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Hubert Juin (Autre)
EAN : 9782070322015
114 pages
Gallimard (03/02/1981)
4.01/5   38 notes
Résumé :


Joë Bousquet
Que lire après La Connaissance du soirVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Combattant de la Grande Guerre, Joë Bousquet fut victime d'un coup de feu qui le paralysa des membres inférieurs. Contraint de demeurer couché, il fit de sa chambre un espace pour les mots, un continent de poésie.

Mais sa blessure la plus ancienne, vive et profonde, il l'avait reçue d'une femme aimée. La blessure de son corps en fut une conséquence indirecte, tragique et symbolique. Des deux atteintes naquit cette parole ininterrompue, telle qu'on la trouve dans les carnets étranges du Papillon de neige et de Traduit du silence.

Toutefois le seul véritable recueil de poèmes de Joë Bousquet est La Connaissance du soir.

Une émotion particulière se dégage de L'Epi de lavande. Les mots y sont comme jaillis d'un rêve douloureux et obsédant. Les phrases se déroulent, aux articulations incertaines, et l'on est pris dans leur flux et leur reflux, que renforce l'absence de ponctuation visible.

Les autres parties du livre offrent des poèmes de format plus classique, mais dont le ton est instantanément reconnaissable. Il en est ici comme pour les voix des êtres chers, qui nous touchent au fond de l'âme, y éveillant une résonance inconnue. Et la musique de Bousquet rappelle celle de Verlaine, en son "rêve étrange et pénétrant" :

Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.
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C'est dans une chambre étroite aux pages souvent à moitié vide - comme le sont souvent les poèmes - que le poète griffe et griphone son vide.
Drapé d'une bannière - comme à son habitude - l'éditeur laisse d'abord un préfacier chanter les pages futures. S'ensuivent alors une suite de poèmes sur la lente consumation d'un homme sur lui-même, de lui-même, tapi dans sa chambre, pris par une blessure de guerre perdue.
C'est alors l'oeuvre d'une torsion des mots vouée au néant, à un langage obscur qui s'ouvre et se ferme perpétuellement sur lui-même et de lui-même, fait d'éclairs et de nuits terribles, et rongeuses, et divines. C'est l'histoire d'existences qui faisant perpétuellement face à leur néant de ne pas pouvoir exister plus s'échappent pour se retrouver sous leur forme de chaos confus de formes. Alors on croit sortir, un nuage passe, on le suit. On espère se souvenir bientôt, et toujours, déjà, se souvenir de l'espoir de vivre. Tout est beau dans le ciel fleuri et c'est trop. Alors on vit encore et déjà, mais seulement rêvant, car l'on ne vit que maintenant peut-être.
C'est l'histoire finalement d'un homme qui aimerait être vu de son rêve, une femme qui toujours le hante et revient depuis son passé et son avenir, qui pour lui sont sa mort et que donc il doit dire rêve : car il lui faut bien vivre encore.

Ni dans le rêve, ni chez lui, ainsi vont les poèmes.
Alors le poète décide lentement de tout poétiser, de tout dire rêve, mensonge, fausseté, vérité, mais avec coeur, et de d'en faire ainsi l'éloge tragique pour survivre dans son présent de malade cloîtré.
Et l'on pleure en porté(e) sur l'amour du rêve qui nous aide, musique de notes qu'on porte sur tout. Comme une mort de l'espace et du temps selon nous. On creuse alors nos ombres pendant ces temps et ces espaces du lieu du présent de la vie.
C'est un monde alors où la mort nourrit la vie, où la vie nourrit la mort. Et c'est alors que dans un monde d'échos pleurants donnés à cette mort, de couleurs déchirées dans la lumière spectrale, on porte nos ombres qui portent tout pour notre mort et notre vie, la nôtre, aux milles horizons des vies que nous avons vécu pour nous croire vivant. Et ainsi la mort, de l'amour, se porte universellement.

On lit alors un texte détourné de Bousquet :
Tombe pour devenir la main qui te retient
L'on nait de rêver qu'on ne se connait pas encore
Et déjà l'autre aimé nous rend une chair
Nous sommes le jour d'avant vu, le jour d'après vu
Et l'amour de notre amour imprévu dure sans nous voir, disant sous rien :
"J'ai tout"
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C'est une poésie très particulière, écrite sous opium la plupart du temps. Pour ceux qui ne connaissent pas Joe Bousquet, je leur conseille de prendre connaissance de la vie de cet auteur atypique.
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Très surprenant, il faut connaître la vie de Joë Bousquet pour mieux cerner ses écrits qui sont particulièrement puissants.
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- LA CONNAISSANCE DU SOIR-

Des poèmes jolie à lire qui m'ont transportée dans un autres univers, des poèmes qui parlent de souffrance, de solitude mais aussi d'amour. Joë Bousquet sait utilisée les métaphores pour qu'on comprends les poèmes avec des images qui nous imposent. C'est un agréable moment que j'ai passée à lire des poèmes de l'écrivain et je lirai un autre recueil de lui.

Carlaines
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Citations et extraits (49) Voir plus Ajouter une citation
Quand l'âme eut froid

Mon cœur ouvert de toutes parts
Et l’effroi du jour que je pleure
D’un mal sans fin mourant trop tard
Je ne fus rien que par hasard
Priez qu’on m’enterre sur l’heure

On reverra dans le brouillard
Avec ses maux et ses années
Le roi qu’il fut dans la fumée
D’un feu qui n’était nulle part
Sa mère avait des yeux d’eau vive
Il reviendra dans le brouillard
Le cœur ouvert par trois poignards
Vidé par les lunes oisives

Mais les ans passent sans nous voir
L’aube naît d’une ombre où l’on pleure
De quoi voulez-vous que l’on meure
La nuit ne sait pas qu’il fait noir
Tout est passé pour nous revoir
Nos pas reviennent nous attendre
On rouvre la classe du soir
Où l’on attend le roi des cendres

J’ai cru le voir dans un miroir
Qui m’est resté de mon enfance
Un chant de source était devant
Qui m’a bercé jusqu’au silence
Et je le suis jusqu’à l’absence
Mon corps s’ouvrant à tous les vents
A bu le froid dans l’eau d’argent
D’un cœur noir qu’il est las d’entendre

Tout est trop beau pour être vu
Un amour plus grand que l’espace
Ferme les yeux qui ne voient plus
Et l’ombre que sa forme efface
Mendiant son pas mendiant sa place
Au jour mort d’un rêve pareil
Dira des ombres qui la suivent
Ma vie avait des yeux d’eau vive
Passé prête-moi ton sommeil
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La nuit tous les pas se mêlent
Ce qui nous mène est perdu
L’air est bleu de tourterelles
Le ciel le vent se sont tus
Et pareil à la colombe
Qui meurt sans toucher le sol
Entre l’absence et la tombe
L’oubli referme son vol
Mais il survit du murmure
Où tout se berce en mourant
L’amour des choses qui dure
Au cœur d’un mort qui m’attend
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Madrigal

Du temps qu’on l’aimait, lasse d’elle-même
Elle avait juré d’être cet amour
Elle en fut le charme et lui le poème
La terre est légère aux serments d’un jour.

Le vent pleurait les oiseaux de passage,
Berçant les mers sur ses ailes de sel,
Je prends l’étoile avec un beau nuage,
Quand la page blanche a bu tout le ciel.

Dans l’air qui fleurit de l’entendre rire,
Marche un vieux cheval couleur de chemin,
Connais à son pas la mort qui m’inspire
Et qui vient sans moi demander sa main.
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Frileuses
BLANCHEVOLE


Qu'un vol des chauves-souris
amasse aux mains de la morte
le muguet où noir fleurit
le vent qu'il fait sous ma porte

                  Si blanche d'effacer
                  les jours qui l'ont suivie
                  elle attend du passé
                  trois fleurs pour y bercer
                  ce qu'endormait la vie

Dans la nuit d'une voix
tout son amour l'appelle
et s'est brisé trois fois
sur une ombre plus belle
où ce qui vécut d'elle
en se taisant la voit

                  Est-ce un laurier-tourterelle
                  qu'on ait planté pour un roi
                  et qui fleuri sans lui plaire
                  rende sa flamme à la terre
                  où l'on l'embaume avec toi

Toute une nuit où te taire
les baisers les pariétaires
ne sont pas les fleurs d'ici
ferme tes yeux de souci
dans le bouquet de paupières
qu'achève aux mains de la terre
le vol des chauves-souris

                  Ne me dis rien du silence
                  que mon plus beau jour te doit
                  s'il a passé l'espérance
                  pour être seul avec toi

       Qu'il fit froid ce mai dimanche
       attelé d'un cheval noir
       qui tirait le lit de planches
       où tu tendais pour me voir
       le bouquet de tes mains blanches.

ENVOI

   Puisse en l'attente qu'il endure
   Mon cœur las de vivre à demi
   Mourir d'entendre le murmure
   Qui tient ce qu'il aime endormi

p.105-106-107

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SUITE
 Vois la brûlure que fait en ce monde l'instant d'avant
les choses tu es la pensée de cet instant et sa chair
hélas
 Il n'y aura plus jamais de place pour toi entre la folie
de l'oubli et la folie de toutes les flammes


 Courage va Tu as planté la hache les heures sont tes
prisonnières Déjà quand c'est le soir et que l'air change
de couleur tu regardes en te penchant à droite à gauche
comme un piéton à travers les arbres d'un pays inconnu
tu fais tourner les yeux avec les derniers feux du jour tu
marches tantôt doucement tantôt vite comme si tu
suivais quelqu'un
 À force de trouver partout la tristesse tu n'auras plus
qu'elle à quitter quand le moment sera venu Une
chanson est dans le jour tu ne sais plus si c'est le vent ou
bien la peur du vent d'ici tu ne sais plus quand elle
t'éveille si ce cœur c'est ta vie ou bien si c'est ta
peine

 Tu as deviné dans tous les cœurs un peu de la tristesse
que personne ne connaît comme toi Et c'est toute ta
force en ce monde d'avoir les mains fermées sur ce qui
nous ferait peut-être mourir

p.36-37
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Videos de Joë Bousquet (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Joë Bousquet
Joe BOUSQUET – Le témoin de la condition poétique (Chaîne Nationale, 1955) Une émission spéciale diffusée, le 28 septembre 1955, en hommage à Joe Bousquet. Produite par Hubert Juin, pour la Chaîne Nationale, elle conviait : Michel Bousquet, Jean Negroni, Albert Béguin, Jean Cassou, Alain Robbe-Grillet, Roger Blin et Martine Sarcey.
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