Une vie tournée vers les autres
Née en Virginie en 1892, Pearl part, à l'âge de trois mois, en Chine avec ses parents. le père est missionnaire presbytérien dans la province de Kiangsu.
Elle a été élevée dans la double culture américaine (sa mère s'occupait de cette partie de son éducation) et en début d'après-midi un précepteur chinois prenait le relais ; M. Kung lui enseignait le chinois et les subtilités de cette culture.
Le reste du temps elle était libre, la confiance dans l'éducation qu'elle recevait et son comportement lui valait une liberté qu'elle occupait à aller à la rencontre des familles chinoises des environs ainsi qu'à de longues heures de lecture.
La Chine est un pays mouvant.
« Dans les pensées secrètes des Chinois, pensées que me confiaient mes petits camarades qui les entendaient exprimer par leurs parents, les Occidentaux étaient des « étrangers » et, comme tels, des ennemis en puissance. Les « étrangers » avaient fait beaucoup de mal à la Chine, mais pas les Américains, déclaraient mes petits amis déjà pleins de tact, car les Américains étaient « bons ». Ils n'avaient pas pris de terres aux pays asiatiques et ils leur envoyaient des vivres en période de famine. »
De zéro à sept ans l'enfant évolue et apprend à respecter la famille au sens large, puis le maître d'école prenait de l'importance en occupant la seconde place après celle des parents. En plus des disciplines scolaires c'est la maîtrise de soi, le savoir-vivre qui formaient l'apprentissage de la conduite en société.
Cette double culture, elle la met en valeur comme un enrichissement absolu et une ouverture d'esprit dont elle a fait preuve jusqu'à la fin de sa vie.
À l'âge de huit ans elle est en butte à la haine, à l'exclusion, car certains blancs s'approprient des régions maritimes et fluviales au détriment des Chinois.
C'est la révolte des Boxers, la famille doit partir pour Shanghaï.
Le quotidien est émaillé de beaucoup d'anecdotes qui donnent au lecteur l'impression de grandir aux côtés de l'auteur.
Lorsqu'elle a dû quitter la Chine pour faire ses universités aux Etats-Unis, ce fut un déchirement et elle n'a pu que constater le fossé qui existait entre elle et les jeunes gens de son âge.
Elle revient en Chine pour enseigner et s'occuper de sa mère qui souffre de la maladie de Sprue que l'on ne sait pas soigner à l'époque.
Elle nous fait ressentir comment l'évolution de la Chine s'opère : de
Confucius à la Révolution.
L'aristocratie chinoise était fondée sur la culture pas sur la naissance ni la fortune. Les examens impériaux étaient ouverts à tous. La première étape a été la suppression de ces examens, puis on s'attaqua à la langue, la simplifiant et surtout en l'appauvrissant de ses figures de style.
Après son mariage avec un ingénieur agronome ses liens avec les Chinois n'ont fait que se renforcer.
« Aucun de mes amis sans exception ne savait lire ni écrire et ces connaissances ne leur manquaient pas du tout. Et pourtant ils possédaient une telle science de la vie que j'aimais les écouter parler. Un peuple ancien accumule des trésors de sagesse dans les générations qui se succèdent et, quand toute une famille vie sous le même toit, jeunes et vieux se comprennent mutuellement. »
Pendant cette période trouble elle a dû se réfugier avec sa famille au Japon, là aussi elle fait preuve de pragmatisme et d'une curiosité de l'autre qui fait qu'elle est citoyenne du monde.
1934 sonne le retour définitif aux États-Unis, elle s'installera en Pennsylvanie, où elle s'entourera comme en Chine d'un décor qu'elle crée avec acharnement. Treize ans plus tôt elle a mis au monde une petite fille « qui ne grandira jamais » elle a adopté des enfants et a créé Welcome House pour faciliter l'adoption d'enfants dit plus difficile à adopter car sang-mêlé.
Avec cette vie immensément riche d'expériences, elle a réussi à écrire. La petite fille qui a toujours rêvé de cela a attendu car viscéralement pour elle un écrivain ne doit pas penser à écrire avant d'avoir vécu. Un roman doit être nourri.
Elle a reçu pour son oeuvre le Pulitzer en 1932 et le Nobel en 1938.
Mais sa modestie lui a valu d'être tancée gentiment, il lui a été dit de ne jamais se sous-estimer.
« Mais oui, naturellement, mes personnages ont existé ; ils sont créés avec la poussière de la mémoire et animés par le souffle de l'amour. Mais aucun n'a existé dans la réalité sous la même forme que dans mes livres. »
Avec
Jack London,
Pearl Buck m'a ouvert le monde des livres. Elle m'a emplie de mots, d'images, d'exemples de vie car ses romans racontent la Vie, la richesse de son regard m'a toujours fascinée car toujours bienveillant, jamais dans le jugement. L'autre est une richesse sans barrière, sans frontière.
Pearl Buck est une femme très inspirante.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2023/04/10/les-mondes-que-jai-connus/
Lien :
https://jai2motsavousdire.wo..