Il y a parfois des titres qui portent au contresens.
Ainsi, "Un Village français" m'a longtemps fait fuir...
J'y subodorais une série un peu neu-neu sur l'Occupation, pleine de poncifs et de clichés, sur les résistants qui lavent plus blanc, les grands méchants Aĺlemands, et les collabos vilains-pas beaux. Une série hagiographique de plus sur cette période sombre où les mythes "résistentialistes" servent de cache-misère à la culpabilité collective.
Je me trompais dans les grandes largeurs!
Six saisons plus tard- la 7ème n'est pas encore sortie en dvd- six saisons avalées à la vitesse de la Blitzkrieg tant c'était passionnant, je dois avouer mon admiration: chapeau bas! Voilà une série qui ne nous prend pas pour des abrutis!
Je me suis donc ruée sur le livre de
Marjolaine Boutet, agrégée et docteure en histoire, professeur d'université spécialisée dans l'étude de la représentation de l'histoire et des conflits dans les médias...et auteure aussi médiatique que télégénique du célèbre
Les Séries télé pour les Nuls!
Nouveau ravissement!
Loin de raconter la série, l'auteure en suit le parcours du point de vue de l'historien , en donne une analyse percutante et argumentée, et interrompt régulièrement sa brillante démonstration par des encadrés purement historiques qui mettent en parallèle, avec un grand sens de la pédagogie , les événements réels et leur version dans la fiction.
Mais surtout elle s'attache à montrer combien le recours à la fiction, combien la multiplicité des points de vue, liée à celle des personnages, combien le recours aux recherches historiographiques les plus récentes et surtout combien le "temps long" des 7 saisons- 72 heures!- permettent de comprendre, sans la juger, une période aussi dure, aussi fluctuante, aussi éprouvante que celle-là.
Voici un livre qui emballera les aficionados de la série, mais pas que.
C'est aussi un livre subtil, intelligent, qui met le fait historique et son miroir fictionnel en face à face, et devrait aider les générations suivantes à comprendre, à démêler, à rechercher tout ce qui pourrait éclairer ce passé qui, comme le "national", cet ersatz de café imbuvable des années d'occupation, n'en finit pas de passer...