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Bertolt Brecht nous propose, avec sa Vie de Galilée, à la fois une espèce de portrait, une volonté partielle de biographie du savant pisan, et une interprétation personnelle, une valeur symbolique, un genre de parabole à visée édificatrice — autant que mise en garde — de ce qu'est et de ce que devrait toujours être la science, selon l'auteur.

On voit, dès la présentation du projet littéraire et/ou dramatique, que c'est une chimère, que c'est un brin bâtard tout ça, qu'on navigue entre deux eaux, qu'on est un peu dans plusieurs choses sans être vraiment dans aucune et c'est un peu dommage d'après moi.

Pour que la pièce se maintienne dans des dimensions acceptables, Bertolt Brecht fait le choix d'un nombre limité de tableaux. Bon, certes, c'est réducteur, mais cela peut se comprendre. Ainsi se fixe-t-il beaucoup, énormément même, sur les travaux astronomiques de Galilée, qui, pour être demeurés les plus célèbres, n'en sont pas moins qu'une petite partie de son activité scientifique. Mais bon, passons.

Indubitablement, la pièce pose des questions intéressantes, philosophiquement parlant, sur le rôle des sciences pour la société, sur le rapport que science et pouvoir entretiennent, sur les faiblesses du scientifique, pauvre par nature car non productif (sauf dans le cas où la découverte scientifique permet des retombées économiques immédiates) et donc constamment obligé de faire allégeance aux détenteurs de capital susceptibles de financer ses recherches, c'est-à-dire, très souvent les dirigeants politiques, jamais très éloignés des bourses bien pleines.

Indubitablement, le personnage de Galilée est intéressant et Brecht s'ingénie à le rendre complexe, multifacial, trouble, etc. Aussi multifacial, peut-être que les autres personnages m'apparaissent monolithiques. On sent bien que l'auteur souhaite absolument qu'on comprenne quelque chose à travers sa pièce, quelque chose qui dépasse sa pièce, quelque chose qui est éminemment dans l'air du temps et qui l'est encore aujourd'hui.

Mais je crois qu'il y a là un véritable anachronisme général — comme à plusieurs endroit de la pièce, par exemple quand il fait dire à Galilée des mesure en millimètres cubes, mais peu importe à la limite — : porter un jugement sur les agissement d'époque de Galilée avec un regard et des expériences de maintenant.

C'est quoi l'essence du théâtre, du drame ? Soit la modification d'un personnage (comme Une Maison de poupée d'Ibsen reste un exemple phare), or, ici, dès le départ Galilée est convaincu de ses convictions, donc ce n'est pas là que ça se joue. Soit un conflit : ici, c'est le conflit porté par Andrea Sarti, l'ancien élève de Galilée, convaincu qu'il ne reviendra pas sur sa parole, même sous la torture, et qui est cruellement déçu en constatant que son modèle plie lamentablement et se dédit publiquement.

Là, je pense que Brecht rate un petit peu quelque chose car son théâtre devient trop manichéen. Les bons incorruptibles d'un côté, désireux de science et de bienfaits universels à l'usage de tous, les vilains corruptibles de l'autre, prêts à toutes les compromissions pour de l'argent ou des bénéfices personnels, quitte à ce que leur science soit utilisée à mauvais escient contre une majorité de la population.

Quand on sait les conditions de régime qui sévissaient à l'époque de l'écriture de la pièce en Allemagne, on comprend, on applaudit presque Bertolt Brecht. Mais est-ce ça la fonction et la force du théâtre ? le triomphe du théâtre, c'est le triomphe des personnages, or, ici les personnages secondaires sont assez insipides et du personnage principal on n'a pas les déchirements.

À aucun moment on n'est vraiment dans la tête de Galilée aux moments cruciaux, au moment des choix cornéliens qu'il a été amené à faire. Peut-être justement parce que l'auteur juge un peu trop son personnage au lieu de chercher à le comprendre. Dans l'ensemble, ce Galilée n'est pas très attachant — aucun personnage d'ailleurs dans cette pièce — et si l'auteur s'était plus donné la peine de comprendre et de justifier Galilée, elle aurait forcément perdu en valeur d'édification face aux événements contemporains qu'il entendait dénoncer.

Bref, quelle est la fonction du théâtre ? Quel est le rôle que l'auteur doit donner à ses convictions personnelles par rapport aux personnages eux-mêmes ? En ce qui me concerne, à chaque fois que je vois un auteur qui souhaite à toute force me dire ce que je dois penser, je trouve qu'il y a malfaçon dans l'oeuvre. Une pièce, quand elle est vraiment réussie ne doit rien retirer à ses personnages.

Si je cherche une pièce traitant de la science et du mésusage de la science, je pense à Pygmalion de Shaw et je la trouve supérieure. Pourquoi ? Parce qu'à aucun moment son auteur ne cherche à faire passer ses convictions avant ses personnages. Si je cherche une pièce dont l'analogie historique est parfaite par rapport à ce que l'auteur cherche à dénoncer, je pense à Montserrat de Roblès et là encore je la trouve supérieure car elle touche à l'universel, elle n'est pas compréhensible et forte uniquement en regard de son contexte d'écriture.

Certes, ici la pièce de Bertolt Brecht possède des qualités nombreuses mais elle n'est pas aussi bien sentie, à mon sens, que, par exemple, l'analogie magistrale entre le régime d'Hitler et les groupes mafieux de Chicago dans La Résistible ascension d'Arturo Ui. Je la trouve beaucoup moins plaisante que Maître Puntila et son valet Maati car l'auteur y laisse moins les personnages exprimer tout leur potentiel scénique. Donc, en résumé, pas mal mais pas top, surtout quand on connaît le talent par ailleurs de Bertolt Brecht, mais, bien entendu, une fois encore, ça n'est que mon avis, c'est-à-dire pas grand-chose.
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Savoureux premier contact avec Bertolt Brecht.

L'auteur déploie sur scène la vie du célèbre savant du 17ème siècle, Galileo Galilei, avec une petite idée derrière la tête. Il s'agit d'alerter le public sur le fait qu'il existe souvent des conséquences socio-politiques aux découvertes scientifiques qui apriori « se contentent » d'accroitre notre compréhension de l'univers. Ainsi, la Vie de Galilée a été écrite durant l'exil au Danemark de Brecht, après avoir lu dans les journaux l'annonce de la fission de l'uranium par le physicien Otto Hahn et ses collaborateurs. Un tel potentiel entre les mains du régime hitlérien ne pouvait que faire réagir le dramaturge.
Mais si volonté de faire réfléchir le spectateur il y a, elle est judicieusement incorporée dans une pièce vivante et passionnante qui balaie l'ensemble de la carrière du savant italien.

La période vénitienne insiste sur les idées coperniciennes qui visiblement fascinent Galilée. L'auteur tente de les faire comprendre au jeune Andrea – et aussi aux spectateurs – par certaines scènes amusantes, comme celle où Galilée déplace Andrea sur sa chaise autour d'un trépied représentant le soleil afin de lui faire sentir la relativité du mouvement.
Puis c'est la période florentine, bouleversée par des scènes éprouvantes de présence de la peste. Galilée tourne vers le ciel une lunette optique et découvre les montagnes de la lune, les phases de Vénus et les satellites de Jupiter. Autant d'éléments qui devraient foudroyer le modèle cosmique de Ptolémée, mais qui sont loin de convaincre les savants florentins pour lesquels une observation qui contredit le texte de la Bible ne peut qu'être fausse, voire imposée par Satan. Sans parler des réactions de moquerie des moines et des prélats.

Galilée passe par diverses phases. Il suit les conseils (injonctions ?) de l'Église qui souhaite le voir s'éloigner des sujets cosmologiques, puis il cède à sa curiosité, ne peut plus supporter que la Vérité soit ainsi étouffée, décide d'écrire un livre en langue vulgaire afin que chacun sache. Les conséquences sont telles que les avaient envisagées le haut clergé : le peuple réagit en extrapolant les découvertes. Si la Terre bénie par Dieu n'est plus qu'un astre parmi d'autres qui tourne autour du soleil, cela ne signifie-t-il pas que le noble et le prêtre ne sont que des hommes parmi d'autres qui n'ont aucune raison de se trouver au centre de l'univers humain ? La structure sociale entière peut s'effondrer, l'Église perdre son ascendant.
Le peuple italien a-t-il réellement régi ainsi aux découvertes de Galilée ? Ce tollé a-t-il été une répétition de ce que Darwin provoquera deux siècles plus tard ? Quoi qu'il en soit, ce dernier ne se sent pas responsable. Il a dévoilé une théorie cosmologique élégante et efficace, et cela s'arrête là.
Voilà donc pourquoi l'Inquisition va mettre ses ouvrages à l'index, lancer son procès en hérésie et le pousser à abjurer ses découvertes. Galilée aime la vie confortable et la bonne chaire. Il craint l'idée de la torture. Il cède. L'Église le maintient sous surveillance pour le reste de sa vie.

La fin de la pièce montre Galilée qui accepte finalement la responsabilité des conséquences de sa découverte. Il entre en résistance passive et donne une version de ses « Discours » au jeune Andrea, devenu l'élève tellement déçu de la rétractation de son maître, et qui s'en va en Hollande où les idées ne sont pas emprisonnées. Ainsi le savant qui découvre se doit d'envisager les conséquences non scientifiques positives et néfastes de sa découverte. Il se doit de se considérer responsable de ces conséquences, et décider si le jeu en vaut la chandelle. Voilà comment j'interprète le message de Bertolt Brecht.

Un auteur dont je lirai certainement d'autres oeuvres. Peut-être Mère Courage et ses Enfants qui se passe durant la guerre de Trente Ans.
D'ici-là, j'aurai la joie d'aller voir la Vie de Galilée sur scène, à la fin du mois.
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Galilée est un personnage très réussi, complexe et fascinant, permettant à Bertold Brecht de faire vibrer la pièce de questionnements, de réflexions bien vivantes et bien pertinentes pour le spectateur du XXème ou du XXIème siècle - remettre en question les vérités imposées par la pensée dominante, les soumettre au doute, à l'analyse basée sur l'observation et la raison, ne pas oublier que « le seul but de la science consiste à soulager les peines de l’existence humaine », que mal utilisé, le feu sacré du savoir « finira
Par nous dévorer tous
Oui, tous »
D'où le regret du Galilée de Brecht:
«Si j'avais résisté, les physiciens auraient pu développer quelque chose comme le serment d'Hippocrate des médecins, la promesse d'utiliser leur science uniquement pour le bien de l'humanité! Au point où en sont les choses, le mieux que l'on puisse espérer est une lignée de nains inventifs qui loueront leurs services à n'importe quelle cause. »
Pas de sécheresse ni de lourdeur dans cette volonté de donner à réfléchir, la pièce est prenante et très réussie d'un point de vue littéraire. À vrai dire, je trouve que la réflexion sur la connaissance, sur le rôle de l'homme de savoir, contribue à faire de la vie de Galilée une crise historique chargée d'intensité dramatique nourrie par le contraste, le conflit entre l'enthousiasme du jeune Galilée pour la recherche scientifique, sa foi en la raison humaine, et les persécutions, abdications, inquiétudes, liés notamment à l'action des puissants pour contrôler le savoir - interdire les découvertes ébranlant leurs dogmes ou utiliser la science à tout autre chose qu'à « soulager les peines de l’existence humaine ».
Une très bonne pièce, forte et intelligente et qui malheureusement n'a pas du tout vieilli.
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La première version de la pièce date de 1938-39. Brecht l'a écrite au Danemark, après avoir fuit l'Allemagne nazie. Il la reprendra dans les années 40 aux USA, en vue d'une création américaine. Mais il y a eu entre temps Hiroshima, et Brecht modifie le contenu de sa pièce en fonction des questionnements sur le rôle de la science que pose cette actualité. Elle connaîtra la scène en 1947, mise en scène par Joseph Losey, avec dans le rôle principal Charles Laughton, qui s'est beaucoup impliqué dans cette création. La pièce sera encore réécrite en Allemagne de l'Est, après que Brecht ait été chassé des USA par le maccharthysme ; la dernière version date de 1956. La mort de Brecht, pendant les répétions de l'oeuvre met fin définitivement à la réécriture de la pièce.

L'oeuvre en 15 tableaux, qui résument une trentaines d'années de la vie de son héros, dans plusieurs villes italiennes, comportant une quarantaine de personnages, est d'ampleur, et nécessite presque quatre heures de représentation, ce qui fait qu'elle est rarement montée et n'échappe pas à quelques coupures lorsqu'elle est jouée ; comme dans la mise en scène d'Eric Ruf actuellement à la Comédie Française.

Nous commençons à suivre Galilée lorsqu'il est professeur de mathématiques à Padoue, et qu'il s'approprie et perfectionne l'usage de la lunette, qui lui permettra en faisant des observations du ciel de plus près, de rassembler des données qui confirment le système de Copernic, et qui permettent une représentation du ciel, des astres et de leurs mouvements plus juste, et qui mettent à mal toute l'astronomie officielle héritée de Ptolémée. Et incidemment qui remettent en cause la doctrine de l'Église et la Bible elle-même, ce qui ne peut que provoquer une réaction de l'institution au combien puissante. La vie du savant sera dès lors rythmée par la lutte pour convaincre du bien fondé de ses théories, et tout simplement pour le droit à les exprimer. Les preuves matérielles qu'il rassemble ne sont pas forcément un argument suffisant : une vérité officielle, sur laquelle repose l'équilibre du pouvoir de la société risque d'être balayée par ses démonstrations, qui sont donc interdites. En même temps, les conséquences pratiques de ses découvertes se révèlent d'une grande utilité, voire incontournables, en particulier les cartes du ciel permettent des voyages plus sûrs, il devient donc impossible de tout interdire. Une lutte s'engage entre un pouvoir en place et un individu : inégal, forcément, et où l'individu n'a le choix qu'entre disparaître ou se soumettre, au mieux de ruser pour tenter d'arracher un peu de liberté souterraine.

La pièce est relativement linéaire : nous suivons les moments clés des découvertes de Galilée et de sa confrontation avec la puissance ecclésiastique. Plus que les événements en eux-mêmes, la pièce présente plutôt la résonance sur les individus, sur leurs choix, leur vision du monde, l'amorce d'une réflexion. Les thématiques abordées sont multiples et complexes : le rapport entre la science et au-delà entre le savoir et le pouvoir, la domination idéologique d'une société par une vision du monde érigée comme la seule possible en dépit des faits, le rôle de la science et ses dangers. La pièce est loin d'être univoque : la possibilité de remplacer la religion par une autre forme d'idéologie aussi pernicieuse pour les individus est évoquée, cela pourrait être une vision scientiste, mais aussi économique, comme le suggèrent certains dialogues. Au-delà des observations, d'un savoir, qui peuvent sembler incontestables (jusqu'au moment où ils seront contredits par d'autres faits inaccessibles jusque là ) la question à se poser est quel est l'usage qu'on en fait, et comment faire que certains ne se les approprient pas pour dominer les autres ; que cela soit un bien commun, au service de tous. La raison est-elle suffisante ? L'homme est-il un être de raison ? La pièce soulève sans doute plus de questions qu'elle ne donne de réponses. A chacun d'essayer de continuer la réflexion.

Une oeuvre puissante et riche.
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J'ai trouvé ce livre dans la bibliothèque de mon beau-frère et vu qu'il est ingénieur, je me suis lancée dans la lecture en ne croyant pas franchement que j'allais comprendre et aimer (bonjour les à prioris).
Et pourtant ce fut clairement le cas. Brecht se lance avec foi dans une dénonciation de la censure et du pouvoir de l'église. On se rend compte alors des difficultés et de la révolution que les idées de Galillée ont pu déclencher dans son époque si contrôlée par la politique et la religion et la censure qu'il a du affronter.
Cette pièce montre également au monde la complexité et l'incomensurable intelligence de cet homme aussi passionné par l'astronomie, les mathématiques, la politique, etc.
Au final, ce livre est abordable par tous et son auteur est généreux dans sa rédaction. Je ne dirais pas que c'est un ouvrage facile à lire car chaque phrase est importante et pousse à la réflexion. Mais c'est parfois agréable de s'instruire, surtout lorsque c'est sous cette forme. Brecht met la science et l'astrologie à portée de tous grâce au théâtre.

Ma critique me semble bien pâle à côté de tout ce que comporte cette oeuvre, donc je vous conseille plutôt de la lire.
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La raison a- t-elle toujours à voir avec l'intelligence ? ...Non...mais quelquefois.
l'intelligence doit elle toujours avoir une raison ?... Non.
La raison se soumet elle ? Oui
L'intelligence ? Non
L'intelligence est universelle. La raison est partisane.
Raison morale, raison économique, raison d'état ...
La raison est affaire de choix et donc d'éthique.
L'intelligence ne connaît pas de choix et donc pas de loi.
L'intelligence admet la valeur de ce qui est dans l'avenir de ce qu'il deviendra.
La raison enfonce le plus souvent la valeur de ce qui est dans le passé qui l'a porté.
L'intelligence explore au-delà des lieux où la raison obéit.
Sans foi ni loi, ainsi est elle la chose connue la plus puissante, et donc la plus destructrice ou la plus constructive au monde.
Il n'y a de mauvaise raison que lorsque l'intelligence s'absente partiellement ou, dans un cas plus grave, en totalité.
De là provient l'injustice, le mensonge, la violence, le crime , la guerre.
«  qui ne connaît la vérité n'est qu'un imbécile. Mais qui la connaissant , la nomme mensonge, celui-là es un criminel »

Là où il y a bonne intelligence, c'est à dire où celle ci s'exerce librement , à savoir sans raison, c'est à dire en ne se soumettant à aucun pourvoir, là seulement peut régner la justice, la vérité, la non-violence et la paix.
Quant à savoir si le bien de tous est une raison…. Ou une intelligence ?
Disons que la pérennité de ce bien repose entièrement sur l'intelligence d'une raison.
Raison, qu'à ce jour, avouons le, nous ne connaissons pas encore...
Raison sans pouvoir, mais dont l'intelligence est toujours opérante.
Douce raison comme la nomme Galilée.

Ainsi nous est il possible de l'apercevoir dans un nombre telle que la divine proportion que nous nommons harmonie, équilibre et qui opère sur nous comme révélateur d'esthétisme.
Car ce qui est bien est bon et ce qui est bon est beau, et cela est une règle universelle.
Avoir bonne conscience c'est chercher à asseoir une mauvaise raison. Cela relève d'un confort.
«  Ceux qui ne voient le pain que sur leur table ne veulent pas savoir comment on l'a préparé ; cette racaille préfère remercier Dieu que le boulanger. Mais ceux qui font le pain comprendront que rien ne bouge si on ne le fait pas bouger ».
Oui le petit moine avait bien entendu : « c'est son sens de la beauté qui le forçait à rechercher la vérité ».

L'intelligence s'élève là où la raison se cabre.

«  de là est né ce courant d'air qui soulève même les robes brodées d'or des princes et des prélats, dévoilant des jambes grasses ou maigres, des jambes comme nos jambes.Il est apparu que les cieux sont vides. Alors un rire joyeux retentit. »


Cela étant écrit, entrons à présent dans le vif de notre sujet : la Vie de Galilée.
Pièce de Bertolt Brecht écrite en 1938-1939 . Et c'est à la version française écrite en 1955 que nous soumettons ici notre commentaire. ( et non l'inverse, car soumettre une oeuvre à son commentaire serait faire preuve de raison et pas forcément d'intelligence, ainsi les commentaires se transforment- ils parfois en critique..).
Galilée. Mathématicien, physicien, astronome. le temps, le mouvement, les corps , l'espace.
Galileo Galilei. Né le 1564 et mort, en résidence surveillée en 1642.
« « C'est à l'intellect qu'il appartient de juger et de rendre compte des choses que le temps et l'espace éloignent de nous. » écrivait Giordano Bruno. Galilée lui aura donné son temps pour nous en donner les preuves.
Sciences et conscience , intelligence et raison, ordre ou liberté , les thèmes développés dans cette ouvre de Brecht restent contemporains.
Problèmes centraux de l'ère moderne. ...Complexité de nos problèmes…

«  Protégez la liberté de pensée est pour vous une bonne affaire, n'est-ce pas ? En rappelant qu'ailleurs l'Inquisition règne et brûle, vous obtenez ici à bon marché de bons professeurs .Vous vous dédommagez de cette protection contre l'Inquisition en payant les plus bas salaires »…
« libre commerce, libre recherche. Libre commerce avec la recherche, n'est-ce pas ? »
Problème de nos morales.

De bonnes raisons engendrent parfois de terribles vérités.
«  La vérité est fille du temps, pas de l'Autorité ».

L'avenir a, semble-t-il, encore beaucoup d'entre nous à accueillir...

« J'aurais tendance à penser qu'en notre qualité d'hommes de science, nous n'avons pas à nous demander où peut nous mener la vérité »..

La liberté explore, ordonne, la raison parfois implore.

«  le combat pour rendre le ciel mesurable est à gagné à cause du doute ; à cause de la foi, le combat de la ménagère romaine pour son lait sera encore et toujours perdu. »

Galilée….En quoi avons nous foi ?

« En l'an de grâce seize cent neuf à Padoue
La clarté du savoir jaillit d'un pauvre bouge.
Galileo Galilei calcula tout :
Ce n'est pas le soleil mais la terre qui bouge. »

«  Aujourd'hui, dix janvier 1610, l'humanité inscrit dans son journal : ciel aboli. »

Mais « les villes sont étroites et les têtes le sont aussi. Peste et superstition ».

Parler de mondes lointains, multiples,innombrables, inconnus, remettre en cause les acquis, les doctrines, les croyances répondre de la place l'homme c'est questionner la place des dieux.

Voilà sa question, voilà leur problème..

«  Je ne parle pas de leur ruses. Je sais qu' ils nomment l'âne un cheval quand ils le vendent et le cheval un âne quand ils veulent l'acheter.! voilà toute leur ruse. »

«  il n'y a aucun sens à notre misère, la faim c'est bien ne-pas-avoir-mangé, ce n'est pas une mise à l'épreuve ; l'effort, c'est bien se courber et tirer, pas un mérite. »…

Galileo Galilei...

“ Pourquoi l'ordre dans ce pays est-il seulement l'ordre d'une huche vide, et la seule necessité , celle de travailler jusqu'à en mourir ?”
«  Diable, je vois la divine patience de vos gens, mais où est leur divine colère ? »

Galileo... Galilei.

“ Moi, je soutiens que le seul but de la science consiste à soulager les peines de l'existence humaine. Quand des hommes de science intimidés par des hommes de pouvoir égoïstes se contentent d'amasser le savoir pour le savoir, la science peut s'en trouver mutilée, et vos nouvelles machines pourraient ne signifier que des tourments nouveaux. Vous découvrirez peut-etre avec le temps tout ce q'on peut découvrir , et votre progrès cependant ne sera qu'une progression, qui vous éloignera de l'humanité.L'abîme entre elle et vous pourrait un jour devenir si grand qu'à votre cri de joie devant quelque nouvelle conquête pourrait répondre un cri d'horeur universel. Moi, en tant qu'homme de science, j'avais une possibilité unique. de mon temps l'astronimie atteignait les places publiques.Dans ces conditions tout à fait particulières, la fermeté d'un homme aurait pu provoquer de grands ébranlements. Si j'avais résisté, les physiciens aurait pu développer quelque chose comme le serment d'Hippocrate des medecins, la promesse d'utiliser leur science uniquement pour le bien de l'humanité ! Au point où en sont les choses, le mieux que l'on puisse espérer est une lignée de nains inventifs qui loueront leurs services à n'importe quelle cause. “...

Mais Galiléo Galilei...Tu as résisté. Tes livres ont réussi à passer la frontière.
Ils ont trouvé le chemin de la liberté.

L'oeuvre de Brecht est interdite et brûlée par le régime nazi lors de l'autodafé du 10 mai 1933.
En 1935, le régime nazi le déchoit de sa nationalité allemande.

« Nos défaites d'aujourd'hui ne prouvent rien, si ce n'est que nous sommes trop peu dans la lutte contre l'infamie, et de ceux qui nous regardent en spectateurs, nous attendons au moins qu'ils aient honte. » Bertolt Brecht. 1933.

Astrid Shriqui Garain


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Ecrite en 1938 et publiée en 1955 pour la première fois, cette pièce de Berthold Brecht (1898-1956) nous donne à réfléchir sur le combat entre la science et le pouvoir. Cette biographie théâtrale de Galiléo Galilée (1564-1642) réflète à la perfection la position de Brecht et dénonce clairement l'obscurantisme imposé par l'Etat et l'Eglise à l'époque. Exilé au Danemark entre 1938 et 1939 (Brecht est en effet déchu de sa nationalité allemande par les nazis), l'auteur décide de raconter La vie de Galilée, cet éminent scientifique, contraint à la rétractation pour sauver sa science.

Alors que la théorie de Nicolas Copernic (1473-1543) sur l'héliocentrisme bouleverse le géocentrisme défendu par l'Eglise, Galilée dans son sillage, essaie de démontrer et défendre sa théorie de la chute des corps. Contrairement à ce qu'Aristote et Ptolémée ont établi, la terre ne serait pas au centre de l'univers ! Voilà qui n'était pas pour rejouir les religieux et les politiques : imaginez-vous, même les princes, les cardinaux et le pape roulent avec la terre !

Reflet fidèle des convictions de Brecht, cette pièce dénonce la censure dont il est l'objet mais plus largement, c'est au nom de la science que l'auteur s'insurge contre le monopole du pouvoir politique et économique et des dogmes religieux. Comme un message universel s'élevant contre cette hégémonie, Brecht, grande figure d'extrême gauche pour ses successeurs, ébranle les convictions et nous invite à la réflexion. de l'art de la démonstration, La vie de Galilée en est un bel exemple : art dialectique et personnages de marque, Brecht nous livre ici une pièce magistrale et résolument moderne que je recommande vivement.
Lien : http://livresacentalheure-al..
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Bertold Brecht met en scène la vie de Galiléo Galiléi et nous invite à réfléchir sur les rapports de la science avec le pouvoir, sur la vérité et le mensonge.
(...)
Bertold Brecht, avec cette biographie théâtrale, pose la question de la vérité face au pouvoir totalitaire. Son Galilée reste un homme, avec toutes ses frilosités et ses audaces, ses contradictions. Très loin d'un simple portrait héroïque, cette lecture alimentera bien des débats intérieurs.

Article complet en suivant le lien.
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Première rencontre avec Brecht, que je n'ai pas eu le courage d'aborder en allemand...Comme l'indique le titre de la pièce, Brecht évoque ici la vie du savant Galilée, et tout particulièrement de ses démêlés avec l'Église catholique après qu'il ait soutenu le système copernicien et le fait que le soleil ne tournait pas autour de la terre, bien au contraire.

Brecht nous présente donc un personnage haut en couleur, savant renommé attaché à l'ingrate tâche de professeur qui consiste "à enseigner à des imbéciles plutôt que de se consacrer à la recherche", et qui se révèle matois et manipulateur, désintéressé par son entourage et préoccupé uniquement par le ciel dont il tente de percer les secrets.
Une fois ces secrets mis à jour, ne lui importe plus qu'à faire connaître au monde son tort ; Galilée est persuadé que les hommes se rendront à la raison. Mais si l'Église avait permis le système copernicien comme modèle hypothétique, les affirmations de Galilée sont durement récriées : avec l'effondrement du modèle géocentrique vient des questions existentielles auxquelles l'Église ne peut plus répondre : si le monde ne tourne pas autour de l'homme, prévaut-il véritablement dans la création ? Dieu lui accorde-t-il vraiment une place prépondérante ? Que devient le sens de la vie, le pardon et les péchés ?

Le point fort de Brecht réside dans son admirable articulation d'anecdotes quotidiennes, de traits de vie du savant et dans les débats qui l'oppose à l'Église, dont le chef reconnaît pourtant la véracité du système copernicien à travers la fameuse lunette....L'histoire d'une lutte entre raison et maintien de la population sous une fausse promesse d'un paradis réservé à l'homme, et d'un homme prêt à tout pour poursuivre ses recherches.
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C'est en adoptant puis en perfectionnant une lunette venue de Hollande que Galilée peut démontrer l'incohérence du système aristotélicien qui prétend que l'univers est fixe et organisé autour de la Terre. Ses observations au télescope lui permettent de reconnaître le mouvement des lunes de Jupiter.
Mais Galilée ne veut pas finir comme Giordano Bruno et il décide d'abjurer ses thèses parues son Dialogue sur les deux grands systèmes du monde. Au grand dam de ses disciples.
Dans cette pièce écrite en 1938-1939 dans son exil au Danemark, Brecht évoque le combat entre la science et la foi, entre le rationalisme et l'obscurantisme. La thèse de Copernic remet en question l'autorité du trône De Saint-Pierre sur ses ouailles en faisant de la Terre un satellite du Soleil.
L'auteur fait intervenir une quarantaine de personnages dans une quinzaine de tableaux. Difficile de ne pas voir dans cette pièce derrière la férule du Saint-Siège le Ministère de la propagande du IIIe Reich qui brûlait les livres qui ne recevaient pas son imprimatur. Une pièce qui s'apprécie davantage pour la controverse qu'elle expose que pour l'attrait des personnages.
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