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Critique de Henri-l-oiseleur


Martin Buber fait précéder son anthologie de récits hassidiques d'une longue introduction de 80 pages où il situe pour le profane ce mouvement piétiste juif et la tradition qu'il a créée. Buber, dans cet ouvrage, n'est peut-être pas l'auteur de référence pour la question, mais il fournit des informations utiles. Le premier volume de son anthologie est consacré aux figures fondatrices du Hassidisme, ayant vécu au XVIII°s et au début du XIX°s en Ukraine, Pologne et dans la zone occidentale de la Russie où les Juifs étaient autorisés à résider. Il classe les paroles, anecdotes et brèves nouvelles par écoles et "cours" hassidiques (le maître, Tsaddik, réunissant en un lieu ses disciples, Hassidim, à savoir le Juste entouré de ses "Pieux"). Par là, Buber donne à son anthologie une inflexion historique, chronologique, et il centre tout le propos autour de la figure individuelle du Tsaddik (souvent auréolé de légende et doté de pouvoirs mystiques, voire magiques). Ce n'est pas ainsi que procèdent les auteurs véritablement immergés dans la démarche juive, la pensée juive, la religion juive : en général, ils classent paroles, anecdotes et enseignements dans les marges du texte de la Torah, puisqu'il ne s'agit que d'elle, et que c'est à elle que tout l'effort du Juif est consacré. C'est le verset de la Torah qui confère son autorité, sa valeur, sa grandeur propres à la parole du Rabbi qui le cite. Mais en classant cette tradition selon les individus et non selon le Texte, Martin Buber avoue involontairement sa dette envers la tradition chrétienne de la Philocalie et des hagiographies orthodoxes ou catholiques, où la personne et la pensée du saint l'emportent sur la référence au Livre. C'est que le christianisme n'est pas une religion du Livre, à la différence du judaïsme : c'est une religion d'individus exceptionnels partis à la suite d'un autre individu fondateur hors du commun, Jésus. Jésus n'est pas un livre, c'est une singularité individuelle, rebelle et revendiquée à longueur de page d'évangiles. Ainsi, Martin Buber, dans cette merveilleuse anthologie, montre à quel point il est éloigné du judaïsme vivant et traditionnel qu'il prétend servir. Ceci porte un nom : assimilation. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est Guershom Scholem, qui l'avait bien connu et bien jugé.
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