Amy a retrouvé la foi et le chemin des églises de son enfance. Depuis plusieurs mois, elle mène une vie solitaire et rangée dans le quartier de
Gravesend, à Brooklyn, au service des gens âgés de sa paroisse. Son existence débridée d'autrefois lui semble lointaine. Et pourtant, quand elle décide de suivre un inconnu qui inquiète une paroissienne âgée, elle est loin de se douter que l'Amy d'autrefois va ressurgir. En effet, au détour d'une rue, elle assiste au meurtre de cet inconnu avec un sentiment ambigu en toile de fond. Pour la jeune femme, témoin solitaire d'un crime qu'elle va taire, commence une enquête doublée d'une plongée dans la part obscure de l'humain…
«
le témoin solitaire » est un magnifique roman noir écrit par l'américain
William Boyle.
A travers les yeux d'Amy, l'auteur nous emmène à la découverte d'un quartier au sud de Brooklyn –
Gravesend – dans lequel il a grandi. Dans une note à l'issue de l'intrigue, il explique que ce livre est né d'une urgence, d'une peur, celle « que les voix des morts ne disparaissent petit à petit » (p. 291), d'une profonde mélancolie qu'il ne ressent qu'à Brooklyn. «
le témoin solitaire » ne se veut ni panégyrique ni condamnation, mais il se fonde « sur un certain déplacement paranoïaque ». Finalement, il conclut de cette façon : « Je suis captif de mes origines, mais elles me glissent aussi entre les doigts ». Les fondements du livre explicités par son auteur a posteriori éclairent singulièrement le personnage d'Amy, en quête d'abord d'elle-même dans une existence où elle se sent prisonnière, seule et à l'étroit, dans un quartier qui l'aimante, la retient mais en même temps la pousse à chercher un ailleurs, d'autres possibles.
En cédant à la fascination qui la conduit à suivre un inconnu, elle s'engage dans une série d'événements rocambolesques, de choix peu éclairés, dont on se demande à chaque instant quel tour ils vont prendre. Autour d'Amy, gravitent des personnages déstructurés, radicalement seuls ou aiguillonnés par leurs désirs. Dans cette errance, Amy enquête et cherche une voie.
Le style de
William Boyle retient et captive le lecteur : l'écriture cinématographique lui permet d'être plongé au coeur de l'action ainsi que de Brooklyn et sa noirceur, ses bruits, ses odeurs, ses couleurs, ses rues et bâtiments, son métro, …
Le roman est noir, empreint d'une nostalgie et d'une tristesse tenaces, mais reste porté par la force d'Amy dans sa quête, ses espoirs. Un roman noir bouleversant.