Elles reprirent donc leurs paniers et leurs cannes et revinrent sur leurs pas, en essayant de ne pas avoir de chagrin d'avoir tant marché pour rien.
Elles ne savaient plus que faire, car il n'y avait de mûres qu'à cet endroit-là. Alors elles s'amusèrent à marcher dans le fossé, le long de la haie, en poussant les feuilles avec les gros souliers qu'elles avaient mis pour se protéger des piquants.
Et tout à coup, savez-vous ce qu'elles virent ? Une petite boule de fourrure brune, à quelques pas devant elles, dans l'herbe du fossé.
''Est-ce un lapin ?'' chuchota la petite-amie-Suzanne.
Elles s'approchèrent tout doucement.
''C'est un lapin ! chuchota Mili-Mali-Malou.
- Pourquoi ne se sauve-t-il pas ?'' dit la petit-amie-Suzanne. Elle se baissa et le caressa ; la petite boule de fourrure se débattit. Mili-Mali-Malou, le caressa, et la petite boule se débattit plus fort.
Alors Mili-Mali-Malou s'écria : ''On dirait qu'il a la tête prise dans un trou !''
Elles regardèrent et c'était justement ce qui était arrivé. Pendant que Jeannot-Lapin creusait son trou, la terre s'était écroulée, et il ne pouvait plus ressortir sa tête.
Alors Mili-Mali-Malou et la petite-amie-Suzanne creusèrent tout doucement avec leurs doigts pour écarter la terre. Aussitôt que Jeannot-Lapin put sortir sa tête, il secoua ses oreilles et regarda les deux petites filles avec surprise.
Mili-Mali-Malou et la petite-amie-Suzanne restèrent assises bien tranquilles, se contentant de sourire et de faire de petits signes pour montrer au lapin qu'il n'avait pas besoin d'avoir peur, parce qu'elles étaient ses amies.
Et tout à coup Jeannot-Lapin tourna la tête et se mit à courir de toutes ses force le long du fossé, puis il escalada le talus, entra dans le bois et disparut.
''Oh ! dit Mili-Mali-Malou, nous qui avons toujours eu envie d'un lapin ! maintenant nous en avons un, Suzanne !
- Seulement nous aimons mieux laisser le nôtre jouer dans les champs avec ses frères et ses sœurs, plutôt que de l'enfermer dans un vilain clapier, dit la petite-amie-Suzanne.
- Si nous étions entrées là où c'était défendu, nous ne serions pas passées par ici et nous ne l'aurions jamais trouvé, dit Mili-Mali-Malou. Plutôt qu'un gros tas de mûres, j'aime mieux avoir un petit lapin."
Quand elles revinrent à la jolie maison au toit de chaume, où Mili-Mali-Malou habitait, Papa et Maman, et Bon-Papa et Bonne-Maman, et Tonton et Tantine dirent tous qu'ils aimaient mieux avoir un petit lapin dans le bois, plutôt que toutes les plus belles mûres du monde.
Mais le jeudi suivant, Mili-Mali-Malou et la petite-amie-Suzanne découvrirent un endroit magnifique, plein de mûres, et sans aucun écriteau. Et Mili-Mali-Malou en cueillit un si grand panier qu'il y en eut assez pour faire des tartes aux mûres, et de la confiture, et de la liqueur, et de la gelée, et de la compote, et des mûres à la crème pour Papa et Maman, et Bon-Papa et Bonne-Maman, et Tonton et Tantine - et aussi pour Mili-Mali-Malou !
Et pendant tout ce temps-là il y avait un petit lapin qui gambadait dans les bois et pensait que la vie est belle.
(Et c'est une histoire vraie, ne l'oubliez pas !)
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