J'avais envie d'exister à leurs yeux.
Comme à ceux de ma mère, je l'avoue.
Mais elle était pire qu'eux, elle me rejetait, alors qu'ils (ses frères)
se contentaient de ne pas me voir.
_Comment va maman ?
_Elle s'ennuie.
_Rien de nouveau, donc.
_Tu ne vas pas la voir ?
_J'irais si ça lui faisait plaisir, mais quand j'entre dans sa chambre c'est toujours une déception.
Il ne comprenait plus son époque, la jugeait faite de fausses valeurs et de faux-semblants. Une certaine bien-pensance neutralisait le libre arbitre, la culpabilisation était le nouveau credo. Pendant ce temps-là, la planète était de nouveau à feu et à sang pour d'éternelles guerres de religion, la terre entière se détruisait tout en le niant, les yeux obstinément fermés. Mathieu ne voyait nulle raison d'espérer.
Se sentait-il sur la voie de la guérison ? Sauf qu'il n'était pas malade, seulement épuisé par toutes ces années d'hyperactivité qu'il s'était imposées. L'envie de réussir, de prouver que sa passion le ferait vivre et que son énergie triompherait de toutes les difficultés l'avait mené au bord du gouffre.
Il aurait mieux fait de l’écouter au lieu de poursuivre ce but ingrat : augmenter le chiffre d’affaires. Comme quoi la réussite était un vertige, un engrenage, un piège.
La soirée à venir lui apparaissait comme une épreuve. Faire la conversation, mimer la gaieté ou même un simple bien-être allait lui demander des efforts considérables, et il s'en voulait d'être dans un tel état de rejet. Bon sang, il aimait Tess, il adorait sa fille, pourtant il aurait donné n'importe quoi pour qu'elles s'en aillent ! Il faillit le dire, parvint de justesse à s'en empêcher, mais cette petite victoire sur lui-même ne lui apporta aucune satisfaction.
--Fichu César, maudite baraque!ragea Mathieu en appuyant sur le disjoncteur.
L'électricité revint et la roue du compteur se mit à tourner lentement.Dans la lumière chiche de l'ampoule qui pendait à une poutre ,la grange paraissait sinistre.Mathieu éteignit sa torche,lâcha un soupir et frissonna.....
Et puis un beau matin : plus rien.
Ressort cassé sans raison.
Je me suis levé en pensant que le mieux serait d’entrer dans la mer pour m’y noyer.
N'enfouissez pas les conflits non réglés au fond de votre tête, ils finissent par ressurgir au moment où on s'y attend le moins.
Se sentait-il sur la voie de la guérison? Sauf qu'il n'était pas malade, seulement épuisé par toutes ces années d'hyperactivité qu'il s'était imposées. L'envie de réussir, de prouver que sa passion le ferait vivre et que son énergie triompherait de toutes les difficultés, l'avait mené au bord du gouffre. Comprenant qu'il risquait d'être consumé par le fameux burn-out - pudique synonyme de la dépression - il avait tout arrêté. Depuis, il refusait de songer à ce qui pouvait bien se passer en son absence. Privé de capitaine, son navire était peut-être en train de sombrer, néanmoins il ne voulait pas se poser la question.