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4,13

sur 603 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
«Toute destinée, pour longue et compliquée qu'elle soit, comprend en réalité «un seul moment»: celui où l'homme sait à jamais qui il est.» p. 51

Une lecture exigeante que ce recueil de nouvelles souvent qualifiées de contes métaphysiques. Pour ma part, j'ai surtout vu un jeu de piste formidable au milieu d'une multitude de références littéraires et religieuses. Nombreuses citations et allusions entre lesquelles l'auteur tisse des liens.
L'auteur s'interroge sur ce qu'est la vie, ce qu'est l'homme, comment se connaître soi-même. Il nous peint des destins singuliers où sonne la vengeance parfois, où règne la mort souvent.
Les lieux, d'une façon générale, semblent oniriques. C'est un paysage fascinant, enchanteur, facilitant la méditation et les pensées métaphysiques. Les villes semblent vides, même si très ouvragées, et restent minérales et dépeuplées.

J'ai beaucoup aimé certaines nouvelles, d'autres me sont restées hermétiques. C'est un auteur que l'on n'aborde pas aisément, simplement. Je pense qu'il faut y revenir, approfondir peu à peu et creuser les innombrables références données.

Mais un auteur à lire, c'est certain!
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Même si l'écriture est belle, je dois avoir avoué n'être rentré dans aucune des histoires , nouvelles de ce livre. j'en suis désolé car je me faisais une joie d'apprécier cet auteur de que je ne connaissais pas. tant pis et cela n'enlève rien biensur à sa notoritété et son tatent!
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L'édition que je possède est bilingue français-espagnol et compte trois nouvelles : L'Immortel, Deutsches Requiem et L'Aleph.
J'ai toujours entendu parler de Jorge Luis Borges comme de l'un des plus grands écrivains du XXème siècle. Je suppose que c'est pour cela que j'avais ajouté L'Aleph à ma liste de lecture. Il aurait peut-être mieux valu choisir un autre de ses livres. Déjà, ça partait de manière incertaine car les nouvelles ne sont en général pas un style que j'apprécie. Mon impression a été la même pour chacune des trois nouvelles de cette édition : certains passages m'ont captivée et d'autres m'ont semblé ennuyeux à souhait ou obscurs. le tout m'a laissé une impression plus que mitigée, un arrière-goût de déception.
Je retenterai peut-être la lecture de Borges avec une autre de ses oeuvres mais ce ne sera sûrement pas pour tout de suite.

Challenge XXème siècle 2023
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Recueil de nouvelles où, une fois de plus, l'auteur s'amuse à jouer avec le lecteur notamment en faisant des références littéraires qui sont la plupart du temps fantaisistes ou imaginatives. L'auteur aborde ici des thèmes très variés tels que la mythologie greco-latine, la mort, l'infini et plus particulièrement l'image du labyrinthe, une sorte d'histoire à répétition. J'ai eu plus de mal avec ce livre qu'avec "Fictions" du même auteur car cet ouvrage est beaucoup plus tourné vers l'irrationnel et j'ai eu plus de mal à m'imprégner dedans.
A découvrir néanmoins !
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Série de nouvelles philosophiques dont la logique et la puissante force évocatrice fascine.
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Coïncidences incroyable, je viens de terminer ce recueil de fiction de Borges et j'en fait une note le jour de son 112e anniversaire (et accessoirement également mon jour d'anniversaire) !Même pas fait exprès ! Je viens de le découvrir sur la page d'accueil de Google.Une coïncidence, une forme de destin qui donne un goût de fantastique, très Borgien en somme.Tous les récits de l'Aleph tournent sans fin autour du thème du Labyrinthe et des jeux de miroirs. Les personnages ont souvent un double réel et un double imaginaire. le narrateur, le plus souvent Borges lui même, nous perd dans des micro-fictions sans autre lien apparent. Pas facile à suivre et un peu déroutant.24 août 2011
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Certains auteurs me paraissent encore indécidables, pour user d'un terme un peu barbare dont on qualifie des problèmes de mathématiques. La complication au moins un peu volontaire dont ils ont entouré leur oeuvre me permet mal de savoir – du moins pas avant le genre d'analyse minutieuse à laquelle je vais me livrer – s'ils sont ou furent vraiment profonds, et la sonde que je place en leurs textes, comme des prélèvements, ne suffit même pas toujours à me prononcer, m'empêchant d'instruire un mérite et de répondre d'une hauteur, ne m'offrant pas assez de quoi en estimer l'altitude, selon un phénomène d'incertitude tenant à la fois d'un écrit fournissant trop peu de prises philologiques et de mon esprit refusant à admettre des vertus que je n'aurais d'abord prouvées et avérées (car il y a des puits qui, sans écho ni remugles, ne sont faits que de l'artificielle nuit qu'on a opportunément opacifiée sur leurs parois proches, et il en est d'autres effectivement si souterrains et lointains que le jour – ni moi – ne rencontre le fond : la distinction entre ces opposés est parfois si délicate et confondante !). On ne réalise toujours une mesure qu'en fonction des outils dont on dispose, et je ne prétends pas que le prisme de mon intelligence soit un miroir adapté aux chambres secrètes de tout écrivain : mon esprit n'est le révélateur que d'un certain nombre d'images. L'expérience dont je dispose en littérature et qui s'étend déjà au-delà des volontés ordinaires et des facultés communes – mais ce normal est si piètre que je ne me fais nulle fierté de le supplanter –, ainsi que les méthodes que j'ai acquises pour lire avec perspicacité et irréfragabilité, me rendent quand même dignes de prétendre à une variété plutôt large de genres et de styles, et cependant je me conserve, quoi qu'on ait dit de mon manque de modestie, la liberté honnête de me juger incompétent et de me retirer de verdict sur des textes qui, trop neutres ou trop courts, insipides ou inexplicables, ne me donnent, selon mes techniques pointues, presque aucune matière à juger. Ce n'est pas qu'à chaque fois je ne puisse en tirer des hypothèses, les mots transportant toujours quelques effets langagiers objectifs et examinables, mais ces conjectures se présentent alors comme une somme trop disparate et douteuse pour que j'en tire plus que des suppositions, et les règles de probabilité que j'applique à cette science de l'interprétation me dispensent d'émettre un avis tranché. « Je ne sais pas » est aussi, après tout, une réponse de spécialistes et peut-être celle qui les indiquent le mieux et les plus hauts, réponse qui vaut bien mieux que les « convictions » dont la plupart abusent pour affecter un péremptoire impressionnant qui n'est qu'un bluff, particulièrement sur des sujets d'importance où il s'agit, comme ici, de décider la grandeur ou la petitesse d'un écrivain c'est-à-dire de tout un homme.
Un grand écrivain est pour moi un dieu de l'esprit : il m'importe de ne pas le confondre avec un charlatan.
Les auteurs que je ne comprends pas sont peut-être des génies incompris qui dépassent mon intellection, ou peut-être dissimulent-ils leurs insuffisances : c'est malheureusement l'un ou l'autre, rien entre les deux. Il n'est guère concevable en effet qu'après maints textes que j'ai lus d'eux avec sagacité et application, je demeure égaré par un être, même marginal, qui serait sis quelque part entre le géant et le misérable. Bien des obtusions « humaines, trop humaines » me sont inaccessibles de bassesse et d'incuriosité, mais leur étroitesse les dénonce : c'est le cas par exemple des péroraisons religieuses dont je ne saurais apprécier la teneur savante que pour des témoignages de complaisance, ou bien des essais de philosophie théorique dont le dialecte fait l'impression de docteurs expliquant avec force doctrine comment le myocarde se situe à la dextre de la cage solaire (ce qui suffit quelquefois à faire oublier que le coeur est en fait à gauche de la poitrine !) – on a rédigé sur ces sujets quantité de textes ardus qui n'ont rien à invoquer de réel mais qui produisent au novice l'effet d'une sapience supérieure. A contrario, l'élévation de quelques auteurs m'est si impénétrable que je ne puis même démystifier leur logique et entendre leur pureté, bien que leur langage ne soit pas contourné ni véritablement fait pour détourner de compréhension, notamment parce que je continue de les juger depuis une finitude trop grande : ce fut assurément le cas de Ainsi parlait Zarathoustra lorsque j'allai à la rencontre de Nietzsche en commençant malencontreusement par l'oeuvre où il faut plutôt finir, et encore, à l'époque déjà, je ne le jugeais pas mauvais et n'avais pas, comme pour les autres, le mépris sans réserve que leur petitesse enfin expliquée inspire légitimement.
le dilemme se perpétue, périodiquement : faux-sages ou très-sages ? L'hésitation n'est pas bénigne ni indifférente si l'on tient compte de mon pouvoir de congratuler et de célébrer, de ma volonté de justice et de reconnaissance, de ma solitude qui m'oblige à une discipline et une rigueur, c'est-à-dire, en somme, de ma disposition à aimer – je suis un tel potentiel ! Je ne veux manquer une seule idole s'il y a lieu de la confirmer, je n'ai pas assez d'Admirés alentour pour rejeter par défaut des rares qui glissent dans ma vision et prendre le risque de les méjuger et abandonner d'un moindre soupçon – et j'en quête, avec quelle prudente rationalité ! Il m'est capital, moral, consubstantiel, de m'alimenter de la nourriture des meilleurs, celle qui entretient le métabolisme et perfectionne l'organisme : ce m'est un besoin d'aspirer à une compagnie, de m'élever à la table des colosses, extirpé à la force laborieuse de mes bras sans talent inné. À la différence de la plupart, je n'ai jamais cessé mes recherches, parce que le confort et la facilité m'angoissent au lieu de me rassurer : tant que je reste l'unique qui me juge, sans autre relation de sujétion, je crains de finir, sans m'en apercevoir, par me contenter. Il me faut une émulation dure, cruelle même, pour ne pas me résoudre au même : j'exige le juste fouet pour me raviver le sang. Je veux toujours évoluer ; mon regard, seul, peut faillir ; j'ai une phobie du penchant à l'inessentiel ; le superficiel, naissant de l'habitude, me fait redouter la déchéance. Je refuse ma communauté étroite et lâche, toutes tendances à se satisfaire, le débarras trop aisé des meilleurs qui importunent la tranquillité et le sempiternel circuit. Je ne veux pas ressembler au peuple où je suis. Par conséquent, je ne puis négliger un prophète.
Ils sont pourtant identifiables, ces embarrassants porteurs d'énigme : ils maîtrisent le langage et manipulent les concepts – les banales maladresses se confondent tôt ou tard, et je ne parle pas que d'orthographe ou de syntaxe –, s'expriment sans conteste avec minutie et quelque érudition sensible. On les distingue des cabotins ou des farauds, mais ils pourraient encore être des cuistres ; seulement, ils savent écrire, et cette capacité les enténèbre, oblige à examiner leur ombre, ensemble le regard plissé et la pupille dilatée – ils ne sont pas nuls, occupent un certain espace (mais le bouchent-ils, cet espace, ou bien le révèlent-ils ?). Ils écrivent comme parlent les devins d'expérience – mais les devins se singent aussi et le plus souvent communiquent au nom de dieux imaginaires. Ceux dont je parle lancent des mystères auxquels ils n'apportent pas de solutions, suivant un nombre restreint de thèmes délicats, parfois futiles et possiblement sans avantage, dont ils ont fait leur spécialité, en leur fascination hallucinée ou extralucide ; ils sont notablement emplis et obsédés de : spécularité, circularité, équivalences, correspondances, cycles, éternel retour, fatalité, recul extrême, relativité de tout, neutralisation de soi, inversion d'êtres, mysticisme, paganisme, spagyrisme, symbolisme, symétrie, alternité, labyrinthes, vertiges, absurde, illusion puis spécularité, exprimés en style de métonymies et synecdoques, comme dans les chasses-au-trésor où le concepteur a offusqué la clarté pour créer un obstacle. Parmi ceux que j'ai lus, je citerais : Barthes, Beckett, Bernanos, Conrad, Deleuze, Derrida, Eco, Faulkner, Foucault, Heidegger, Kafka, Kundera, Kraus, Mann, Meyrink, Pessoa, Proust, Ricoeur, Whitman – et Borges. On pourrait en ajouter d'autres, comme Dick, Lovecraft, Melville et Poe, mais ce serait à condition d'estimer par principe que leur littérature est spirituelle, qu'ils ne se sont pas contentés de narrer des actions mises en une forme imaginative et agréable ou virtuose, mais que leurs récits recèlent des interprétations dont le décodage requiert une lecture figurée, un décryptage secret, un degré herméneutique au-delà de leur apparent explicite.
Je sais deux façons de reconnaître ces irrésolubles : ou en « suivant le guide » puisque c'est ce que Juan Asensio, critique naguère intéressant, aime désormais en majorité dans la littérature, multipliant à l'envi et par pose les commentaires alambiqués, abscons à lui-même – ce lui est devenu un critère de complaisance – où il n'admet aucune impasse livresque pour ce qu'elle est, à savoir une route inachevée, paresseusement et indignement laissée à l'abandon – et combien d'universitariens (c'est le nom que je leur prête car c'est une sorte de secte) auxquels il ressemble tant aujourd'hui sont allés sophistiquer des thèses sur des écrivains perpétuellement complus à évoquer et à négliger des pistes, donnant ainsi le sentiment, parce qu'ils regardèrent de très loin en direction d'un horizon vague et envisagé, qu'ils avaient déchiffré un au-delà où en définitive, quand on y arpente vraiment, on ne distingue jamais leur trace ? On anticipe leurs enthousiasmes (dorénavant, je sais aussi, dans ce que Juan Asensio n'a pas lu et commenté, ce qui lui donnerait matière à ergoter avec emphase admirative) à ce que leurs auteurs ont affecté plutôt qu'à ce qu'ils ont démontré, littérature d'expectative et de semblants interrompus où la majorité des commentaires résident dans le non-dit, dans ce que le texte ne suggère même pas, dans le désir critique d'hasarder une construction loin des probabilités d'une intention d'auteur, comble d'absurdité et d'échec pour le professionnel situant sa spécialité dans le langage ; ou, si l'on préfère user contre les références et les autorités son sens critique, on perçoit l'insuffisance du livre, quand on l'a terminé, en se fiant à l'impression gênante d'inachevé et de stérilité qu'on en conserve sans pourtant identifier la supercherie et accuser l'auteur d'être manifestement un escroc. On sent que l'ouvrage a donné à réfléchir, et certes par moments il a plongé dans une perplexité presque insaisissable, à la limite de l'intentionnel car on ignore par quelle transition un auteur eût pu vouloir produire la pensée précise qui vous a alors traversé l'esprit – le lien est inconsistant – , et à d'autres moments on devine qu'il aurait fallu qu'on fût mis en réflexion parce que quelque autre passage, par sa tonalité « détachée » et d'une sorte de sagesse typique, le suggérait également dont le message cette fois n'a pas pris, mais entre ces méditations reçues et passées on ne parvient pas à savoir au juste si sa pensée de lecteur a suivi le cheminement de l'auteur ou si par hasard on a parcouru le sien tout indépendamment, et l'on se demande en fin de compte si l'on n'a pas extrapolé une philosophie littéraire sur des suggestions fortuites et des incomplétudes calculées, c'est-à-dire si l'écrivain n'a pas surtout feint de mener quelque part sans jamais indiquer où, par le moyen de l'atmosphère de mysticisme que le bénéfice-du-doute incite à matérialiser en faveur de l'artiste. Ce dernier d'ailleurs, contre les questionnements, se fait un principe à ne jamais révéler ses pensées, façon de laisser les significations ouvertes, à ce qu'il prétend, et il ne répond point aux demandes de renseignements, ces précisions sont plutôt troubles que limpides, il préfère ces interprétations floues qui le valorisent, c'est essentiellement la méthode du faussaire de ne pas préciser ses critères : le détournement est fondamental au prestidigitateur. La transmission du message en sort toujours défaillante ; il faut, pour prétendre le comprendre, le renfort d'abstractions louches et de pseudo-docteurs ès Lettres qui refusent d'emblée, puisqu'ils l'ont élu sujet de thèse, de considérer que l'idole peut être d'or plaqué et qui s'acharnent à démontrer que leur moindre mot recèle des trésors inestimables de paraboles cachées – combien ne sont que les apôtres d'une divinité, ils en parlent véritablement comme le Chrétien de Jésus ! À travers ces livres, le parcours de l'auteur est si bizarrement abscons que c'est comme s'il n'y avait pas tant élaboré une carte et un itinéraire que jalonné l'oeuvre des marques stéréotypées de savantes extrapolations. Une insistante érudition, aussi bien lexicale que conceptuelle, fait croire en la subtilité, mais aussi il s'agit toujours de références obscures qu'on ne saurait chaque fois vérifier, placées là comme volontairement contre même la culture générale, et le peu que vous en cherchez ne vous paraît guère à cet emplacement d'une nécessité incontestable, au point que vous vous interrogez s'il n'y a pas véritablement un système poseur dans cette sophistication, si ces citations complexes et peu profitables ne servent pas à établir d'autorité l'honorabilité intellectuelle de l'auteur et à atténuer par ruse la défiance du lecteur, sorte de garanties patentes d'un effort puisqu'elles ont nécessité des fouilles et de la mémoire – mais moins maintenant, avec Internet. C'est indéniablement compliqué, donc le lecteur naïf (et il n'y a plus que cela) suppose que c'est perspicace et pertinent – procédé d'artificielle fiabilité : arborer autant que possible, sans autre avantage que de parer, les insignes de l'intelligence et du travail (dans un registre similaire, on sait des auteurs qui livrent des interviews par écrit : le lecteur contemporain croit encore que c'est plein d'à-propos et de spirituelles improvisations !).
Alors, une sorte d'effarement circonspect vous saisit, sitôt l'oeuvre achevée : est-ce que ces sauts ponctuels dans l'érudition et la cogitation marquent vraiment la profondeur implicite ? On l'ignore, d'autant que ces méditations ne débouchent guère sur de grandes révolutions. Il ne s'agit pas de bouleversements au terme d'un ouvrage où les idées méthodiquement exposées, par leur caractère d'irréfragabilité, forcent la conception, renversent la vision de pans de réalité, mais plutôt de petits casse-têtes comme on en trouve dans les éditions de fin d'année sous la forme ou non d'almanachs, où l'on est supposé se creuser l'esprit d'une façon ponctuelle et qui relève de la dimension circonscrite d'une partie d'échecs arrêtée qu'on est censé reprendre et gagner en tant de coups. Une sorte de heurt, dont vous présumez un peu vite qu'il constituera un apport – il est peu vraisemblable, n'est-ce pas ? qu'un auteur instruit puisse jouer sans motif avec l'intellection de ses lecteurs –, interpelle et bientôt arrête sans inviter nulle part : on n'entre point. C'est un battant fermé qu'on n'imagine pas qu'un être malicieux, parce qu'il semble sûr, ait pu poser contre un mur. On tire, on s'efforce, on veut franchir l'obstacle, arracher la planche, et l'on suppose alors que ses facultés sont insuffisantes : l'auteur n'aurait pas tenté la traîtrise d'un panneau collé sur une pierre – c'est hors de jeu ! Une pareille sensation est patente chez Borges, parce qu'en l'occurrence il s'agit d'un recueil de nouvelles dont nulle ne communique l'impression d'une efficacité littéraire ni d'une pensée parfaite : le lecteur est embrouillé entre les deux, l'art manque d'idée, l'idée manque de superbe, on se trouve piégé dans l'indécision, comme entre deux eaux également saumâtres. Comme récits, ces intrigues souffrent d'un défaut de contenu et ne reposent que sur un concept vague, court et presque sans chute, quoique écrite avec soin ; comme essais narratifs, ces méditations sont curieuses mais ne débouchent pas sur de nets progrès, au point que par sympathie on s'efforce d'y mêler des pensées adventices, les complétant de ce qu'on suppose n'avoir pas compris, ce qui forme par négatifs la construction qu'on a tirée de l'oeuvre, de sorte qu'à la fin presque toute la substance mentale se concentre en ce qu'on a fabriqué. En somme, on ne peut dire à aucun moment : « Voilà ce que Borges profond a voulu dire » ; pas davantage on ne peut dire : « Voilà la beauté que Borges a voulu dépeindre. » Ce n'est ni manifestement beau ou profond, on dispose seulement de « pistes » de beauté et de profondeur sans les avoir explorées. En ces « indices » auxquels on se rattache, il faut admettre que le récit a tourné court et que la réflexion fut piètre : Borges est de ces auteurs qu'on aime à vanter comme « participatifs », au sens où l'on dit d'eux qu'ils font « travailler » ceux qui les lisent, mais il serait à vérifier si leur avantage ne réside pas tout entier dans l'esprit du lecteur et si leur propre esprit n'est pas uniquement compris dans une supposition au point de n'avoir rien à transmettre, tirant profit de la présomption favorable selon laquelle comme on suppose des vertus, par conséquent on pardonne. C'est bien en effet ce pardon d'avance qui fait croire en un « progrès mutuel », en un « accompagnement », mais où pointe-t-on que l'auteur a aidé ? Une expérience serait de prêter à un lecteur l'oeuvre d'un auteur auquel, sans bien le connaître, il accorde a priori sa confiance – un Hugo, par exemple. Puis, lui donner à commenter, en lieu de Hugo, un extrait incompréhensible, pas illisible, surtout très abstrait. le lecteur conclurait, je pense, que le passage est éloquent, et pourtant objectivement insensé ; on finirait sans doute par arguer que l'exercice ne plaide en défaveur ni du lecteur dupé, ni du texte trompeur, que les deux en sortent transfigurés. C'est ainsi qu'on forge le mythe de l'auteur qui construit le sens « conjointement avec son lecteur », ce qui, bien entendu, induit de ne jamais indiquer quelle interprétation est la bonne. On se fie à lui, par conséquent il est sage. Il a écrit ce qu'il doit avoir trouvé, c'est donc qu'il y a quelque chose à chercher. le credo marque le pas du cogito.
Or, il me semble repérer une technique systématique à Borges – récurrence ou routine – qui éclaire une facilité voire une romperie l'invalidant comme écrivain de qualité et le penchant du côté des faux-monnayeurs conscients de la littérature.
Il est à peu près incontestable que Borges fut à la recherche continuelle non
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Dans ce recueil-ci, il y a davantage de nouvelles à histoire, donc moins conceptuelles. Ce sont souvent des petites biographies de personnages entre le 19e et le 20e siècle.

On retrouve quand même quelques histoires à idée, notamment sur le thème du labyrinthe.

Ce recueil m'a paru moins bon que les précédents, mais il n'est pas mauvais pour autant.
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Recueil de nouvelles pour la plupart fantastiques et ayant pour point commun de rallier des points (temporels, spatiaux) apparemment éloignés, voilà un livre qui offre des textes de différents niveaux, certains très abordables, d'autres nécessitant peut être une belle culture soutenue pour pouvoir être pleinement savourés. Quelques pépites furent plaisantes à lire, en se laissant emporter par le tourbillon induit par ces boucles reliant passé et présent (e.g. L'homme sur le seuil ). Personnellement, à choisir dans ce registre, Poe a néanmoins ma préférence.
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Une lecture qui me réjouissait autant que je ne l'appréhendais.
Étant une adepte de la littérature de Garcia Marquez, le réalisme magique qui caractérise l'oeuvre m'attirait beaucoup. J'ai également entendu d'autres comparaisons avec Lovecraft : le recueil marquait encore un point de plus. J'ai donc sauté le pas, lorsque j'ai vu le recueil sur ma liste de lecture de cet été, pour mon cours de littérature.
MAIS.
Finalement, je suis assez mitigée et frustrée par cette lecture, qui m'a laissé plutôt indifférente, et que je n'ai pas su apprécier à sa juste valeur, à mon grand désarroi. Effectivement, l'abondance d'érudition et de références peut paraitre alléchantes pour toutes celles et ceux qui adorent se cultiver, mais dans le cas de l'Aleph, cette accumulation m'a perdu.
Par ailleurs, la caractérisation alambiquée des personnages les rend finalement assez inaccessibles au lecteur, et peinant à s'identifier à l'un deux, on décroche constamment (d'autant plus que les personnages changent toutes les vingt pages !). J'avais l'impression de passer à côté de pas mal de détails, qui font l'intérêt de la nouvelle en question.
J'espère trouver d'avantage de plaisir et percer les mystères de cette oeuvre, dans le cadre de mon cours à la rentrée.
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