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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Un roman assez curieux. Conway veut faire vengeance sur l'homme qui sort de prison et qui a tué son frère qui, à l'époque, était un vrai caïd qui n'avait peur de personne et qui faisait tomber les filles. Quand il le kidnappe, il s'aperçoit vite que c'est devenu une lopette. Est tatoué le nom de sa victime sur son bras et il lui dira qu'il ne demande que ça de mourir et il veut que ce soit par lui. Déstabilisant, non ? Seize ans qu'il attend de le punir de la peine de mort. Gravitent autour de ces deux-là une starlette, les parents, les collègues, un jeune qui se frotte à la mafia. William Boyle a vécu à Gravesend, quartier de Brooklyn où l'ennui et la pauvreté suintent, qu'on veut fuir mais qu'on ne quitte jamais. Roman social et surtout original loin des clichés habituels.
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Bientôt la trentaine, Conway voit enfin sortir Ray Boy Calabrese de prison. Seize ans auparavant, Ray Boy et sa bande ont persécuté Duncan, le frère homosexuel de Conway, jusqu'à ce que, en essayant de fuir, il soit renversé et tué par une voiture. le retour de Ray Boy à Gravesend, ce quartier pauvre italien de Brooklyn fait parler. Il y a ceux qui pensent qu'il n'aurait jamais dû sortir de prison et ceux qui estiment qu'il n'aurait jamais dû y entrer. Pour Conway, en tout cas, une chose est sûre : il doit tuer Ray Boy.
Mais Ray Boy Calabrese n'est plus l'adolescent qui, presqu'une vie auparavant, a poussé Duncan à la mort et Conway n'est pas aussi fort qu'il voudrait l'être. La vengeance va alors prendre un tour d'autant plus inattendu que d'autres acteurs vont venir se mêler à la tragédie. Il y a McKenna, l'ancien flic alcoolique et ami de Conway, il y a la naïve Stephanie, il y a Eugene, le neveu de Ray Boy qui vit dans le culte du chef de bande qu'a été son oncle et qui rêve de lui succéder malgré sa patte folle, il y a la belle Alessandra, de retour de Los Angeles et, surtout, il y a le quartier.
Ainsi donc Boyle fait jouer ici une tragédie contemporaine dans laquelle se pose autant la question de la vengeance et de l'expiation que celle de l'impossibilité à échapper à un déterminisme social dans lequel s'enferme toute une communauté. En seize ans, le quartier que retrouve Ray Boy Calabrese n'a finalement pas changé. Les mêmes personnes y vivent et y meurent, les plus âgés n'ont pour certains même jamais mis les pieds en dehors de Brooklyn et voient Manhattan comme une terre étrangère et lointaine. Et les affaires se règlent entre soi. Mais de la communauté soudée au ghetto, il n'y a qu'un pas. Aussi voit-on là une société d'ouvriers et de petits commerçants incapables de s'extraire de leur condition et qui accumulent une énorme frustration. Ainsi en va-t-il du père d'Alessandra :
« le bac était petit et son père avait fixé des rideaux en plastique sur les quatre côtés, et même autour de la pomme de douche, pour éviter que les joints moisissent. Ne restait plus qu'un espace très sombre et étouffant. (…) le confinement du bac de douche était - et avait toujours été - le projet d'un homme qui avait connu trop d'échecs dans sa vie et refusait d'être par-dessus le marché vaincu par la moisissure. »
Alessandra, justement, partie à Los Angeles pour poursuivre un rêve d'adolescente, n'a jamais décroché un rôle, seulement fait de la figuration, et revient là sans projet et sans avenir, ce qui ne l'empêche pas de fasciner Stephanie pour qui le simple fait d'avoir quitté le quartier apparaît comme un geste d'une audace folle.
Car si l'intrigue se cristallise autour de Conway et Ray Boy, c'est bien cette impossibilité à s'extraire de Gravesend, qui est au coeur du roman de William Boyle. C'est la peur du monde extérieur et la haine de celui que l'on ne peut quitter et dans lequel on se trouve sans cesse face à ses propres failles. Conway ne peut échapper à sa propre lâcheté, Ray Boy ne peut fuir son passé et s'est d'ailleurs fait une raison en espérant que Conway puisse abréger cette souffrance, Eugene ne sait pas encore qu'il ne sera jamais pour tout le monde que le boiteux à grande gueule du quartier, Stephanie ne pourra jamais quitter a mère, et Alessandra a beau rêver d'ailleurs, elle reste collée à Gravesend. Toute cette frustration, finalement ne se retourne pas contre la société. Elle vient frapper les personnages et leurs parents à qui ils reprochent de n'avoir pas été différents de ce qu'ils sont eux-mêmes devenus, adultes aux rêves étriqués et égoïstes. Bref, un cocktail qui, dans le pire des cas, débouchera sur une violence désespérée.
William Boyle méritait bien de décrocher le numéro 1000 de la mythique collection Rivages/Noir. Non pas parce qu'il propose avec Gravesend un roman exceptionnel mais bien parce que l'on y retrouve en quelque sorte tout ce qui compose la personnalité de la collection (du noir, un instantané de la société, des personnages forts et complexes) et qu'avec ce premier roman l'éditeur montre que le genre est loin d'être mort et que ce millième livre n'est pas une fin mais seulement une étape dans une aventure amenée à durer. Sans doute que s'il était paru dans la masse des précédents ou suivants Rivages/Noir, Gravesend serait passé inaperçu… pas assez exceptionnel, peut-être un peu trop noir pour le grand public. Et l'on ne peut donc que se féliciter du coup de projecteur que lui vaut ce numéro 1000 sur la tranche et qui permet de découvrir une belle écriture dans laquelle les phrases chocs mettent en exergue la frustration et l'abandon des personnages. Bref, un vrai bon roman noir.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Le numéro 1000 de chez Rivages/Noir se devait de marquer le coup et au lieu de miser sur un auteur connu, François Guérif a misé sur un inconnu.

Pari osé ? Pari risqué ? Oui, mais mais pari gagné !

Dans ce roman noir, il y a des voix… Les vois désabusées des personnes qui gravitent à Graveland, petit quartier de Brooklyn, sorte de microcosme où les habitants végètent, n'attendant plus rien de la vie, cette chienne.

Que ce soit Conway qui rêve de venger la mort de son frère Duncan, tué par Ray Boy, le caïd du coin; Alessandra qui se rêvait actrice et qui est juste une starlette ratée condamnée à ne faire que de la figuration; Stéphanie, vieille fille de 30 ans, vierge et vivant toujours chez sa mère, sorte de demi-folle tarée; ou Eugene, le neveu de Ray Boy qui ne rêve que de ressusciter le culte de son mauvais genre de tonton, rêvant même d'en faire un flingueur.

C'est noir, c'est sombre, à se demander si la lumière viendra les éclairer un jour. Sans compter que certains habitants du quartier n'ont jamais mis les pieds en dehors ! le Bronx, Manhattan, c'est déjà trop loin pour eux. Un peu comme si Gravesend les retenait dans son orbite.

Ceux qui ont quitté le quartier n'ont pas mieux réussi. Eux qui reprochaient à leurs parents d'avoir loupé leur vie n'ont pas réussi la leur, même s'ils ne s'en vanteront pas.

Les chapitres alternent les aventures – les déconfitures – des uns et des autres, nous offrant des tranches de vie misérable, sombre, sans espoir.

L'auteur ne ménage pas ses personnages et les fait se croiser, s'entrecroiser pour mieux jouer avec leur désespoir, leurs illusions, qui deviendront des désillusions.

La vie est une chienne mais parfois, certains personnages prennent conscience que tout compte fait, ils ne sont pas si mal que ça comparés à d'autres encore moins bien lotis qu'eux.

Gravesend, c'est une voix, des voix… C'est l'histoire d'un quartier de New-York, l'histoire de ses habitants, une satyre de la société, un abîme dans lequel des gens habitent, c'est le blues du dimanche, des journées qui s'écoulent, toutes les mêmes, des parents qui rêvent d'un avenir meilleur pour leurs enfants, qui leur offrent une belle école et piquent une crise si le gamin se fait renvoyer du bahut.

C'est aussi une histoire de vengeance qui ne tourne pas comme Conway voudrait, c'est l'histoire d'une rédemption, une histoire violente, inscrite dans le sang.

Une histoire que certains croyaient écrite pour eux, qui pensaient que le destin jouait en leur faveur mais qui au lieu de faire banco, ils ont trouvé l'éternel dodo.

Ce sont des gens qui se cherchent et qui ont du mal à se trouver. Des jeunes qui voulaient une autre vie que celle de leurs parents et qui reproduisent le même schéma, comme condamné à faire pareil. Ou pire.

C'est une histoire qui pourrait se dérouler à n'importe quelle époque, tant les nouvelles technologies sont peu présentes dans les pages. Et c'est tant mieux car dans ces pages, pas besoin d'artifices, on est dans la vraie vie, celle qui est ironique, cruelle, vache, celle qui ne vous loupe pas.

Un bon cru pour cette 1000ème bouteille chez Rivages/Noir. Un vrai noir sans sucre, hormis Alessandra. Et encore !

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Un quartier, Gravesend, scène microlocale en plein Brooklyn d'une tragédie noire, bien noire, où plusieurs personnages vont se croiser ou se recroiser.

Deux y reviennent, Ray Boy et Alessandra. Deux rêvent de s'en sortir pour une autre vie, Eugène et Stéphanie. Et au centre, trait d'union de ces pauvres vies, Conway.

Conway rêve de vengeance depuis longtemps. Depuis la mort accidentelle de son frère. Enfin accidentelle, pas tant que ça, harcelé et poursuivi qu'il était depuis tant de temps par Ray Boy, condamné pour cela. À sa sortie de prison, Conway l'attend pour se venger. Il est prêt. Enfin il le croît. Car se venger n'est finalement pas si simple, d'autant plus que sa cible est consentante.

Petite frappe de banlieue, Eugène rêve de s'élever dans l'échelle du crime, pour suivre les traces de son oncle Ray Boy, lui ressembler, l'accompagner, le rendre fier. Mais pas facile de prendre pour modèle quelqu'un qui a décidé de ne plus l'être, et qui ne lui renvoie que de l'indifférence.

Retrouvant Gravesend et les traces de sa jeunesse, Alessandra se pose. Retour chez les ploucs, intermède dans une vie agitée où seul Ray Boy suscite son intérêt, apporte un peu de piquant dans cette univers sans sel ni aspérité. Mais Ray Boy n'existe plus... Elle renoue avec Stéphanie, enfermée dans sa morne vie, qui va s'encanailler, pour peu de meilleur et beaucoup de pire.

Pour son premier roman, William Boyle dépeindre l'atmosphère si particulière d'un petit bout d'Amérique, si proche de NY et en même temps, tellement hors du temps, où les jours passent, où les habitants s'interrogent sur leur avenir mais, le temps d'y répondre, la vie est déjà passée. C'est bien fait, même si tant d'autres auteurs US avant lui l'ont également réussi.

Il nous livre en revanche une magnifique étude de caractères et une double réflexion. La première sur la vengeance, tellement obsédante, tellement évidente, qu'elle en devient tellement frustrante quand elle ne peut s'appliquer comme on la rêve depuis tant de temps. Un monde s'écroule, une vie s'écroule, des vies s'écroulent.

La deuxième, finalement plus intéressante, sur la repentance. À l'image de Ray Boy, personnage central du livre bien plus que Conway finalement, Boyle nous raconte comment la repentance et le remords peuvent être bien plus dangereuses que la vengeance.

La vengeance permet de vivre dans l'attente et dans l'espoir, que la délivrance tant attendue, espérée jouissive, viendra le moment venu apporter la paix intérieure.
Le remords et la repentance non partagée est mortellement perverse : Ray Boy le sait. À quoi bon vivre encore quand on est mort depuis longtemps ? Pas besoin de le tuer, il s'est tué tout il y a seize ans. reste juste à finir le travail.

Tout cela est donc noir, bien noir. Et dans le genre, Boyle y fait une entrée fracassante.
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Gravesend est un quartier périphérique de New York . Gravesend est un cul de sac . Ceux qui y reviennent après un échec , ceux qui y végètent dans les miasmes de la rancoeur , dans la torpeur de la routine, dans la puanteur des rêves brisés ,tous sont dans leur propre cercle infernal. La belle fille qui se rêvait star, la fille laide qui se rêvait aimée, le boiteux qui s'imaginait caïd, le tueur qui voudrait ne pas avoir tué , le vengeur qui voudrait le pouvoir ,tous se débattent dans les toiles du destin et ce sont leurs efforts , dérisoires , ridicules, que Boyle décrit avec compassion. Un roman mélancolique , très noir où la déréliction d'un quartier accompagne celle des vies.
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Un excellent roman, difficile à lâcher. Les protagonistes sont réalistes et d'autant plus attachants. L'ambiance sombre, triste et sans espoir de ce roman nous plonge dans un monde à la destinée cruelle qui n'est autre que la réalité.

Conway est un jeune homme qui depuis la mort de son frère il y a seize ans, n'attends plus qu'une chose : voire sortir de prison celui qui a causé sa mort pour enfin pouvoir se venger. Depuis cet incident, tout s'est écroulé dans la vie de Conway, seule la revanche semble capable de l'apaiser.
Ray Boy était le dur à cuire, le chef de bande, celui qui faisait la loi et qui n'avait pas peur de défier les autres. Depuis que Duncan est mort par sa faute, il est resté enfermé sous les barreaux seize longues années. Mais, maintenant il est libre. Et cassé.
Revenue de Los Angeles après avoir échoué sa carrière en tant qu'actrice, Alexandra est finalement de retour dans son quartier natal. Les choses semblent ne pas avoir changé, le gang de caïd de son bahut est toujours là, Stephanie la fille de son lycée vit toujours chez sa mère bien qu'elle soit presque trentenaire.
Eugène ne rêve que d'une chose : être comme son cousin, Ray Boy. Et il compte bien montrer à tout le monde que ce n'est pas parce qu'une de ses jambes est boiteuse, qu'il est une mauviette. Une vraie petite frappe hargneuse et insolente qui se prend pour une grosse brute et qui tente de s'imposer en tant que tel.
Gravesend est loin d'être l'endroit dans lequel on reverrait de naître. Quartier où se mêlent italiens et russes au sud de Brooklyn, une mélancolie constante et âcre règne cependant dans ses rues affligées. Conway a vu son jeune frère mourir renversé par une voiture, alors qu'il essayait de semer Ray Boy Calabrese et sa bande. le tribunal conclut à un crime motivé par la haine et Ray Boy empoche dès lors seize ans de prison. Tandis que certains pensent qu'il ne méritait pas une peine si longue, d'autres sont d'avis qu'il aurait dû y rester plus longtemps. Conway n'a jamais digéré la mort de son frère. Mais Ray Boy est sortis de prison à présent et il compte bien le faire payer pour ses actes.
Seulement sa revanche ne s'est pas déroulé comme prévu. Alors que Conway pensait retrouver le bad boy qu'il connaissait il y a seize ans, il est surpris de découvrir un homme déchiré qui ne souhaite que la mort.
Les destins de Conway, Ray Boy, Alessandra et Eugène se croisent pour le pire et le… non, en fait juste le pire.
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Boyle joue à Dieu et pointe son doigt sur un quartier populaire de Brooklyn, mêlant la vie de personnages tellement stéréotypés que la mayonnaise prend directe. J'te cause d'un univers marqué par la filmographie de Scorcese, voir Ray Liotta ou de Niro se pointer pour faire un caméo serait pas une grosse surprise ma gueule. D'ailleurs les références sont citées de manières intelligentes et ce pour notre plus grand bonheur, à conditions d'en être friand.

Tu veux du New-York qui sent la sauce tomate ? Où le rêve américain est une putain de publicité mensongère malgré l'envie d'en faire partie ?

Le contraste old school/nouvelle génération est fulgurant. Les anciens s'acharnent à faire régner une tradition de mafia vieillissante mêlée d'une protection divine face à la jeunesse dopée aux codes culturels des années 90, leur foutant des rêves plein la tête, ou en tout cas, celui de s'échapper de la crasse ambiante du quartier.

Dans ce bordel organisé, Boyle en rajoute une couche. Une couche bien dégueulasse, remplie à ras bord et qui laisse croire qu'elle est sur le point d'être changée.

Le meurtre de son frère ayant changé sa vie à tout jamais, Conway n'a qu'une idée en tête, se venger en tuant l'assassin, véritable star pour toutes les petites frappes locales. Seize ans qu'il attend ce moment, seize ans à ruminer un plan. Malheureusement rien ne va se dérouler comme prévu.

Vu au début du récit comme une sorte de chevalier blanc qui manque de bol et de courage, Conway va lentement sombrer dans le grand n'importe quoi, entraînant avec lui son entourage plus ou moins proche dans une chute sans fond, et dont les vertiges nous tordent les boyaux comme dans un pur film de genre.

350 pages à te bouffer les doigts à cause du suspense, du talent à revendre mon vieux. Gravesend est un polar à lire tant qu'on veuille de la qualité. On pense à Il était une fois dans le Bronx, Il était une fois en Amérique, aux Infiltrés, aux Affranchis, … Boyle est un véritable sociologue, un guide qui nous plonge dans un monde réglé comme du papier musique mais à deux doigts de péter à n'importe quel moment.

Pfiou, encore une lecture dont on va avoir du mal à se remettre. Sublime mon vieux, su-blime.

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William Boyle, né en 1978 à Brooklyn (New York), est un romancier et disquaire américain. Il vit aujourd'hui à Oxford, dans le Mississippi. Gravesend, son premier roman, date de 2013.
Il y avait un mystère pour moi autour de cet écrivain. J'avais lu et détesté le Témoin solitaire, pourtant William Boyle était encensé par la critique, portant aux nues ce Gravesend. Je devais en avoir le coeur net.
Pour Conway c'était simple : on venait de relâcher après seize années de prison Ray Boy Calabrese, cette petite frappe qui avait assassiné Duncan son frère homosexuel, il allait le tuer et lui faire payer pour enfin faire son deuil. Vouloir est une chose, faire en est une autre…
Le roman se déroule à Gravesend, quartier italien au sud de Brooklyn, une enclave un peu hors du temps où tout semble figé comme hier et où va se jouer le destin quasiment écrit d'avance, d'une poignée d'acteurs aux vies fracassées.
L'assassinat de Duncan a fait exploser la famille de Conway, le père est comme mort intérieurement et sa mère est partie, à près de trente ans il vit toujours dans la maison familiale, vivotant d'un petit boulot dans une parapharmacie, tout en ruminant sa vengeance. Il n'a qu'un ami, McKenna, marié mais effondré par son couple qui tangue. le retour de Ray Boy déclenche des attitudes divergentes selon les clans, Conway s'active pour mettre à exécution son plan, tandis que dans l'entourage du libéré on se félicite de revoir celui qu'on considérait comme une injuste victime de la justice. Eugene, son jeune neveu, éclopé et bon à rien, voit en cet homme une figure de héros, s'imagine un avenir plus pétaradant qui le sortira de cette vie qu'il déteste, un futur de nouveau caïd peut-être.
Mais le Ray Boy d'autrefois, cette petite frappe chef de bande, tabassant les faibles de son école et draguant les filles n'est plus le même homme aujourd'hui. La prison lui a fait prendre conscience de ses crimes, il est désormais en quête de rédemption. Ce qui désarçonne complètement Conway et Eugene, pour des raisons diamétralement opposées.
Une figure féminine s'imposait et c'est un autre retour à Gravesend, Alessandra, partie tenter sa chance comme actrice à Los Angeles, en vain. Elle aussi a fréquenté la même école que Conway et Ray Boy. Conway qui l'admirait déjà alors cherchera maladroitement à s'en rapprocher. Toutes les jolies filles ont une vague copine qui l'est moins et les met en valeur, Stephanie est celle-là. Une autre malheureuse, célibataire vivant une morne vie avec sa mère à moitié folle.
Ce roman est absolument magnifique tant tout y est parfait. La description du quartier et des gens qui y vivent est très précise et détaillée, on visite cette enclave avec un guide de choix. Quant aux personnages, cette petite poignée d'êtres ravagés par l'ennui, l'alcool et l'avenir borné, réduits à des actions lamentables (picoler) ou franchement répréhensibles, le lecteur ne peut les détester, leur pathétisme nous émeut et certaines scènes sont d'une force émotionnelle extrêmement forte.
Bien évidemment, tout cela finira mal pour beaucoup d'entre eux mais le roman s'achève sur une légère note d'espoir, peut-être qu'Alessandra animée de nouvelles résolutions – basiques certes et loin de ses rêves, mais bonnes – s'en tirera ?
Une lecture indispensable, proche du chef d'oeuvre. Mais pour moi le mystère William Boyle subsiste, est-ce réellement un grand écrivain ou bien ce livre, son premier, n'était-il qu'un one shot ? J'y reviendrai, c'est désormais obligatoire.
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Dans un Brooklyn triste et froid, Boyle dépeint des individus esseulés, englués dans une existence terne dont ils ne parviennent pas à se dépétrer. Leurs vies semblent être circonscrites à ce quartier italo-américain qui les a vus naître, grandir puis dépérir si bien que l'envergure de leurs destinées paraît proportionnelle à la superficie du lieu. Qu'il s'agisse d'une soif de vengeance qui détruit l'âme de la victime voulant se faire bourreau, d'une mère folle qu'on ne réussit pas à quitter, d'une carrière cinématographique qui n'arrive pas à se lancer, nous assistons au déclin de cette jeunesse précarisée, peuplée de "losers" tiraillés entre le sentiment d'être redevables à une famille et l'envie de tout envoyer valdinguer, quitte à tout détruire. Un vrai roman noir donc qui met en scène des existences dérisoires étouffant sous une chape de plomb et qui s'incarnent dans des personnages qui voudraient oublier ou vivre plus fort mais qui, accumulant les mauvaises décisions, ne se sauvent pas. Ils suscitent indéniablement notre empathie, peut-être parce que leurs désillusions ne nous semblent pas si éloignées, nous rendant ainsi sensibles à leur désespoir.
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RÉSUMÉ:"Gravesend, une enclave Italienne au sud de Brooklyn. Conway y vit avec son père et, depuis seize ans, il pleure son frère Duncan, renversé par une voiture alors qu'il tentait d'échapper à Ray Boy Calabrese et à sa bande de petites frappes. Depuis seize ans, Conway attend que Ray Boy sorte de prison afin de lui infliger la seule condamnation valable à ses yeux : la peine de mort. Mais la vengeance ne prendra pas le tour attendu dans ce quartier hanté par la mélancolie et les fantômes, la colère, la frustration et les regrets."

MON AVIS: Premier roman de William Boyle, il distille le noir à travers des personnages paumés, lâches, désabusés, et pour certains aux ambitions mafieuses surréalistes.
Une bande de loosers coincés dans ce quartier italien de Brooklyn se lamentant sur eux même, rêvant de fortune, de vengeance, de lumière, d'une autre vie ou de pas de vie du tout.
Des hommes et des femmes au passé commun , assez lamentables les uns et les autres .
2 gamins totalement déconnectés de la réalité, sans morale, sans repère, se rêvant braqueurs magnifiques.
Et tout ça pour une fin minable, dans une vie minable à l'avenir éteint .
L'écriture est assez remarquable, dépeignant sans concession un paysage morne, où les personnages évoluent, englués dans ce quartier défraîchit.
Depuis William Boyle a écrit d'autres romans et vu la qualité de celui ci je ne doute pas de son succès.
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