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EAN : 9782351220894
160 pages
Editions Sulliver (18/10/2012)
4.43/5   14 notes
Résumé :
Claire est psychologue, elle vient de rencontrer un nouveau patient. Antony a dix-neuf ans, l'âge de l enfant qu'elle n a pas eu. Celui-là, Claire a décidé de le sauver, comme on ramasse les morceaux. Mais sur la route, les débris. Les siens. Les leurs. Les nôtres. Autour d Antony, Monsieur Zed, le Cyclope, Fatima et Papillon repeuplent ce désert asilaire de leur forêt mentale, labyrinthe de toutes ces vies qu'on fracasse contre les murs de la nuit sécuritaire. Clai... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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La nuit, forteresse géante où cogne sur les murs blindés la jérémiade des rebuts, des fous, des parasites.

On les entend les chiens, ils hurlent comme des loups en cage. La souffrance est une plaie ouverte d'où coule une hémorragie sans fin.

L'hopital psychiatrique dans la nuit, dans les murs ouvrent ses grilles pour soigner des âmes en peine et en déroute. Médicaments, camisole, mutisme, ils finissent tous encore plus fous.

La psychologue Claire a en charge les patients de l'hôpital psychiatrique, sauver les âmes, les guérir, les comprendre. Surtout lui, Anthony 19 ans qui lui rappelle l'enfant qu'elle n'a pas eu il y a 19 ans... Il a toujours eu beaucoup d'amour à donner, Anthony et personne qui n'en a jamais voulu de son amour.
Alors dans la cage aux fous, dans la cage de ceux qui vivent mal avec la souffrance, de ceux qui écorchent leur peau à la lame du chagrin, il y a tous les fantômes, les vampires partout qui menacent entre les murs. La guerre est intérieur. Anthony et les autres autant de colis en souffrance en transit dans les non-lieux du no man's land.

La marge est faible et fragile entre Claire et ses patients. L'écho du malheur résonne en elle, les orgues jouent la pléiade de la mélancolie, elle tombe, se relève, espère, désespère. Ses doigts se crispent et se détendent : index, majeur, annulaire, auriculaire et retour.

Nous voilà plongés dans le noir à entendre les plaintes, les gémissements, les appels à l'aide, plongés dans une brume puissante à la force de mots saccadés. Une logorrhée de mots à maux qui fait de ce roman un récit sanglant et poignant au coeur même de ces laissés pour compte dont le bonheur n'a pas voulu d'eux.

Index, majeur, annulaire, auriculaire et retour.

Quelque part dans la nuit des chiens...

Aboient,
Dorment,
Agonisent,
Supplient,
Espèrent,
Dorment,
Hurlent,
Cognent,
Espèrent,

Oui, quelque part au bout de la nuit, la lumière les attend.
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Tu vois, Léo, cela faisait longtemps que je n'avais pas pris la peine de t'écouter. Toi l'anar..
C'est ce livre qui m'a rappelé combien tes mots me bouleversaient, et ce matin, ta voix me rappelle la violence et l'ennui...

«  Nous de l'autre côté de la terre et des phrases
Nous des marges Nous des routes Nous des bordels
intelligents

O ma soeur la Violence nous sommes tes enfants
Les pavés se retournent et poussent en dedans  »

Tu sais, Claire, il faudrait être bien endurci et imperturbable pour ne pas prendre en pleine face, ton dévouement aux fous, tes amours fichues, ta pudeur, cette blessure...

« Cette blessure
Où meurt la mer comme un chagrin de chair
Où va la vie germer dans le désert
Qui fait de sang la blancheur des berceaux
Qui se referme au marbre du tombeau
Cette blessure d'où je viens »

Et toi, Antony, que dire de tes peines, de ces tracas qui te lassent et te fracassent, de ta folie...

« La chaise de van Gogh où tu ne t'assieds pas
Les souliers de Vincent que tu ne chausses pas
L'oreille de ce mec qui ne t'écoute plus
Ces corbeaux dans le blé d'une toile perdue

Je ne m'arrête plus quand je vois la folie
Je fais ses commissions et couche dans son lit »

Et vous, Monsieur Zed, le Cyclope, Fatima et Papillon, comment ne pas être touché par vos aberrations, par votre perdition, par votre désespoir, par votre solitude...

« il est inutile de regarder
devant vous car devant c'est derrière, la nuit c'est le jour. Et...

La solitude... »

Alors, oui, Sandrine, j'ai aimé votre premier livre, j'ai aimé ces mots que vous jetez sur la page blanche comme Van Gogh, au couteau, peignait de gestes saccadés et furieux les près, les champs, le ciel...Et peu importe si vos phrases sont tordues, dédaigneuses de la syntaxe et tellement déroutantes. Elles sont à l'image d'une volonté non-conformiste, d'une révolte qui couve, tout le long du roman. Révolte contre cette loi passée sous le gouvernement Sarkozy, loi « relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge. », qui donne bien trop de pouvoir au préfet, amoindrit celui des psychiatres et transforme le milieu psychiatrique en milieu carcéral.

Merci à l'opération Masse Critique, aux éditions Sulliver pour l'envoi de ce roman fort. Et merci bien sûr à Dixie qui par son merveilleux texte m'a donné envie de lire « Quelque part dans la nuit des chiens »
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Tu vois c'est rien que ça
c'est rien que de la folie
enfermer pour sécuriser
soigner contre son gré
alors tu écris
entre en résistance
Outre-noir sans mémoire
fausseté sur les mots
brossés dénaturés
en HP jeté-e-s là
blanches et blasées
Quelque part
dans la nuit
des chiens

Sandrine
Bourguignon

Tu vois c'est rien que ça
c'est rien qu'un boulot
t'es là derrière mon dos
les mains crispées
brûlées par le thé
à faire semblant d'écouter
pendant que je crache
haines et souffrances
tu panses

Fatima

Tu vois c'est rien que ça
c'est rien que des mots
des silences et des non-dits
qui gueulent à chialer
à me faire cramer la peau
le crâne à vif
moitié de cheveux fondus
qui me tuent

Antony

Tu vois c'est rien que ça
c'est rien que l'eau salée
le matin dans la gorge
coulent quarante ans
sans embruns
l'oeil absent aux aguets
veille et vacille
Monsieur Zed
toujours en vie

Cyclope

Tu vois c'est rien que ça
c'est rien qu'un livre offert
pour mon anniversaire
que j'ai pas su lâcher
écorchée par les mots
à distance vouloir rester
c'est sans compter
les yeux rivés s'accrochent
aux pages qui filent
et tissent la vie
de Claire et ceux-nous-autres écorchés
paumés comme des chiens
Quelque part
dans la nuit

Dixie pour dire Ellane Merci
Lien : http://page39.eklablog.com/q..
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Ce roman est une claque magistrale que je viens de me prendre en pleine figure.
C'est un livre qui me parle tellement, qui parle de la souffrance psychique mais aussi de son traitement dans les hôpitaux psychiatriques et dans le monde en général, de l'indifférence et du désespoir qui peut nous habiter.
C'est d'un style violent, haché, percutant, mais poétique et toujours criant de vérité.
C'est un texte qui dénonce notamment la violence d'une politique ultra sécuritaire, qui est plein de bon sens et d'humanité.
C'est émouvant, c'est beau, c'est triste, c'est vrai, c'est sensible.
C'est un texte parfait, un réel coup de coeur mais surtout un coup au coeur.
Je sors réellement chamboulée de ma lecture, c'est un livre que je n'oublierai pas de sitôt...
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J'ai pas pu ! Pas pu venir écrire une critique à chaud, parce que le coeur gros comme la terre, parce que l'esprit chamboulé, l'âme déchiré par ce que je venais de lire... Et même là, à froid, je peux pas... Je ne peux pas trouver les mots, les phrases, qui mettront en évidence la claque littéraire que je me suis prise... Je peux pas pas... parce que ce livre m'habite encore et m'habiteras longtemps ! Très difficile pour moi de trouver l'angle à prendre, de rendre mon ressenti, et pourtant, je ne suis pas avare de mots habituellement.

Ce livre m'a déchiré, chamboulé, bouleversé... Cette histoire, ces histoires ont résonné dans ma chair, dans mon coeur, dans mon âme... Chaque parcelle de ma peau a frisonnée. Chaque phrase m'est apparu comme un écho venu de je ne sais où. Des mots qui vont droit au coeur et vous le broie. Tout a fait du sens pour moi, tout ! Et Bourguignon écrit tellement bien... ce genre de style incisif, intrusif, martelé, brut, à vif, poignant...

J'y arrive pas ! J'ai beau essayé... ma critique s'arrête ici... parce que j'ai encore le coeur qui bat à cent à l'heure en repensant à ce livre... parce que j'ai les yeux qui baignent, parce que mes doigts s'arrêtent sur chaque mot, parce que tout ce que je peux en dire de plus c'est que c'est un livre à mettre dans toutes les mains... Un vrai de vrai coup de coeur... Et pour piquer une phrase d'Ariane84, un véritable coup au coeur !
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Moi je m'en suis pris plein la houle, des rincées bien salées sur le pont. Je peux vous dire que ça n'a jamais soigné personne. La déferlante de vos lois comme des vagues scélérates. On nous fout la tête sous l'eau depuis des siècles mais moi je suis fort en apnée, vous ne me noierez pas comme un chaton au fond d'un sac de jute.
Je sais quand ça gîte.
J'avais treize ans la première fois, la mer complètement saoule avec sa gueule ouverte, qui vous crache dessus qui s'engouffre et vous fout des trempes.
La vorace une ogresse.
Si elle ne m'a pas avalé vous n'êtes pas prêt de m'engloutir.
Je viens du déluge et vos torrents de lois qui nous tabassent et nous régurgitent comme des arêtes coincées dans la gorge, c'est pacotille.
Vous ne voyez que mes œuvres mortes mais sous la surface la carène c'est du solide.
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Quelques lumières aux fenêtres. Elle aime ce silence, après les larmes, quand les lueurs du jour reviennent comme ça, sans raison.

Gorgées de café et les yeux qui se ferment un instant.

Prendre le temps avant de le donner.

Chacun vaque à son vide. Vacances d'hôpital. Déserts intérieurs.

Personne ne saura jamais pourquoi on s'échoue.

Il a menacé sa mère avec un couteau. Pas facile le gamin. Claire l'observe par le hublot de la chambre.

Dégingandé les oreilles décollées tout maigre.

Elle entre. Le détache. Elle n'a pas le droit mais c'est ainsi, la condition qu'elle met toujours. Ne pas parler à un homme attaché. L'équipe s'y est résolue. C'est en quelque sorte sa lubie.

Les jours d'enjour, les nuits d'ennui. L'an nuit.

Autrefois quand il partait, elle agonisait pendant des semaines. C'était presque bon, de l'amour comme ça qui saigne, le couteau dans la plaie. Aujourd'hui quand il s'en va, c'est juste un petit morceau d'amour qui reste coincé dans la porte, la gorge.

Vogue la galère, perpétuité sur ordonnance.

Le jour qui s'entame, ça le vulnère toujours un peu.

A quoi bon repérer le nord, autant le perdre.

La vie, ça vaut la peine d'essayer, parfois.

En amalgamant la folie à une pure dangerosité sociale, en assimilant d'une façon calculée la maladie mentale à la délinquance, on justifie un plan de mesures sécuritaires inacceptable.

Juste un désespoir qui coagule, ça fait des caillots dans la cervelle.

C'est parce qu'on interdit aux patients un peu plus d'exister, qu'ils se cognent contre les murs.

La sécurité, l'ordre public. Médicalisation absolue de l'existence.

Questionnaire d'évaluation et auto-questionnaire, diagnostic scientifique. Les déficits, les retards, troubles de l'humeur du comportement de la personnalité, ça fait des croix dans des cases. Des symptômes, pas des hommes.

Elle n'arrive pas à se convaincre qu'il faille persuader les gens de vivre.

Nul n'est à l'abri des grandes marées du délire.

Ça viendra jusqu'à vous cul sec.

La vie ne nous a pas fait crédit ni aucune ristourne, alors on resquille.

Il ne comprend pas au nom de quoi on oblige un homme à avoir un logis s'il a décidé de vivre nomade.

On a pas seulement sabré nos métiers, ces quarante dernières années.

On a torpillé les hommes.
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On ne peut pas toujours les garder on aimerait bien mais on ne peut pas.
Tu comprends, qu'ils disent.
Et Claire ne comprend pas.
Elle n'admettra jamais qu'on les fasse sortir quand ils vont à peine mieux même pas bien. Elle voudrait qu'on les garde qu'on les couve.
S'il faut s'en séparer, qu'on s'en sépare quand ils sont guéris pas avant.
Consolidés, pas branlants chancelants fendus comme des copeaux.
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Les fantômes les vampires partout qui menacent entre mes murs.
S'ils savent où je suis, s'ils ont mon adresse, je n'aurai plus de répit.
Je suis un colis en souffrance en transit dans les non-lieux les no man'sland.
Ma poste restante, c'est vous.
Ma seule adresse, c'est vous.
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Dans la salle commune, les patients attendent comme des miettes.
Claire aime bien le pain perdu, elle se mettrait volontiers à table mais le Cyclope lui barre la route.
Vous ne passerez pas madame.
Vous n'irez nulle part, où qu'on aille on est encore ici.
L'hospitalisation du Cyclope n'a ni début ni fin.
Il tient debout depuis toutes ces années du haut de ses deux mètres, avec son quintal et ses cheveux blancs filasse de fille dans son catogan toujours sale. Il a un bandeau sur l'œil gauche pour cacher son orbite vide, le trou de la sécu comme il dit puisqu'il n'a pas les moyens de se payer une prothèse oculaire.
Je n'ai peut-être qu'un œil, mais j'ai une longue vue.
Alors je vous le répète, vous n'irez nulle part où qu'on aille on est encore ici.
Le Cyclope a toujours les mots qu'il faut.
Ceux qui coincent et qu'il faut bien avaler.
Claire déglutit.
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