Conseillé par mon petit libraire, puisque je me suis mis à piller son rayon SF, comme un bon recueil de nouvelles "filfy" , j'ai pris le carton pâte dans les dents mais pas trop de plaisir en fait.
Commenter  J’apprécie         20
Roger actionna le volet, et l’un des points bondit. Le jeune homme en fit autant. Il regarda de nouveau : le point bondit encore une fois. Il bondit environ d’un dixième de seconde.
Roger se redressa, puis se gratta la tête. Il alluma une cigarette, la posa sur le cendrier, recommença son observation. Le point bondit pour la troisième fois lorsqu’il actionna le volet.
Harry Wesson, qui assurait le service de nuit, venait d’entrer dans le bureau et accrochait son manteau.
- Dis donc, mon vieux ! s’exclama Roger. Il y a quelque chose de détraqué dans ce foutu microscope.
- Ah, vraiment ?
- Oui, vraiment. Pollux s’est déplace d’un dixième de seconde.
- Ma foi, ça colle assez bien en ce qui concerne la parallaxe. Trente-deux années lumière... la parallaxe de Pollux est de 0"101. Guère plus d’un dixième de seconde. Donc, si ta plaque témoin a été prise il y a six mois, au moment où la Terre se trouvait à l’autre extrémité de son orbite, ça colle à peu près.
- D’accord, mais la plaque témoin a été prise la nuit dernière : ça fait vingt-quatre heures d’écart.
- Tu es cinglé !
- Regarde toi-même.
Bien qu’il ne fût pas encore cinq heures, Harry Wesson, faisant preuve de magnanimité, s’assit devant le microscope. Il actionna le volet, et Pollux bondit de la meilleure grâce du monde.
On ne pouvait douter que ce fût bien Pollux, car c’était de beaucoup le point le plus brillant sur la plaque (Pollux est une des vingt étoiles les plus éclatantes du ciel, et, sans conteste, la plus éclatante de la constellation des Gémeaux). Par ailleurs, aucune des étoiles plus pâles qui l’entourent n’avait change de place.
Tout en mâchonnant un sandwich, Roger écouta la musique en connaisseur, et réussit à ne pas entendre la publicité. Depuis 1980, presque tous les gens intelligents avaient acquis une espèce de surdité radiophonique grâce à laquelle ils pouvaient ne pas entendre une vois humaine sortant d'un haut-parleur, tout en restant capables de goûter les rares intermèdes musicaux entre les annonces. A cette époque, la concurrence en matière de publicité était si grande qu'on ne trouvait presque plus un seul mur nu, un seul lotissement dépourvu de panneau-réclame, dans un rayon de plusieurs milles autour des centres urbains. Par suite, les esprits délicats, afin de garder une vision normale de l'existence, se trouvaient contraints de cultiver une surdité et une cécité partielles qui leur permettaient d'ignorer le gros de cette attaque concertée contre leurs sens.
Fredric Brown, Anarchie dans le ciel
Un microscope à volet permet d’examiner deux photographies d’une même section du ciel prises à des moments différents. Les plaques sont juxtaposées avec le plus grand soin, et l’observateur peut alternativement concentrer sa vision, tantôt sur l’une tantôt sur l’autre, en actionnant un petit volet. Si elles sont identiques, cette opération ne révèle rien; mais si l’un des points figurant sur la seconde plaque n’occupe pas exactement la même position qu’il avait sur la première, il attire aussitôt l’attention en ayant l’air de bondir en avant et en arrière.
L'homme est un parasite sur une planète qui était peuplée bien avant son arrivée.
La Terre… Le seul endroit où le vert fût la couleur dominante, où la vie des végétaux fût basée sur la chlorophylle.
Extrait de la conférence "Dialogue entre les morts : Robert Sheckley et Fredric Brown" aux Utopiales 2017 avec J._A.Debats, S.Lainé et X.Mauméjean.