AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de BazaR


Voilà un livre qui remplace allègrement mes vacances de printemps !

Quel fantastique voyage, mes aïeux ! Quel exotisme ! J'ai rarement été autant emporté par la construction d'un monde imaginaire s'inspirant de la réalité et irrigué comme elle de beauté, de poésie, de danger, de cruauté et de mort.
Charlotte Bousquet invente un monde africain-oriental aussi beau que dangereux, aux senteurs de musc et de gingembre, où les oueds, les ergs et les villes de terre cuite invitent à la caravane, où de magnifiques chevaux et d'inquiétants lycaons côtoient des lézards géants et des vers des sables (clin d'oeil à Dune ?), et sur lequel l'âme humaine souffle parfois une poésie qui fait chanter le vent, mais fait aussi souvent gronder sa brutalité et sa colère en haïssant, en asservissant et en tuant cruellement. L'humain n'y vit cependant pas seul ; des Djinns immortels, des Éfrits et des Nehlîls foulent Shâhra. Et certains humains appartiennent aux deux univers du visible et de l'invisible. On les nomme les Kenzi.
Dans ce monde envoûtant, l'Islam n'existe pas, ou pas encore.

On suit les voyages initiatiques de trois femmes étonnantes. Chacune va devoir quitter son nid dont la sérénité est balayée par la haine et la mort.
Il y a Djiane / Déjà Morte, la danseuse-guerrière détentrice d'un art secret, fruit d'un premier mariage, détestée par sa marâtre, fuyant un mariage imposé avec le neveu de cette dernière, un des pires hommes que j'ai eu l'occasion de voir vivre sous les mots.
Il y a Arkhane / Née deux fois, privée de l'une de ses identités sexuelle, privée de son amour par une rivale sans pitié, qui développe au cours de ses voyages ses dons pour la médecine.
Il y a Tiyyi / Cent Vies, asservie, évadée, recueillie, capable de trouver son chemin même dans le plus complexe labyrinthe, et ce n'est que le moindre de ses dons.

La vie belle et cruelle se charge de leur apporter l'expérience qui leur sera nécessaire pour faire face à un être qui pourrait être sorti de la cuisse du Sauron de Tolkien. Mais un Sauron dont on partage avec amertume les états d'âme à travers les « lettres à son père ». Malik est dangereux, il souhaite vivre éternellement et a besoin pour cela de se sustenter « d'énergie humaine ». Pour lui les humains ne sont qu'une forme de viande qu'il méprise. Il a réuni – enchainé – toute une caravane d'êtres talentueux dont il puise dans la substance en attendant la réalisation de la prophétie.
Mais l'un des membres de la troupe a un plan. La sibylle Aya Sin voit les futurs possibles et essaie d'orienter les événements vers le plus souhaitable. Cela passera par la réunion des trois femmes.

Charlotte Bousquet parvient avec talent à faire exister des personnages sensibles et forts sans les écraser par un décor pourtant riche et grandiose. Il y a du Guy Gavriel Kay dans cette écriture, et venant de moi c'est un sacré compliment. Au pire ai-je pu penser de temps en temps que les trois personnages féminins principaux manquaient de différenciation de caractère nette. Mais la vie, les pages, se chargent de graver ses différences au fur et à mesure que l'on avance dans la lecture.

J'attends désormais la suite avec impatience. Et j'espère aussi qu'un jour prochain verra les nombreuses nouvelles écrites dans cet univers et éparpillées dans diverses anthologies regroupées dans un recueil. Pensez-y les éditeurs.
Commenter  J’apprécie          3711



Ont apprécié cette critique (36)voir plus




{* *}