Ayant lu peu de romans de
Franck Bouysse, je ne suis jamais parvenu à leur accorder plus de deux étoiles, peut-être injustement, car ses textes présentent de nombreuses qualités. C'est leur structure et leurs dénouements bâclés qui m'ont chaque fois incité à porter une appréciation plutôt négative.
Je vais déroger avec ce roman en allant jusqu'à trois étoiles, malgré, encore une fois, une fin, à mon goût, complètement ratée alors que toute la progression du roman pouvait laisser espérer une apothéose du noir au milieu du décor blanc de neige des hauts plateaux cévenols.
La qualité de l'écriture de
Franck Bouysse est indiscutable, ses descriptions de la nature saisissantes, avec peu de clichés, ses études des personnalités humaines élaborées, du moins pour les principaux protagonistes, laissant pour les autres une impression d'inachevé.
Ici, il met en scène deux hommes, voisins solitaires par la proximité de leurs fermes perdues dans la nature, séparés malgré eux par des dissensions familiales que l'un d'eux méconnaît totalement et qu'il va découvrir à mesure de l'avancement de l'histoire.
Gus et Abel, voisins, suspicieux l'un envers l'autre, ayant chacun besoin des services de l'autre, passent à côté des joies de l'existence, frappés qu'ils sont par les enchaînements du destin, des méchancetés humaines diverses, jusqu'au jour où ils iront tant mal que bien "
grossir le ciel" où les attend depuis peu l'abbé Pierre.
Que vient faire l'abbé si populaire dans cette galère où des évangélistes sortis de nulle part veulent convertir des hommes que leurs racines camisardes ont rendus étanches à toute parole faisant référence au divin qu'ils invoquent pourtant chacun à leur manière? L'image de l'abbé finit par dominer au long de la lecture, tel un repère que le lecteur finit par trouver peu à peu nécessaire.
Malgré cette fin que j'ai trouvée une nouvelle fois très médiocre, l'écriture de
Franck Bouysse saisit, emporte, l'ensemble de son style et la richesse sobre de ses dialogues finissant par atteindre tout lecteur.