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Pèlerin, je le suis en m'aventurant sur les traces de Bashô, poète itinérant et errant dans les profondeurs de son pays. Avec comme guide Nicolas Bouvier, j'explore l'âme de ce pays, mon coeur en voie d'explosion. Ce n'est pas une simple virée estivale, un voyage d'un mois de mai avec ses espoirs et ses tristesses, ce voyage au Japon, où les fleurs de cerisiers s'ouvrent comme le sourire d'une jolie femme. Avant de tracer ma voie dans les méandres des temples, au-delà du Mont Fuji, je recompose l'histoire de ce pays. Je revois ses religions, son histoire, sa philosophie, et ses traditions. La folle passion qui m'habite, mon corps immergé dans ce pays devient fébrile et fiévreux, comme la première fois que je me mets à nu dans le onsen que l'on aurait dit perdu en pleine campagne, comme la première fois que l'on met un pied dans une nouvelle gare, comme la première fois que l'on croise le sourire d'une rencontre.

Les premiers mouvements du bouddhisme, les premières persécutions chrétiennes, la première bombe atomique, l'histoire avance au fil des pages de Bouvier entre deux citations de Bashô, son maître indéniable, son guide tant spirituel que littéraire. Nicolas me donne des cours d'histoire, de géo-politique, de religion. Il a raison, pour comprendre un pays, un peuple, il faut d'abord s'attaquer à son passé, avant de grimper les sentiers errants de la basse campagne.

Bien entendu, le voyage date un peu. 1965, c'est pas loin d'être une éternité à la vitesse où avance le monde actuel. Les grandes villes ont énormément subi de grandes mutations inhumaines. Cependant, certains coins ruraux n'ont guère changé en un demi-siècle. Nicolas pourrait encore faire avec force et foi mon guide pour parcourir les chemins détournés de ce pays où le soleil se lève toujours plus à l'est. Nicolas Bouvier pourrait même s'affirmer "je suis un écrivain japonais" que cela ne serait pas une usurpation d'identité tant il est imprégné de ce pays, tant il me fait partager son amour de ce pays. Il y a bien longtemps, je me souviens d'avoir traversé les Balkans dans sa Fiat, là c'est vers un autre peuple qu'il m'emmène. Traversant le pays du sud au nord, de la moiteur des temples à la neige des solitudes, j'erre l'âme silencieuse à la recherche du regard d'une geisha qui m'offrira certainement la beauté de son âme et de son pays dans le rouge à lèvre de son sourire.
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Nicolas Bouvier est un écrivain voyageur, - le fut plutôt, car il s'en est allé pour un voyage sans retour, enfin c'est ce qu'on dit, emportant j'espère là-bas avec lui son stylo et son cahier à spirale… Nicolas Bouvier nous a tant appris sur l'usage du monde, une façon de voyager avec curiosité et élégance.
L'usage du monde est un de ces rares récits de voyage qui a su me procurer des ailes. Les ailes servent à partir, mais aussi à revenir…
Chronique japonaise pourrait avoir la même vertu. Ce que j'ai aimé dans ce voyage, c'est le Japon non pas selon les Japonais, mais selon Nicolas Bouvier.
J'ai voyagé dans ses pas, convoquant la complexité d'un archipel pétri d'histoires et de mythes, captant la magie des instants volés, l'aubaine des chemins, dévoilant la musique des détours, restituant les odeurs de l'air, de l'apesanteur aussi, le contour d'un visage, le reflet d'un regard, les mots appris au gré des rencontres et des connivences ici et là…
C'est l'histoire d'un voyage mêlant le récit de ses trois séjours au pays du soleil levant avec quelques épisodes fondateurs de son histoire. Pourtant ce n'est pas un livre historique et le récit de voyage ne serait rien sans cette passerelle jetée vers l'âme fondatrice de l'archipel. Nicolas Bouvier est un passeur, un voyageur étonné, un écrivain étonnant par sa manière de nous restituer le vertige de ses pas, son errance, son émotion…
L'histoire du Japon nous parle d'un pays qui fut longtemps une terre d'accès difficile. Sans doute faut-il y voir un trait commun à beaucoup d'îles lointaines et de ses habitants. L'histoire du Japon est faite d'ombres et de lumières, de douceur et de violence. Les persécutions, les guerres, la spiritualité, l'odeurs des fleurs de cerisiers, ont façonné l'âme du Japon et c'est ce qui fascine Nicolas Bouvier dans son périple.
Chronique japonaise regroupe plusieurs textes écrits entre 1955 et 1970. Cela fait un bail, me direz-vous, le Japon a dû changer depuis ce temps-là. Sans doute oui, mais le Japon de Nicolas Bouvier restera éternel puisque c'est le sien…
J'ai aimé sa manière de voyager vers nous, lecteurs, dans ce livre totalement bancal, imparfait, mais si riche et si attachant. Parlant des autres dont il nous raconte un peu leur histoire, il nous rend ses personnages quotidiens si familiers. Ce sont des scènes de rues, des scènes de vie, quotidiennes et inoubliables. Aller boire du saké chez deux Coréennes, la mère et la fille… Nous parler d'un petit temple bouddhiste à la campagne où le bonze sommeille sur sa bouteille de bière. Voir un spectacle de no dans une école. « Visages de femmes pleins d'espièglerie, de rides et de sérénité ». Nous dire que le no est plus lent que tout ce que le mot lenteur suggère à l'Occidental… Que dirait-il aujourd'hui, Nicolas Bouvier de cette lenteur dont nous avons tant besoin ?
Le no, ce sont aussi des masques, c'est une manière de frapper le tambour, c'est le trait fin qui dessine la frontière entre deux mondes. Peut-être que l'oeuvre de Nicolas Bouvier se résume à cette grâce en apesanteur ?
Tout comme j'aime tant la littérature japonaise pour ses rivages, pour cela aussi.
Sans peut-être l'imaginer un seul instant, sait-t-il qu'alors déjà il nous parle de lui-même ? Et c'est ce qui le rend si attachant dans ce récit humble et riche.
De temps en temps, tel un petit Poucet rêveur, Nicolas Bouvier égrène sur son chemin des haïkus du moine-poète Basho.

« de temps en temps
Les nuages nous reposent
De tant regarder la lune. »

Ou bien encore :

« Mes larmes grésillent
En éteignant
Les braises. »

Loin des clichés et des représentations que nous pouvons nous faire de cette terre japonaise, Nicolas Bouvier nous en livre son âme dans le saisissement de ses contrastes et de ses contradictions. C'est un tableau impressionniste plongé dans une modernité déjà fulgurante.
Nicolas Bouvier nous entraîne du nord au sud, d'est en ouest. Kyoto, Hokkaïdo, Kagoshima, Oshiamambe, Tokyo…
Et puis il y a ce village voisin d'un volcan où j'ai apprécié à mon tour de me glisser dans les sources chaudes qu'on appelle onsen…
Nicolas Bouvier traverse des lieux, traverse les pages, nous traverse à son tour, laissant du sel de la mer de Chine ou du Pacifique sur nos paupières.
Au milieu du récit, Nicolas Bouvier nous livre cette phrase sidérante par son intemporalité :
« Si l'on ne peut plus guère progresser aujourd'hui dans l'art de se détruire, il y a encore du chemin à faire dans l'art de se comprendre. »
Comme tout récit de voyage, celui-ci est inachevé puisqu'il comporte en lui cette part béante de tous les séjours que n'aura pas fait l'auteur par la suite…
Sait-t-il à ce moment-là qu'un jour il mourra, nous laissant désormais orphelins de nos ailes ?

« La mission de l'homme
sur la terre est
de se souvenir »
Henry Miller
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Livre que j'ai lu il y a maintenant plusieurs années. Outre le récit d'une errance dans ce pays, je retiens, comme toujours chez Bouvier, une envie d'aller à la rencontre de la population, de coller au plus près du quotidien de ces gens, en dehors des sentiers battus. Je me souviens également de sa volonté de voyager quasiment sans argent, provocant ainsi des rencontres plus authentiques et des relations plus spontanées, n'hésitant pas à se retrouver dans des situations extrêmes. (je pense aussi à Cendrars). C'est un parti pris que je trouve vraiment très audacieux, que l'on retrouve également dans « L'usage du monde ». Souvenir également de son chapitre sur Hokkaido, à la rencontre des Aïnous. Région, qui encore de nos jours reste très peu parcourue par les voyageurs. Comme toujours, Bouvier, au-delà d'un récit de voyage, nous offre une véritable leçon de vie et un regard non conventionnel sur le monde.
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Livre très riche et très émouvant. On traverse les siècles et les campagnes japonaises à un rythme très zen, on s'arrête sur les détails au gré des envies.
Je ne suis pas très portée sur les récits de voyage mais celui-ci a quelque chose de remarquable : le respect. L'auteur s'efface souvent au cours de son récit, revient sur les faits historiques qui ont marqué le Japon pour expliquer des comportements ou des traits de caractère des gens qu'il rencontre. On est loin de l'observation ethnologique qui vire au voyeurisme. Des instants de vie nous sont livrés et à nous lecteurs d'en faire ce que nous voulons.
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Maître incontestable du récit de voyage, considéré comme un « saint patron » par la nouvelle génération d'écrivains voyageurs de langue française, Nicolas Bouvier fait aujourd'hui partie des grands classiques du XXème siècle du genre, ou faudrait-il plutôt dire, de ce mélange de genres que constitue le courant littéraire du travel writing.
Sous le titre de CHRONIQUE JAPONAISE, l'auteur regroupe ici différents textes composés au long de ses nombreux séjours au pays du Soleil-Levant, entre 1955 et 1970. D'emblée, le recueil peut paraître assez hybride dans sa forme: chroniques éparses, datées mais présentées néanmoins sans aucun souci particulier de classement chronologique et linéaire, quelques chapitres «taillant à grands coups dans la cosmogonie japonaise» et survolant histoire de la culture nippone depuis ses origines jusqu'au XXème siècle, extraits de journaux intimes, poèmes s'y succèdent et s'intercalent, donnant ainsi à l'ensemble l'aspect d'un collage, à première vue, donc, hétéroclite.
Tracés d'un plume légère, aux reflets irisés, impressionnistes, manifestant parfois une pointe de cette frugalité qui habite aussi l'esprit japonais, par moments délibérément elliptique, « émiettée » selon le mot de l'auteur lui-même, on ne retrouve aucun mouvement volontaire d'approche cumulative ou didactique de ces souvenirs de voyage japonais, y compris même dans les chapitres que l'auteur aura dédiés à l'histoire du pays. Aucune tentative non plus de traduction intellectualisée ou de systématisation interprétative face à une des cultures pourtant les plus codifiées, perfectionnistes et esthétisantes de la planète.
Poète de l'instant par excellence, l'auteur considère par ailleurs que «les plaisirs simples sont les meilleurs». Wanderer dans l'âme, c'est en chemineau errant au gré du vent, se laissant guider essentiellement par l'intuition, son imagination et ses envies du moment, qu'il aura le sentiment de vivre pleinement et de partager le meilleur de sa pensée et de sa sensibilité personnelles avec son lecteur. S'étant par exemple retrouvé un petit matin dans une gare routière à Hataka, et ayant aperçu derrière son comptoir un limonadier suivant du doigt, avec la marchande de sorbets voisine, tous les deux «transportés, absents», la partition d'un récitatif de théâtre No qu'un lecteur de cassettes audio braillait en même temps haut et fort dans le vacarme général, il écrira: « C'est dans la mesure où elle est spontanée et «plaisir de l'instant», que cette culture japonaise que nous cherchons à emmailloter dans le discours ou l'explication, est si impressionnante. On était ce matin-là bien loin des pâmoisons érudites qui la tuent.»
C'est donc en routard dépouillé de bagages, de guides de voyages ou d'attentes particulières, attrapant les idées «sans faire exprès», les écrivant sur des bouts de papier souvent égarés «dans la couture des poches», que Nicolas Bouvier semble chercher sa voie. Y compris, aux risques et périls d'être déçu ou imprévoyant, ce qu'il paraît accepter tout aussi bien et en toute sérénité, comme faisant juste partie des choses. C'est ainsi, par exemple, qu'on le voit se lancer, sans trop se poser de questions, en scandant poétiquement « la mer...la mer», sur un trajet de vingt kilomètres à pied pour regagner Noboribetsu par une plage déserte, à la tombée de la nuit, parcours erratique durant lequel, obligé de traverser un chenal reliant la mer à la lagune, il faillit «rejoindre l'armée de fantômes qui hantent le détroit de Tsugaru ». Aussi, est-il visiblement plus à l'aise et davantage épanoui, seul passager dans un bus arrivé à son terminus dans un coin perdu de l'île d'Hokkaido, qu'en pénétrant dans la baie de Matsushima, un des «Trois Paysages» du Japon où, tombé sur «des longues files de touristes» attendant qu'on vienne «les conduire au paysage comme des enfants qu'on mène à la toilette», il se verra contraint d'attendre l'aube, le lendemain, afin d'y retourner «une demi-heure au moins entre le premier soleil et le premier train de Sendaï, où l'on peut encore aller la voir sur la pointe des pieds», et de pouvoir enfin s'extasier comme le moine-poète Basho en s'écriant comme il le fit : «Matsushima yah!».
Un autre poète, moins connu et Sud-Américain cette fois-ci, Mário Quintana, disait, lui, avoir toujours détesté de voyager ; ne s'étant quasiment jamais éloigné de sa ville d'origine, il définissait les voyages comme une vaine tentative de «changer le décor à sa propre solitude». N'est-ce pas, pourtant, me suis-je paradoxalement demandé après la lecture de CHRONIQUE JAPONAISE, ce que chercherait au fond Nicolas Bouvier, ainsi que la plupart de ses héritiers actuels, écrivains voyageurs de plus en plus nombreux, au point de constituer un véritable courant littéraire à part? Pourquoi voyagent-ils en définitf ? Que cherchent-ils à l'autre bout du monde, quelquefois aux antipodes mêmes de leur «décor» d'origine ? Sylvain Tesson, par exemple, figure de proue du genre en France, confiait ne pas voyager pour aller à la «rencontre de l'autre», une absurdité, d'après lui, en tant qu'objectif, au même titre que «visiter des monuments» ou «goûter la cuisine locale».
En partant à l'autre bout du monde, que chercherait-on d'autre, en fin de compte, sinon soi-même ?
Ce paradoxe apparent, j'ose imaginer, ne déplairait certainement pas à Nicolas Bouvier. A l'image de ces koans inextricables du Zen japonais, si appréciés par l'auteur de CHRONIQUE JAPONAISE, cela pourrait, de mon point de vue, seoir parfaitement à l'esprit vif, si souvent intranquille et, en filigrane, mélancolique que j'ai perçu chez ce grand écrivain voyageur.
Ainsi, répondant à sa femme Eliane, rentrée en Europe, et qui l'avait exhorté dans une lettre qui lui était adressée «Regarde bien Kyoto pour moi, j'en ai l'ennui», écrira-t-il :
«Maintenant que tout ce qui te pesait ici, que la légère odeur de deuil qui flotte parmi tant d'autres est tenue à distance, tu tires du vivier de ta mémoire les images qui te plaisent et tu les enlumines patiemment en levant parfois les yeux sur les prés verts d'Europe. Et c'est ainsi que les livres s'écrivent. J'aurai moi aussi bientôt l'ennui de cette ville, parce qu'elle est unique, admirable...et que j'y ai vécu.»
A bord du paquebot qui le ramenait en Europe de son voyage en Orient, le poète Alvaro de Campos, hétéronyme de Pessoa, noyé dans les fumées d'opium, s'exclamerait à son tour : «Pourquoi suis-je allé visiter l'Inde qu'il y a, s'il n'y a d'autre Inde sinon l'âme en moi ?»
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Trés beau livre qui nous présente le périple de Nicolas Bouvier dans le Japon des années 50/60. On apprend beaucoup à travers cet homme dont l'écriture est d'une poésie inspirée. Ce que j'en retiens aussi c'est cette immense amour qu'il avait pour les japonais et....pour l'humain en général....curieux et respectueux de l'autre et de ses différences.
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Ce livre est remarquable pour une raison simple: il n'a pas vieilli depuis quarante ans. Ce qui prouve , pour le moins, que Nicolas Bouvier avait du talent. Je lis ce livre après plusieurs voyages récents au Japon. Je donne un conseil à ceux qui préparent un voyage au Japon :lisez le.Vous y apprendrez bien plus que dans un guide touristique. Et un deuxième conseil, relisez le au retour. Cela vous permettra de comprendre (un peu) mille petites choses qui vous auront échappé sur place.Cela vous permettra aussi de saisir , à un modeste niveau, la mentalité japonaise .
Je sais , c'est compliqué mais c'est passionnant .
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Ce récit fait parti de ceux « Un jour je le lirai ». le début est un peu ardu avec historique du Japon. Des passages prenants quand Nicolas Bouvier parcourt le pays. Je pense qu'il est surtout une bible pour les voyageurs qui s'y rendent.
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Grand écrivain voyageur Nicolas Bouvier s'est imprégné de cet archipel d'îles du Japon pour nous livrer un peu de l'âme de ses étranges habitants dans Chroniques Japonaises. Brasser toute l'histoire du Japon depuis sa création, sa genèse aussi céleste et lunaire qu'une terre dissimulée derrière huit épaisseurs de nuées blanches, comme pour échapper encore à nos regards, est un pari un peu fou.

Décrire le Japon d'aujourd'hui qui puise dans la zen attitude, la suprême qualité du sage indifférent à la rumeur, être cartésien, cérébral c'est oublier que la nature est la source de toute leur spiritualité, au Japon il faut se faire voyageur, glaner les odeurs, les couleurs, les parfums, et s'abandonner à leur lanterne magique.

Ils sont frère et soeur, leurs noms Izanagi et Izanami, ce sont les créateurs du Japon.
"Dans une auguste union, ils joignent leurs augustes parties, et engendrent trois enfants ».
 »ils s'y prennent comme il faut , assistés par une bergeronnette, qui de sa queue bat la mesure, et cette fois la soeur épouse accouche des huit îles du Japon" Et ainsi de suite, vers une nombreuse postérité, dont les Kamis deviennent les multiples divinités, comme le Kumi du crachat!
"La naissance la plus importante, est issue de l'oeil gauche de Izanagi est Amaterasu O-mi Kami, déesse de la lumière, ancêtre du clan impérial et figure la plus importante du shinto.
En dernier acte c'est la déesse du rire qui s'exhibe, provoquant un gigantesque fou de rire des dieux.


Le japon a ainsi de toute pièce recréé leur histoire, et très largement fourni les preuves de son prodigieux pouvoir assimilateur, les empereurs piocheront dans les idéogrammes et mettront à profit les conceptions chinoises. Les religions seront assimilées et reconverties aux Dieux et aux coutumes du pays du soleil levant.

Toute l'épopée de St François Xavier est analysée, jusqu'à sa disgrâce , les nombreuses églises fondées dans tout le pays faisaient de l'ombre à l'empereur, mais malgré les suicides des convertis, le catholicisme se maintenait. La fin de son essor signe aussi le replis du pays pendant plus de deux cent ans.

La mondialisation qui se mit en place vers 1850, allait bouleverser le pays, et la nouvelle devise devint "tant qu'il y aura de nouveaux mondes à conquérir le samouraï japonais s'en emparera."

Vagabonder dans ce Japon fut un pur bonheur, et la découverte de leur imagination pour, imposer une singularité tenace et indestructible, me fit tenir une longue liste de coutumes intemporelles, en ces quelques notes.

la propreté élevé à l'un des arts sublimes, discrétion dans la gestuelle journalière, au point de masquer par la musique les pets ordinaires, ou aller vers l'hygiène corporelle jusqu'à la recherche naturelle du plaisir... Que dire des hommes qui n'ont pas une bonne odeur, voici un pays cible pour nos parfums, qui voguent sur la vague d'Hokusai, comme une barque de la félicité.

Zen est ici plus qu'une philosophie, et n'en déplaise à nos normaliens, c'est apprendre à tout oublier, sinon la verge du maître peut s'abattre sur vous, si une idée ancienne est formulée: les fidèles sont plutôt insoumis, et si les nôtres se dirigeaient vers une telle insoumission?

Si nous avons développé l'art de la table, au Japon le jardin est un lieu de méditation et de culture. Des règles immuables doivent être dissimulées. le jardin japonais est un havre de parfums et de saveurs, où les truites se cachent,  Le bureau des jardins et des étangs de Didier Decoin, dans un petit village de l'Empire du Japon, au XIIe siècle, illustre bien cet engouement.

Le peuple Aïnous vous réservera encore une immense surprise, ce peuple japonais considéré comme le plus velu du monde!

Cependant l'histoire du japon ne peut faire l'impasse de l'ensemble des guerres, que ses empereurs successifs se sont entêtés à mener. Pour quelles avancées?
On ressent après le drame d'Hiroshima et de Nagasaki, que le pays, ne puisera aucune de ses ressources pour faire la guerre et apportera toute son intelligence pour conserver la paix.

Nicolas Bouvier se fait un redoutable conteur pour nous permettre de traverser ces années sombres, sans tomber dans un exposé titanesque, il sait nous dire l'essentiel, avec justesse et simplicité sans occulté aucun fait important.

"Paver la route vers une grande paix pour les générations à venir en endurant l'intolérable et en supportant l'insupportable": tel est la ligne intangible du Japon , "décret impérial diffusé le 15 Août 1945".

Quand on a traversé Giverny, et goûté à ses nénuphars, on perçoit combien , il y a une fibre musicale et bariolée qui se met à vibrer , ici pour les estampes et les maîtres japonais comme Hokusai, les jardins qui se japonisent avec délices, ou les multiples complicités partagées avec ses artistes. Là bas au soleil levant les français sont vus avec étonnement, et notre indiscipline reste une énigme pour un peuple qui a su se faire un grand nom dans la haute couture et devenir un prophète de la grande cuisine.

Un très beau voyage en 250 pages pour cette Chronique Japonaise



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Nicolas Bouvier revient au Japon.
D'abord il consacre une centaine de pages à l'histoire et aux religions japonaises. Et il fait bien car non seulement je dois admettre que je n'y connais pas grand chose mais de plus, cette mythohistoire joue un rôle déterminant dans la construction de la mentalité japonaise... ...
page 15 : "La façon dont un peuple explique son existence en apprend parfois aussi long que celle dont il la vit."
Cette petite mise au point faite, il consacre le reste de l'ouvrage à ses tribulations, à ses rencontres.
Comme à son habitude il s'arrête à des petits riens qui vont signifier beaucoup : le bain et le souci des Japonais de l'hygiène, les repas et leur frugalité, leur préoccupation constante (sauf quand ils ont trop bu) de ne pas froisser, de ne pas gêner...
La simplicité, la justesse de ton de Nicolas Bouvier font que ce pays si étrange nous semble tout à coup plus proche.
Un vrai écrivain-voyageur.
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