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Critique de frandj


Le recueil intitulé "L'Aleph" est l'un des chefs d'oeuvre de l'écrivain argentin J.-L. Borges. Il est composé uniquement de nouvelles courtes et, à mon avis, de valeur inégale.
Le texte qui donne son titre à l'ensemble du livre est un vrai petit bijou. Dans cette nouvelle, un infime recoin dans une cave quelconque se révèle être « le lieu où se trouvent, sans se confondre, tous les lieux de l'univers, vus sous tous les angles »; et l'auteur explique, à ce propos, son « désespoir d'écrivain »: « Tout langage est un alphabet de symboles dont l'exercice suppose un passé que les interlocuteurs partagent; comment transmettre aux autres l'Aleph infini, que ma craintive mémoire embrasse à peine ? ». On pourrait imaginer un développement dans le registre du fantastique, mais non… Les cartes sont habilement brouillées, car la découverte inouïe de l'Aleph se trouve malicieusement éclipsée par une mesquine histoire de rivalité: l'auteur jalouse un apprenti écrivain, qui s'est lancé dans une description poétique de toute la planète - rien que ça ! Le tableau de ces deux hommes qui se détestent cordialement est un morceau d'anthologie. Mais finalement le plus fort, c'est que le lecteur apprend incidemment que, étant enfant, le découvreur de l'Aleph avait entendu dire que « il y avait là [dans cette cave] tout un monde » ! Ce clin d'oeil, c'est tout Borges.

Il n'est pas question d'analyser ici toutes les nouvelles qui composent ce recueil. Mais je me dois de mentionner au moins "Emma Zunz", un conte bizarre et émouvant, et surtout l'extraordinaire récit intitulé "L'immortel". Cette nouvelle raconte une histoire étrange, suggérant une mythologie tout à la fois fascinante et dérisoire; l'atmosphère créée par J.-L. Borges est inoubliable. La traduction française a des difficultés à rendre le style très particulier choisi volontairement par l'auteur pour écrire ce texte. Mais je regrette une seule chose: le dénouement de "L'immortel" me semble inutilement compliqué.
Comme dans le recueil de "Fictions", l'intrigue dans ces nouvelles est en elle-même originale; mais c'est surtout la manière de raconter qui est inimitable. Le lecteur se sent entraîné dans un récit original, mais c'est orchestré avec une extraordinaire finesse. En compagnie de J.-L. Borges, Le lecteur se prend au jeu de la subtilité et se sent… comment dire ? intelligent. Très peu d'auteurs ont été capables de créer ce climat de lecture.
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