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Critique de Ambages


« S'habituer très tôt à se sacrifier pour de nobles causes, n'est-ce pas ce qui forge le mieux le caractère du camarade-soldat ? »

Effrayant, glaçant, éclairant, un roman qui me touche énormément. Il décrit un monde où l'individu n'est qu'une cellule d'un État-Monde. Chacune des cellules est faite pour assurer le bien suprême, le bien collectif. L'état de la cellule ? Peu importe. Elle 'doit faire', elle doit se sacrifier, elle ne doit pas penser autrement que dans l'intérêt général. Rien de personnel dans tout ceci.

Sauf que si, c'est très personnel tout ça. L'individu, l'être n'existe plus par lui-même. Mais à lire ce roman j'ai pris conscience que cet État-Monde était dans ma tête. A l'intérieur de mon crâne se tient cet État-Monde, cet État-Univers et je l'ai laissé grandir. Pour faire plaisir, pour espérer apporter un petit plus au bien commun, ma petite goutte d'eau, mais aussi pour obtenir une once de reconnaissance, le tout à mon corps défendant, à mon corps souffrant. Mais j'y allais, la fleur au fusil, parce que c'était bien.
Mais qu'est-ce que le bien quand il vous fait mal ? Alors j'ai compris que ce livre m'expliquait mon État-Univers. Il était en moi. Ma dictature. Cet auteur a su me parler, beaucoup plus que d'autres.

« L'organisation ? Répéta-t-elle. Nous ne cherchons pas à nous organiser. Ce qui est organique n'a nul besoin d'organisation. Vous bâtissez de l'extérieur, nous le faisons de l'intérieur. Vous vous utilisez comme des pierres de construction et vous vous effondrez, dehors comme dedans. Nous croissons de l'intérieur, comme les arbres, et entre nous s'établissent des ponts qui ne doivent rien aux matières mortes ni aux forces mortifères. de nous jaillit la vie. En vous n'entre que ce qui est mort. »

Je suis étonnée que ce roman ne soit pas plus lu car c'est une oeuvre qui touche à la psychologie sous un angle atypique, une manière d'aborder l'individu dans un univers qui le nie. Mais ce livre entre dans votre tête. Il est entré en moi à la vitesse éclair, aspiré comme on peut l'être lorsqu'un bateau coule et engouffre les survivants dans le tumulte des flots. J'ai été tous les personnages, la maternité vous change, le travail vous pousse à ne plus être vous parfois et il arrive qu'un faisceau de lumière vous rapproche de Rissen. de son intérieur, qui est vôtre ...quand on y pense. Je lui laisse les mots de la fin de ce petit billet.

« Ce doit être la kallocaïne, je suppose, qui me remplit d'un espoir insensé – tout me semble clair, paisible, aisé... Je suis toujours en vie – en dépit de tout ce qui m'a été dérobé -, et maintenant je sais que ce que je suis subsistera quelque part. J'ai vu les puissances de mort se répandre sur le monde en cercles toujours plus larges – mais les puissances de vie n'ont-elles pas aussi leurs cercles, même si je n'ai pu les discerner ? Oui... bien sûr... c'est sous l'effet de la kallocaïne que je m'exprime. Mais pourquoi mes paroles en seraient-elles moins vraies ? »
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