Un recueil de souvenirs, la plupart de l'entre deux guerres, assez joliment écrit. Cela ne se prétend pas de la grande littérature, simplement des tranches de vie, mais ce n'en est que plus charmant finalement.
Comme le titre l'indique très bien, l'auteur était d'origine bisontine, et tous les Franc-Comtois, plus particulièrement ceux du Doubs, retrouveront des endroits aimés, mais je ne pense pas que cela soit pour autant une lecture à réserver aux seuls Franc-Comtois. La nostalgie des jours enfuis de sa jeunesse, le souvenir de la campagne, de la nature, des êtres aimés partis trop vite...Tout cela est universel, qu'on soit né à Besançon, à Paris, ou au fin fond de la plus lointaine steppe ouzbek.
Une bien jolie lecture.
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Pour le Parisien qui n'a pas parcouru le dédale de ces rues étroites et mal pavées, qui n'a pas ressenti le charme spécial de ses maisons endormies et grisonnantes, la tristesse des rues bordées de couvents, telle la rue du Chapitre, derrière la cathédrale St-Jean, tout ceci semble austère et archaïque.
Mais pour le Franc-Comtois, le Bisontin fervent, la Bisontine fidèle, tout ce lacis de rues sévères recèle un charme infini. On se souvient des longues promenades de ses seize ans, au bras d'une amie qu'on reconduisait de l'autre côté du pont Saint-Pierre; on voit encore le tourbillon sans fin des eaux si souvent agitées du Doubs; on respire le parfum printanier des arbres de Micaud, les bassins immenses et moussus de la grande promenade Chamars assoupie, près de l’hôpital.
La citadelle vous domine, le Fort Bregille vous appelle, le quartier des Chaprais, avec ses petits chemins, ses rues bordées de bosquets, vous annonce la campagne toute proche.
Mon regard maintenant se pose sur d'autres rayons du magasin-café-épicerie Bonnin. Je connais tous les aîtres et les trésors de la boutique. Les cartes postales, celles du château du Deschaux m'intéressent particulièrement: on y voit le rendez-vous de chasse Louis XIII enseveli dans ses sapins denses. Il y a des arbres touffus et très anciens qui se pressent autour de la maison et la Vouivre y sommeille, comme l'atteste une plaque en fonte, portant son nom et scellée à la muraille, au centre de la cage du vaste escalier.
La Vouivre, qu'a illustrée Marcel Aymé, c'est le symbole du bas du pays, jadis marécageux et souvent voilé de brumes: animal saurien qui tient à la fois du lézard et du serpent.
Robes en taffetas, mauve pâle, si jolies, qui transformaient en fleurs les jeunes filles de l'époque, robes de mes amies d'alors, établies et composées avec tant de soin, avec tant d'amour, où êtes-vous, jolis fantômes qui hantez si souvent mes rêveries?
La vie a passé sur ces teintes et sur ces tons pastels si doux au teint si frais à l’œil. Les cœurs qui battaient sous ces soieries délicates sont encore vivants, sans doute; mais l'âme et l'ardeur juvéniles, l'illusion de nos vingt ans sont loin.