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Philippe Philippovitch Transfigouratov est un éminent chirurgien moscovite des années 1920. Un professeur admiré, une sommité mondiale dans le domaine du rajeunissement. Il multiplie les interventions réputées infaisables, et, pour l'essentiel, les réussit. Il se fait aider dans sa tâche par un jeune médecin qu'il a pris sous son aile il y a quelques années : le docteur Bormenthal.

En revanche, ce que l'on peut affirmer, c'est que Le Professeur n'est pas un franc partisan de la révolution de 1917 — voilà bien le moins que l'on puisse dire ! Il occupe un appartement très spacieux, situé rue Pretchistenka. Il est jugé trop luxueux par Schwonder, le représentant des bolcheviks dans son immeuble, qui rêverait de lui amputer de moitié pour pouvoir loger d'autres personnes à la place.

Toutefois, le professeur Transfigouratov a suffisamment de relations en haut lieu pour parvenir à faire ravaler sa langue et trépigner Schwonder et ses sbires… pour le moment. J'écris pour le moment parce qu'il se produit un petit événement qui risque fort de venir perturber le quotidien très actif mais toutefois plutôt tranquille du professeur.

Une expérience, figurez-vous. Oui, une simple expérience, comme il en a déjà réalisées des tas, mais qui, cette fois, concerne un patient un peu spécial. le patient en question est un malheureux, un vagabond, rencontré quasi agonisant, à demi mort de froid et de faim, sous une porte cochère un soir d'automne.

Le malheureux a eu à subir, au surplus, une violente brûlure sur tout le flanc gauche qu'un mauvais coucheur a provoqué en lui balançant sciemment une pleine marmite d'eau bouillante.

N'entretenons pas le mystère plus longuement : ce vagabond n'est pas un homme mais un chien, appartenant à la catégorie grand bâtard, vivant de rapine et fortement sujet aux puces. N'ayant pas de propriétaire avéré, et, par conséquent, pas non plus de nom, le professeur le baptise Bouboul.

Pendant quelque temps, il le soigne convenablement et le remet en forme, faisant disparaître son grand état de maigreur et s'assurant que sa brûlure guérit convenablement. Bouboul, ex-chien pouilleux, loqueteux et quémandeur, vivra donc comme un coq en pâte dans le bel immeuble de la rue Pretchistenka, au grand dam de Schwonder qui juge d'un très mauvais oeil cette introduction d'un animal aussi peu reluisant.

Mais il me semble vous avoir parlé d'une opération qui allait tout déclencher… Eh bien la voici. Un soir, le docteur Bormenthal arrive essoufflé et tout content, porteur d'un petit flacon contenant un matériel glandulaire fraîchement prélevé sur un humain fraîchement décédé. Il s'agit des testicules et de l'hypophyse du défunt, au demeurant, notoire alcoolique et volontiers fainéant des environs.

Le professeur Transfigouratov va donc s'employer à réaliser une première médicale qui va boubouleverser sa vie, si vous me pardonnez cette facilité langagière. Considérant, de surcroît, que j'en ai déjà dévoilé beaucoup pour un livre aussi petit, il me semble bienvenu d'arrêter ici ma présentation de l'histoire afin de vous en laisser jouir si le coeur vous en dit — Coeur de chien, cela va sans dire.

Voilà donc une farce à caractère corrosif, mais sans excès, une dénonciation douce tant d'un système naissant, le communisme, que d'une dérive médicale poussant à tenter n'importe quoi sur n'importe qui, tels des docteurs Frankenstein du XXème siècle.

Bien évidemment, l'infortuné Mikhaïl Boulgakov n'imaginait pas encore que, dès la fin de ce même XXème siècle, on serait capable de dessiner plein de moutons à tous les petits princes de la Terre des hommes, en les clonant tout simplement et en les baptisant Dolly n° 1, n° 2, n° 3, etc. Et je ne vous parle même pas des apprentis Frankenstein ou Transfigouratov du XXIème siècle, dont on a cruellement l'impression qu'ils n'ont pas toujours tiré les enseignement des chimères du passé…

Un livre assez drôle, donc, sans être hilarant non plus, qui se lit vite sans appartenir, selon moi, à la catégorie des chefs-d'oeuvre intemporels. Divertissant sans être niais, voilà tout. Bien entendu, ce que j'exprime ici n'est qu'un chien d'avis, c'est-à-dire, pas grand-chose. Waf !
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Le professeur Philippe Philippovitch, chirurgien moscovite renommé qui exerce son activité dans un vaste et luxueux appartement, voit un jour se présenter à sa porte le comité d'immeuble qui prétend réquisitionner une pièce pour un nouveau locataire. Philippovitch se débarrasse promptement des opportuns en faisant intervenir une de ses relations. Il est pressé de commencer une intervention sur le chien Bouboul, ramassé dans la rue. Son idée est de greffer sur l'animal testicules et hypophyse humains en vue de tester leur rôle dans le rajeunissement. Mais opéré, bientôt le chien se transforme en un homme sans-gêne, grossier, et incontrôlable.

La créature chien-homme née des manipulations du docteur Philippe Philippovitch, sorte de docteur Frankenstein, est on le comprend ensuite l'incarnation de l'homo sovieticus, un être qui par son indifférence au bien commun, entre autres, oppose une résistance à l'endoctrinement. Bien qu'écrite en 1925, avant la nuit noire du stalinisme, cette remarquable satire de la société soviétique des années 20 ne fut publiée en URSS qu'en 1987, jugée contre-révolutionnaire — comme d'ailleurs son auteur qui pu néanmoins toute sa vie travailler dans son pays, mais muselé.

« Supposez que nous ayons une guerre contre les rapaces impérialistes ?
— Moi, je ne vais pas aller faire la guerre où que ce soit ! jappa soudain Bouboulov ...»

Challenge MULTI-DÉFIS 2020
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Tout commence très simplement : un chien errant dans les rues qui gémit de douleur, un geste de charité, de compassion, et voilà Bouboul - pauvre bête souffrante qui vient de se faire ébouillanter par un cuisinier - dûment adopté par le Professeur Philippe Philippovitch. Histoire a priori tristement banale de maltraitance animale et de sauvetage in extremis, sauf que le Professeur Philippe Philippovitch, chirurgien et chercheur renommé à la pointe de l'innovation, ne voit bientôt plus en ce chien que l'occasion de mener à bien le projet susceptible d'être le couronnement de sa carrière : la conquête et la maîtrise des processus du rajeunissement.

Funestes perspectives pour le pauvre Bouboul… Mais jouer les apprentis sorciers n'est généralement pas une bonne idée et il s'avèrera bien vite que greffer à un chien l'hypophyse et les testicules d'un jeune voyou qui fut de son vivant voleur, menteur et alcoolique n'en est pas une non plus. S'ensuit une série d'aventure rocambolesques où le chien Bouboul, métamorphosé en humain et rebaptisé Bouboulov, fera subir avec jubilation à son entourage tous les sévices que lui inspirera sa nouvelle personnalité de crapule revancharde, méchante et bornée… caricature de l'homme soviétique en gestation.

Avec “Coeur de chien” (écrit en 1925 mais qui ne sera pas publié en Russie avant 1987), petit texte qui renouvelle, sur le mode animal, le thème de Frankenstein et anticipe également les expérimentations médicales qui seront plus tard monnaie courante dans le monde communiste, Boulgakov s'en donne à coeur joie dans la description de tout ce qu'il peut y avoir de plus médiocre et de plus laid dans la nature humaine tout en se livrant - sous les apparences inoffensives d'un conte grotesque - à une critique en règle de la société corrompue, mesquine, vulgaire et bêtement fanatique de la Russie soviétique des années vingt.

C'est ironique, drôle, mordant, plein de fantaisie et parfois glaçant, mais n'a pas, loin s'en faut, l'envergure de ce qui sera, bien des années plus tard, son chef-d'oeuvre : “Le Maître et Marguerite”. Un roman intelligent et distrayant mais un peu anecdotique, comme le sont bien souvent les oeuvres de jeunesse des futures grandes plumes de la littérature.

[Challenge Multi-Défis 2020]
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Bouboul est un chien errant moscovite.
Un soir de galère dans le froid polaire de la jeune URSS, il a tiré le gros lot des canidés: un nouveau maitre en la personne du chirurgien Philippe Philippovitch Transfigouratov, qui prend rang de divinité dans sa cervelle de chien.
Pauvre Bouboul! C'est bien de cervelle qu'il s'agit car il se retrouve chien de laboratoire, greffé de testicules et hypophyse humaines.

Et les résultats dépassent les espérances du chirurgien. le chien devient homme, en corps et esprit: Bouboulov, un individu ingérable et mal dégrossi, allégorie du nouvel Homme russe communiste.

Sur fond de musique de Verdi et de balalaïka, la liberté de ton dans ce petit livre humoristique et décalé est un plaisir. La littérature russe du 20e siècle ne nous a pas habitués à cette écriture caustique et jubilatoire.
En 1925, la chape de plomb stalinienne est en devenir. On trouve quelques beaux restes aristocratiques, la bienséance a encore court, la pratique des langues étrangères également, les prénoms-patronymes restent une marque de respect face à la familiarité du nom de famille. Mais les appartements communautaires et des règles de vie collective se développent, accompagnés de criminalité et perte de valeurs de société.

Boulgakov peut donc encore se permettre cette caricature littéraire, en liberté d'écrivain critique d'un système politique dogmatique. Cette satire, jugée néanmoins contre-révolutionnaire, ne sera éditée qu'à l'étranger et devra attendre 1987 pour sa publication en URSS.
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Coeur de chien est une nouvelle satirique et fantastique écrite en 1925. C'est aussi une allégorie de la Révolution russe. Malgré de nombreuses tractations, la nouvelle n'obtiendra pas le visa de censure et ne sera pas publiée en Russie avant 1987.
C'est l'histoire de Bouboul un brave chien errant qui crève de froid et de faim. Il est recueilli par un éminent professeur spécialisé dans les cures de rajeunissement ce qui vaut à ce dernier des privilèges, un grand appartement en particulier et la rancune tenace du président du comité de son immeuble. le professeur Philipov Philipovitch Transfigourov fait subir à Bouboul une opération fameuse. le voilà transformé en homme avec un coeur de chien. Enfin de chien…Il deviendra de la pire espèce humaine… servile et cruel.
C'est drôle et…mordant. Boulgakov était un fin connaisseur de Molière et un digne successeur de Gogol. Les dialogues sont ciselés, vifs, hilarants, tout le monde en prend pour son grade, du grand médecin méprisant aux cadres zélés qui sévissent dans l'appartement. Beaucoup de farce, de burlesque, de grotesque mais aussi d'ironie incisive pour montrer la corruption qui avilit en un rien de temps le petit prolétaire Bouboulov pour le transformer en brute épaisse. L'utopie égalitariste de la Révolution s'est fracassée socialement et moralement. Après l'opération chirurgicale qui arrive à la moitié du livre, le rire devient donc amer. le savant fou qui a joué à l'apprenti sorcier et qui représente l'intelligentsia, a littéralement créé un homme nouveau. Et il n'est pas beau.
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Hiver russe de 1924, le chien Bouboule se mourant de faim et de froid est recueilli par Transfigouratov, chirurgien bien nommé se livrant à des expériences qui si elles n'ont pas le but recherché n'en seront pas moins passionnantes.

Faisant évoluer dans les appartements l'aide plein d'admiration, la jeune femme de chambre Zinia, la cuisinière Daria et les irruptions de Schwonder, président du comité d'immeuble jaloux des privilèges du savant, c'est tout le petit monde de Moscou qu'on découvre.

Soutenue par une chouette traduction, l'écriture de Boulgakov est jubilatoire et terriblement suggestive. Quelques mots suffisent à visualiser à la fois une situation, le personnage et son désarroi.
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Le chien n'est pas un animal comme un autre. Il a, pour nos yeux d'êtres humains, une valeur qui varie suivant les époques, les régions du monde ou encore les situations dans lesquelles nous nous trouvons. Ainsi les francophones que nous sommes considérons le chien comme le meilleur ami de l'homme tout en conservant le mot dans notre gamme peu reluisante d'insultes (quel chien! Fils de chien). Il en va de même pour la langue russe. Собака désigne autant le canidé que la personne que l'on injective. Dans d'autres régions du monde, cet animal a un rôle utile, je pense notamment au Grand Nord où des meutes de chiens deviennent des moyens de locomotion dès qu'elles sont attachées à des traîneaux (rappelez-vous L'Appel de la forêt de Jack London). Et que dire de ces boules de poils en Asie qui se révèlent être des objets d'attention à la limite du jouet alors qu'il existe encore, à quelques kilomètres de là, des élevages de chiens destinés à être … mangés!

Boulgakov, lui, aura utilisé le symbole du canidé dans son roman Coeur de chien afin de créer une histoire satirique dans la Russie des années 1920, c'est-à-dire juste après la révolution d'Octobre et avant l'arrivée de Staline. Ce livre est l'antichambre de son chef-d'oeuvre le Maître et Marguerite, on y reconnaît déjà le style particulier et décalé qui continue de faire le succès de l'auteur russe. Analyse.

L'histoire est celle de Bouboul, un chien errant dans les rues glaciales de Moscou, qui est recueilli par l'illustre chirurgien Philippe Philippovitch Transfigouratov. Ce dernier tente une opération expérimentale qui consiste à remplacer l'hypophyse du chien par celle d'un humain à peine décédé. Au fur et à mesure de sa convalescence Bouboul se transforme en un être grossier et alcoolique. Il ne tardera pas à se faire enrôler dans les nouveaux comités d'État autoproclamés afin de devenir une personne à part entière de la société moscovite. Avec Coeur de chienBoulgakov crée une histoire qui se situe à mi-chemin entre Frankenstein et la satire politique. C'est ainsi que la première partie du roman se concentre sur la vie de Bouboul en tant que canidé et de sa métamorphose inattendue. 😉

« À 1 heure 13, profond évanouissement du prof. Transfigouratov. En tombant s'est cogné la tête contre un barreau de chaise. Température. En ma présence et celle de Zina, le chien (si on peut encore l'appeler chien) a insulté le prof. Transfigouratov en termes grossiers.

[…]

À cinq heures de l'après-midi, un événement. Pour la première fois, les mots prononcés par les individus n'ont pas été arrachés aux phénomènes ambiants mais provoqués par eux. À savoir, quand le professeur lui a dit d'un ton de commandement « ne jette pas les restes par terre », il lui a répondu de façon imprévue : « Ta gueule, fumier ».

Philippe Philippovitch fut consterné, puis il se reprit et dit :

— Si tu te permets encore une fois de m'injurier moi ou le docteur, tu recevras une volée.

À cet instant, j'étais entrain de photographier Bouboul. Je jure qu'il a compris les paroles du professeur. Une ombre sinistre est tombée sur son visage. Il a eu un regard en-dessous, assez irrité, mais il s'est tu.

Hourra, il comprend! »

L'auteur russe utilise ainsi sa patte stylistique si particulière faite de dérision mais aussi de son expérience (Boulgakov fut médecin avant d'être écrivain) pour décrire l'évolution du chien vers un être humain aux allures d'ivrogne.

Il ne s'arrête d'ailleurs pas là puisqu'il tourne en dérision cette période de l'après révolution d'Octobre (1917) où les bolcheviques se désignaient eux-mêmes à la tête de comités créés de toutes pièces et octroyaient des fonctions à quiconque voulait être membre du parti. le Comité d'immeuble dont il est souvent question dans Coeur de chien, n'est ni plus ni moins une satire de cette époque. Schwonder, le responsable dudit Comité est décrit comme un être vil, ignorant et prêt à tout pour exercer son petit pouvoir. Ce personnage a d'ailleurs marqué la littérature russe puisqu'il est entré dans le vocabulaire courant. En Russie si quelqu'un vous traite de Schwonder cela veut dire que votre interlocuteur pense que vous êtes sournois et opportuniste 😉. Boulgakov aura donc laissé des traces dans le langage usuel, n'est-ce pas là la marque des grands auteurs ?

“Réunion plénière du comité d'immeuble présidé par Schwonder. Pour quoi faire, ils ne le savent pas eux-mêmes.”

Ce livre est, peut-être, aussi l'occasion de faire connaissance avec les particularités des noms russes puisque chaque personnage a un patronyme qui s'intercale entre le prénom et le nom de famille. Ainsi dans le nom du professeur Philippe Philippovitch Transfigouratov nous pouvons aisément retrouver le prénom du père de ce dernier. En Russie, les personnes s'appellent souvent par leur prénom et leur patronyme tel un signe de politesse, à l'instar de notre “Madame”, “Monsieur” en français. Et Boulgakov de jouer, à nouveau, de cette particularité en donnant le nom désopilant de Polygraphe Polygraphitch Bouboulov au personnage principal de son livre.

En conclusion, Coeur de chien sans être du niveau d'un Maître et Marguerite montre déjà l'imagination débordante de Mikhaïl Boulgakov et de son goût prononcé pour se moquer de son époque. L'histoire, bien ficelée, mets en avant les frasques de Bouboul qui se fait mener par le bout du museau par chaque être humain qu'il rencontre, et ce, jusqu'à l'épilogue. le roman de Boulgakov est finalement bien plus qu'une pure dérision ou satire, il nous donne aussi à lire, en filigrane, une certaine morale qui pourrait être celle-ci: l'ignorance rend bête.
Lien : https://lespetitesanalyses.c..
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Ici, on ne retrouve pas l'atmosphère habituelle de la littérature russe, il s'agit d'une satire de la société soviétique des années 20.
A travers bouboulov, chien errant recueilli puis transformé en citoyen, homme de parti, grâce à une opération, M. Boulgakov dépeint non sans humour le système soviétique et ne se prive pas de critiquer de façon acerbe les rouages de la bureaucratie et le communisme .
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C'est un petit roman (comparé au Maître et Marguerite) du grand Boulgakov , roman qui aurait du être publié en 1925, avant que la chape de l'horreur stalinienne ne vienne s'abattre, mais qui sera quand même interdit par la censure de l'époque.

Il faut dire que ce roman au caractère fantastique et complètement burlesque, dans la lignée d'un Gogol, dresse un portrait sans concession de cette époque, où la bêtise et la corruption faisaient bon ménage, où des êtres opportunistes et sans scrupules se mettaient à la tête de comités dits prolétaires pour conquérir un petit pouvoir.

Boulgakov nous raconte, avec l'ironie mordante qui le caractérise, une histoire improbable dans laquelle un pauvre chien errant et maltraité dénommé Bouboul deviendra le sujet d'une « première » chirurgicale mondiale réalisée par un chirurgien que l'on qualifierait de nos jours de chirurgien esthétique, Philippe Philippovitch Transfigouratov (sic). Ce dernier, un expérimentateur infatigable, va greffer à Bouboul les testicules et l'hypophyse d'un homme qui vient de décéder (et dont on apprendra que c'était un délinquant et un ivrogne).

Bouboul deviendra en quelques semaines un homme, mais quel homme!, ce Polygraphe Polygraphovitch Bouboulov! , grossier, brutal, lâche, et qui, en s'alliant au Président du Comité de Quartier, se retournera contre son chirurgien qui regrettera d'avoir joué les apprentis sorciers, jusqu'à un retournement final dont je ne dirai rien. Bref, une sorte de variation loufoque sur le thème de Frankenstein. Et c'est mené rondement à la façon d'une pièce de théâtre, avec d'autres personnages hauts en couleurs, l'Assistant Bormenthal, la servante Zina, la cuisinière Daria Petrovna, etc…et avec des scènes parfois désopilantes, parfois d'une ironie cruelle.

Mais Coeur de Chien, c'est aussi une critique en règle de la bêtise de cette société mesquine qui se met en place, de cet Homo Sovieticus qui ne fera pas rêver. …Et dont Boulgakov souffrira toute sa vie.

Bien sûr, on doit concéder que ce roman ne se hisse pas à la hauteur du chef-d'oeuvre absolu qu'est le Maître et Marguerite, mais, c'est quand même une oeuvre unique, ce « Coeur de Chien », Et vous le valez bien! cher Mikhaïl Boulgakov.
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Bonjour les ami(e)s babélio !
Me revoilà après une petite absence, durant laquelle j'ai découvert entre autre, un petit village que tout amoureux du livre devrait aller visiter une fois dans sa vie : Bécherel, en Ile-et-Vilaine. La caverne d'Ali-Baba du livre !

Après cette petite introduction, venons-en à Coeur de chien.

Vous voulez vous refaire une beauté ? Arranger quelques plis disgracieux ou mieux, les supprimer ? Rajeunir ? Ne cherchez plus, je vous ai trouvé un médecin : le professeur Préobrajenski, à Moscou. le cabinet de cet éminent chirurgien ne désemplit pas malgré les temps troublés d'après la révolution de 1917.
Un jour, le professeur recueille un chien errant, affamé, dans un piteux état et le nomme Boule. Aidé du docteur Bormenthal et de Zina la gouvernante, le professeur tente, sur le chien, une opération que personne n'eut jamais tentée. Ni pensée d'ailleurs ! Tant elle est... comment dire... Ah, tant pis, vous n'avez qu'à lire le livre ! Tout ce que je peux vous dire est que cette opération aura un succès inespéré puisque Boule deviendra...
C'est délicieux, hilarant, grotesque, avec des scènes dignes des grands vaudevilles. Qu'est-ce que j'aimerais voir une pièce de théâtre issue de ce roman !

Derrière la joie de la lecture, l'auteur met l'accent sur l'absurdité du système bolchevique nouvellement mis en place, sur l'aberration de certaines situations et la stupidité des nouveaux "chefs" à tous les échelons.
Ce pourquoi, Coeur de chien, rédigé en 1925, fut immédiatement censuré et ne parut à Moscou, en une édition unique, qu'en 1990.

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