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Critique de Heliquescente


APOLLON : C'est délicieux, non ? Il n'y a rien d'autre à en dire.
DIONYSOS : Délicieux ? C'est énergisant, oui ! Tout y vibre de la présence du personnage, ça fait revenir Oscar Wilde parmi nous. Et ça nous rappelle combien le monde est ennuyeux depuis qu'il nous a quittés. C'est savamment documenté sans jamais la moindre lourdeur ni la moindre pédanterie. le choix du narrateur est particulièrement réussi à ce point de vue-là, car c'est Arthur Conan Doyle, le fameux créateur de Sherlock Holmes, qui raconte l'enquête menée par son ami Oscar Wilde pour résoudre l'affaire de Jack l'Éventreur. Sa parole vis-à-vis de son ami Wilde émerge à la bonne distance ; elle est bienveillante, mais débarrassée de l'idolâtrie du biographe. L'homme s'y montre brillant, ridicule, hilarant, épuisant, séduisant et laid tout à la fois. de bonne volonté et sujet aux décisions douteuses. Et l'auteur, Gyles Brandreth, a eu du mal à imiter la sécheresse de la prose de Conan Doyle, heureusement ! Son livre est riche en dialogues savoureux ‒ le talent d'Oscar Wilde pour la conversation est bien restitué ‒ et le brave docteur écossais nous apparaît vivant et sympathique.
APOLLON : Il est celui auquel on s'identifie, ce qui est flatteur pour le lecteur ou la lectrice, bien sûr. L'enquête d'ailleurs est captivante, même si elle s'avère très linéaire.
DIONYSOS : L'investigation est surtout formidablement baroque. Elle entraîne nos détectives amateurs, Conan Doyle et Wilde, dans une exploration des bas-fonds hauts en couleur du grand cloaque londonien et de l'âme humaine. Deux gouffres que ces deux auteurs ont explorés avec des approches différentes mais une égale délectation. Les atrocités de Jack l'Éventreur sont elles-mêmes résolument baroques, évidemment, mais il fallait du doigté pour insuffler de la vie à une telle ambiance mortifère.
APOLLON : Gothique est plus approprié à la période que baroque, non ? Même si le tragi-comique propre à la pensée d'Oscar Wilde nous attire aussi vers le baroque.
DIONYSOS : Je veux bien, mais un gothique qui rit ! le seul détail que je trouve regrettable, c'est ce nez crochu qui est mentionné au détour d'une phrase, à propos d'un personnage secondaire juif. Nous n'avions guère besoin de ce cliché antisémite. Son surgissement est en outre d'autant plus surprenant que le reste de l'intrigue (et de la série de romans mettant en scène Oscar Wilde) dénonce à plusieurs reprises les discriminations infligées aux juifs par le reste de la population dans l'Angleterre victorienne.
APOLLON : À propos, tu parles de série mais seule l'édition française a joué la carte du rapprochement en modifiant le titre pour avoir l'air de rattacher ce tome à la série des enquêtes d'Oscar Wilde. L'édition d'origine est beaucoup plus claire : il s'agit d'un volume indépendant, ne faisant pas partie de la série des six enquêtes d'Oscar Wilde.
DIONYSOS : Pourquoi cette distinction, alors que le contenu est de même nature ? Était-ce parce que la série avait déjà accompagné Oscar Wilde jusqu'à la prison de Reading et que les événements de ce livre-ci impliquent un bond en arrière dans la chronologie de sa vie ?
APOLLON : Ou bien parce que ces meurtres, contrairement à ceux qui servent de prétextes aux autres livres, sont des faits historiques qui n'ont été que trop réels ?
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