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Critique de LaBiblidOnee


Un titre intriguant et une plume aussi poétique qu'imagée, parcourue de métaphores dont la principale est filée sur tout le livre : la centrale électrique comme araignée géante, monstre qui tue à petit feu les habitants de la ville, en les capturant dans sa toile, les enserrant, les privant de liberté jusqu'à les étouffer, puis les faire mourir - Il y a du Germinal dans cette entame charbonneuse, les mots de l'auteur faisant écho à certains passages de Zola puisqu'il annonce qu'un événement « 𝘴𝘦𝘮𝘢 𝘥𝘦 𝘥𝘳ô𝘭𝘦𝘴 𝘥𝘦 𝘨𝘳𝘢𝘪𝘯𝘦𝘴 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘦𝘶𝘳𝘴 𝘵ê𝘵𝘦𝘴, 𝘦𝘵 𝘪𝘭𝘴 𝘯𝘦 𝘵𝘢𝘳𝘥𝘦𝘳𝘢𝘪𝘦𝘯𝘵 𝘱𝘢𝘴 à 𝘵𝘳𝘰𝘶𝘷𝘦𝘳 𝘥𝘦 𝘲𝘶𝘰𝘪 𝘭𝘦𝘴 𝘧𝘢𝘪𝘳𝘦 𝘨𝘦𝘳𝘮𝘦𝘳 𝘴𝘶𝘳 𝘭𝘦 𝘵𝘦𝘳𝘳𝘦𝘢𝘶 𝘥'𝘶𝘯𝘦 𝘴𝘰𝘶𝘳𝘥𝘦 𝘤𝘰𝘭è𝘳𝘦. » D'expérience, on sent poindre la révolte… C'est d'ailleurs par un cadavre que tout commence. Alors nous remontons le temps « 𝘴𝘶𝘳 𝘭𝘦 𝘤𝘢𝘥𝘳𝘢𝘯 𝘭𝘪𝘲𝘶𝘪𝘥𝘦 𝘥𝘦 𝘭𝘢 𝘳𝘪𝘷𝘪è𝘳𝘦 », pour comprendre ce qui s'est passé. A l'aide de courts chapitres, comme les fenêtres d'un calendrier de l'avent s'ouvrant et se refermant sur un bout de vie de chaque habitant, nous remontons le fil de chaque micro-évènement du quotidien, qui tissent ensemble cette toile meurtrière. Un tricotage méticuleux du suspense, où chaque personnage fait un pas de plus vers le point de non retour.


« 𝘓𝘦𝘴 𝘪𝘭𝘭𝘶𝘴𝘪𝘰𝘯𝘴 𝘯'𝘢𝘷𝘢𝘪𝘦𝘯𝘵 𝘱𝘢𝘴 𝘱𝘭𝘶𝘴 𝘤𝘰𝘶𝘳𝘴 𝘦𝘯 𝘷𝘪𝘭𝘭𝘦 𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘢𝘳𝘵𝘰𝘶𝘵 𝘢𝘪𝘭𝘭𝘦𝘶𝘳𝘴 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘢 𝘷𝘢𝘭𝘭é𝘦. 𝘊𝘩𝘢𝘲𝘶𝘦 𝘨é𝘯é𝘳𝘢𝘵𝘪𝘰𝘯 𝘴𝘢𝘤𝘳𝘪𝘧𝘪𝘢𝘪𝘵 𝘭𝘢 𝘴𝘶𝘪𝘷𝘢𝘯𝘵𝘦 𝘴𝘶𝘳 𝘭'𝘢𝘶𝘵𝘦𝘭 𝘥𝘦 𝘭𝘢 𝘥é𝘦𝘴𝘴𝘦 𝘧𝘪𝘭𝘦𝘶𝘴𝘦, 𝘤𝘢𝘳 𝘱𝘳𝘰𝘱𝘰𝘴𝘦𝘳 𝘶𝘯𝘦 𝘷𝘪𝘦 𝘮𝘦𝘪𝘭𝘭𝘦𝘶𝘳𝘦 𝘢𝘶𝘳𝘢𝘪𝘵 é𝘵é 𝘤𝘰𝘯𝘴𝘪𝘥é𝘳é 𝘤𝘰𝘮𝘮𝘦 𝘶𝘯 𝘢𝘤𝘵𝘦 𝘥𝘦 𝘩𝘢𝘶𝘵𝘦 𝘵𝘳𝘢𝘩𝘪𝘴𝘰𝘯 𝘦𝘯𝘷𝘦𝘳𝘴 𝘭𝘢 𝘣ê𝘵𝘦. 𝘊𝘰𝘯𝘵𝘪𝘯𝘶𝘦𝘳, 𝘵𝘳𝘢𝘯𝘴𝘮𝘦𝘵𝘵𝘳𝘦 𝘭𝘢 𝘴𝘰𝘶𝘮𝘪𝘴𝘴𝘪𝘰𝘯 𝘦𝘵 𝘭𝘢 𝘱𝘦𝘶𝘳, 𝘥é𝘮𝘦𝘮𝘣𝘳𝘦𝘳 𝘭𝘦𝘴 𝘳ê𝘷𝘦𝘴 𝘦𝘯𝘵𝘳𝘦𝘷𝘶𝘴 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭'𝘦𝘯𝘧𝘢𝘯𝘤𝘦, 𝘳𝘦𝘱𝘳é𝘴𝘦𝘯𝘵𝘢𝘪𝘵 𝘭𝘦 𝘴𝘦𝘶𝘭 𝘱𝘳𝘰𝘫𝘦𝘵 𝘥𝘦𝘴 𝘢𝘥𝘶𝘭𝘵𝘦𝘴. 𝘴𝘶𝘳𝘵𝘰𝘶𝘵 𝘯𝘦 𝘫𝘢𝘮𝘢𝘪𝘴 𝘤𝘳𝘰𝘪𝘳𝘦 𝘢𝘶𝘹 𝘳ê𝘷𝘦𝘴, 𝘯𝘦 𝘱𝘢𝘴 𝘮ê𝘮𝘦 𝘭𝘦𝘴 𝘳𝘦𝘴𝘱𝘦𝘤𝘵𝘦𝘳, 𝘢𝘷𝘦𝘤 𝘭𝘦 𝘴𝘦𝘯𝘵𝘪𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘤𝘩𝘦𝘷𝘪𝘭𝘭é 𝘲𝘶𝘦, 𝘴𝘪𝘯𝘰𝘯, 𝘤𝘦 𝘴𝘦𝘳𝘢𝘪𝘵 𝘭𝘦𝘶𝘳 𝘱𝘭𝘶𝘴 𝘨𝘳𝘢𝘯𝘥𝘦 𝘥é𝘧𝘢𝘪𝘵𝘦. 𝘈𝘤𝘤𝘦𝘱𝘵𝘦𝘳 𝘭𝘦𝘴 𝘥é𝘧𝘢𝘪𝘵𝘦𝘴 𝘴𝘢𝘯𝘴 𝘮𝘦𝘯𝘦𝘳 𝘭𝘦𝘴 𝘨𝘶𝘦𝘳𝘳𝘦𝘴. 𝘌𝘯 𝘳𝘦𝘧𝘶𝘴𝘢𝘯𝘵 𝘭𝘦 𝘤𝘰𝘮𝘣𝘢𝘵, 𝘳𝘪𝘦𝘯 𝘥𝘦 𝘨𝘳𝘢𝘷𝘦 𝘯𝘦 𝘱𝘰𝘶𝘷𝘢𝘪𝘵 𝘢𝘳𝘳𝘪𝘷𝘦𝘳. »


Mais plus que la centrale, le monstre n'est-il pas son dirigeant, à peine humain surveillant tout et contrôlant tout le monde, s'entourant de sbires, d'espions et de gardes du corps, soudoyant ou menaçant la moindre parcelle d'autorité, instaurant des shérifs véreux et des couvre-feu, séquestrant jusqu'à son substitut de famille - un mariage arrangé, un fils désiré puis renié…?
Dans ce décor, le cadavre retrouvé est le déclencheur… de la bombe humaine qui se prépare. Etouffant dans cette vie dont ils ne veulent plus, faite de trop peu d'instants magiquement suspendus, des gilets jaunes façon Zola vont désormais « 𝘳é𝘴𝘰𝘭𝘶𝘮𝘦𝘯𝘵, 𝘤𝘩𝘢𝘤𝘶𝘯 𝘴𝘰𝘶𝘵𝘦𝘯𝘶 𝘱𝘢𝘳 𝘵𝘰𝘶𝘴 𝘭𝘦𝘴 𝘢𝘶𝘵𝘳𝘦𝘴, 𝘦𝘯 𝘶𝘯𝘦 𝘧𝘰𝘳𝘮𝘦 𝘥𝘦 𝘤𝘰𝘶𝘳𝘢𝘨𝘦 𝘨𝘳é𝘨𝘢𝘪𝘳𝘦, 𝘲𝘶𝘪 𝘷𝘦𝘶𝘵 𝘲𝘶𝘦 𝘭𝘦 𝘯𝘰𝘮𝘣𝘳𝘦 𝘧𝘢𝘪𝘵 𝘤𝘳𝘰𝘪𝘳𝘦 𝘲𝘶𝘦 𝘭'𝘰𝘯 𝘢𝘶𝘳𝘢 𝘵𝘰𝘶𝘫𝘰𝘶𝘳𝘴 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶'𝘶𝘯 𝘴𝘶𝘳 𝘲𝘶𝘪 𝘤𝘰𝘮𝘱𝘵𝘦𝘳, 𝘴𝘢𝘯𝘴 𝘴𝘦 𝘥𝘰𝘶𝘵𝘦𝘳 𝘶𝘯 𝘴𝘦𝘶𝘭 𝘪𝘯𝘴𝘵𝘢𝘯𝘵 𝘲𝘶𝘦 𝘤𝘦 𝘲𝘶𝘦𝘭𝘲𝘶'𝘶𝘯, 𝘤'𝘦𝘴𝘵 𝘴𝘦𝘶𝘭𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘴𝘰𝘪-𝘮ê𝘮𝘦 ». Et même si, selon l'araignée, « 𝘪𝘭𝘴 𝘯𝘦 𝘧𝘰𝘯𝘵 𝘤𝘢𝘶𝘴𝘦 𝘤𝘰𝘮𝘮𝘶𝘯𝘦 𝘲𝘶𝘦 𝘱𝘰𝘶𝘳 𝘮𝘢𝘴𝘲𝘶𝘦𝘳 𝘭𝘢 𝘴𝘰𝘮𝘮𝘦 𝘥𝘦 𝘭𝘦𝘶𝘳𝘴 𝘥é𝘧𝘢𝘪𝘭𝘭𝘢𝘯𝘤𝘦𝘴 𝘪𝘯𝘥𝘪𝘷𝘪𝘥𝘶𝘦𝘭𝘭𝘦𝘴, 𝘭𝘦𝘶𝘳 𝘮𝘢𝘯𝘲𝘶𝘦 𝘥'𝘢𝘮𝘣𝘪𝘵𝘪𝘰𝘯 𝘦𝘵 𝘥𝘦 𝘤𝘰𝘶𝘳𝘢𝘨𝘦 », la tension monte au fil des pages, des injustices, silences et maltraitances. Et la question demeure : Qui est mort, et pourquoi ? Est-ce celui qui suscite tant de haine ? Un sbire, ou au contraire une victime rebelle ?


La couverture d'Albin Michel sert de décor à cet univers dans lequel, petit à petit, la vie ressort du lit dans laquelle on avait, trop longtemps, tenté de l'enfermer. C'est le barrage qui cède, la rivière qui déborde. Elle servira d'appui à de très belles descriptions, des épiphanies sur toile de jute ; comme ces quatre enfants suspendus au viaduc, dont les vies ne tiendront, littéralement, qu'à un fil… Déroulant sa soie noire mais puissante, l'écriture chuchote et puis elle crie. Comme sur la couverture, on se demande si la nuit tombe ou bien se lève, sur ce village où le monstre veille et où la révolte sommeille depuis trop longtemps. Est-ce un début ou bien une fin, ce qui ce joue sous nos yeux ? Un décor plongé dans l'obscurité, mais au milieu duquel coule une lumière. Qui ruisselle, coule, enfle puis déborde ; Eclate. Brûle, aussi ?


« 𝘖𝘯 𝘴𝘦 𝘥𝘦𝘮𝘢𝘯𝘥𝘦 𝘴𝘰𝘶𝘷𝘦𝘯𝘵 𝘢𝘱𝘳è𝘴 𝘤𝘰𝘶𝘱 à 𝘲𝘶𝘦𝘭 𝘮𝘰𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘭𝘢 𝘷𝘪𝘦 𝘴'𝘦𝘴𝘵 𝘵𝘳𝘢𝘯𝘴𝘧𝘰𝘳𝘮é𝘦 𝘦𝘯 𝘥𝘦𝘴𝘵𝘪𝘯 𝘪𝘯𝘤𝘰𝘯𝘵𝘳ô𝘭𝘢𝘣𝘭𝘦, 𝘲𝘶𝘢𝘯𝘥 𝘭𝘢 𝘮𝘢𝘤𝘩𝘪𝘯𝘦 𝘴'𝘦𝘴𝘵 𝘦𝘮𝘣𝘢𝘭𝘭é𝘦, 𝘴𝘪 𝘤'𝘦𝘴𝘵 𝘶𝘯 𝘦𝘯𝘤𝘩𝘢î𝘯𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘥'é𝘷é𝘯𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵𝘴 𝘱𝘢𝘴𝘴é𝘴 𝘲𝘶𝘪 𝘱𝘳é𝘴𝘪𝘥𝘦 𝘢𝘶 𝘤𝘩𝘢𝘯𝘨𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘰𝘶 𝘴𝘪 𝘭𝘦 𝘤𝘩𝘢𝘯𝘨𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘭𝘶𝘪-𝘮ê𝘮𝘦 𝘦𝘴𝘵 𝘪𝘯𝘴𝘤𝘳𝘪𝘵 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭'𝘢𝘷𝘦𝘯𝘪𝘳. »


Beaucoup d'habitués de cet auteur ont trouvé que ce n'était pas son meilleur livre. Alors je suis contente de le découvrir avec cette oeuvre-là, afin de l'apprécier à sa juste valeur sans comparaison : Un très beau roman.


« 𝘐𝘭𝘴 𝘪𝘯𝘴𝘱𝘪𝘳𝘢𝘪𝘦𝘯𝘵 𝘧𝘰𝘳𝘵 𝘦𝘵 𝘣𝘶𝘷𝘢𝘪𝘦𝘯𝘵 𝘭𝘦 𝘷𝘦𝘯𝘵 𝘲𝘶𝘪 𝘮𝘰𝘯𝘵𝘢𝘪𝘵 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘢 𝘷𝘢𝘭𝘭é𝘦, 𝘭𝘦 𝘳𝘦𝘤𝘳𝘢𝘤𝘩𝘢𝘯𝘵 𝘦𝘯 𝘳𝘦𝘭𝘦𝘯𝘵𝘴 𝘥𝘦 𝘵𝘦𝘮𝘱ê𝘵𝘦 𝘴𝘰𝘶𝘴 𝘭𝘦𝘶𝘳 𝘤𝘳â𝘯𝘦 𝘥'𝘦𝘯𝘧𝘢𝘯𝘵𝘴 ».
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