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Critique de latina


Comment ne pas être attendri par la bonne "bouille" d'Anibal, petit Indien des Andes de 5 ans? Eh bien, c'est ce qui est effectivement arrivé à son grand frère d'adoption, Edgar, le narrateur. Celui-ci, jaloux au départ, s'est vite pris d'amitié pour ce drôle d'enfant au drôle de nom. A eux deux, ils vont former une paire indestructible (al)liée contre le monde entier, et en premier lieu contre leurs parents (indignes!).

J'ai vraiment apprécié ce court roman plein de sensibilité et de naïveté.
A part le vocabulaire argotique du narrateur (l'auteur a vraisemblablement confondu "pré-adolescent" et "argotique"...) le langage imagé d'Egar, grand amateur de fleurs, m'a fait rire. Pour lui, le Monde n'est que Nature, comme dans ces exemples : 'les cheveux de gypsophile de Lucille", "le sexe d'André ressemblait à un plantoir à tulipes", "je me suis rapproché, silencieux comme un nuage", "elle était aussi docile que la terre sous le soc"...
Ses interventions intempestives m'ont conquise, et j'y adhère ! Comme par exemple, lorsqu'il met des boules Quiès dans les oreilles de son petit frère lors de ses leçons de français afin de "lui retarder les emmerdes, les déceptions, les larmes qu'on verse dès qu'on comprend le langage des hommes(...).Je me suis dit : moins vite il comprendra, mieux il se portera. Vous avez dû remarquer comme les bébés ont les yeux limpides, transparents. Tous, sans exception. Vous pouvez vous pencher sur n'importe quel berceau et tenter l'expérience, susurrer au marmot 'sale corniaud', 'sagouin', 'fils de pute', je vous parie que vous réussirez pas à troubler cette limpidité, cette transparence. Et si le môme est bien luné, il se peut même qu'il vous offre un sourire en prime. Mais, plus tard, dès que les choses vont devenir intelligibles, qu'il pourra les nommer, pour la transparence, ce sera foutu. Les yeux d'un enfant qui grandit, c'est comme le bassin du docteur Chevalier, peu à peu l'eau tourne, elle devient trouble, on peut même plus se voir dedans. J'ai mis longtemps, des années, avant de comprendre ce qui fait tourner la belle eau dans les yeux des innocents. J'ai repéré les responsables : les mots. Chaque mot nouveau est une pierre enrobée de boue qui tombe dans le regard des petits et le salit pour toujours. A quatre ans, on a reçu, mettons, une brouette de pierres. A sept, c'est déjà un tombereau, à douze, suffit de croiser mon regard. Et quand on est vieux, c'est des milliers de tonnes et, à force, l'oeil est un vrai cloaque, il a pris l'opacité, la dureté de la pierre, on se cogne contre".
J'adore ses valeurs, il veut adoucir la vie de son petit frère pour qu'elle ne ressemble pas à la sienne : "Parole, des fois je pense qu'Anibal est pareil qu'une fleur : vous tenez son sort entre vos mains, vous pouvez lui faire tout le bien ou tout le mal que vous voulez, c'est une responsabilité terrible. Mais quand la fleur est un môme de cinq ans qui vous regarde comme si vous étiez une idole, c'est une responsabilité encore plus terrible, qui vous met le coeur en badaboum. Juste à cause de cette façon qu'il a de me regarder, je peux pas me permettre de faire des conneries". Déjà, à douze ans, il se montre très mûr.

Pour cet enfant responsable, pour cet amoureux des fleurs, chapeau! Puisse-t-il y avoir encore des enfants pareils à lui !
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