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Critique de hannahens


Je remercie Babelio et les éditions de l'Herne grâce à qui j'ai reçu et pu lire gracieusement ce livre. La lecture en a été rapide, accessible et intéressante.

"La république des censeurs" me semblait être tout à fait d'actualité vu les remouds que peuvent faire continuellement des opinions de politiques ou personnalités diverses dans les médias. On parle souvent de "dérapages" et on intente régulièrement des procès médiatiques ou juridiques pour des propos choquants. L'intérêt de ce livre était d'avoir accès à une réflexion un peu poussée tout en restant accessible dans son écriture vu que l'auteur n'est pas un philosophe mais un physicien à la base. Pari réussi.

La république des censeurs développe une thèse assez simple : on ne doit pas réprimer une opinion, qu'elle nous plaise ou pas. Sinon on juge une personne pour délit d'opinion. C'est ce que s'attache à démontrer Jean Bricmont dans son essais de 150 pages.

Le livre est composé de trois parties. La première qui pose les bases légales et philosophiques de la liberté d'expression tout en montrant divers exemples de censures qui touchent des propos actuels en vertu de la Loi pleven (ne pas inciter à la haine raciale, etc). Il est intéressant de penser que la loi pleven est difficilement applicable du fait de son manque de précision. Elle sera forcément soumise à interprétation, ce qui signifie à un avis subjectif, et donc peu probablement à un avis suivant l'esprit de la loi. L'auteur met notamment le doigt sur le fait que selon la personne et le sujet, les propos tenus ne seront pas jugés de la même manière, ce qui est contraire à l'égalité de la loi.

La deuxième partie revient sur la loi Gayssot qui interdit la négation de crimes contre l'humanité établis par le tribunal de Nuremberg. J'avoue ne m'être jamais posée de question sur cette loi et son bien fondé. Or l'auteur nous montre bien simplement que cette loi est injuste envers d'autres crimes commis que l'on est libre de nier. Il y a un effet pervers qui pousse à une hiérarchisation des crimes. L'autre point défendu par l'auteur est l'impossibilité de remettre en cause un fait historique comme si les faits étaient figés et qu'aucune découverte ou travaux de scientifiques ne pouvaient apporter de nouvelle lumière sur un évènement. Cette idée ne nous viendrait pas pour un fait scientifique. Il y a donc une notion de politique, d'idéologie derrière cette loi. de plus, on ne peut pas interdire une idée parce qu'elle est fausse, sans quoi bien des personnes ne pourraient plus parler! Au contraire, il faut profiter de cette erreur pour la rectifier.

Cette partie, la plus importante de l'essai, comporte des longueurs et revient surtout sur les querelles historiques à propos du génocide juif. Pour l'auteur la loi Gayssot a empêché dès sa promulgation une réflexion ou de nouvelles conclusion sur la question des chambres à gaz dans le génocide juif. Ce qui a permis la montée du négationnisme et non pas son éviction selon le principe que la où nous empêche de regarder, c'est qu'il y a anguille sous roche. de même, la montée en puissance de personnalités telles de Alain Soral, Dieudonné ou Eric Zemmour viendrait indirectement de la loi Gayssot et du tabou qui frappe la question des juifs dans la seconde guerre mondiale.

J'ai regretté, et cela dans l'ensemble de l'ouvrage, le manque d'ouverture sur d'autres thématiques que les polémiques touchant à Israël ou à l'antisémitisme. Mais cela provient peut-être du fait que ces polémiques intéressaient plus particulièrement l'auteur et donc qu'il les maitrisait mieux.

Son développement en arrive donc à la conclusion que les lois qui appellent à la censure depuis une trentaine d'années poussent la montée des idées extrémistes puisque la personne accusée, si l'on ne rectifie pas ses propos, est perçue comme une victime et a finalement gain de cause dans l'opinion publique. le mieux est l'ennemi du bien dira t-on. A force de vouloir être bien pensant, et vouloir que l'autre pense de même, on étouffe l'expression de son voisin.

Un petit ouvrage que je conseillerais donc pour une approche des questions liées à la liberté d'expression, aux différences de traitement qui existent selon le sujet que l'on traite, qui remet les pendules à l'heure aux personnes qui jugent des idées et non des faits, ce qui, je pense, arrive à peu près à chaque être humain.

Mais un ouvrage qui ne pourrait se suffire à lui même. L'orientation du discours cible uniquement, ou presque, comme je l'ai dit, les personnalités ayant été inquiétées suite à des propos qualifiés d'antisémites ou antisioniste (ce n'est pas à moi de le juger) et c'est dommage.
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