Décidément, le talent littéraire (prouvé, cela s'entend) se bonifie avec le temps
et «flamboie» quand il retombe
en jeunesse. Une histoire boudjedréenne comme il se doit. La femme, des femmes, l'indépendance, la solitude, l'amour, le sexe, encore du sexe, l' angoisse, la liberté, la vie, la mort
Déjà, rien que le corps de l'histoire est, en lui-même, toute une philosophie de vie : Une jeune femme, Teldj, née en hiver 84 dans les Aurès enneigés, enseignante universitaire (donc autonome financièrement), intellectuelle (car elle pense), libre (elle n'aime pas les hommes
qui, dans son enfance, à l'âge de sept ans, ont tenté de la violer et les terroristes islamistes ont «égorgé» au sein de la clinique où elle travaillait, sa mère, une sage-femme ; l'égorgeur étant un résident devenu par la suite professeur et doyen paradant) et libérée (elle aime les femmes, jeunes et mignonnes de préférence), sportive, ancienne championne olympique du 400 m haies (un parcours d'obstacles très difficile en raison des haies multiples et de la nécessaire précision des gestes, conjuguée à la rapidité) avec, aussi, pour autre spécialité, la course de vitesse...et très belle et mordue de Chine où elle a séjourné en tant qu'enseignante. Pas facile de la rattraper et encore moins de l'attraper !
Avis : Difficile à lire (c'est du Boudjedra, pardi ! avec ses mots, ses petites (ou très longues) phrases qui se mélangent, s'enlacent, se pénètrent, ses échappées, ses mots excessifs et ses jugements tranchants, mais à lire, car c'est une de ses plus belles oeuvres, peut-être la plus aboutie, qui montre aussi que
Rachid Boudjedra reste le plus grand, le plus fort, le meilleur de la littérature algérienne
et plus (+). Avec «
la Répudiation», on a eu les mémoires romancées d'un jeune homme, d'un homme en devenir. Aujourd'hui, on a les mémoires (sous forme de roman et une histoire-alibi) d'un homme-citoyen accompli
L'auteur ne manque pas de multiplier des digressions explicatives parfois pour ce qui concerne les personnalités ou les périodes historiques citées
et des digressions critiques pour expliquer, à sa manière et selon ses idées politiques. Qui ne les connaît, tant sa franchise est proverbiale et claire, défenseur d'une révolution collective et pourfendeur des «
printemps arabes» -dont l'Octobre 88 d' Algérie- derrière lesquels il ne voit que complots et autres manip'extérieurs. Tout y passe : le pays, le système, l'actualité nationale et internationale, la gouvernance, les gouvernants, les dérives
ce qui rend parfois difficile le suivi et compréhension de l'histoire principale. Dans tout cela, ne mâchant pas ses mots, l'islamisme, le terrorisme, le capitalisme, le «système», le machisme, tous en prennent pour leur grade !