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EAN : 9782226251565
217 pages
Albin Michel (13/11/2013)
4/5   1 notes
Résumé :
Le collègue de Micheline lui a conseillé de retourner faire du tricot ? Tom est humilié par un mot utilisé durant la période de l’esclavage ? Malagua est mise à l’écart à cause de son poids ? Stefano a perdu toute chance de promotion du fait de son orientation sexuelle ? Véronique est harcelée en raison de ses activités syndicales? Hamid est stigmatisé parce qu’il est musulman ?…”

Ce n’est pas admissible, mais que faire ?

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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Combattre le harcèlement au travail : décrypter les mécanismes de la discrimination, est un essai en 3 parties de Dounia et et Lylia Bouzar (mère et fille, l'une anthropologue et l'autre juriste). Cet essai se base sur les 3 années de travail qu'elles ont passé à Disneyland Paris à la demande des RH. Leur mission consistait à écouter et comprendre les mécanismes du harcèlement et de la discrimination au travail, et de trouver les moyens d'y remédier. En s'appuyant sur un groupe ressources d'une cinquantaine de salariés de Dysney, elles ont mis en oeuvre la méthode IDECM.

La première partie de cet essai présente 6 situations, cas fictifs basés sur les éléments les plus représentatifs de cas réels, 3 relatifs à du harcèlement ("Tom, un chef d'équipe coloré", "Véronique la syndiquée non légitime" et "Micheline une femme handicapée trop déterminée), les 3 autres à de la discrimination ("Malaga une chef à la dimension XXL", "Stefano ou la difficulté d'être soi même quand on est homosexuel" et "Hamid stigmatisé depuis sa naissance"). Pour chaque cas, les auteurs présentent le contexte de la venue des personnes à la cellule IDECM, l'écoute et la reformulation des volontaire de la cellule IDECM, l'objectivation du harcèlement ou de la discrimination, le recours au juridique, la confrontation avec le harceleur ou discriminant supposé, et l'issue du cas.
Si ces cas paraissent très typiques, presque un peu trop "parfaits" pour être vrais, il y a différents éléments de la démarche que j'ai apprécié : l'écoute, avec la reconnaissance de la personne en souffrance, la confrontation systématique, et la recherche d'appui tant managérial que RH pour instruire le dossier. Chaque cas n'aboutit pas à une conclusion "heureuse" pour le discriminé ou le harcelé. Un autre point assez intéressant dans cette partie est la façon dont les auteurs montrent que la discrimination, qui est au final liée aux mentalités, n'est pas toujours intentionnelle (dans le cas de Malaga, cette dernière défend son discriminant, en expliquant qu'il est de bonne foi et ne cherche qu'à la protéger... ce qui est effectivement le cas !).
En conclusion de cette partie sont présentés, en guise de repères, les 19 critères encadrés par la loi sur lesquels portent la discrimination et le harcèlement. On nous y explique également les différences de traitement des dossiers entre ces deux cas : par exemple, il faut faire la preuve que l'on est victime de harcèlement, preuves écrites à l'appui, alors que dans un cas de discrimination, c'est à l'entreprise de prouver qu'elle n'a pas eu lieu....

La seconde partie, "Pourquoi est-il si difficile de combattre les discriminations?", donne des pistes (pas faciles à suivre certes, mais auxquelles j'adhère particulièrement) pour comprendre ce que sont les discriminations et quelles seraient les conditions qui permettraient de les combattre.
L'un des premiers éléments de compréhension consiste à se replonger dans la législation française. La fameuse pierre angulaire française "Liberté, égalité, fraternité", et la première phrase de la constitution des droits de l'homme, obligeant à une égalité officielle de traitement, ont pour conséquence, malgré l'idéologie indispensable qui en est l'origine, d'empêcher la reconnaissance d'existence de minorités, qui doivent, de fait, être assimilées. Ces minorités n'existant pas officiellement, elles ne peuvent s'assembler pour pour faire reconnaître leurs droits.
Un autre élément de compréhension des difficultés relatives au combat contre les discriminations est qu'elles sont la conséquence de préjugés, et que tant que ces préjugés existent et sont tabou (l'origine, l'orientation sexuelles, la couleur de la peau...), puisque inexistantes officiellement, on ne peut les prendre à bras le corps pour les nommer et les intégrer. de ce fait, le combat contre la discrimination passe par la reconnaissance des préjugés préexistants, et des catégories qui les sous-tendent ; il passe donc par une évolution de la société elle-même, un changement des mentalités ; il n'y a qu'à voir le barouf autour de la PMA dans le cadre du "mariage pour tous". Typiquement, ce qui pose problème n'est pas tant la catégorie auxquelles les personnes revendiquant des droits appartiennent, mais le fait que cette catégorie peut avoir les mêmes droits que tout le monde, et donc, que moi (mariage, management...).
Cette catégorisation qui sous-tend les préjugés met les discriminés en situation de responsables de leur propre discrimination : le processus de catégorisation enlève à l'intéressé la possibilité d'être un "sujet pensant", car le monde et les personnes qui l'entourent le considèrent et n'examinent son comportement qu'au travers du filtre d'une seule de ses caractéristiques : celle de sa discrimination (c'est une femme, c'est un homo, c'est un beur... et on a tout dit !). Les auteurs pointent le rôle de la religion dans l'assignation d'un rôle et de la place de chacun dans le monde en fonction de son genre, par exemple.
Enfin, les auteurs terminent cette seconde partie en évoquant le rôle de la stigmatisation dans la discrimination. Quand on a été stigmatisé toute sa vie, il est quasi impossible de sortir de se rôle imposé et on devient et se comporte de la façon dont on l'attend de la part d'un stigmatisé.

Enfin, la 3ème partie présente plus précisément la méthode IDECM mise en place et utilisée par les auteurs dans le cadre de la mission à Disneyland Paris.
L'originalité de cette approche est la place accordée à la médiation, première étape pour permettre au discriminé de se réparer (au travers de la reconnaissance de sa souffrance au travail), et parfois, au discriminant, de changer de comportement en prenant conscience de son comportement discriminant et de ses conséquences. On sort ainsi de la "résolution classique" de ce genre de problème, qui consiste en général à déplacer la personne qui se sent discriminée dans une autre entité (et surtout pas le discriminant, ce qui donne une certaine légitimité institutionnelle à son comportement...). Pour mener à bien sa mission, IDECM s'appuie et se réapproprie les fondamentaux, notamment les définitions légales, pour dépassionner le débat. La méthode ensuite consiste à construire des faisceaux d'indices pour instruire le dossier, et surtout, le recueil des versions de chaque acteurs du cas, pour tenter d'atteindre l'objectivité.
A l'issue de ce diagnostique est conçu un plan d'actions partagé et porté institutionnellement (via le management de haut niveau si nécessaire et les RH) pour instituer les changements dans la durée. Cette étape est délicate car ce plan d'action remet en cause la gestion institutionnelle du personnel dans l'entreprise. Quoiqu'il en soit, ce plan d'action a deux objectifs pédagogiques : faire prendre conscience de l'impact destructeur de la souffrance supportée par le demandeur, et sortir du déni pour enclencher la reconnaissance, la réparation et la réhabilitation du demandeur.
Au final, IDECM permet de traiter la discrimination mais également de casser les catégories qui les sous-tendent.


Au premier abord, j'ai été assez déçue de ce livre. La promesse portée par le titre, "Combattre le harcèlement au travail : Décrypter les mécanismes de discrimination" me semblait assez peu compatible avec le cas particulier de Disneyland Paris, et je m'attendais à des éléments généraux sur le harcèlement et les discriminations dans un cadre professionnel, pas à tout un tas d'exemple trop "parfaits" (disons stéréotypés) pour être vrai résolus avec une "méthode miracle" qu'on ne connait ni ne comprend au premier abord. le livre aurait dû porter un autre titre ayant plus trait à son contenu (et je trouve très frustrant d'être "trompée sur la marchandise" de cette manière!). En fait, pour moi, le plus gênant dans ce livre, c'est son plan : des cas fictifs (et pourquoi pas vrais, d'abord ?) et les étapes de leur résolution, des éléments sur les origines de la discriminations, et quelques spécificités de la méthode utilisée. Personnellement, j'aurais bien vu un rappel ou une définition de ce qu'est le harcèlement, la discrimination, une présentation de la méthode, et les cas présentés à titre d'illustrations. Enfin, le dernier point négatif concernant ce titre est sa mise en page : il y a tout un tas de citations mise largement en évidence sur la page du texte qu'on lit, qu'on confond avec les titres et sous-titres du contenu, et qu'on vient juste ou que l'on va juste lire. Aucun intérêt à ces redondances qui polluent la lecture.
En-dehors de ces points négatifs, je trouverais vraiment dommage que l'on passe à côté de cet excellent ouvrage de Dounia et et Lylia Bouzar. Pour moi qui travaille dans un grand groupe, je trouve leur approche vraiment très intéressante, voire révolutionnaire : le rôle central de la médiation, le retour aux fondements juridiques, et l'implication du management et des RH tout au long du processus de traitement des cas me paraissent pour le coup réellement être une prise en charge du harcèlement et de la discrimination. Cela replace le harcelé, et le harcelant, tout comme le discriminé et le discriminant, en tant que sujet : on reconnait la souffrance de l'un, y compris collectivement (la cellule IDECM fonctionne grâce à un groupe d'une cinquantaine de collaborateurs de l'entreprise volontaires ; en général, on déplace celui qui se "plaint" dans une autre entité, pour éviter les "vagues", confortant le harcelant ou discriminant dans son bon droit, puisque c'est l'autre qui part), et on travaille avec l'autre sur les mécanismes de son comportement et sur les conséquences qu'il a sur les autres. La méthode proposée par les auteurs ne tombe pas dans la facilité, au contraire, elle montre tout la complexité de ces phénomènes, et ne propose pas de solution miracle (à laquelle je ne crois pas) mais un vrai travail de fond, seul à même de faire changer les mentalités dans l'entreprise. Et c'est là le second point très intéressant de ce livre : revenir aux origines de la discriminations, expliquer l'ignorance dont elles font l'objet, permet de les rendre "objectivables", et participent déjà à ce changement de mentalité.
A lire et à mettre en place dans toutes les entreprises !
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Pour les uns, les discriminations liées à l'origine sont contestées (ou amoindries) au profit d'un problème de classe et/ou de territoire. Autrement dit, les discriminations des personnes de couleur ne seraient pas liées à des préjugés mais à leur niveau social et à la ghettoïsation des cités. [...] Le sociologue Saïd Bouanama montre comment, dans ce type de discours, les discriminations sont niées par l'affirmation qu'il n'existe que l'explication économique et l'exclusion sociale. [...] Pour d'autres, les discriminations liées à l'origine seraient tout à fait explicables par le "handicap culturel" des discriminés... Cette perception est partagée par quantité d'acteurs, qui n'ont pas compris qu'on ne rencontre jamais "une culture" ou "une religion" mais toujours un "être humain qui s'approprie des éléments culturels et/ou religieux en mouvement...". Une culture n'est pas héritée puis fixée à l'individu à la naissance, comme la couleur de ses cheveux... C'est une perpétuelle interaction avec le monde dans lequel il évolue. [...] Ces deux approches - le tout social et le tout culturel - ont comme point commun de permettre de faire l'économie du combat des préjugés racistes qui sous-tendent le traitement différencié du salarié sur l'origine vraie ou supposée. [...] Cela leur permet aussi de faire l'économie du combat du processus de catégorisation des êtres humains liés à leur taux de mélanine, qui débouche sur un processus conscient ou inconscient de hiérarchisation sociale.
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La difficulté du harcèlement moral est de mettre au jour le processus. Toute la force d'un système de harcèlement moral "réussi" repose sur son invisibilité. Seule la victime "le voit". Le harceleur utilise des techniques très subtiles (dénigrement, menaces, insultes...) toujours habilement dosées, patiemment répétées et amplifiées au fil du temps. Les reproches sont souvent fondés sur une part de vérité, ce qui amplifie le trouble.
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Pourtant, les professionnels de la jeunesse se rendent à l'évidence : certains enfants grandissant en famille monoparentale sont plus équilibrés que d'autres élevés au sein d'une famille dite "traditionnelle". Il ne faut pas spécifiquement un père et une mère pour garantir l'équilibre du petit enfant, mais un bon équilibre d'éléments masculins et d'éléments féminins.
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La loi est claire : en cas de traitement discriminatoire supposé, c'est à l'employeur d'apporter la preuve que sa décision repose sur des critères objectifs, étrangers à toute discrimination. Le salarié s'estimant victime doit fournir des éléments laissant apparaitre la vraisemblance de son témoignage mais depuis la dernière loi, il ne doit plus en apporter la preuve.
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Il faut rappeler que les préjugés sur la définition du genre, et ensuite sur la répartition des rôles, ont été sacralisés par les récits de la création d'Adam et Eve. Si la femme est subordonnée à l'homme, ce n'est pas dû à sa différence sexuelle mais à son ordre d'arrivée dans la Création.
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