Citations sur Nous étions le sel de la mer (139)
C'est peut-être ça, l'amour (…) : une grâce qui nous élève au-dessus du doute.
Quand il parle de cette mer et de la peau dansante de la nuit, un accent du Sud lui revient, un accent qu’il a appris à trahir dans la froide banlieue de Longueil et que le soir marin ranime tout entier : les « r » roulent dans le ressac, les « u » s’assouplissent en « ou » ondoyants, les « on » se féminisent, s’étirent, soupirent. (p.188)
Cyrille, il disait que toute vérité est mouvante et insaisissable. Ceux qui vont en mer le savent : ce qui est déposé sur la vague se brise et se reconstruit constamment. Autrement. Il disait que le vent, le courant et la houle sont insatiables et qu’il faut être vigilant, même sur une mer d’huile. « Ce qui est là maintenant te fera mentir dans dix minutes. » Il disait que nous n’existions que grâce au mensonge émouvant de la vie.
Peut-être qu'on l'est tous un peu [fou], quand la vie nous arrache le cœur.
Cyrille, il disait que toute vérité est mouvante et insaisissable. Ceux qui vont en mer le savent : ce qui est déposé sur la vague se brise et se reconstruit constamment. Autrement. Il disait que le vent, le courant et la houle sont insatiables et qu'il faut être vigilant, même sur une mer d'huile. « Ce qui est là maintenant te fera mentir dans dix minutes. » Il disait que nous n'existions que grâce au mensonge émouvant de la vie.
On va en mer parce que c'est la seule porte qui s'ouvre quand tu sonnes, parce que ça te réveille la nuit, Catherine. Chaque fois que t'accostes, que t'entres dans la foule, tu sens ta différence. Tu te sens étranger. Tu vas en mer parce que t'es en porte-à-faux avec le monde et qu'y'a juste dans le silence du vent que t'es à ta place. (…) Pour les marins, c'est pas le large qui est compliqué, c'est la terre. On vit et on meurt en mer parce qu'on est fait pour l'horizon.
Des fois, je me dis que la plus grande punition d'un homme, c'est de vivre sans amour.
Quand la coque se tourne vers le large, que les vagues longues et éphémères me hissent au sommet du monde et me ramènent dans leur berceau murmurant ; quand le vent glisse dans le génois et s'appuie dans la grand-voile, alors les doutes s'éparpillent et se dissolvent. Je tends les cordages, manœuvre la barre et l'horizon m'appartient. (…) C'est là que je suis heureuse : dans l'effrayante et tumultueuse majesté du large.
Cyrille, il disait que la mer se suffisait à elle-même, et qu'elle nous suffisait. Il disait que, face aux vagues, le mensonge s'essoufflait à trop se débattre et coulait à pic. Il ajoutait que seuls les gestes francs nous sauvaient quand le vent se levait et mettait des nœuds plein nos voiles.
Quand O’Neil Poirier a vu la coque du voilier se profiler à travers le hublot de sa cabine, il s’est dit que la journée commençait vraiment mal. Poirier, il venait des Îles-de-la-Madeleine, avec son caractère et ses deux aides-pêcheurs. Ils étaient arrivés l’avant-veille à Mont-Louis, le temps de se ravitailler pour rallier l’île d’Anticosti où les attendaient la morue et le hareng. Ils s’étaient couchés tôt, la veille, pour partir avec l’aube, et n’avaient pas entendu le voilier s’amarrer à leur épaule. Le ronronnement de la génératrice avait sûrement couvert les bruits de pas de l’équipage voisin.
(Incipit)