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sur 1094 notes
Sur le Chemin des dames nombreux ils succombaient, “Le chemin des âmes” alors ils empruntaient...
Publié en 2004, le roman de Joseph Boyden est un mélange de barbarie et de spiritualité, guidé par deux voix qui tour à tour lui donne vie.

“Le chemin des âmes” c’est l’enfer du nord de la France raconté par un amérindien, Xavier, enrôlé avec son ami d’enfance Elijah dans un bataillon canadien vite embourbé dans les tranchées durant des mois interminables face à l’envahisseur allemand ; c’est une immersion au cœur de ”la Der des Ders” ; c’est le quotidien de soldats terrés dans des trous à rats avec la peur, la boue, les poux chevillés au corps ; ce sont les assauts répétés de ces pauvres bougres sous la mitraille, les obus et les gaz qui fauchent aveuglément.

“Le chemin des âmes” c’est aussi l’histoire de la tribu Cree en voie d’extinction, racontée par la tante de Xavier qui récupère celui-ci en piteux état dans une gare de l’Ontario un jour de 1919.
Chamane pour les uns, sorcière pour les autres, c’est elle qui a recueilli Xavier et Elijah encore enfants, qui leur a appris à survivre en milieu hostile au cœur de la forêt.
Arrivera-t-elle par ses remèdes ancestraux, par ses incantations, par son amour, à sauver une fois de plus son neveu maintenant à l’agonie au fond du canoë qui lentement glisse vers "son chez elle” ?

L’infinie tristesse qui hante “Le chemin des âmes” longtemps me poursuivra ; la personnalité hors norme de ses trois personnages principaux longtemps me fascinera ; la plume incisive de Joseph Boyden longtemps m’appellera !
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♫Elle rentrera blessée dans les parfums d'un autre
Tu t'entendras hurler "que les diables l'emportent"
Elle voudra que tu pardonnes, et tu pardonneras
C'est écrit♫
-Francis Cabrel-1989-
----♫---♪---🏹----🍁----🏹---♪---♫----
Sur un sapin, les ailes écartées, gloussait une gelinotte
(c'est écrit alors pas besoin de prendre des notes !)
30 ou 40 oiseaux autour de l'arbre, en cercle, tournaient
Ils se dandinaient suivant les appels de l'autre qui les menait...
Puis, il s'est produit quelque chose de stupéfiant...
(Il y a l'onguent , ça c'était avant, concoction plantes et racines; remplacé par l'emprise de la médecine, comprenez morphine !)
Grande gélinotte a replié ses ailes, gloussé de plus belle
les autres, s'arrêtant net , ont ébouriffé leurs plumes
-ils en doublaient de volume-
Avant de recommencer leur ronde dans l'autre sens.
Personne ne te croirait ....Houhouhou !
Aussi quand c'est tes cris : preuves y dansent
Invocation par Cri de chouette
Pincée de glandes de mouffette
Cendres d'orignal, singulier car y bout
Fit celle qui m'apprenait l'esprit des animaux
traditions que je n'aurais pu dire avec des mots
merci à Niska, ma tante, femme tipique
dans l'Environnement d'un camp amérindien.
Je ne suis qu'un Cree...
Signé X...14-18
Chemin des Dames
Jetez les D, comme pour une partie de Yams
DCA
DCD
Dés sans d'sur le chemin des âmes...

Des maux Crient
Mais les Cree restent...
♪C'était Cree♪
et ma Cree tique 😱

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1919. Niska, une vieille Amérindienne du nord du Canada vient chercher son neveu Xavier à la gare. Elle le ramène chez lui après des années passées à faire la guerre en Europe. de là à leur campement, ils ont trois jours de voyage à faire en canot. Ce long chemin est l'occasion pour Xavier de faire le point sur sa vie, de faire la paix avec lui-même. Et pareillement pour sa tante. C'est ce que nous propose Joseph Boyden avec son roman « le chemin des âmes », un voyage vers l'intérieur, spirituel mais pas dans le genre psychologie pop. Dans tous les cas, moi, j'ai apprécié. C'est un de mes coups de coeur de l'année.

Dans les tranchées de France et de Belgique, Xavier a vécu l'horreur de la Grande Guerre. Boyden (pourtant à son premier roman !) a réussi à dépeindre admirablement bien ce conflit. Avec réalisme, parfois la barbarie, d'autres fois l'ennui du quotidien, souvent la peur, à l'occasion l'héroïsme. La bataille de Vimy, les escarmouches à Passchendaele, etc. Mais surtout la vie dans les tranchées et les petites excursions. C'est que Xavier et son meilleur ami Elijah, son frère d'adoption, sont tellement bons à atteindre la cible qu'ils sont devenus des tireurs d'élite. Ils étaient souvent envoyés en avant des lignes. Là, embusqués, ils devaient éliminer les ennemis dangereux. Si Xavier ressent une réticence à tuer, Elijah y excelle rapidement. Peut-être même y prend-il goût ?

J'aime bien cette façon de Boyden de dépeindre la guerre. Ça me fait beaucoup penser aux romans de l'Allemand Erich Maria Remarque ou d'un autre Canadien, Timothy Findley. Oui, on y retrouve quelques hauts faits d'armes, mais l'accent est mis sur l'aspect humain de cet enfer. Comment les soldats l'ont vécu au jour le jour. Leurs craintes. Leur peine quand ils perdent l'un des leurs. Leur solitude.

Mais Xavier n'est plus seul. de retour au pays, il devrait pouvoir compter sur Niska, qui l'accompagne dans son parcours. Alors que le jeune homme reste muré sans son silence et ses souvenirs douloureux, sa tante ressent le besoin de parler, de raconter l'histoire de son peuple, les Crees. Comment ils vivaient avant. Avant l'arrivée des Blancs, de leur commerce des fourrures, de leur alcool ravageur, leurs écoles où ils ont amené de force les petits Amérindiens et les ont coupés de leur culture plusieurs fois millénaire. Puis elle lui parle de son père, de sa soeur, des raisons qui l'ont poussées à récupérer ce neveu. Chacun doit mener ses propres combats mais, parfois, certains sont trop lourds à porter…

Le roman va et vient entre les souvenirs de Xavier et l'histoire que raconte Niska. Cette alternance permet de bien digérer toutes les scènes de violence de la guerre. Il permet aussi de comprendre leur solitude. Leurs deux solitudes, qui se croisent sans vraiment se rencontrer. Et où peut-on vraiment en prendre conscience que dans les grands espaces canadiens ? Là où on ne retrouve que des rivières à fort débit et des forêts vierges à perte de vue. Là où la solitude de l'âme rencontre celle de la nature. La puissance d'évocation de Boyden est forte à un point tel que, en lisant ce roman, je me suis senti envahi par une nostalgie pour une époque que je n'ai pas connue. Malgré la longueur du bouquin, jamais je n'ai senti des chapitres inutiles ou ennuyeux, ni même des passages. Je me suis laissé porté par cette lecture qui m'encourage à lire d'autres roman de cet auteur canadien talentueux.
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Joseph Boyden - le chemin des ames - 2004 : 1919, ce canot qui glisse pendant trois jours sur une rivière de l'Ontario matérialise le chemin des âmes qui donne son nom à ce livre. À l'intérieur de l'embarcation Niska une vieille indienne décharnée et son neveu Xavier blessé et agonisant de retour après plusieurs années de guerre en France. Ces deux-là pendant les longues heures du voyages vont expier une vie qui arrive pour tous les deux à son terme. L'histoire du peuple Crees décimé et spolié de ses terres par les soldats blancs entre alors en résonance avec les récits de combats du jeune homme noyé dans un des plus horrible massacre de l'histoire de l'humanité. Alors que Niska arrive à remonter aux temps heureux de sa tribu, Xavier lui ne se sort pas de sa vision traumatisante de la violence et de la fureur incarné par son cousin Elijah transformé en bête sauvage par la vue du sang et par la consommation excessive de drogue. En effet comment ne pas devenir fou dans un monde où on passe par les armes un gamin de dix-huit ans pour s'être endormi sur son tour de garde et ou la seule consigne donné aux combattant est de tuer, de tuer et de tuer encore. Les deux jeunes indiens pour leur habilité au tir vont devenir les tireurs d'élite de leur compagnie et les bêtes noires d'un ennemi accablé par leur redoutable efficacité. Dans ce monde fracassé ou les deux seules portes de sortie sont la mort où l'hôpital psychiatrique la lumière ne vient même pas d'une présence féminine et innocente. Ce récit est terrible et sans espoir, c'est le premier livre d'un écrivain canadien marqué par un père militaire et par le sang indien qui coule en parti dans ses veines. C'est aussi un roman qui retrouve les mots désespérés de ceux qui ont vécu de prêt cet enfer et qui l'ont raconté (Erich Maria Remarque, Ernst Junger, Maurice Genevoix, Roland Dorgeles et beaucoup d'autres.)… beau et terrifiant à la fois
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Premier roman de l'écrivain canadien Joseph Boyden, « Le chemin des âmes » nous conte le cheminement halluciné d'Elijah et Xavier, deux jeunes indiens Cree engagés volontaires dans l'armée canadienne, au coeur des tranchées de la première guerre.

Explorant avec une acuité bouleversante les méandres de violence absolue et de folie pure qui hantèrent les plaines de la Somme entre 1915 et 1918, le livre semble habité par une noirceur insondable, que peine à traverser la lumière d'éphémères instants de grâce.

Si les lieux et les protagonistes n'ont rien en commun, l'épopée des deux amis évoque « Apocalypse Now », de Francis Ford Coppola, ainsi que le roman qui l'inspira, « Au coeur des ténèbres » de Joseph Conrad. On y retrouve la même trame narrative, un voyage au bout de l'enfer, un voyage au bout de la nuit aussi, qui nous envoie côtoyer, comme ses deux jeunes héros, une horreur indicible. On y redoute également la confrontation avec une forme de folie à l'état chimiquement pur, qui se dessine peu à peu comme la destinée ultime des deux protagonistes, que le regard fou du colonel Kurtz semble attendre niché au creux d'une tranchée du nord de la France.

Les scènes de combat dans les entrailles d'un paysage lunaire, dévasté par la fureur guerrière, constituent le fil du récit, tandis que les troupes canadiennes reprennent peu à peu le terrain cédé aux Allemands, et qu'Elijah s'enfonce dans une dépendance mortifère à la morphine et dans une folie meurtrière inextinguible. le roman observe ainsi avec une sagacité à la limite du supportable, l'horreur de la première guerre mondiale, cet enchaînement continu de bombardements, de combats au fusil, à la baïonnette et au couteau pour s'emparer des quelques arpents de terre qui séparent les tranchées des deux camps.

Et pourtant, « Le chemin des âmes » est aussi un roman ample et ambitieux dont l'objet dépasse l'aventure de deux guerriers indiens égarés parmi des visages pâles portant des casques à pointes.

En plongeant dans les souvenirs d'enfance de ses héros, l'auteur revient ainsi sur l'asservissement des tribus Cree ou Ojibwé par le colonisateur blanc, qui entend arracher les jeunes indigènes à leur culture d'origine en les plaçant dans des établissements où des bonnes soeurs acariâtres rivalisent de sadisme pour ré-éduquer les petits sauvages qui leur sont confiés.

Joseph Boyden revient surtout par l'intermédiaire du magnifique personnage de Niska, la tante de Xavier, sur la possibilité d'une survivance des traditions d'un peuple voué à la disparition. le second arc narratif de l'ouvrage, consacré au trajet en canoë de Niska et de son neveu estropié et drogué, enfin de retour en ce début d'année 1919, fait songer à « Dead Man », le très beau film de Jim Jarmush. L'amérindienne, qui a hérité du don de chaman de son père et le jeune soldat hanté par le fantôme d'Elijah vont remonter la rivière vers le nord de l'Ontario, et parcourront à leur manière « le chemin des âmes ». Tandis que les souvenirs de la grande guerre éclatent tels des grenades derrière les yeux enfiévrés de Xavier, Niska devra faire appel une nouvelle fois à la magie indienne pour tenter de sauver le jeune homme dont l'âme semble sur le point de rejoindre le Grand Esprit.

Si le roman raconte, avec une profondeur émouvante, le tragique de la guerre de tranchées qui ravagea le nord de la France, au travers de l'odyssée du solaire Elijah et du taiseux Xavier, sa beauté incandescente se niche dans le combat que mène envers et contre tout une vieille indienne pour perpétuer la spiritualité d'un peuple que les visages pâles ont tentée d'éradiquer à tout jamais.

« J'ai longtemps prié Gitchi Manitou cette nuit-là, puis le lendemain : je l'ai remercié d'être toujours en vie et pour la mort de mon ennemi. Depuis lors j'arrive à tuer en sachant que je ne le fais que pour survivre, et tant que je dis mes prières à Gitchi Manitou : il comprend. Mon ennemi, lui, ne le comprend peut-être pas quand je l'envoie sur le chemin des âmes, mais j'espère qu'il le comprendra le jour où je le rencontrerai à nouveau ».

PS : pour découvrir l'avis de Onee c'est par là :
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Prenez deux univers fictionnels que rien a priori ne semblait pouvoir rapprocher. Deux univers dont le potentiel romanesque reste immense malgré la profusion d'oeuvres déjà produites. Prenez, par exemple… la guerre de 14-18 (une énorme boucherie qui a taillé dans le gras de la pyramide des âges de la population française comme dans un vulgaire morceau de kebab, en tout cas, c'est de cette façon édulcorée qu'on nous l'avait présentée dans les petites classes), et prenez, tiens, pourquoi pas… les indiens d'Amérique (un peuple décimé et spolié de ses terres ancestrales par un autre, prétendument censé représenter la civilisation). Dans les deux cas, ces sujets charrient beaucoup de bagarres, de drames et de morts inutiles, et dans les deux cas, ils ont inspiré (chacun de leur côté) pléthore de récits, romans, films, bédés, qui font désormais partie de notre imaginaire. Ces univers en apparence disjoints n'ont aucun point d'intersection. Enfin, si… maintenant, il y en a un. Ce point commun s'appelle le Chemin des âmes de Joseph Boyden.
En 1916, deux indiens Cree, Xavier Bird et Elijah Whiskeyjack, font la guerre dans les environs de Saint-Eloi et d'Ypres, en Belgique. Enrôlés comme tireurs d'élite, ils se cachent dans les recoins improbables laissés par la dévastation des combats. Ils observent et déciment les tireurs à découvert du camp d'en face qui paient de leur vie un instant d'inattention. Ils participent également aux assauts dans les tranchées, aux corps-à-corps à la baïonnette, à la reconquête des collines et des cratères investis par l'ennemi.
Le lecteur est à leur côté, rentrant la tête dans les épaules au miaulement des balles et des éclats d'obus, éclaboussé par la boue, le sang et les morceaux de cervelle des camarades.
Mais ce livre est beaucoup plus que ça. Une histoire complexe entre Xavier et Elijah, qui sont amis d'enfance, se développe progressivement, mêlant admiration réciproque, jalousie et compétition. Leur histoire finira en tragédie indienne ressuscitant le mythe du windigo, qui n'a rien à envier à la tragédie grecque.
On sait dès les premières pages que Xavier, accueilli par sa tante Niska à sa descente du train, rentrera au pays. Xavier et Niska sont tour à tour les deux narrateurs du récit. Sur la route du retour en canoë qui durera plusieurs jours, la guerre est racontée à travers les souvenirs de Xavier, anéanti, qui semble se laisser mourir. Niska rappelle comment a évolué le destin de sa famille confrontée à l'arrivée des wemistikoshiw, des hommes blancs, et raconte à travers son parcours personnel celui des indiens de l'Ontario. Ses vieux trucs de sorcière parviendront-ils à faire revenir Xavier parmi les vivants ?
A travers tout ce qu'il évoque et dévoile sur cette période, le chemin des âmes est un immense et exceptionnel roman, mais c'est aussi un premier roman, qui l'eût Cree ? A lire d'urgence.
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J'ai accompagné Xavier à la lisière du chemin des âmes... Je les ai entendues murmurer leur ravage à son oreille, j'ai tremblé avec lui dans le fracas des armes, tellement fort qu'il en est devenu sourd. J'ai souffert avec lui. J'ai été dévastée devant la folie meurtrière d'Elijah, son ami. J'ai regretté le Canada, ses forêts sombres et ses animaux sauvages, la liberté de Niska, sa tante qui l'avait pris sous son aile.
Et Niska, justement, je l'ai admirée pour sa façon de vivre, libre et sauvage ; pour son refus de la Mort. Force de vie, elle est l'incarnation de la Déesse-mère qui fait fructifier ses petits et leur donne le courage de continuer.
La guerre des tranchées, en Belgique et dans la Somme, couplée à la chasse à l'orignal et à la magie de la religion des Indiens, forme un mélange détonant, hymne à la vie et à la mort.
Mais cessons d'évoquer cette histoire, car « évoquer sa mémoire ne ferait qu'inviter la tristesse et la tristesse, par ici, monte aussi vite que la pluie dans les tranchées, jusqu'à tout noyer. »

Ce roman, je l'ai donc aimé, mais pour ma survie, je suis contente de l'avoir refermé, il m'emportait trop loin et trop longtemps à la lisière de l'enfer.
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Assise dans le canoë je me suis laissée bercée par l'histoire de Niska. J'ai entendu sa voix susurrer par-dessus mon épaule. Bercée par le clapotis des flots je l'ai écouté me raconter son peuple, me dire la liberté, la communion avec les éléments, les légendes millénaires. J'ai senti le souffle de ses ancêtres, vu l'orignal, ressenti la peur inspirée par les wemistikoshiw (les blancs), enduré la souffrance du carcan qu'ils ont voulu imposer aux Cree, aux Ojibwés et à tous ces hommes qu'ils disaient être des sauvages. J'ai senti l'arrachement de ce peuple à la nature, à leur terre avec laquelle ils ne faisaient qu'un ; senti la pitié de Niska pour ces pauvres fous et ressenti la futilité de leur grand Manitou et de leurs croyances. Comment un tel mépris de l'autre et de la nature peut-il être imposé par un Manitou bienveillant ? J'ai senti la fureur et la colère gronder dans son coeur et sa volonté s'affirmer à mesure qu'elle se heurtait au mépris et à la suffisance des wemistikoshiw.

J'ai écouté Neveu (Xavier) me raconter la pêche, la chasse, l'instinct, les traques silencieuses. Je l'ai écouté me raconter l'amitié, la fraternité quasi fusionnelle avec Elijha ce frère de coeur, cet autre lui. J'ai ressenti la fêlure quand les wemistikoshiw ont exploité ses dons, ceux des sauvages. Ces dons qu'ils essayaient d'extirper de leurs corps et de leurs coeurs à coup de prières, de vêtements « civilisés », de cheveux coupés et de sévices. Instrumentalisé dans cette guerre qui n'est pas la leur Neveu se bat pour rester humain, pour rester digne et ne pas se perdre. Elijha lui, veut plus il veut être le meilleur chasseur, meilleur que les wemistikoshiw. Il veut être le plus grand chasseur des tranchées, alors il comptabilise les cadavres des fritzs pour prouver sa bravoure, quitte à se perdre.

J'ai vu la fêlure devenir fissure puis plaie béante dans le coeur de Neveu et d'Elijha. J'ai vu la puissante médecine des wemistikoshiw pervertir leurs coeurs, et détruire leurs âmes.

Niska ne sait pas ce qu'est devenu Elijha mais elle sait que Neveu est là et qu'il a besoin d'elle. Elle sait que la médecine des wemistikoshiw est puissante mais ce combat elle ne peut le perdre. Alors elle susurre à l'oreille de Neveu ses vieilles histoires, sa vie. Elle lui insuffle la force de ses racines de ses ancêtres. Elle invoque le lynx, l'orignal et l'ours parce que face à la folie, à la barbarie et à la boucherie de cette guerre il faut des êtres puissants et dignes.

Ce récit est comme un conte initiatique. C'est l'histoire d'un peuple meurtri qui inlassablement se relève, toujours digne. Derrière la plume de Joseph BOYDEN j'ai entendu en écho celle de Richard WAGAMESE. Même humanité, même magie.
Portée par les mots, submergés par eux, j'ai fait un voyage incroyablement triste et lumineux. Peu d'auteurs savent faire cohabiter la laideur et la beauté, la cruauté et l'humanité sans que cela sonne faux, mais ici le tissage des émotions et des sentiments est d'une rare beauté.
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Cher Isi,


Je suis bien rentrée sous mon tipi, et t'écris en fumant le calumet que nous n'avons pas eu le temps de partager. J'espère que tu es bien remis de notre chevauchée de trois jours où nous avons raccompagné, sur nos appaloosas, Xavier et la tante qui remontaient la rivière en canoë jusqu'à chez eux.


J'ai trouvé impressionnant d'accompagner tante Niska jusqu'au train pour récupérer Xavier. Ou plutôt son fantôme... Car Isi, dans quel état ils nous l'ont rendu ? Je ne sais pas si j'ai eu plus de peine en croisant son regard sans vie sur son visage cadavérique, ou en m'apercevant qu'il lui manquait une jambe. J'aurais voulu lui poser tant de questions alors, mais la tante a eu raison de nous enjoindre de lui laisser reprendre des forces. D'ailleurs peut-être est-ce un grand mot. J'ai l'impression qu'il tirait ses dernières ressources de sa médecine à aiguille qu'il a ramené de cette guerre entre la France et l'Allemagne… Et en même temps, la tante a raison, peut-être que ce venin qu'il s'infiltrait faisait ressortir le poison qui hantait ses rêves, lui permettant comme une fièvre d'expulser toute la noirceur accumulée.


C'était terrible d'entendre ses psalmodies, ses cauchemars, ses peurs à ciel ouvert… Trois longues journées à chevaucher sous ses souvenirs de la guerre, les horreurs qu'il a vues et celles qu'il a commises au nom et pour le compte d'un peuple qui le voyait à peine, et pour un combat qui n'était pas le sien, ni celui de notre peuple. La tante a bien fait, dans les moments où il s'apaisait, de lui raconter sa propre histoire d'indienne, elle qui s'est toujours battue pour sa liberté que les blancs appelle sauvagerie. Je crois que ses récits faisaient beaucoup de bien à Xavier, à son esprit et à son corps. Cette voix apaisante qui nous ramène aux sources, aux choses simples et au sens de la vie, dans un monde où la vie a un sens, un monde où on ne tue que pour la conserver et sauver la sienne. Un monde où creuser des tranchées pour exploser la gueule du plus d'humains possible n'est même pas envisageable, et n'a aucun sens. « Chacun se bat sur deux fronts à la fois, l'un contre l'ennemi, l'autre contre ce que nous faisons à l'ennemi ».


Les récits que la tante intercalait entre deux réminiscences de scènes de guerre sont ceux qui m'ont le plus émerveillée, car même lorsqu'ils parlaient de famine ou de descentes de blanc pour les civiliser, les mater, les martyriser et les parquer dans des réserves, ça me faisait du bien d'entendre que les nôtres s'attachaient au sens des choses. Et puis cette romance, sous la tente de sudation, avec le beau chasseur blanc… Ça commençait si bien ! Indispensable chasseuse de wendigo, la tante est une passeuse formidable, qui continue de se battre pour transmettre ses dons et perpétuer les traditions. Pour autant, j'apprécie quand même d'avoir pu entendre les cauchemars éveillés de Xavier. J'ai trouvé ça long, pourtant, et parfois répétitif, souvent trop violent pour moi lorsque ses souvenirs s'intensifiaient au rythme des combats dans lesquels son esprit replongeait. Mais ça m'a aidé à le comprendre, car jamais il n'aurait raconté tout cela consciemment. Comme la plupart des nôtres, il est plutôt silencieux sur ses « exploits ». Sauf Elijah, mais toi et moi savons ce que ça lui a valu, n'est-ce pas ? Deux guerriers Crees se servant de leur expérience silencieuse de la chasse pour décimer les lignes allemandes… L'un d'entre eux qui commence à aimer ça ; Au bout du compte, comme disait Elijah, « nous faisons le sale boulot à leur place : Quand nous rentrerons chez nous, rien d'autre n'aura changé, on nous traitera toujours comme des merdes. Mais tant que nous sommes ici, il n'y a qu'à faire ce que nous savons si bien faire ».


Sais-tu ce que j'ai préféré, Isi ? La fin de cette aventure. Encore une fois, c'est elle qui donne son relief à l'histoire, sa rondeur, qui boucle la boucle, referme le cercle, celui de la vie éternelle ou de l'éternel recommencement, de la renaissance. Lorsque leurs deux voix se rejoignent, lorsque le passé et le présent ne forment plus qu'un. Car alors tout s'éclaire, le job a été fait et bien fait, tout a finalement un sens. « Je suis devenu ce que tu es, Niska », a marmonné Xavier, tu te souviens ? Et c'était tellement vrai. Paix à leurs âmes pleines de vie, puissent-elles trouver le chemin de futurs lecteurs. En attendant, je te remercie infiniment d'avoir accepté de parcourir ce chemin avec moi. Ça restera un souvenir éprouvant, mais beau, aussi.


Amicalement,
Onee-qui-est-devenue-fan-de-ton-ragout-d'orignal-aux-racines.


L'avis d'Isidoreinthedark :
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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J'ai terminé ce roman il y a déjà plusieurs jours, mais j'ai du mal à rédiger cette critique, tans je suis sous le charme de la plume de cet auteur, de l'histoire qu'il a racontée. J'ai envie de rester encore un peu dans son univers magique…

Joseph Boyden nous parle de la tragédie d'un peuple, les Crees, Amérindiens dont le mode de vie a été bouleversé par l'arrivée des Blancs qui les ont colonisés, les obligeant à renoncer à leur mode de vie si proche de la Nature, exterminant les plus récalcitrants, les obligeant à envoyer les enfants dans les écoles catholiques, où la maltraitance physique et morale régnait en maître absolu.

Les Crees chassait le caribou, pour se nourrir et se faire des vêtements, vivaient en harmonie avec les éléments ; le chef savait où se trouver l'animal en observant les bois de l'animal qu'ils avaient tué auparavant, les faisant brûler pour lire comme sur un parchemin, la « carte géographique » de l'endroit où chercher. le chef avait aussi le pouvoir de voir les « mauvais esprits » et délivrer pour protéger la tribu. Mais les Blancs, les wemistikoshiv , ont imposé leurs propres lois, tuant le chef purement et simplement.

« L'assassinat de mon père avait planté au fond de mon ventre une graine dure et amère ; au fil des ans il en monta la fleur obscure de la colère. Ma mère reconnut ce qui poussait en moi. A sa façon, elle cherchait à m'empêcher d'en user pour le mal, car c'est entrer dans une spirale à laquelle on n'échappe presque jamais. » P 122

Ce chef était le grand-père de notre héros, Xavier Bird, qui était si malheureux à l'école que sa tante Niska, autrefois l'enlever pour vivre avec lui dans la forêt selon les traditions, allant jusqu'à aller chercher plus tard un autre enfant, le seul ami de Xavier : Elijah.

Les deux gamins grandissent ensemble, comme des frères et finissent par s'engager dans l'armée canadienne pour aller combattre sur le front durant la première guerre mondiale. Si Elijah s'adapte très vite devenant un tireur d'élite, Xavier ne se sent pas à sa place, mais suit son ami : ils traquent les Allemands, comme ils traquaient le gibier dans la forêt, ce qui les rend très vite indispensables.

Mais Elijah aime débusquer et tuer, devenant la coqueluche des supérieurs : on les méprise pour leur couleur de peau, comme s'ils étaient des sous-hommes, mais comme ils se comportent en héros, on les accepte mieux. Mais, pour avoir encore plus de sensations fortes, Elijah dérobe de l'héroïne et se pique en cachette…

« Nous aurons passé toute la guerre côte à côte pour nous perdre aux tout derniers jours. Un obus est tombé trop près. Il m'a lancé dans les airs, et soudain j'étais oiseau. Quand je suis redescendu, je n'avais plus ma jambe gauche. J'ai toujours su que les hommes ne sont pas faits pour voler. » P 22

On sait dès le départ, que Xavier revient de la guerre avec une jambe en moins, dépendant lui-aussi de la morphine, et c'est sa tante Niska qui va le maintenir en vie coûte que coûte, lui racontant l'histoire de la famille.

Dans ce roman, Joseph Boyden alterne les récits : ce qui se passe au front, la vie des soldats, leur quotidien, les rivalités, les chefs parfois tellement imbus d'eux-mêmes qu'ils envoient les soldats au casse-pipe alors qu'une autre solution serait possible, la souffrance de ces jeunes gens. Puis, on revient au présent, à Xavier et Niska et ce deuxième combat contre la dépendance à l'héroïne, la souffrance de l'amputation, le refus de continuer à vivre…

L'auteur a choisi de raconter la guerre, à chaque injection que se fait Xavier, pensant que sa tante ne s'en aperçoit pas, comme si la guerre était un « bad trip » ce que j'ai trouvé brillant. Les scènes de guerre, seraient, sinon, très difficiles pour le lecteur. Il en dénonce au passage l'absurdité…

J'ai vraiment eu un coup de coeur pour ce roman, et pourtant j'ai lu peu de livres sur la première guerre mondiale, m'intéressant beaucoup à la guerre suivante. J'ai trouvé des thèmes qui me touchent : les Amérindiens, leur mode de vie en harmonie avec la Nature : ils étaient écologistes avant l'heure, si l'homme blanc n'avait pas détruit toutes les autres civilisations sur son passage…

Cerise sur le gâteau: le titre est excellent…

Si ces thèmes vous touchent, et si vous faites partie des chanceux qui ne l'ont pas encore lu, n'hésitez pas, foncez !


Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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