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Ginette Hubert (Traducteur)
EAN : 9782845960367
188 pages
Les 400 coups (10/10/2001)
3.6/5   41 notes
Résumé :
Dans cette chronique d'une adolescence en banlieue de Montréal, Chester Brown décrit avec subtilité les doutes et les contradictions de cet âge compliqué, entre les difficultés à communiquer avec les proches, la pression sociale des copains de lycée, les relations jamais simples avec les filles et les premiers émois amoureux. Son trait délicat et sa mise en page originale de petites cases placées çà et là sur fond noir sont en harmonie parfaite avec les états d'âme ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Il s'agit d'une histoire autobiographique, complète en un tome.

Chester Brown évoque le développement de son sentiment amoureux sur une période 8 ans, depuis l'âge de 9 ans, jusqu'à 17 ans. Alors que l'histoire commence, Chester vit dans un pavillon avec des espaces verts autour et il accompagne Connie, sa voisine, à l'école. Dès la troisième page, le lecteur découvre que Chester a un rapport difficile avec les gros mots du fait d'une mère très à cheval sur leur utilisation. Dans son quartier, il entretient des relations amicales quotidiennes avec 2 autres jeunes filles et un ou deux autres garçons. Au fur et à mesure qu'il grandit, Chester Brown insère des scènes courtes sur les relations affectives qui le lient à sa amère, sur des échanges brefs avec les jeunes filles qu'il croise ou qui gravitent dans sa sphère privée. Il y a en particulier Carrie qui est une voisine légèrement moins âgée que lui et qui a le béguin pour lui, Sky une camarade de classe que la nature a généreusement pourvue, et quelques autres. Il finit par dire à Sky qu'il l'aime. le livre se termine alors qu'il fait comprendre par son attitude à Sky qu'il n'y a rien entre eux.

J'ai eu beau me creuser la tête, impossible d'imaginer un résumé qui puisse donner envie de lire cette histoire. Brown dépeint des scènes très courtes avec une économie de dialogue, presqu'aucune case de texte (autre que les phylactères), des actions prosaïques et factuelles, tout ça avec un style graphique simple, voire simpliste. Il n'y a pas d'action, pas de violence et pas de sexe. L'avantage, c'est que cette bande dessinée se lit très vite (moins d'une heure). L'inattendu, c'est qu'elle reste longtemps dans la tête, non pas de manière intrusive, plutôt comme un souvenir attachant et légèrement dérangeant.

Chester Brown fait partie d'un trio d'auteurs indépendants (et underground à leur début) avec Joe Matt (Le pauvre type) et Seth (George Sprott : 1894-1975). le moins que l'on puisse dire, c'est que chacun d'entre eux s'est construit un point de vue très personnel sur la vie. Avec cette histoire, Chester Brown ne souhaite pas parler d'amourette platonique, mais de développement du sentiment amoureux comme quelque chose qui ne va pas de soi. Il parle de son vécu pour dire et montrer son expérience sur des phases de développement relationnel que chaque individu traverse avec sa propre sensibilité. Ce qui est captivant, c'est de contempler comment l'individu Chester Brown relate la construction de sa sensibilité.

Brown compose avec cet ouvrage une oeuvre littéraire. Il ne se limite pas à enfiler de courtes scènes qui lui semblent significatives dans le développement de son mode relationnel affectif avec la gente féminine. Il s'agit plutôt de l'aboutissement de sa réflexion personnelle sur les caractéristiques de ces relations, les fruits de son introspection livrés et formalisés de manière la plus simple possible. Comme souvent dans ce type d'ouvrage, cela signifie que le lecteur appréciera d'autant plus le propos de l'auteur qu'il a lui-même parcouru une partie de ce cheminement introspectif pour son cas particulier. J'avais eu l'occasion de lire quelques scènes de cette histoire il y a plus de 20 ans et je n'en avais retenu que leur fadeur et leur manque de substance. Prise une à une, chaque scène décrit de manière simpliste un bref échange de propos dans un quotidien banal. Ce n'est que la construction et la composition du récit qui donne un sens à chaque partie.

À condition de percevoir cette structure et ce mode narratif sophistiqués, "I never liked you" prend une toute autre dimension. Tout d'un coup, Chester Brown évoque à la fois des particularités de sa vie qui ont modelé son sentiment amoureux et des expériences de vie que tous les hommes ont traversées, chacun à leur manière. Par exemple, Brown constate qu'il est attiré sexuellement par les formes généreuses de Sky. Il rattache cette préférence innée à sa lecture d'un numéro de Playboy (le poster central en l'occurrence). Pour mieux comprendre le sens de ce symbolisme, la lecture de le Playboy éclaire le lecteur sur l'importance de ce magazine dans la vie de Brown. Il relate également les propos anodins de sa mère sur la taille de sa poitrine. En reliant les points entre eux, le lecteur comprend que Brown évoque l'impact de la figure maternelle sur la formation des goûts sentimentaux et sexuels des enfants.

Le vrai tour de force de Chester Brown réside dans la forme. Il ne parle jamais de théories psychologiques ou psychiatriques (sur lesquelles il a un avis ambigu). Il n'a jamais recours à des théories complexes ou des développements romantiques. En fait, sa retenue dans la manière de raconter permet au lecteur de placer ses propres expériences, l'oblige même à porter un jugement de valeur sur le comportement de Chester, par rapport à ses propres expériences, ses valeurs et son vécu sentimental. Chester Brown met donc en scène son développement affectif au travers de scènes simplifiées à l'extrême pour mieux impliquer le lecteur dans ce qu'il lit.

Il faut également dire un mot sur l'aspect graphique de ce récit qui est lui aussi unique en son genre. Chester Brown dessine chaque case séparément sur de petites feuilles de papier et il colle ensuite chaque case sur la page finale pour véritablement composer l'agencement de chaque dessin par rapport aux autres. Il donne une grande importance aux marges blanches entre les cases et autour des cases. Chaque dessin est très dépouillé et le trait est imperceptiblement tremblé. Il a parfois recours à des codes graphiques issus des caricatures (les grands yeux ronds de Carrie), mais de manière très restreinte. Il n'intègre pas de nuances de gris, que des traits à l'encre, avec une épaisseur variable. Il ne cherche pas une forme d'esthétisme confortable, mais il cherche une lisibilité maximale. le résultat peu paraître parfois enfantin (faible densité d'information) ou amateur (l'aspect tremblé de certaines lignes). Je n'ai pas trouvé ce choix graphique dérangeant et il est en pleine cohérence avec le mode narratif terre à terre et simple, sans être minimaliste.

Cette histoire simple du développement des relations de Chester avec la gente féminine de 9 à 17 ans recèle une analyse subtile et délicate de ce comportement qui comprend autant d'inné que d'acquis. Chester Brown est un auteur attentionné qui laisse toute la place nécessaire pour que le lecteur puisse s'exprimer et se placer par rapport à ce qu'il lit.

Les oeuvres de jeunesse de Chester Brown sont regroupées en 2 volumes Ed, the happy clown (des fictions dérangeantes, sanguinolentes, scatologiques, éprouvantes) et le petit homme (des histoires oscillants entre le surréalisme et l'autobiographie). Après ces 2 romans autobiographiques ("Je ne t'ai jamais aimé" et "Le Playboy"), Brown a réalisé une biographique d'un leader politique canadien Louis Riel (en anglais). Et en 2011, il a publié 23 prostituées relatant ses expériences de client de prostituées.
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Je ne t'ai jamais aimé... toi, Carrie qui avait un crush sur moi, Chester Brown.
Toutes ces années durant, tu as passé du temps avec quelqu'un que tu as aimé, mais que lui ne t'aimait pas. Malgré tout cela tu ne le connaissais pas. Tu avais flashé sur lui, tu étais hypnotisé, tu vivais dans un rêve, que sans doute même toi, tu as oublié comment ce rêve s'est créé. Mais tu n'as pas su créer ce lien de communication pour exprimer tes sentiments d'amour et ça n'est jamais devenu réalité ... à l'inverse des autres élèves de l'école qui auraient dû fermer leur bouche plutôt que de dire des méchancetés. Pourquoi eux arrivent-ils à parler mais pour injurier, alors que toi qui a de bons sentiments en toi, n'y arrives-tu pas ? Voilà l'injustice dans laquelle nous nageons. Ceux qui méritent le bonheur vivent dans l'ombre. Et ceux qui vivent au soleil méritent le malheur.

Tout comme moi, Chester Brown. J'avais flashé sur Sky quand nous étions ados, qui a deux ans de moins que moi, mais uniquement sur son physique, avec la puberté et tout et tout... mais je ne l'aimais pas. J'étais maladroit. Comme Carrie, comme tant de gens petits et grands.
Puis Carrie par jalousie s'est mise avec un autre garçon pour essayer de me rendre jaloux, ou alors elle l'aimait ?


Voilà, ce que vivent nombre de gens : Nous ne savons pas qui ait fait pour chacun de nous, et nous essayons par des rencontres de se trouver, ou malheureusement par timidité, par peur, nous ne nous exprimons pas. Car dire qu'on aime l'autre, comme de dire le nom du seigneur ne devrait pas être dit en vain. Mais surtout quelle perte de temps nous perdons à faire autre chose. Cette source de bonheur que l'amour nous donne, voilà le réel but dans la vie. le trouver, et le vivre.


Le comportement social et la personnalité de Chester ont beaucoup été influencés par ses parents, surtout sa mère, en bien comme en mal. Ça a fait de lui quelqu'un de bien, mais hélas socialement ça lui a mis des bâtons dans les roues. Mais malheureusement pour sa mère, les gens cencés la soigner, l'ont tuée. Sa mort, l'a laissé presque indifférent. Sans doute car il n'y avait pas de liens d'amours que normalement un parent donne à son enfant.

Environ sept années de très beau et triste souvenir que Chester Brown nous a fait partager. Peut-être était-ce un poids qu'il avait besoin de se libérer en le mettant sur papier ?... pour le faire partager, pour nous faire échos à notre propre enfance, et à notre futur rôle de parents sur les bonnes choses à donner à son enfant comme éviter de faire des erreurs qu'on a vécues ou que d'autres peuvent vivre à cause de nos erreurs.

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Chester Brown raconte son triste adolescence dans une banlieue de Montréal des années 70. Il nous raconte ses relations avec sa mère, son frère et ses amies, ses pensées sous-jacentes, refoulées et son comportement réservé.
Chester Brown opte pour une narration simple surtout basé sur les dessins assez sobres et secs avec peu de dialogue et beaucoup d'interprétations. Les dessins ne m'ont pas vraiment plu, j'ai eu du mal à reconnaître les personnages mais ils font ressortir la différence entre ses sentiments et ses réactions face à son entourage. Il se représente d'ailleurs de façon assez peu flatteuse. Une autobiographie touchante par sa forme et les émotions qu'elle dégage.
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Chester Brown a un sacré talent: celui de nous faire partager le quotidien d'un adolescent comme si on y était. À croire qu'il a rédigé un journal intime sur lequel il a pu e baser pour écrire cette BD. le dessin est simple, presque caricatural, le discours minimaliste et pourtant on ne perd jamais le fil de la narration qui tend à nous faire vivre le malaise intérieur de cet anti-héros qu'a été (et qu'est peut-être encore) Chester Brown. Quelques cases suffisent à nous faire entrer dans les situations sans que jamais on n'en sorte et dont l'accumulation finit par peser. Paradoxalement, le fait que l'auteur relate son intimité avec tant de sincérité est aussi extrêmement rafraichissant.
Ce qu'il fait sort de l'ordinaire et j'aime ça. Je me promets d'y revenir sous peu.
J'ai lu cette fois-ci la version québécoise qui rend très bien compte de l'univers des banlieues montréalaises de l'époque.
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Suis-je tellement difficile ? Il semblerait. Non, je n'ai pas trop apprécié cette chronique d'un adolescent mal dans sa peau dans la banlieue de Montréal. Encore le quotidien et la banalité et la tristesse...

Il y a certes les difficultés à communiquer avec les proches mais plus globalement les contradictions d'un âge compliqué. Il y a également la pression du groupe qui ne nous rend pas service en étant pas soi-même.

J'ai pas beaucoup aimé ce graphisme très dépouillé, ni ces petites cases sur fond noir. Il y a certes une audace dans le fait d'agencer ces petites cases pour former une espèce de tableau.

Une autobiographie et un témoignage de plus sur un sujet maintes fois exploité dans le genre oeuvre introspective. Il faut aimer. C'est comme semble dire le titre.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Les garçons... Je pense que vous êtes assez grands pour que j'aborde certains... sujets avec vous.
Vous savez, la plupart des hommes ont une idée bien précise de ce que doit être le corps d'une femme, or tous les corps n'y correspondent pas.
Alors une femme doit parfois faire des choses qui changent son apparence pour être acceptée par ceux qui l'entourent.
Les gens attendent des seins d'une femme qu'ils aient une certaine taille. Les miens sont trop petits.
Donc, je porte des soutiens-gorge rembourrées. Ça donne l'impression que mes seins ont la même taille que la plupart des femmes

[Monologue d'une mère à ses deux fils, en voiture]
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Je ne t'aime pas... je t'adore...Et même, je te hais un peu.
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Les choses dont les gens hésitent à parler sont souvent les plus importantes, je pense.
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- Les jeunes filles vont commencer à te remarquer.
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Videos de Chester Brown (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Chester Brown
À l'occasion de l'invitation du Canada sur le SoBD 2018, Seth et Chester Brown étaient présent sur le salon. L'occasion était rêvée d'inviter également Joe Matt et de permettre au célèbre trio d'amis de se retrouver au coeur de Paris. On sait que Seth, Chester et Joe se sont connus à Toronto, qu'ils ont tous trois pratiqué l'autobiographie, de manière assez différentes, et qu'ils se représentent les uns les autres dans leurs livres respectifs. Ainsi, chacun montre des deux autres la façon dont il les voit, et tous s'accordent en amitié alors pourtant que leurs caractères et l'apparence qu'ils donnent à voir d'eux-mêmes diffèrent grandement. le SoBD les avait rassemblé tous trois pour une conversation animée par Jean-Paul Jennequin, assisté de Marguerite Capelle pour l'interprétariat vers l'anglais. Une table ronde en anglais, filmée et sous-titrée, que vous pouvez revoir ici-même.
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