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EAN : 9782410006032
288 pages
Editions Belin (31/10/2017)
3.55/5   70 notes
Résumé :
À quelques kilomètres d'Embrun dans les Hautes-Alpes, sur les bords du lac de Serre-Ponçon, jaillit soudain un château aux allures médiévales, le château de Picomtal. Au début des années 2000, les nouveaux propriétaires effectuant des travaux découvrent, au revers des planchers qu'ils sont en train de démonter, des inscriptions.
Cent vingt ans plus tôt, au début des années 1880, le menuisier qui a monté le parquet dans les différentes pièces s'est confié. L'... >Voir plus
Que lire après Le plancher de Joachim Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (29) Voir plus Ajouter une critique
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"Heureux mortel. Quand tu me liras, je ne serai plus."

C'est par ces mots de Joachim Martin que peut commencer cette histoire. Si elle n'est pas extraordinaire, elle est peu banale et très prenante. On est toujours quelque part un peu voyeur, c'est une histoire vraie que j'ai avalée comme un élixir de jouvence. Celui que peut nous distiller le conteur d'une tranche de vie provinciale de la haute Provence du XIXème siècle. Des événements de la petite histoire qu'avec cet ouvrage Jacques-Olivier Boudon raccroche à la grande. Les faits n'existant pas à l'état isolé.

Tout commence lorsque des travaux de rénovation exécutés dans le château de Picomtal, commune de Crots jouxtant Embrun dans les Hautes Alpes, mettent au jour les écrits que l'artisan menuisier, qui avait fait les mêmes travaux de rénovation du plancher cent vingt ans plus tôt, a laissés à notre attention, lecteurs d'un temps futur.

Les lames du plancher qu'il a construit comportent en effet la transcription de propos dont il était sûr qu'ils ne pourraient souffrir ni de contradiction ni de censure, puisque destinés à être découverts en un temps où les protagonistes de son récit ne sauraient être inquiétés par les révélations, parfois sous forme de dénonciations. Combien de pas ont fait grincer les lames de parquet en ignorant qu'ils marchaient sur des confidences, qui elles feraient peut-être grincer des dents ?

Lorsque Jacques-Olivier Boudon apprend de façon fortuite la découverte, quelques années après qu'elle se fût produite, il s'empare du sujet et décide de donner à l'intention initiale de l'auteur de ces écrits une dimension que ce dernier n'eût à coup sûr jamais osé espérer.

En effet, conservée par les propriétaires actuels du château de Picomtal, et offerte aux visiteurs occasionnels, cette découverte aurait pu être cantonnée au sort anecdotique de trouvaille insolite. Mais, livrée à la sagacité de l'éminent historien, cette tranche de vie de Joachim Martin, modeste artisan menuisier, renoue avec l'histoire. Jacques-Olivier Boudon nous confie ainsi un ouvrage dans lequel on identifie parfaitement l'énorme travail de recherche auquel il s'est adonné pour replacer les propos du menuisier dans le contexte social, économique et politique de la fin du XIXème siècle. Celui qui comme moi a une appétence particulière pour l'histoire des simples ballotés par celle des grands sera comblé d'aise.

Le piquant de l'affaire étant l'intention de l'auteur premier, assortie de la précaution qu'il a mise en oeuvre pour s'octroyer la liberté d'ouvrir son coeur, ce qui pourrait se voir qualifier de comédie de moeurs offre un éclairage supplémentaire sur les mutations opérées dans les mentalités au sortir du second empire, alors que notre pays s'ancre dans la république, que le train pose ses rails dans les vallées alpines et que la religion perd son statut d'état. Les prêtres étaient aussi, on le sait, forcément bien placés pour animer les querelles de clocher. On découvre en outre, vieux comme le monde, des sujets que l'on croit nouveaux de nos jours. On ne refait pas le monde, il n'y a jamais que la vitesse qui change.

J'imagine que Jacques-Olivier Boudon reste à l'affût de tous travaux de rénovation qui pourraient intervenir sur d'autres anciens chantiers connus de Joachim Martin. le mutisme étant souverain ferment de toutes les rancoeurs, gageons que notre menuisier aura pu, sous d'autres lames de parquet de la région, soulager son coeur d'obsessions qui le tenaillaient. On n'omettra pas non plus le côté croustillant de certaines révélations qui, c'est le moins que l'on puisse dire, ne sont pas colportée de langue de bois.
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Voici un livre documentaire - témoignage que l'on m'a prêté , assez difficile à lire car pétri de dates, de noms , de nombreuses familles , de leurs ramifications de la fin du XIX ° siècle, mais très intéressant, un genre de puzzle décrypté et analysé remarquablement par l'historien Jacques - Olivier Boudon, ancien élève de l'Ecole Normale supérieure , professeur d'histoire contemporaine à La Sorbonne, les TRACES des Gens du Peuple à cette époque étant rares.

Tout part des travaux que les nouveaux propriétaires du château de Picomtal, sur les bords du lac de Serre- Ponçon, ont engagé au début des années 2000.
Cent vingt ans plus tôt , Joachim Martin , le menuisier qui a monté le parquet a laissé au verso des écrits découverts derrière les lattes .

L'auteur part donc sur les traces de Joachim Martin qui y livre ses pensées, et ses réflexions sans tabou car il sait qu'il ne sera pas lu avant la refonte du plancher avant soixante ou quatre - vingts ans ——«  Heureux mortel. Quand tu me liras, je ne serai plus » .
En fait , il faudra attendre cent vingt ans ...pour découvrir les fameuses planches.
Ces propos se présentent à partir de 72 textes de quelques mots à quelques lignes écrits au crayon par Joachim.

Ces bribes permettent à l'historien de reconstituer l'environnement quotidien,, c'est tout un village qui apparaît , Joachim n'a rien d'un héros .

C'est un silencieux qui perçoit les tiraillements qui traversent son monde: c'est «  la fin des terroirs » , le début de la mutation de la démographie de son village : déjà l'exode rural.

Il dénonce bassesses et corruption des uns et des autres, aussi bien entre notables ou au sein des familles , décrit les nombreuses querelles .
Il écrit en français et non en patois , se passionne pour les faits divers, dénonce l'influence du curé dans un langage cru, il se mêlait de tout , même des relations sexuelles de ses ouailles .

La confession était un moment privilégié de la vie religieuse pour les catholiques,en supposant que les révélations au curé seraient gardées secrètes ......
La forêt pour lui est un lieu mystérieux , propice à la dissimulation ( des centaines d'hectares de bois ) qui ont abrité maintes fois des réfugiés ...
Que sait Joachim des secrets enfouis - là ?
Par contre il éprouve un sentiment positif pour les avancées apportées par la République, s'attarde sur les pratiques sexuelles de ses contemporains .

L'auteur à partir de ce témoignage unique aborde des thématiques diverses : scolarité à l'école laïque et différences avec l'école religieuse ..., religion, politique , il décortique les us et coutumes de la population rurale à cette époque : nombreux petits métiers complètement disparus ,travaux des cultivateurs , normes et codes en partie refusés par la société villageoise que voudraient lui imposer la société et l'église très puissante ....

Un témoignage passionnant faisant revivre une société villageoise confrontée au progrès économique : arrivée du chemin de fer et avènement de la République , aussi une parcelle des moeurs souvent cachées de ce temps là .

Un décryptage unique , original , qui pourrait faire office de «  Reportage ».
L'histoire des gens du peuples , industrieux et méconnus , histoire , bien sûr qui n'apparaît pas dans les livres d'histoire avec un grand H.
Une époque revivant sous nos yeux , j'ai signalé le foisonnement des dates , des lieux , il faut être très attentif et prendre des notes si l'on veut comprendre et saisir ce message d'outre- tombe .
En tout cas l'historien a reçu le prix Georges Goyau
de l'académie française pour cet ouvrage .
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A quelques kilometres d'Embrun dans les hautes alpes, sur les bords de la Durance, s'élève un château aux allures médiévales, le château de Picomtal. Au début des années 2000, les propriétaires découvrent au revers du plancher qu'ils sont en train de rénover, des inscriptions tracées à la mine de plomb. Ses confessions revêtent un caractère exceptionnel.
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L'Histoire m'intéresse depuis toujours (même si parfois je mélange les régimes politiques qui ont suivi la Révolution...). Je m'intéresse encore plus à la microhistoire. Avec cet ouvrage, j'ai été servie ! Qui est Joachim Martin, le menuisier qui a écrit un peu de sa vie et de celle de ses contemporains au dos des planches d'un parquet ? « Il n'a rien d'un héros. C'est un homme du peuple, un petit propriétaire, comme la France en a tant connu alors. Mais c'est surtout un homme qui a voulu transmettre un message à ses descendants. Il a une claire conscience du temps qui passe et veut s'inscrire dans l'histoire. » (p. 15) Sous ses brefs écrits et grâce au travail de recherche et de reconstitution de Jacques-Olivier Boudon, on voit revivre le petit village des Crottes et on suit le passage des saisons, au rythme de la vie quotidienne des habitants. « Quand il dit se contenter d'eau sucrée parce que la soirée précédente a été trop arrosée, il ne manque pas d'en faire part à son lecteur. » (p. 95)

Évidemment, on se délecte des jugements de Martin sur les turpitudes amoureuses et sexuelles de ses voisins. Il dénonce tout, de l'adultère à l'infanticide, en passant par des pratiques très déviantes. « Toujours à l'affût des entorses à la morale chrétienne, Joachim observe avec curiosité les moeurs de ses contemporains. Il a un avantage sur les autres habitants puisqu'il travaille pour l'essentiel à l'intérieur des maisons. » (p. 137) Cette supériorité, le menuisier la cultive en lisant le journal et en s'intéressant à ce qui se passe au-delà de son village. Il ne se laisse pas freiner par le labeur quotidien des petites gens de la campagne : il réfléchit sur les changements politiques et sur son époque et, ne pouvant en être véritablement acteur, s'en veut un témoin sagace et féroce. « Il a trouvé dans l'écriture un substitut à une existence qu'il juge médiocre parce qu'il ne se sent pas reconnu par ses contemporains comme un homme cultivé. Il veut de ce point de vue sortir de sa condition d'anonyme et démontrer à la postériorité ses talents d'écrivain, au risque, en choisissant l'improbable support du revers des planches, de n'être jamais lu. La chance lui a souri. Aujourd'hui, par le truchement d'un livre, Joachim connaît une forme de notoriété qu'il avait manquée de son vivant. » (p. 159)

Je déplore le caractère un peu encyclopédique du début de l'ouvrage, même si je comprends la nécessité d'inscrire le sujet dans son contexte et son environnement. La qualité littéraire du texte est en outre très limitée et la démonstration parfois aride. Mais le sujet est passionnant, ce qui rachète une forme un peu sèche. En fin d'ouvrage, les 72 planches sont transcrites, dans l'ordre où elles ont été trouvées, avec leurs fautes diverses. le plus fascinant est qu'il reste des salles à explorer dans le château de Picomtal : le menuisier des Crottes n'a peut-être pas fini de nous parler de son temps, au dos des lattes et des cales de planchers vieux de plus de 200 ans !
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Une incroyable mine que ces écrits sous un plancher !
L'auteur, Jacques Olivier Boudon, historien spécialiste de Napoléon les découvre par le hasard d'un arrêt au château de Picomtal pour une nuit. En refaisant restaurer les planchers, les propriétaires ont mis à jour ces phrases écrites par le menuisier qui a réalisé les travaux en 1880-81.
Pour les propriétaires du château, c'est l'opportunité d'en faire un spectacle. Pour l'historien, c'est un matériau inestimable !
En effet, rares sont les écrits témoignages de 1ère main d'un homme du peuple. le menuisier ne cherche pas à faire oeuvre de littérature mais à laisser une trace. Il sait que cela ne sera pas lu avant au moins un siècle - il connait la valeur de son plancher ! - il se "lâche" sur ces contemporains, dit ce qui lui passe par la tête, ce qu'il pense des uns et des autres ... sur sa vie aussi car il a plus de 40 ans.
A partir de là, M. Boudon puise tout ce qu'il peut de ces écrits, croise avec d'autres archives, reconstitue la vie de Joachim, de sa famille, du village, des moeurs, bref, tire toutes les ficelles, déroule les pelotes de laine et dresse le portrait d'un village à un moment crucial de notre histoire, l'installation de la république, le début de la fin de la religion, bref, la fin d'un monde.
Certes par moment, je me suis perdue dans les noms, les filiations, les clans car il creuse toutes les galeries. C'est une vraie monographie et c'est passionnant, vraiment ! Il rend la vie de cet homme, de ce village extrêmement présente et attachante.
J'ai hâte de me rendre à Picomtal, aux Crottes - maintenant les Crots. Bientôt !
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critiques presse (2)
NonFiction
18 janvier 2018
Histoire d'un village des Hautes-Alpes vers 1880 à travers le récit rédigé par un menuisier au dos d'un plancher qu'il a posé à l'époque.
Lire la critique sur le site : NonFiction
LeMonde
21 décembre 2017
La chronique sans tabou d’un village alpin à la fin du XIXe siècle a été trouvée sur l’envers d’un plancher. Un puzzle décrypté par l’historien Jacques-Olivier Boudon.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
[L'auteur parle ici du propriétaire du château, et non de Joachim] :

Il recommande également à ses enfants de se marier dans un milieu comparable sur le plan de la fortune et termine son propos par cette projection dans l'avenir qui a dû marquer ses enfants au point qu'ils ont presque complètement rempli ses espérances :
" Voilà comment à votre place je voudrais arranger ma vie. Vous êtes quatre, trois garçons et une fille. L'un de vous serait militaire, un second prêtre, un troisième élève de l’École des chartes et bibliothécaire à Paris. La bonne petite Lydie resterait avec sa mère tant qu'elle vivrait pour la soigner et la consoler quand je ne serai plus là, puis si sa mère venait à lui manquer, elle irait habiter avec son frère l'abbé qui peut être, qui sait ? serait alors évêque."
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«  Heureux mortel.Quand tu me liras , je ne serai plus ».
écrit Joachim Martin sur l’une de ses planches retrouvées » ..
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« Il a trouvé dans l’écriture un substitut à une existence qu’il juge médiocre parce qu’il ne se sent pas reconnu par ses contemporains comme un homme cultivé. Il veut de ce point de vue sortir de sa condition d’anonyme et démontrer à la postériorité ses talents d’écrivain, au risque, en choisissant l’improbable support du revers des planches, de n’être jamais lu. La chance lui a souri. Aujourd’hui, par le truchement d’un livre, Joachim connaît une forme de notoriété qu’il avait manquée de son vivant. » (p. 159)
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Grâce aux écrits découverts sous les parquets, nous disposons d'un peu moins de 4 000 mots laissés par Joachim. Eux aussi nous parlent à leur façon. Tracées au crayon noir, le crayon du menuisier, les phrases laissées par Joachim présentent un aspect généralement régulier; il écrit droit, de manière lisible. Il forme es lettres et n'omet pas les majuscules en début de phrase ou quand il énonce un nom propre. Il écrit en français et n'emploie jamais de mots de patois, ce qui révèle une éducation assez poussée, à une époque où les patois sont encore utilisés par les instituteurs dans l'apprentissage du français.
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Heureux mortel, quand tu me liras, je ne serai plus. Sois plus sage que moi de 15 ans à 25 ne vivant que d'amour et d'eau de vie fesant peu et dépensant beaucoup.
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Videos de Jacques-Olivier Boudon (20) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jacques-Olivier Boudon
Jacques Olivier Boudon vous présente ses ouvrages "Napoléon et l'Aquitaine" et "Napoléon III et l'Aquitaine" aux éditions Memoring.
Retrouvez les livres : https://www.mollat.com/livres/2681670/jacques-olivier-boudon-napoleon-et-l-aquitaine-une-region-entre-fidelite-et-rebellion https://www.mollat.com/livres/2800348/jacques-olivier-boudon-napoleon-iii-et-l-aquitaine
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