voici quelques splendeurs : « Elle avait l'âge où l'on pense que les arbres tournent autour des oiseaux. », « Si les étoiles étaient de l'or, je creuserais le ciel. »
Il n'y a qu'à se laisser porter et ce n'est pas désagréable.
D'ailleurs, dans une interview, Miguel Bonnefoy explique que c'est lors d'une soirée pour la promotion de son précédent livre, le Voyage d'Octavio, soirée qui associait à la fois lectures d'extraits et dégustation de rhum (humm, pas mal…) qu'il s'est dit: « comme j'aimerais un jour pouvoir écrire un livre qui ressemble à une bouteille de rhum. » Eh bien voilà, c'est fait et pas besoin de déguster avec modération !
Néanmoins, derrière cette fantaisie apparente se cache un message peut-être pas si léger que ça, l'idée que ce trésor que l'on cherche toute une vie est peut-être là, sous nos yeux et que si l'on n'a pas eu la sagesse de le voir, c'est parce qu'on voulait à tout prix qu'il prenne la forme d'un coffre scellé !
Une réflexion sur le bonheur, les vraies richesses qui sont souvent devant nous, qui s'offrent à nous, au quotidien mais que l'on cherche ailleurs, parce qu'ailleurs, croit-on, c'est toujours mieux qu'ici. Il y a quelque chose de la fable de la Fontaine « Le laboureur et ses enfants » dans ce conte.
L'on peut aussi y lire l'histoire d'un pays, le Venezuela (d'où est originaire la mère de l'auteur) ou la métaphore du naufrage d'une terre qui a cru que l'or noir qui sortait de son sol était son trésor. Il s'est trompé, cet or noir, d'une certaine façon, l'a ruiné : certes, l'essence à la pompe est peut-être la moins chère du monde mais il faut se battre et patienter de longues heures au soleil pour espérer trouver des oeufs, du lait, du sucre, de l'huile. Ce pays doit, maintenant qu'il a tout misé sur le pétrole, importer la quasi totalité de ses biens de consommation alors que ses terres sont si riches ! le trésor, finalement, était un leurre, les vraies richesses se trouvaient ailleurs mais personne ne les a vues ou n'a voulu les voir...
Un très beau texte à savourer lentement et à méditer longuement...
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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