Dans l'ensemble, elle avait l'impression que la vie tenait plus de la comédie que de la tragédie. Pratiquement tout ce qui se passait contenait un élément comique, qui d'ailleurs n'était pas si bien dissimulé que ça. Tôt ou tard, on pouvait trouver quelque chose de comique dans presque chaque situation. C'était, ce qui, au bout du compte, préservait les gens de la folie. En vérité, si vous parveniez à tirer une bonne Tragédie d'une vie, une tragédie bien déchirante, absolue, pas ridicule, qui raclât le fond de l'âme et ne fût en aucun cas le fruit de la bêtise humaine, vous vous en sortiez, pensa-t-elle, plutôt bien, oui, vous vous en sortiez même très bien. (page 178)
En ce qui la concernait, elle se préserverait, pour elle-même. La gloire ne l’intéressait pas. Devenir une « star » ne l’intéressait pas.
Créer – un rôle, un poème, une image, une musique, un enchantement de pierre : magnifique. Mais pas pour elle.
Ce qu’elle voulait, c’était offrir au monde une bonne Maud Martha. Telle était l’offrande, la parcelle d’art, qui ne pouvait venir de nulle autre que d’elle-même.
Elle allait perfectionner et peaufiner cela.
« Elle avait dix-huit ans et le monde attendait. De pouvoir la caresser. »
« Ce qu’elle voulait, c’était offrir au monde une bonne Maud Martha. Telle était l’offrande, la parcelle d’art, qui ne pouvait venir de nulle autre que d’elle-même. Elle allait perfectionner et peaufiner cela. »
Elle contempla les petites spirales de fumée qui tournoyaient autour de la main de Paul et songea aux scénarios possibles. Elle craignait de lui avouer que rien n’« arrivait » à la plupart des gens. Qu’ils vivaient simplement au jour le jour, jusqu’à leur mort. Qu’au bout d’un an après sa mort, probablement moins de cinq personnes penseraient à lui plus d’une fois par an. Qu’une année viendrait où personne sur Terre ne penserait plus à lui.
Mais si l’amertume était dans la racine, pour quelle raison perdrait-elle son temps à s’en prendre à la feuille ?