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Critique de Tanvyeboyo


Je remercie d'abord tous les auteurs de critiques précédentes. Leurs contributions donnent envie de lire le petit livre de Patrick Boucheron. J'ajouterai que Boucheron incite à découvrir davantage l'homme que fût Niccolò di Bernardo dei Machiavelli, mais surtout son oeuvre plus large sur son époque, sur les principautés et la fragilité des républiques.
Ainsi, on apprend que Machiavel n'est pas le chantre du machiavélisme et que son oeuvre va bien au delà du ‘Prince'. Ce dernier est un pamphlet subtil de reproches à l'encontre de l'incompétence du prince de Florence. Comment gagner et conserver l'Etat et le pouvoir? La conduite des affaires d'Etat, selon les principes habiles et clairvoyants, doit conduire à une bonne gouvernance, à la stabilité, la paix et à l'ordre établi. Un vadémécum du bon prince et de ses sages conseillers à l'instar de Machiavel. Ce dernier, était-il républicain de coeur ? Sans doute, mais pour lui la souveraineté du peuple exige que le peuple connaisse ses limites dans la compréhension du monde, même si Machiavel considère également que le peuple juge leurs chefs avec justesse.
Quels sont les points faibles des analyses de Machiavel à la lumière de ce texte de Patrick Boucheron ?
A part quelques voyages en France, Machiavel, comme ses contemporains, a peu voyagé en dehors de la péninsule.
N'a-t-il pas vu que le vrai danger pour Florence et l'Italie provenait des superpuissances de l'époque menées par Charles Quint et Louis XII puis François Ier ?
Il a été témoin de la critique sévère de Savonarole de la déliquescence du pouvoir des micro-états tel que Florence. Mais il n'a pas pu imaginer qu'un autre Savonarole, un contemporain, mais plus habile, Martin Luther, pourrait changer l'ordre établi en Europe. Cette mise en cause conduira à la Guerre de 30 Ans et le Traité de Westphalie qui consacrera en Europe du Nord la formalisation de l'Etat nation, une réalité géopolitique qui dépasserait de loin les petites principautés d'Italie ou d'Allemagne.
On ne saurait reprocher à Machiavel de ne pas avoir imaginé l'Italie de Mazzini et Garibaldi, dont la ville, Florence, deviendra la capitale culturelle et linguistique. Aurait-il rejoint Cavour, Mazzini et d'Azeglio et aurait-il compris la célèbre phrase du dernier «Fatta l'Italia, bisogna fare gli italiani»? Ceux qui ont ‘fait l'Italie', sinon des italiens, depuis 160 ans ont dû certainement beaucoup apprendre à le lire.
Le petit livre de Boucheron nous rappelle ces leçons qui sont connues jusqu'en Chine, où ‘Le Prince' est promu comme lecture convenable à côté ‘De la démocratie en Amérique' d'Alexis de Tocqueville.
Par hasard, j'ai lu le livre de Boucheron cet été au même moment où je dévorais le ‘Judas' d'Amos Oz. Immense roman qui évoque incidemment le destin de David Ben Gurion, prince du peuple d'Israël, dont le côté ‘Machiavel', sans toutefois le citer, obsède des protagonistes de l'histoire. Juxtaposition étrange de lectures et preuve pour moi que Machiavel et son héritage sont faits pour ‘philosopher par gros temps'…
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